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Dossier : 2008-3972(IT)G

ENTRE :

ISABELLE GINGRAS,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

 

Appels entendus le 6 octobre 2010, à Québec (Québec)

 

Devant : L'honorable juge Réal Favreau

 

Comparutions :

 

Avocat de l'appelante :

 

Me Louis Sirois

Avocat de l'intimée :

Me Sylvain Ouimet

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

        Les appels à l’encontre des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu datées du 2 octobre 2008 à l’égard des années d’imposition 2001, 2002 et 2003 sont rejetés avec dépens et les pénalités sont maintenues.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de septembre 2011.

 

 

 

« Réal Favreau »

Juge Favreau

 


 

 

 

Référence : 2011 CCI 439

Date : 20110920

Dossier : 2008-3972(IT)G

ENTRE :

ISABELLE GINGRAS,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Favreau

 

[1]              Il s’agit en l’occurrence d’appels à l’encontre de nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985) ch. 1 (5th Suppl.) telle que modifiée (la « Loi »), datées du 2 octobre 2008 concernant les années d’imposition 2001, 2002 et 2003. Par ces nouvelles cotisations, le ministre du Revenu national (le « ministre ») a ajouté aux revenus de l’appelante les sommes suivantes :

 

2001 : 32 787,20 $

2002 : 28 062,21 $

2003 : 17 466,00 $

 

et a imposé des pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi à l’égard de chacune des années d’imposition 2001, 2002 et 2003.

 

[2]              Afin de déterminer l’impôt payable par l’appelante pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003, le ministre a tenu pour acquis les faits suivants énoncés au paragraphe 10 de la Réponse à l’avis d’appel :

 

a) un état des avoirs nets de l’appelante dont une copie est jointe à la présente à l’annexe A comme en faisant partie intégrante;

 

b) durant les années d’imposition 2001, 2002 et 2003, la famille de l’appelante était composée de deux adultes et de deux enfants;

 

c) Pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003, l’appelante et son conjoint ont déclaré les revenus suivants :

 

 

         ANNÉES

 

 

2001

     2002

2003

Isabelle Gingras

7 707 $

11 886 $

13 083 $

Donald Audy

(1 734) $

7 825 $

24 625 $

Revenus totaux

5 973 $

19 711 $

37 708 $

 

d) Pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003, l’appelante et son conjoint ont reçu les montants d’argent suivants :

 

 

ANNÉES

 

     2001

     2002

2003

PFCE et SPNE

4 551 $

5 062 $

5 148 $

Remboursement d’impôt

888 $

0 $

3 020 $

Total fonds additionnels

5 439 $

5 062 $

8 168 $

 

e) Durant les années d’imposition 2001, 2002 et 2003, l’appelante et son conjoint ont encouru les dépenses suivantes :

 

                                                                  ANNÉES

 

   2001

   2002

 2003

Dépenses personnelles

30 171 $

46 853 $

52 800 $

Paiement impôt provincial

0 $

287 $

0 $

Déduction à la source conjoint-fédéral

0 $

1 378 $

2 867 $

Déduction à la source conjoint-provincial

0 $

1 480 $

3 359 $

Total dépenses

30 171 $

49 998 $

59 026 $

 

f) Durant les années d’imposition 2000, 2001, 2002 et 2003, le bilan de l’appelante et son conjoint faisaient état des actifs et passifs suivants :

 

 

ANNÉES

 

         2000

      2001

2002

2003

Actifs totaux

67 227 $

71 489 $

68 306 $

71 295 $

Passifs totaux

129 271 $

116 568 $

102 359 $

96 982 $

Avoirs net

(62 044) $

(45 079) $

(34 053) $

(25 687) $

 

g) Suivant l’évolution des actifs et des passifs décrits au paragraphe f) ci-dessus, les avoirs de l’appelante et de son conjoint ont augmenté pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003 de 16 965 $, 11 026 $ et de 8 366 $ respectivement.

