Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

 

Dossier : 2011-787(IT)I

 

ENTRE :

HUGH VINCENT LUNN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

____________________________________________________________________

Appel entendu le 30 novembre 2011 à Ottawa, Canada.

 

Devant : L’honorable juge Wyman W. Webb

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocats de l’intimée :

Me Christopher Kitchen

Me Tanis Halpape

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté par l’appelant est rejeté, sans dépens.

 

          Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour de décembre 2011.

 

 

 

 

« Wyman W. Webb »

Juge Webb

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 19jour de janvier 2012.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


 

 

 

Référence : 2011 CCI 552

Date : 20111202

Dossier : 2011-787(IT)I

ENTRE :

HUGH VINCENT LUNN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Webb

 

[1]              L’appelant a été libéré de l’armée en 1995. Avant 2008, l’appelant recevait une pension des Forces canadiennes et des prestations d’invalidité de longue durée du Régime d’assurance‑revenu militaire (le « RARM »), qui était administré par la Financière Manuvie. Le 3 juin 2008, la demande de prestations au titre du Régime de pensions du Canada (le « RPC ») faite par l’appelant a été approuvée, avec effet rétroactif au mois de mars 2007. Cette approbation a donné lieu à un paiement forfaitaire de 12 487,70 $ fait en faveur de l’appelant. Étant donné que l’appelant avait donc reçu des prestations au titre du Régime de pensions du Canada pour la même période que celle durant laquelle il avait reçu des prestations de pension provenant des Forces canadiennes et des prestations du RARM, la conséquence a été que l’appelant avait reçu un paiement en trop des prestations de pension des Forces canadiennes et du RARM. Le montant perçu en trop au titre de la pension des Forces canadiennes était de 6 446,58 $ et celui perçu en trop au titre du RARM était de 8 521,02 $. L’appelant a demandé une déduction de 14 519,87 $ dans le calcul de son revenu pour 2008, compte tenu du fait qu’il était tenu de rembourser ce trop-perçu[1]. L’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») a réduit le montant accordé comme déduction à 108 $. La question en litige est de savoir si l’appelant a droit à une déduction supérieure à 108 $.

 

[2]              L’appelant a exprimé sa préoccupation à propos du fait que le paiement forfaitaire qu’il avait reçu en 2008 au titre du RPC était de 12 487,70 $, mais que le montant total du trop‑perçu était de 14 967,60 $. Bien que cela ne soit pas tout à fait clair, il me semble que cette différence découle peut‑être du moment auquel on a déterminé le droit de l’appelant à recevoir des prestations au titre du RPC par rapport au moment où les paiements provenant d’autres sources ont été reçus. La demande de l’appelant présentée au titre du RPC a été approuvée le 3 juin 2008, avec effet rétroactif au mois de mars 2007. Le paiement forfaitaire de 12 487 $ couvrait dix mois en 2007 et cinq mois en 2008. Le paiement forfaitaire couvrait donc la période allant de mars à décembre 2007 et de janvier à mai 2008.

 

[3]              Toutefois, pour le mois de juin 2008, l’appelant a reçu un paiement brut de 843,54 $ au titre du RPC et un paiement brut de 1 530,24 $ au titre du RARM, étant donné que ce n’était qu’au mois de juillet 2008 que les paiements bruts faits au titre du RARM ont été réduits à 991,07 $ pour tenir compte des paiements mensuels que l’appelant recevait alors au titre du RPC. La conséquence a été que, en plus du paiement en trop de 12 487 $ pour la période allant de mars 2007 à mai 2008, il y aurait également eu un paiement en trop de 539,17 $ (1 530,24 $ - 991,07 $) provenant du RARM pour le mois de juin 2008. Ce paiement en trop de 539,17 $ compterait vraisemblablement dans le paiement en trop total (12 487,70 $ + 539,17 $ = 13 026,87 $).

 

[4]              Le montant des paiements mensuels faits au titre de la pension des Forces canadiennes n’a pas été communiqué à l’audience, mais étant donné que la lettre qui mentionnait le paiement en trop fait au titre de cette pension était datée d’octobre 2008, on peut présumer que les paiements mensuels pour juin, juillet, août et septembre (et peut‑être octobre) ont continué à être effectués au taux qui ne tenait pas compte de la prestation mensuelle que l’appelant recevait au titre du RPC. Il me semble que cette situation peut expliquer la différence entre le paiement forfaitaire reçu au titre du RPC et le paiement en trop total.

 

[5]              L’appelant remboursait les sommes payées en trop au moyen de déductions effectuées sur les paiements qu’il recevait au titre de la pension des Forces canadiennes et du RARM. Il remboursait un montant de 54,34 $ au titre de la pension des Forces canadiennes et deux de ces remboursements (pour novembre et décembre) ont été faits en 2008. L’appelant a obtenu une déduction de 108 $ relativement à ces deux paiements.

