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Dossier : 2016-2456(EI)

ENTRE :

FARID KATTOUS,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

9250-1469 QUÉBEC INC.,

intervenante.

 

Appel entendu et décision rendue à l’audience
le 6 octobre 2017, à Montréal (Québec).

Devant : L’honorable juge Alain Tardif


Comparutions :

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l’intimé :

Me Mounes Ayadi

Avocat de l’intervenante :

Me Yannick Derome

 

JUGEMENT

        L’appel en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l’assurance‑emploi est accueilli et la décision rendue par le ministre est annulée en ce que le travail effectué par l’appelant durant la période en litige pour le compte et le bénéfice de l’intervenante constituait un contrat de louage de services et, par conséquent, un travail assurable, selon les motifs du jugement ci‑joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de décembre 2017.

« Alain Tardif »

Juge Tardif


Référence : 2017 CCI 251

Date : 20171219

Dossier : 2016-2456(EI)

ENTRE :

FARID KATTOUS,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

9250-1469 QUÉBEC INC.,

intervenante.

 


MOTIFS DU JUGEMENT
Décision rendue à l’audience le
6 octobre 2017, à Montréal (Québec).

Le juge Tardif

[1]              Il s’agit d’un appel d’une détermination en vertu de laquelle l’intimé a conclu que le travail exécuté par l’appelant pour le compte et le bénéfice de l’intervenante lors de la période du 1er janvier 2014 au 1er novembre 2014 ne l’avait pas été dans le cadre d’un contrat de louage de services mais plutôt à titre de travailleur autonome.

[2]              À la lecture de la réponse à l’avis d’appel, l’intimé limite son analyse à un seul aspect à savoir le travail qui consistait à faire le transport de salariés à l’emploi de l’intervenante.

[3]              Or l’avis d’appel vise et concerne tout le travail exécuté par l’appelant pour le compte et le bénéfice de l’intervenante durant la période en litige qui s’est échelonnée entre le 1er janvier 2014 et le 1er novembre de la même année.

[4]              L’intervenante, la société 9250-1469 Québec Inc., oeuvrait dans le domaine de placement de personnel pour diverses entreprises qui avaient des besoins ponctuels d’employés. Il s’agissait notamment d’entreprises qui fabriquaient des oreillers, des arrangements floraux et finalement qui abattaient des poulets.

[5]              À la réponse à l’avis d’appel, on lit ce qui suit :

8.         Pour rendre sa décision, l’intimé a tenu pour acquis les faits suivants :

Le payeur

(a)                le payeur était une entreprise qui offrait les services de placement de personnel;

(b)               l’actionnaire unique du payeur était Rochdi Elahamar;

(c)                le payeur était immatriculé le 22 août 2011;

L’appelant

(d)               l’appelant et le payeur avaient conclu une entente verbale à Laval, Québec;

(e)                l’appelant a été engagé en tant qu’employé en 2013;

(f)                 lorsque l’appelant était employé du payeur, il effectuait l’emballage de fleur;

(g)                à la fin de novembre 2013, le payeur avait confié à l’appelant un mandat, mais en tant que travailleur autonome;

(h)                le travail de l’appelant consistait à transporter les employés n’ayant pas de voiture sur les lieux de travail des clients du payeur;

(i)                  l’appelant effectuait le transport des employés sur leurs lieux de travail matin et soir;

(j)                 l’appelant utilisait son véhicule personnel;

(k)               l’appelant défrayait les coûts d’opération de son véhicule;

(l)                  l’appelant était totalement libre d’accepter ou de refuser le travail;

(m)              l’appelant n’avais pas de compte à rendre au payeur;

(n)                l’appelant était libre de quitter en tout temps;

(o)               l’appelant accordait du temps au payeur selon ses propres disponibilités;

(p)               l’appelant était libre de ses méthodes de travail et de son exécution;

(q)               l’appelant ne bénéficiait pas d’aucun avantage social;

(r)                 l’appelant ne bénéficiait de vacances;

(s)                l’appelant fournissait ses propres outils de travail;

(t)                 l’appelant et le payeur avaient convenu un taux fixe quotidien pour la rémunération de l’appelant lors de l’entente verbale;

(u)                l’appelant était payé 50 $ par jour;

(v)                l’appelant était payé par chèque;

(w)              l’appelant a reçu un chèque du payeur en mai 2014 au montant de 550 $;

(x)                après janvier 2014, l’appelant n’était plus à l’emploi du payeur;

(y)                l’appelant avait quitté le pays pour se rendre en Tunisie du 20 février 2014 au 10 avril 2014 et par la suite du 5 août 2014 au 2 octobre 2014;

(z)                aucune déduction n’avait été faite sur le montant versé à l’appelant; et

(aa)            le payeur a produit un T4A pour l’appelant pour le travail effectué en 2014.