 

h) Pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003, les dépenses encourues par l’appelante et son conjoint cumulé à l’augmentation de leurs actifs ont nécessité les sommes suivantes :

 

 

ANNÉES

 

2001

2002

    2003

Total dépenses

30 171 $

49 998 $

59 026 $

Augmentations des actifs

16 965 $

11 026 $

8 366 $

Total

47 136 $

61 024 $

67 392 $

 

i) Durant l’année d’imposition 2002, l’appelante et son conjoint ont subi une perte sur un bien à l’usage personnel d’un montant de 2 600 $ :

 

j) Pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003, les écarts entre les revenus et les autres montants d’argent dont disposaient l’appelante et son conjoint et les sommes ayant dû être déboursées pour payer leurs dépenses et pour augmenter leurs actifs étaient les suivants :

 

 

ANNÉES

 

2001

2002

2003

Écarts

35 724 $

38 851 $

21 516 $

 

k) Suite à de nouvelles représentations au stade des oppositions, pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003, les écarts décrits au paragraphe j) ci-dessus ont été diminués de 2 936,80 $, 10 788,79 et de 4050,00$ respectivement

 

[3]              L’appelante a soutenu dans son avis d’appel qu’elle avait déclaré l’ensemble de ses revenus au cours des années en litige et que le ministre n’était pas justifié d’utiliser la méthode de l’avoir net dans le cadre de sa vérification compte tenu des explications claires, simples et sincères qu’elle a fournies quant aux sources de ses revenus.

 

[4]              L’appelante a de plus invoqué les faits suivants dans son avis d’appel :

 

a)  L'appelante et son conjoint, M. Donald Audy, ont bénéficié d’une aide financière de la part de leurs parents respectifs. L’appelante allègue avoir reçu de son père, M. Gaston Gingras, une somme d’environ 9 000 $ au cours de chaque année en litige et avoir reçu de ses beaux-parents, M. et Mme Audy, les sommes suivantes : 6 500 $, en 2000, 5 000 $ en 2001 et 4 500 $ en 2002;

 

b)  Une somme de 5 800 $ a été ajoutée à son revenu alors qu’il s’agissait d’un chèque émis au nom de son conjoint pour un travail qu’il a effectué et pour lequel il a payé des sous-traitants, soit une somme de 3 400 $ à M.  Dany Awashich et une somme de 1 800 $ à M. Daniel Audy;

 

c)  le conjoint de l’appelante a vendu des biens mobiliers personnels et des outils pour une somme d’environ 10 230 $;

 

d)  le coût d’achat d’un véhicule quatre roues enregistré au nom du conjoint de l’appelante a été ajouté à son revenu alors que ledit véhicule appartenait à son conjoint et à ses trois frères ayant chacun collectivement payé la somme de 2 500 $;

 

e)  la vérificatrice n’a pas tenu compte de l’aide apportée par son conjoint à l’un de ses amis, M. Richard Morisette, en lui prêtant environ 5 500 $ sur sa carte de crédit laquelle somme lui a par la suite été remboursée;

 

f)  la vérificatrice n’a pas tenu compte du fait que l’appelante et son conjoint ont vécu sur de l’argent provenant de cartes de crédit et de la marge de crédit hypothécaire.

 

[5]              Suite aux représentations de l’appelante au stade des oppositions, l’agent des oppositions a fait une demande à la vérificatrice au dossier, Mme Chantal Pichette, d’effectuer un complément de vérification. La vérificatrice a pris en considération toutes les représentations soumises par l’appelante. Son analyse a résulté en une diminution de 17 775 $ de l’écart par avoir net pour les trois années en litige. Les points soulevés dans l’avis d’appel ont été traités de la façon suivante :

 

a)  dons des parents et des beaux-parents

 

Aucun montant n’a été considéré comme don de la famille pour l’année 2001 parce qu’aucun montant à ce titre ne figure dans l’analyse des encaissements de l’appelante en date du 25 janvier 2007. L’analyse des encaissements comprend tous les montants d’argent reçus par l’appelante, qu’ils aient été déposés ou non dans les compte bancaires.