 

[6]              Les prestations brutes totales payées au titre du RARM en 2008 étaient de 15 127,86 $. L’appelant a remboursé un montant de 1 934,63 $ en 2008 au titre du RARM, et la différence entre ces deux montants est de 13 193,23 $, ce qui représente le montant figurant sur le feuillet T4A de l’appelant sous la rubrique « autres revenus » pour les prestations versées au titre du RARM et qui était le montant de revenu provenant du RARM qu’il avait inclus dans sa déclaration de revenus pour 2008. L’ARC n’a effectué aucun rajustement de ce revenu. L’appelant a donc reçu une déduction pour les montants qu’il avait remboursés au titre du RARM en 2008.

 

[7]              L’appelant a demandé une déduction de 14 519,87 $ dans le calcul de son revenu pour 2008 compte tenu du montant qu’il était tenu de rembourser, ce qui voudrait dire que, comme les avocats de l’intimée l’ont souligné à juste titre, l’appelant aurait droit, s’il obtenait gain de cause, à deux déductions pour les montants qu’il a réellement remboursés au RARM – d’abord dans le calcul du montant net figurant sur le feuillet T4A de l’appelant et ensuite comme partie de la déduction de 14 519,87 $ que l’appelant a demandée dans le calcul de son revenu. Bien qu’il ait demandé une déduction (14 519,87 $) inférieure au montant total remboursable (14 967,60 $), la différence (447,73 $) est inférieure au montant remboursé au RARM (1 934,63 $), et est donc inférieure au montant pour lequel il a déjà bénéficié d’une déduction. Il subsisterait donc le montant de 1 486,90 $ (1 934,63 $ - 447,73 $) pour lequel l’appelant bénéficierait de deux déductions. Même si l’appelant était autorisé à demander une déduction pour le montant qui était remboursable, il ne peut pas bénéficier du même montant deux fois.

 

[8]              Quoi qu’il en soit, la question en litige est de savoir si l’appelant a le droit de demander quelque déduction que ce soit pour les montants qui étaient remboursables ou si la déduction à accorder à l’appelant n’est limitée qu’aux montants qu’il a réellement remboursés en 2008.

 

[9]              Pour demander une déduction dans le calcul du revenu pour l’application de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), il est nécessaire de trouver une disposition de la Loi qui autorise une telle déduction. L’appelant n’a invoqué aucune disposition de la Loi. L’intimée a renvoyé aux alinéas 8(1)n) et 60j.04) de la Loi, qui prévoient ce qui suit :

 

8(1) Sont déductibles dans le calcul du revenu d’un contribuable tiré, pour une année d’imposition, d’une charge ou d’un emploi ceux des éléments suivants qui se rapportent entièrement à cette source de revenus, ou la partie des éléments suivants qu’il est raisonnable de considérer comme s’y rapportant :

 

[…]

 

n) une somme payée au cours de l’année par le contribuable ou pour son compte conformément à un arrangement, sauf celui visé au sous-alinéa b)(ii) de la définition de « paiement compensatoire pour invalidité » au paragraphe 6(17), selon lequel le contribuable est tenu de rembourser toute somme qui lui a été versée pour une période tout au long de laquelle il n’exerçait pas les fonctions de sa charge ou de son emploi, dans la mesure où :

 

(i) la somme ainsi versée a été incluse dans le calcul de son revenu tiré d’une charge ou d’un emploi;

 

(ii) le total des sommes ainsi remboursées ne dépasse pas le total des sommes qu’il a reçues pour la période tout au long de laquelle il n’a pas exercé les fonctions de sa charge ou de son emploi;

 

[…]

 

60 Peuvent être déduites dans le calcul du revenu d’un contribuable pour une année d’imposition les sommes suivantes qui sont appropriées :

 

[…]

 

j.04) le total, sauf dans la mesure où il est déductible en application de l’alinéa 8(1)m) dans le calcul du revenu du contribuable pour l’année, des montants représentant chacun un montant que le contribuable a versé au cours de l’année à un régime de pension agréé au titre, selon le cas :

 

(i) du remboursement, effectué en application d’une disposition législative visée par règlement, d’un montant provenant du régime et qui, à la fois :

 

(A) a été inclus, en application du paragraphe 56(1), dans le calcul du revenu du contribuable pour une année d’imposition se terminant après 1989,

 

(B) peut raisonnablement être considéré comme n’ayant pas été indiqué dans la déclaration de revenu du contribuable pour l’application de l’alinéa j.2),

 


(ii) des intérêts afférents au remboursement visé au sous-alinéa (i);

 

 

                                                               [Non souligné dans l’original.]