[6]              Ainsi les faits tenus pour acquis pour soutenir la détermination dont il est fait appel visent essentiellement le travail exécuté à titre de transporteur de salariés à l’emploi de l’intervenante. Le travail en question a été rémunéré par chèque; par contre, la preuve fait référence à un seul chèque au montant de 550 $.

[7]              L’entente pour le transport de personnes prévoyait une rémunération de 50 $ par jour. Conséquemment, il semble que l’appelant a fait 11 voyages laissant sous‑entendre que l’appelant aurait été payé au moyen d’argent comptant pour d’autres transports. Je rappelle que la période en litige est d’une durée de 10 mois d’une part, et d’autre part, il est fait référence à un seul chèque.

[8]              Appelé par le tribunal à admettre, à nier ou à ignorer les faits allégués au soutien de la détermination, l’appelant a admis la majorité des faits tenus pour acquis; à première vue les admissions de l’appelant valident le fondement de la détermination qu’il conteste.

[9]              Par contre, l’appelant s’est empressé d’expliquer qu’il s’agissait là d’un aspect marginal et très secondaire du travail exécuté pour le compte et le bénéfice de l’intervenante au cours de la période en litige. Il a d’ailleurs expliqué et justifié d’une manière très claire pourquoi ce travail était secondaire et très occasionnel. Il a insisté sur le fait que son avis d’appel ne visait pas ce travail mais plutôt le travail qu’il avait exécuté en 2013, lequel s’était poursuivi en 2014 selon les mêmes paramètres et dans les mêmes conditions.

[10]         Il a donc insisté sur le fait que l’analyse devait porter sur le véritable travail exécuté pour le compte et le bénéfice de l’intervenante relativement à l’abattage du poulet, aux arrangements floraux et à la fabrication de taies d’oreillers.

[11]         En effet, l’appelant a témoigné sur la nature du travail à l’origine de son avis d’appel. Il s’agissait d’un travail lié au commerce de fleurs, de fabrication d’oreillers et de l’abattage de poulets. Les explications fournies par l’appelant sont d’ailleurs conformes et cohérentes avec ses déclarations lors des enquêtes ayant conduit à la détermination.

[12]         Selon l’intervenante, l’intimé partageant la même position, l’appelant a essentiellement fait du travail à titre de travailleur autonome en utilisant sa propre voiture pour transporter des travailleurs de l’intervenante durant la période en litige.

[13]         Dans un tel contexte le tribunal peut-il procéder à l’analyse du bien‑fondé de la détermination? Je réponds par l’affirmative puisque l’avis d’appel vise la totalité de la période de janvier au 1er novembre 2014 d’une part, et d’autre part, ne concerne pas le transport de personnes.

[14]         L’intimé a manifestement erré en décidant sans raison ni motifs valables de prendre en compte une infime partie du travail exécuté par l’appelant. Il semble que l’intimé ait écarté du revers de la main toutes les explications et affirmations de l’appelant d’une part, et d’autre part, a tenu pour acquis la version de l’intervenante, et ce, dans un climat de grande tension entre l’appelant et l’intervenante. Il m’est apparu manifeste que l’intimé avait lors de la rédaction de la réponse à l’avis d’appel tenu pour acquis la seule vision des faits de l’intervenante et occulté totalement et sans raison la version de l’appelant.

[15]         À l’audition, tant l’intervenante que l’intimé ont soutenu que l’appelant n’avait pas travaillé comme salarié mais essentiellement comme entrepreneur autonome à titre de transporteur de salariés de l’intervenante, et ce, en vertu d’une convention verbale que l’appelant a d’ailleurs admis spontanément et sans détour.

[16]         En substance, l’appelant a admis cette facette du dossier s’empressant toutefois d’affirmer et de démontrer que l’objet de son appel n’avait rien à voir avec ce travail de transporteur marginal, peu important, ponctuel et dont la courte durée est établie par un seul chèque.

[17]         D’ailleurs l’appelant a affirmé avoir fait sensiblement le même travail en 2013, lequel avait été déterminé assurable ce que l’intervenante a de plus admis.

