Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

Dossier : 2011-957(IT)I

ENTRE :

SHAYE B. GREEN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE] 

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 3 octobre 2011, à Victoria (Colombie-Britannique).

 

Devant : L’honorable juge François Angers

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

 

L’appelant lui-même

Avocate de l’intimée :

Me Amandeep K. Sandhu

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

L’appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu à l’égard de l’année d’imposition 2008 est rejeté conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de janvier 2012.

 

 

 

« François Angers »

Juge Angers

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 22e jour de février 2012.

 

Marie-Christine Gervais

 


 

 

 

Référence : 2012 CCI 10

Date : 20111210

Dossier : 2011-957(IT)I

ENTRE :

SHAYE B. GREEN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Angers

 

[1]              Il s’agit d’un appel que M. Shaye Green a interjeté à l’égard d’une cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») pour son année d’imposition 2008. En établissant la nouvelle cotisation à l’égard de l’appelant, le ministre du Revenu national (le « ministre ») a supprimé une perte en capital de 2 750 $ que l’appelant avait déduite et il a inclus un gain en capital de 68 250 $ à l’égard de la disposition d’un immeuble situé au 66, rue Main, à Ottawa (l’« immeuble »).

 

[2]              L’immeuble avait appartenu à la grand-mère de l’appelant et il avait été acheté en tant que lot en 1926. En 1954 ou vers 1954, un bâtiment a été construit sur le lot; le premier étage était utilisé à des fins commerciales et la famille de la grand-mère a habité le logement situé au deuxième étage jusqu’en 1966. La grand-mère de l’appelant est décédée en 1967. Dans son testament, l’immeuble était légué à ses fiduciaires, à savoir la mère de l’appelant et ses deux frères ou leur survivant ou survivants, pour que ceux‑ci le détiennent et l’administrent au profit de la mère de l’appelant toute sa vie durant; au décès de celle‑ci, l’immeuble devait être utilisé et administré par les fiduciaires de celle‑ci au profit de ses enfants jusqu’à ce que le plus jeune de ces enfants atteigne l’âge de vingt et un ans, l’immeuble devant alors être transféré en parts égales entre les enfants de la mère encore vivants à ce moment‑là pour qu’ils en aient l’utilisation absolue.

 

[3]              La mère de l’appelant possédait un intérêt viager jusqu’à son décès, le 18 juin 2007. Au moment du décès, tous les enfants de la mère avaient atteint l’âge de vingt et un ans et quatre enfants étaient vivants, dont l’appelant. Ils ont acquis un intérêt en fief simple dans l’immeuble après le décès de la mère de l’appelant. La mère de l’appelant était l’unique fiduciaire survivant aux termes du testament de la grand-mère; jusqu’en 2003, elle a produit des feuillets T3 pour le compte de la fiducie, mais aucune disposition de biens en immobilisation n’a été déclarée par 1a fiducie au cours de ces années.

 

[4]              Les déclarations relatives au droit de mutation (pièce R‑1, onglet 15) indiquent que, le 7 mars 2008, certains documents ont été enregistrés au bureau d’enregistrement immobilier, montrant que l’appelant, son frère et ses deux sœurs étaient tenants communs de l’immeuble. Ils ont tous les quatre vendu l’immeuble le 10 mars 2008 au prix de 395 000 $.

 

[5]              Une vérification de l’année d’imposition 2008 de l’appelant a été effectuée par suite d’une demande de certificat de décharge que l’appelant avait faite pour la succession de sa mère. La vérification a révélé que l’immeuble n’était pas une résidence principale, que des feuillets T3 avaient été produits par les fiduciaires jusqu’en 2003 et que, comme il en a ci‑dessus été fait mention, aucune disposition de biens en immobilisation n’avait été déclarée par la fiducie. Le 15 mars 1994, la fiducie avait de fait exercé un choix en vue de reporter le jour de la disposition réputée en vertu du paragraphe 104(5.3) de la Loi (pièce R‑l, onglet 9).

