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Dossier : 2010-1638(IT)I

 

ENTRE :

 

TAPIO PAAJANEN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel de Monique Paajanen

(2010-1639(IT)I) le 8 juin 2011 à Sudbury (Ontario).

Devant : L’honorable juge Judith Woods

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelant :

M. Robert D. Topp

Avocate de l’intimée :

Me Ashleigh Akalehiywot

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

L’appel interjeté à l’encontre de cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2004 et 2005 est accueilli, et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et qu’il établisse de nouvelles cotisations en tenant compte du fait que le revenu de Monique Paajanen provenant d’une société de personnes était de 754 $ pour l’année d’imposition 2004 et de 2 888 $ pour l’année d’imposition 2005.

 

L’appelant a droit à ses dépens, le cas échéant.

 

 

       Signé à Toronto (Ontario), ce 21e jour de juin 2011.

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 3e jour d’août 2011.

 

Espérance Mabushi, M.A.Trad. Jur.


 

 

Dossier : 2010-1639(IT)I

ENTRE :

 

MONIQUE PAAJANEN,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel de Tapio Paajanen

(2010-1638(IT)I) le 8 juin 2011 à Sudbury (Ontario).

Devant : L’honorable juge Judith Woods

Comparutions :

 

Représentant de l’appelante :

M. Robert D. Topp

Avocate de l’intimée :

Me Ashleigh Akalehiywot

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

L’appel interjeté à l’encontre d’une cotisation établie au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2004 est rejeté.

 

L’appel interjeté à l’encontre d’une cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2005 est accueilli, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et qu’il établisse une nouvelle cotisation en tenant compte du fait que le revenu de l’appelante provenant d’une société de personnes était de 2 888 $.

 

L’appelante a droit à ses dépens, le cas échéant.

 

 

       Signé à Toronto (Ontario), ce 21e jour de juin 2011.

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 3e jour d’août 2011.

 

Espérance Mabushi, M.A.Trad. Jur.


 

 

Référence : 2011 CCI 310

Date : 20110621

Dossiers : 2010-1638(IT)I

2010-1639(IT)I

 

 

ENTRE :

 

TAPIO PAAJANEN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée;

 

ET ENTRE :

 

MONIQUE PAAJANEN,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

La juge Woods

 

[1]              Il s’agit d’appels interjetés par Monique Paajanen et son époux, Tapio Paajanen, à l’encontre de cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») pour les années d’imposition 2004 et 2005.

 

[2]              Une seule question doit être examinée en l’espèce, à savoir quel est le montant de revenu que Mme Paajanen a tiré d’une entreprise qu’elle exploitait avec sa sœur, Danielle Audet, par l’intermédiaire d’une société de personnes.

 

[3]              L’intimée soutient que les sœurs ne partageaient pas le revenu de façon raisonnable au cours des années d’imposition en question et que la part du revenu de Mme Paajanen devrait être revue à la hausse en application du paragraphe 103(1.1) de la Loi. Pour l’année d’imposition 2004, il est soutenu que la part du revenu de Mme Paajanen devrait être portée de 754 $ (6,5 pour 100) à 5 803 $ (50 pour 100). Pour l’année d’imposition 2005, il est soutenu que sa part du revenu devrait être portée de 2 888 $ (15 pour 100) à 9 627 $ (50 pour 100).

 

[4]              La question en litige est pertinente non seulement pour Mme Paajanen, mais aussi pour son époux, étant donné que le revenu de Mme Paajanen a une incidence sur le droit de M. Paajanen à un crédit d’impôt personnel prévu à l’alinéa 118(1)a) de la Loi.

 

[5]              L’intimée a soulevé une objection préliminaire à l’égard de l’appel de Mme Paajanen concernant l’année d’imposition 2004. Il a été soutenu que cet appel devrait être annulé parce qu’il visait une cotisation portant qu’aucun impôt n’est à payer. Le représentant de Mme Paajanen ne s’est pas opposé à cet argument tant qu’il n’y avait pas d’incidence sur l’appel de M. Paajanen concernant l’année d’imposition 2004. Après discussion, l’avocate de l’intimée a marqué son accord à propos de l’argument du représentant de l’appelante.