[18]         Ce travail a-t-il pris fin en décembre 2013 ou s’est-il poursuivi en 2014?

[19]         La preuve a mis en lumière deux thèses, deux versions totalement contradictoires.

[20]         Dans un premier temps, l’appelant a expliqué avoir travaillé durant la période en litige de janvier au 1er novembre 2014 pour l’intervenante pour trois entreprises différentes; l’une fabriquait des taies d’oreillers où il avait la responsabilité d’autres salariés, une autre concernait les arrangements floraux et finalement, l’une où l’on abattait des poulets. Il a aussi admis et reconnu avoir convenu par le biais d’une entente verbale de transporter à l’occasion des compagnons de travail à ses frais avec son véhicule personnel moyennant un tarif de 50 $ par jour.

[21]         Il a expliqué que les prétentions de l’intimé partagées par l’intervenante étaient sans fondement pour la bonne et simple raison que cela était sans aucun intérêt pour lui; il a effectivement expliqué que la version de l’intimé était en fait déraisonnable voire farfelue. Il a expliqué que cette version était à l’effet que le transport de travailleurs se faisait à partir d’une station de métro où il y prenait des passagers pour les conduire à l’usine d’abattage au nord de Montréal.

[22]         L’appelant a expliqué que la version de l’intervenante et de l’intimé était totalement loufoque puisqu’elle aurait eu pour effet de lui faire perdre de l’argent ce qu’il n’aurait jamais accepté. Il a aussi affirmé que cette version se discréditait d’elle‑même.

[23]         L’appelant a soutenu avoir accepté de faire deux transports moyennant le paiement d’un forfait de 50 $ pour l’aller‑retour; il s’agissait pour lui de se rendre à l’endroit où il exécutait lui‑même le même travail que ses passagers. Le 50 $ convenu s’ajoutait alors à la rémunération pour son travail exécuté à titre de salarié.

[24]         La thèse de l’intimé se discrédite d’elle‑même; en effet, les deux interprétations possibles sont toutes deux déraisonnables.

[25]         La première interprétation aurait pour effet que l’appelant aurait dû faire quatre transports pour 50 $ et non pas deux, soit un aller‑retour pour conduire les travailleurs le matin et un aller‑retour le soir pour aller chercher ses passagers.

[26]         La seconde interprétation aurait pour effet qu’il doive se rendre sur les lieux de travail de ses passagers et doive attendre toute la journée pour les ramener le soir.

[27]         Les deux interprétations auraient dû en outre composer avec une réalité tout à fait inacceptable, soit de ne jamais pouvoir savoir l’heure exacte des retours puisque les travailleurs en question terminaient le travail à des heures qui variaient beaucoup.

[28]         Dans les faits, le 50 $ par jour s’avérait intéressant en ce qu’il prenait son propre véhicule et transportait des compagnons de travail; à la fin de la journée de travail, il les ramenait au point de départ faisant ainsi un aller‑retour pour 50 $ alors que la version de l’intimé était telle qu’il aurait dû faire en sorte qu’il doive faire deux aller‑retour soit quatre voyages et non deux.

[29]         Quant à la rareté des voyages, l’appelant a expliqué que son intervention n’était nécessaire que dans les cas où il y avait un surplus de travailleurs par rapport à la routine habituelle où l’intervenante s’occupait généralement du transport des travailleurs et dont celui de l’appelant expliquant ainsi le peu de voyages effectués.

[30]         L’appelant a expliqué le genre de travail qu’il effectuait pour l’intervenante; il a aussi affirmé avoir toujours été rémunéré par l’intervenante la plupart du temps au moyen d’argent comptant. À l’appui de ses prétentions, l’appelant fait valoir qu’il avait reçu une rémunération qu’il avait bel et bien déclarée à l’Agence du revenu du Canada. Il a aussi déposé des documents attestant qu’il avait reçu des montants qui correspondaient à ses prétentions.

[31]         Il a affirmé que les affaires de l’intervenante étaient gérées d’une façon nébuleuse en ce qu’il y avait des entités différentes qui s’échangeaient certaines opérations et activités. De façon générale, l’argent comptant constituait souvent une façon de faire notamment pour le paiement des salaires.