 

[10]         En l’espèce, il n’est pas nécessaire de décider s’il est satisfait à toutes les conditions pour l’application des dispositions ci‑dessus, étant donné que les deux dispositions ne s’appliquent qu’à des montants versés par le contribuable. Elles ne s’appliquent pas à des montants payables (mais non versés).

 

[11]         L’appelant n’a pas droit à une déduction des montants payables en 2008 qui n’ont pas été versés en 2008. L’appelant a reçu indirectement une déduction à l’égard des remboursements qu’il avait faits au titre du RARM (1 934,63 $) étant donné que le montant inclus dans son revenu et provenant du RARM (13 193,23 $) tenait compte de la somme totale qu’il avait remboursée au titre du RARM. Une déduction a été accordée à l’appelant pour les montants (108 $ au total) qu’il avait remboursés au titre de la pension des Forces canadiennes. L’appelant a donc bénéficié d’une déduction pour les montants qu’il avait remboursés au titre du RARM et au titre de la pension des Forces canadiennes en 2008. En conséquence, l’appelant n’a droit à aucune autre déduction dans le calcul de son revenu pour 2008.

 

[12]         On peut présumer que, pour les remboursements effectués au titre du RARM après 2008, les montants figurant sur les feuillets T4A de l’appelant pour chaque année tiennent compte du montant net qui lui a été versé (en considérant les montants qu’il rembourse durant cette année). Il est possible qu’il continue à bénéficier d’une déduction pour chaque année à l’égard des montants qu’il rembourse durant cette année au titre de la pension des Forces canadiennes.

 

[13]         L’appelant a également soulevé une question relative à une demande de déduction qu’il avait faite concernant une perte en capital. En 1993, l’appelant a retenu les services d’un entrepreneur pour qu’il lui construise une maison à Kingston, en Nouvelle‑Écosse. L’appelant a déclaré que la maison devait être utilisée en partie pour l’exploitation d’une entreprise, mais il n’a pas indiqué la partie des frais engagés qui se rapporteraient à cette entreprise; il n’a pas non plus précisé s’il avait commencé à exploiter une entreprise.

 

[14]         Par suite de la libération de l’appelant des Forces canadiennes, la demande de crédit hypothécaire de l’appelant n’a pas été acceptée et l’appelant a été incapable de payer l’entrepreneur. Ce dernier a engagé des poursuites judiciaires contre l’appelant auprès de la Cour suprême de la Nouvelle‑Écosse et a obtenu un privilège sur le bien pour un montant de 50 217 $. Dans la décision de la Cour suprême de la Nouvelle‑Écosse, on parle du bien comme étant l’habitation ou la maison de l’appelant. Il n’est aucunement fait mention de l’usage que l’appelant se proposait de faire d’une partie du bien pour l’exploitation d’une entreprise. Une copie de la lettre que l’avocat de l’appelant a adressée à l’avocat de l’entrepreneur a été versée au dossier de la Cour suprême de la Nouvelle‑Écosse. Dans cette lettre, l’avocat de l’appelant a désigné le bien comme étant la maison ou le domicile de l’appelant. Il semble également que l’appelant a vécu dans cette maison pendant une certaine période.

 

[15]         Compte tenu du témoignage de l’appelant, il semble que le bien a été par la suite saisi et vendu, et que le produit de la vente a simplement été utilisé pour régler la créance privilégiée.

 

[16]         Pour demander une déduction de perte en capital, l’appelant serait tenu de fournir la preuve du produit de disposition, du prix de base rajusté et du fait que le bien n’était pas un bien à usage personnel. Une maison dans laquelle l’appelant vivait serait un bien à usage personnel. Même si l’appelant pouvait établir tous les éléments ci‑dessus pour une partie du bien, toute perte en capital déductible qui y serait liée pourrait seulement être déduite de gains en capital imposables, et l’appelant n’avait aucun gain en capital imposable en 2008. Aucun rajustement ne sera donc effectué à l’égard de la déduction demandée par l’appelant pour la perte en capital.

 

[17]         En conséquence, l’appel interjeté par l’appelant est rejeté, sans dépens.

 

 

 

          Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour de décembre 2011.

 

 

 

 

« Wyman W. Webb »

Juge Webb

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 19jour de janvier 2012.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


RÉFÉRENCE :                                  2011 CCI 552

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :     2011-787(IT)I

 

INTITULÉ :                                       HUGH VINCENT LUNN

                                                          c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Ottawa, Canada

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 30 novembre 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge Wyman W. Webb

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 2 décembre 2011

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

 

L’appelant lui‑même

Avocats de l’intimée :

Me Christopher Kitchen

Me Tanis Halpape

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

      

       Nom :                                        

 

       Cabinet :                                    

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 



[1] Aucune explication n’a été fournie quant à la différence entre la déduction demandée par l’appelant (14 519,87 $) et le montant réel du trop‑perçu (6 446,58 $ + 8 521,02 $ = 14 967,60 $).

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.