 

Pour 2002, l’analyse des encaissements montre un montant de 8 000 $ provenant des parents comme don. Comme un montant de 5 117,71 $ a été considéré comme reçu des parents (soit un montant de 6 317,71 $  considéré comme reçu et non déposé dans les comptes bancaires, diminué d’un montant non déclaré de 1 200 $ provenant de la vente de bleuets), la différence entre 8 000 $ et 5 117,71 $, soit 2 882,29 $, a été considérée comme un montant reçu et déposé. Comme ce montant figure déjà dans les dépenses personnelles, il a été soustrait dans les redressements comme don.

 

Pour 2003, un montant de 10 300,43 $ a été considéré comme don des parents. Cependant, comme ce montant n’a pas été déposé dans les comptes bancaires, il ne figure pas dans les dépenses personnelles. Par conséquent, ce montant a été ajouté dans les redressements comme dépenses personnelles.

 

Pour faciliter la compréhension, il y a lieu de mentionner que les dépenses personnelles ont été établies par les sorties de fonds des comptes bancaires. Donc, tous les encaissements non déposés dans les comptes bancaires ne sont pas inclus dans les dépenses personnelles parce qu’ils n’ont pas transigé via les comptes de banque. Par conséquent, les encaissements d’argent non déposés doivent figurer dans les dépenses personnelles payées en argent. Selon l’analyse des encaissements de l’appelante du 25 janvier 2007 et selon l’analyse des dépôts de la vérificatrice, telle que corroborée par l’analyse de l’appelante du 20 mars 2007, les sommes d’argent reçues et non déposées totalisent 8 670,05 $ pour 2001, 6 317,71$ pour 2002 et 11 750,43 $ pour 2003.

 

b)    ventes de biens mobiliers personnels et d’outils pour une somme d’environ 10 230 $

 

Le produit de la vente de biens mobiliers et d’outils en 2001 au montant de 10 230 $ a été considéré comme argent non déposé ayant servi à payer des dépenses personnelles. L’appelante a, selon la vérificatrice, confirmé que ce montant n’a pas été déposé et n'a pas figuré dans l’analyse des encaissements de l’appelante du 25 janvier 2007. Comme ce montant n’a pas été déposé, il n’a pas été inclus dans les sorties de fonds et il doit donc être considéré comme ayant servi à payer les dépenses personnelles en argent.

 

c)     chèque de 5 800 $ émis au nom de M. Donald Audy en date du 17 août 2001

 

Le chèque a été ajouté aux revenus de l’appelante et les deux chèques faits au nom des sous-traitants totalisant 5 200 $ ont été soustraits des dépenses personnelles comme sorties de fonds.

 

d)    l'achat d’un véhicule quatre roues au nom de M. Donald Audy qu’il possédait avec ses trois frères

 

La mise de fonds des trois frères au montant de 7 500 $ a été considérée. Le coût d’achat de 8 971,95 $ indiqué initialement, a été soustrait de l’actif de l’appelante et un montant de 2 500 $ (soit le ¼ du prix d’achat total plus les frais inhérents) a été ajouté à l’actif. L’emprunt contracté auprès de Corporation Financière Household Inc. au montant de 8 971,95 $ pour financer le prix d’achat a continué de figurer au passif de l’appelante puisqu’il y a eu un encaissement de 7 500 $ en contrepartie. Donc, aucun ajustement n’a été fait pour l’emprunt. Par contre, comme un remboursement de 3 000 $ a été retracé et dont la provenance n’était pas connue, la vérificatrice a diminué de 3 000 $ l’encaissement de 7 500 $ qui devait servir à rembourser l’emprunt. Le solde de l’encaissement à cet égard, a été ramené à 4 500 $ en 2001 et à zéro pour 2002 parce que l’emprunt a été remboursé en totalité.