[32]         De son côté, l’intimé a soutenu et répété que les prétentions de l’appelant devaient être écartées pour le motif qu’il n’y avait aucune preuve de paiement pour le travail exécuté. Or, l’intimé retient et accepte la réalité de paiement comptant pour le travail à titre de travailleur autonome. Cette preuve est déficiente et incomplète au point qu’elle doit être écartée.

[33]         En effet, la seule preuve de paiement pour le transport de personnes est un chèque au montant de 550 $ représentant 11 allers‑retours sur une période de 10 mois soit de janvier 2014 à novembre 2014.

[34]         En matière d’assurabilité, le fardeau de la preuve incombe à celui ou celle qui conteste la détermination quant à l’assurabilité.

[35]         En l’espèce, au soutien de l’appel, l’appelant a longuement témoigné et produit un certain nombre de documents souvent imprécis et incomplets, mais très cohérents et raisonnables validant sa thèse d’une manière nettement prépondérante.

[36]         De son côté, l’intimé et l’intervenante ont soumis comme seule preuve le témoignage du représentant de l’intervenante, et divers documents tout aussi imprécis et incomplets que ceux de l’appelant mais non déterminants pour la thèse de l’intimé qui repose essentiellement sur une preuve non crédible.

[37]         Ainsi, on est en présence de preuve totalement contradictoire. Bien que l’appelant ne soit pas représenté par avocat la preuve a permis de constater qu’il maîtrisait très bien son dossier. De plus, il s’est montré très habile et efficace lors du contre‑interrogatoire de l’intervenante.

[38]         L’appelant a affirmé avec conviction et fermeté que le travail de transporteur avait été totalement secondaire, marginal, exécuté de manière ponctuelle. Pour ce travail, il a reconnu avoir été rémunéré au moyen du chèque de 550 $ ce qui représentait au total 11 voyages.

[39]         Or, la période visée par la détermination fait état de la période du 1er janvier 2014 au 1er novembre 2014. Évidemment durant une période aussi longue, il peut y avoir eu plusieurs genres de travail et une multitude de relations juridiques, lesquelles doivent être analysées et évaluées, étant donné la période litigieuse à laquelle fait référence l’avis d’appel.

[40]         Or le travail ciblé par l’intimé et l’intervenante ne concerne qu’un seul aspect très isolé et parallèle à son véritable emploi. Dans les faits, selon la preuve soumise par l’appelant conformément à son avis d’appel, la presque totalité du travail exécuté durant la période en litige n’avait strictement rien à voir avec le transport des personnes qui s’était essentiellement avéré être un très petit surplus s’ajoutant à sa charge de travail habituelle et courante.

[41]         Or, l’intimé et l’intervenante ont soutenu que le travail de l’appelant au cours de la période en litige avait essentiellement été celui de chauffeur‑transporteur, et ce, bien qu’un seul chèque ait été fait en contrepartie.

[42]         L’intimé soutient que la majeure partie a été faite au moyen de chèques, mais fait la preuve d’un seul chèque; l’intervenante soutient que très souvent le paiement se faisait comptant. Or, quand l’appelant soutient avoir été payé comptant, l’intimé met en doute son explication. L’intimé appuie donc sa thèse sur un fait qu’il utilise pour discréditer la thèse de l’appelant.

[43]         À partir de ces deux versions contradictoires, l’issue du dossier devient essentiellement une question de crédibilité. Avant d’évaluer le dossier sous cet angle, il m’apparaît important d’apporter une précision quant à la capacité de la Cour de statuer sur la nature du travail qui a tendancieusement été occultée de l’analyse, ce qui ressort clairement de la réponse à l’avis d’appel, et ce, bien que l’appelant ait bel et bien exprimé, expliqué et décrit la nature du travail qu’il a exécuté pour le compte et le bénéfice de l’intervenante, lors de l’enquête qui a précédé la détermination formelle. L’intimé s’en est remis à la seule version de l’intervenante et présume dès le départ, sans raison aucune, que l’appelant mentait ou fabulait, et cela, dans un contexte de grande tension entre des parties au contrat de travail litigieux.

[44]         L’appelant a longuement témoigné, d’une manière très précise, voire très nuancée; je n’ai constaté aucune contradiction. Les explications ont été raisonnables et cohérentes. De plus, le contre‑interrogatoire de l’intervenante par l’appelant lui‑même a fait ressortir très clairement des contradictions, des demi‑vérités, des incohérences et plusieurs aberrations.