 

[6]              Les conclusions de fait ci‑dessous sont fondées sur les éléments de preuve présentés à l’audience et sur les actes de procédure. À cet égard, de nombreux faits énoncés dans l’avis d’appel n’ont pas été contestés, et la Cour les a admis.

 

Les faits

 

[7]              En 1996, Mme Paajanen et sa soeur, Mme Audet, ont décidé de s’associer pour ouvrir un commerce de détail. La nature de l’activité se devine par le nom même de la société, à savoir le Barnyard Birder Nature Shop (magasin spécialisé dans la vente de matériel d’observation des oiseaux dans la nature).

 

[8]              Les circonstances ayant conduit à la création de la société de personnes suscitent de la compassion. L’époux de Mme Audet est décédé en 1995, et il a laissé à son épouse très peu de ressources financières et deux jeunes enfants à élever. Mme Paajanen voulait aider sa sœur en lui procurant une source potentielle de revenu, et elle a mis sur pied une entreprise exploitée par l’intermédiaire d’une société de personnes.

 

[9]              Il semble que l’entreprise n’a pas réalisé de profits importants dans ses premières années.

 

[10]         Le tableau suivant résume le revenu attribué à chaque associée dans la mesure où je peux l’établir à la lecture de l’avis d’appel. Je tiens également à souligner que la plupart des revenus qui sont présentés comme ayant été attribués à Mme Audet (Associée 2) avant les années d’imposition en question ont été considérés comme un salaire, mais je ne pense pas que cela soit important.

 

Année

Revenu total

Revenu attribué

Associée 1

Revenu attribué

Associée 2

1999

11 178 $

4 339 $

6 839 $

2000

5 574

459

5 114

2001

4 855

427

4 427

2002

4 090

45

4 045

2003

2 722

361

2 361

2004

11 606

754

10 852

2005

19 253

2 888

16 365

 

[11]         Dans l’avis d’appel, il est mentionné aussi que les retraits effectués par les associées étaient toujours supérieurs aux revenus jusqu’en 2005, et que les attributions aux associées représentaient généralement des distributions d’espèces.

 

[12]         Dans la plupart des années, c’est Mme Audet qui a reçu la grande majorité des revenus. Je retiens le témoignage de Mme Paajanen selon lequel elle avait consenti à ce qu’il en soit ainsi, parce que sa sœur se trouvait dans une situation financière difficile. Mme Paajanen avait accepté de limiter ses propres retraits en espèce dans l’espoir que l’entreprise serait viable à long terme.

 

[13]         Les revenus attribués à Mme Paajanen pour les années d’imposition 2004 et 2005 représentaient 6,5 pour 100 et 15 pour 100, respectivement, du revenu total de la société de personnes.

 

[14]         D’après ce que j’ai compris, l’entreprise est devenue très prospère, et les associées partagent maintenant le revenu en parts égales.

 

[15]         Aucun contrat de société de personnes n’a été conclu par écrit. Les attributions de revenus reflètent une convention orale entre les associées.

 

Analyse

 

[16]         Le paragraphe 103(1.1) de la Loi exige qu’une part du revenu d’un associé soit rajustée lorsque l’associé a convenu de partager le revenu, sur un fondement qui n’est pas raisonnable, avec une personne ayant avec lui un lien de dépendance. Voici le libellé de cette disposition :

 

103(1.1) Lorsque plusieurs associés d’une société de personnes qui ont, entre eux, un lien de dépendance conviennent de partager tout revenu ou toute perte de la société de personnes, ou tout autre montant qui se rapporte à une activité quelconque de la société de personnes, et qui doit entrer en ligne de compte dans le calcul du revenu ou du revenu imposable de ces associés et que la part du revenu, de la perte ou de cet autre montant revenant à l’un de ces associés n’est pas raisonnable dans les circonstances, compte tenu du capital qu’il a investi dans la société de personnes ou du travail qu’il a accompli pour elle ou de tout autre facteur pertinent, cette part est réputée, indépendamment de toute convention, être le montant qui est raisonnable dans les circonstances.

 

[17]         L’intimée soutient que les attributions convenues entre les associées, à savoir 6,5 pour 100 et 15 pour 100, ne sont pas raisonnables compte tenu du fait que les apports des sœurs à la société de personnes étaient relativement égaux. Il est soutenu qu’une attribution de revenus à parts égales entre les sœurs est plus raisonnable.