 

e)     prêt de 5 500 $ de M. Donald Audy à M. Richard Morisette

 

L'avance à M. Morisette a été considérée dans l’avoir net final. Il a été ajouté à l’actif de l’appelante en 2001 avec le solde d’une avance antérieure de 250 $, soit au total 5 750 $. Le montant porté à l’actif a été ramené à 3 150,00 $ en 2002 et à 550 $ pour 2003 pour tenir compte des remboursements de 2 600 $ effectués par M. Morisette au cours de chacune des années 2002 et 2003.

 

f)      validation du coût de la vie

 

Le coût de la vie a été établi à partir des sorties de fond et il a été comparé avec l’analyse des décaissements fournie par l’appelante. Le résultat de cette analyse a démontré que le coût de la vie établi reflétait bien la réalité.

 

[6]              Lors de son témoignage, la vérificatrice a expliqué pourquoi le dossier de l’appelante a été retenu pour vérification. Ces raisons étant le faible niveau des revenus déclarés par l’appelante et sa capacité de rembourser ses dettes. Comme l’esquisse d’avoir net a procuré des résultats positifs, elle a alors décidé de procéder à la vérification en utilisant la méthode de l’avoir net. Face au refus de l’appelante et de son conjoint de collaborer à l’établissement du coût de la vie pour une famille de quatre personnes, soit deux adultes et deux enfants, la vérificatrice a dû établir les dépenses personnelles en utilisant le cumulatif des sorties de fonds des comptes bancaires personnels.

 

[7]              Les dons des parents et beaux-parents de l’appelante ont été pris en compte par la vérificatrice mais la façon dont ils ont été traités n’était pas très favorable à l’appelante. Qu’ils aient transités ou non par les comptes bancaires, le montant des dons a été ajouté aux dépenses personnelles et ce n’est que s’ils ont transité par les comptes bancaires qu’ils ont été inclus dans les redressements comme dons, i.e. comme une source de revenu non imposable. Si l’appelante avait collaboré à l’établissement du coût de la vie, les dons auraient pu être traités différemment et recevoir un traitement plus favorable. L’appelante a omis de fournir des éléments de preuve permettant d’établir son coût de la vie réel au cours de la période en question. Elle ne peut donc pas se plaindre que le ministre se soit basé sur une méthode arbitraire pour l'établir.

 

[8]              La vérification initiale et le complément de vérification ont démontré que l’appelante n’avait pas déclaré la totalité de ses revenus. La justification des écarts constatés entre les revenus et les montants d’argent dont disposaient l’appelante et son conjoint et les sommes déboursées pour payer leurs dépenses et pour augmenter leurs actifs était la responsabilité exclusive de l’appelante. Vu l’absence de pièces justificatives, l’appelante n’a pas été en mesure d’identifier la source des revenus non déclarés et d’établir la nature non imposable de ses revenus.

 

[9]              En de telles circonstances, la conclusion inéluctable est que la fausse déclaration de revenu a été produite sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde. Cela justifie l’imposition de pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi.

 

[10]         Pour ces motifs, les appels des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003 sont rejetés avec dépens.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de septembre 2011.

 

 

 

« Réal Favreau »

Juge Favreau


 

 

RÉFÉRENCE :                                  2011 CCI 439

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2008-3972(IT)G

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Isabelle Gingras c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Québec (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 le 6 octobre 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge Réal Favreau

 

DATE DU JUGEMENT :                   le 20 septembre 2011

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l'appelante :

 

Me Louis Sirois

Avocat de l'intimée :

Me Sylvain Ouimet

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelante:

 

                     Nom :                            Me Louis Sirois

 

                 Cabinet :                           Sirois & Champagne, avocats

                                                          Québec (Québec)

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

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