[45]         Le comportement, l’attitude du représentant de l’intervenante étaient façonnés par une profonde rancœur à l’endroit de l’appelant. Ces réponses étaient incomplètes, confuses; à plusieurs questions, il refusait tout simplement de répondre. L’habileté, la perspicacité et la ténacité de l’appelant à l’endroit de l’intervenante a permis de faire ressortir plusieurs aberrations et contradictions.

[46]         À titre d’exemple, il a d’abord affirmé qu’il ne savait rien relativement à une société avec laquelle l’appelant avait eu des relations et communications; or le contre‑interrogatoire dirigé par l’appelant a fait ressortir que ladite société partageait la même adresse d’affaires que l’intervenante et que le responsable était un ami et lié avec l’intervenante.

[47]         Questionné sur la façon de payer les montants dus à l’appelant, le représentant de l’intervenante a d’abord indiqué qu’il payait par chèque. Devant l’insistance de l’appelant, il a fini par admettre qu’il payait aussi en argent comptant ajoutant que c’était tout à fait légal : coincé à partir d’un écrit, le représentant de l’intervenante a soutenu qu’il s’agissait d’un vol de document sur lequel on avait contrefait la signature sans pour autant donner plus d’explications.

[48]         De son côté, l’appelant a témoigné d’une manière simple, claire, cohérente et raisonnable. De plus, certains documents ont validé sa thèse, et ce, bien que les chiffres ne correspondaient pas entièrement à ses gains totaux déclarés.

[49]         Selon la thèse ou la version de l’intimé et de l’intervenante, l’appelant aurait déclaré ses revenus d’emploi beaucoup supérieurs à ceux que l’intimé lui attribue. Pour justifier son interprétation, l’intimé a soumis que les revenus pouvaient provenir d’une autre source.

[50]         L’appelant a expliqué qu’il avait effectivement fait le transport des travailleurs qui, dans les faits, étaient des collègues de travail. Il prenait des passagers et se rendait sur les lieux de travail. Tous, y compris l’appelant, exécutaient leur journée de travail; à la fin de la journée, l’appelant terminait son quart de travail en même temps que ses collègues passagers et revenait au point de départ du matin, moyennant 50 $, montant qui s’ajoutait à sa paye à titre de salarié. Les transports en question étaient essentiellement occasionnels.

[51]         Cette explication est simple, claire, cohérente tout en étant raisonnable, caractéristiques totalement absentes dans la preuve de l’intimé.

[52]         Tant la preuve testimoniale que la preuve documentaire valident la thèse de l’appelant. Pour ce qui est de la preuve de l’intimé constituée essentiellement du témoignage du représentant de l’intervenante, elle est non crédible, cousue de fil blanc reposant essentiellement sur des hypothèses et spéculations, façonnée par une profonde rancoeur à l’endroit de l’appelant.

[53]         L’appelant a relevé le fardeau de la preuve qui lui incombait en ce qu’une nette prépondérance de la preuve valide la position exprimée dans son avis d’appel.

[54]         L’intimé a manifestement mené son analyse d’une façon tendancieuse en ce qu’il a essentiellement épousé la thèse de l’intervenante qui repose sur des contradictions, incohérences et explications non crédibles.

[55]         Pour toutes ces raisons, je conclus que le principal travail exécuté par l’appelant pour le compte et le bénéfice de l’intervenante pour la période en litige, soit du 1er janvier 2014 au 1er novembre 2014, constituait un véritable contrat de louage de services; quant au travail très secondaire voire marginal qui consistait à faire le transport de travailleurs pour le compte de l’intervenante, ce travail a été exécuté à titre de travailleur autonome. Pour ce travail, l’appelant a admis avoir reçu 550 $ ce qui représente 11 allers-retours sur une période de près de 10 mois.

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de décembre 2017.

« Alain Tardif »

Juge Tardif

 


RÉFÉRENCE :

2017 CCI 251

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :

2016-2456(EI)

INTITULÉ DE LA CAUSE :

FARID KATTOUS c. M.R.N. et
9250‑1469 QUÉBEC INC.

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 6 octobre 2017

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :

L’honorable juge Alain Tardif

DATE DU JUGEMENT :

Le 19 décembre 2017

COMPARUTIONS :

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l’intimé :

Me Mounes Ayadi

Avocat de l’intervenante :

Me Yannick Derome

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelant :

Nom :

 

Cabinet :

 

Pour l’intimé :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

 

Pour l’intervenante :

Me Yannick Derome

 

Cabinet :

Derome Avocats

Montréal (Québec)

 

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