 

[18]         Comme je l’ai déjà mentionné ci‑dessus, cela donnerait lieu à une augmentation du revenu de 754 $ à 5 803 $ pour l’année d’imposition 2004 et de 2 888 $ à 9 627 $ pour l’année d’imposition 2005.

 

[19]         L’avocate de l’intimée a renvoyé, à l’appui de son argument, à des décisions de la Cour dans lesquelles on a fait observer que les répartitions entre des associés ayant entre eux un lien de dépendance devraient être fondées sur des critères se rapportant à une activité de la société, comme le travail accompli pour elle ou le capital qui y a été investi. Voir les décisions Fillion v. The Queen, 2004 DTC 2667; Zalesky v. The Queen, [2000] 4 CTC 2126; Spencer v. The Queen, [2003] 4 CTC 2679; Archbold v. The Queen, [1995] CTC 2872, au paragraphe 9.

 

[20]         Une approche fondée sur des critères liés à une activité de la société se justifie dans les décisions précitées parce que dans toutes ces décisions, il était question de membres de la famille immédiate qui représentaient une entité économique unique, à savoir un époux ou des enfants, et la planification fiscale semblait être un facteur clé concernant les répartitions.

 

[21]         Toutefois, il est erroné, à mon avis, d’énoncer comme principe général que les répartitions entre les associés ayant entre eux un lien de dépendance doivent toujours être fondées uniquement sur des critères se rapportant à une activité de la société.

 

[22]         En premier lieu, je souligne que le paragraphe 103(1.1) de la Loi n’est pas libellé d’une manière aussi restrictive. Bien que cette disposition mentionne explicitement des critères liés à une activité de la société, elle inclut ensuite tout facteur « pertinent ». Cela laisse entendre que le législateur ne voulait pas limiter le genre de facteurs qui seraient pris en compte.

 

[23]         En second lieu, pour savoir si une répartition convenue par les associés est raisonnable, il convient de garder à l’esprit que le paragraphe 103(1.1) de la Loi est une disposition anti-évitement. Des termes tels que « raisonnable» et « tout autre facteur pertinent » doivent être interprétés dans cette optique. Il y a quelques années, j’ai adopté une approche semblable pour interpréter le paragraphe 55(2) de la Loi, une autre disposition anti-évitement, dans la décision 729658 Alberta Ltd. v The Queen, 2004 DTC 2909.

 

[24]         En l’espèce, la convention conclue entre Mmes Paajanen et Audet pour partager le revenu en parts inégales n’était pas du tout motivée par des considérations fiscales. M. Paajanen a réalisé une petite économie d’impôt à l’égard des crédits personnels, d’environ 1 000 $ par année. Il n’est pas logique que ce facteur ait influencé les associées à convenir d’un partage inégal du revenu. Je retiens les éléments de preuve présentés par Mme Paajanen et son comptable selon lesquels les attributions n’avaient rien à voir avec l’impôt.

 

[25]         En l’espèce, il est raisonnable, à mon avis, que les associées conviennent de partager le revenu en fonction des distributions en espèces qui ont réellement été effectuées à chaque associée. Les appels sont accueillis, à l’exception de l’appel de Mme Paajanen portant sur l’année d’imposition 2004.

 

[26]         Les appelants ont droit à leurs dépens, le cas échéant.

 

 

       Signé à Toronto (Ontario), ce 21e jour de juin 2011.

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 3e jour d’août 2011.

 

Espérance Mabushi, M.A.Trad. Jur.


RÉFÉRENCE :                                  2011 CCI 310

 

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR : 2010-1638(IT)I

                                                          2010-1639(IT)I

 

INTITULÉS :                                     TAPIO PAAJANEN c. SA MAJESTÉ LA REINE et MONIQUE PAAJANEN c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Sudbury (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 8 juin 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge J.M. Woods

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 21 juin 2011

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant des appelants :

M. Robert D. Topp

 

Avocate de l’intimée :

Me Ashleigh Akalehiywot

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour les appelants :

 

                          Nom :                      s/o

 

                          Cabinet :                 

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Ontario

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