 

[6]              Par conséquent, le vérificateur a calculé le gain en capital réalisé lors de la disposition de l’immeuble en utilisant la juste valeur marchande de l’immeuble au 31 décembre 1971 (le jour de l’évaluation), qui, comme l’appelant en a convenu, était de 100 000 $. Le vérificateur a ajouté les frais de vente de 22 000 $ à ce montant. Un prix de base rajusté de 122 000 $ a donc été utilisé pour la détermination du gain total, de 273 000 $, dont un quart a été attribué à l’appelant.

 

[7]              L’intimée soutient que les bénéficiaires, y compris l’appelant, sont réputés avoir reçu l’immeuble à sa juste valeur marchande à la date du décès de la grand‑mère, en 1967. Étant donné que cette date était antérieure au jour de l’évaluation, le coût de l’immeuble serait sa juste valeur marchande au jour de l’évaluation, qui, comme on en a convenu, était de 100 000 $. L’intimée soutient en outre que le gain en capital réalisé à l’égard de l’immeuble a été calculé d’une façon appropriée et qu’il a été inclus dans le revenu de l’appelant pour l’année d’imposition 2008.

 

[8]              L’appelant fait valoir que la fiducie était responsable du paiement de l’impôt sur les gains en capital et qu’étant donné qu’il est uniquement devenu propriétaire de l’immeuble lors du décès de sa mère, il faudrait utiliser le prix de base rajusté de l’immeuble à ce moment‑là afin de calculer le gain en capital. Il affirme que le prix de base rajusté au moment du décès de sa mère ne peut pas être inférieur au prix auquel l’immeuble a été vendu, quelques mois plus tard.

 

[9]              Il s’agit de savoir si le ministre a eu raison d’inclure le gain en capital tiré de la disposition de l’immeuble dans le revenu de l’appelant pour son année d’imposition 2008.

 

[10]         Il importe d’examiner les faits de la présente affaire afin de répondre à la question susmentionnée. Lorsque la grand-mère de l’appelant était en vie, elle détenait le titre en common law et le titre en equity, qui s’appelle en droit un fief simple. Lorsqu’elle est décédée en 1967, une fiducie a été établie par testament, la mère de l’appelant et ses deux frères étant désignés à titre de fiduciaires. Le fief simple devait continuer à faire partie de la fiducie, sous réserve d’un domaine viager en faveur de la mère de l’appelant. Lors du décès de la mère de l’appelant, le fief simple détenu par la fiducie a été transmis aux bénéficiaires de la fiducie, à savoir l’appelant, son frère et ses deux sœurs, à titre de tenants communs. Le domaine viager ne comportait aucune condition ayant pour effet de rendre la mère de l’appelant responsable du paiement des impôts sur le revenu à l’égard de l’immeuble. Les fiduciaires sont chargés de produire les déclarations de revenus et ce sont eux qui s’acquittent de l’obligation relative à l’impôt sur les gains en capital, notamment lorsqu’il y a disposition réputée.

 

[11]         L’appelant a également soutenu que la succession de sa grand-mère devrait être responsable du paiement de l’impôt sur les gains en capital. L’impôt sur les gains en capital a commencé à s’appliquer le 31 décembre 1971 et pareil impôt n’a commencé à s’accumuler qu’en 1972. (Voir l’alinéa 104(4)b) de la Loi de l’impôt sur le revenu). Étant donné que la grand-mère de l’appelant est décédée en 1967, sa succession ne peut pas être tenue responsable du paiement de l’impôt sur les gains en capital qui n’avait pas commencé à s’accumuler au cours de sa vie.

 

[12]         Il reste à savoir si la fiducie peut être tenue responsable du paiement de l’impôt sur les gains en capital se rapportant à l’immeuble. Le paragraphe 104(4) de la Loi indique la date à laquelle une disposition réputée a lieu dans le cadre d’une fiducie; il s’agit de la règle de disposition réputée au bout de vingt et un ans. Le sous‑alinéa 104(4)b)(i) s’applique à la fiducie testamentaire de la grand-mère de l’appelante et, en vertu de cette disposition, la date de la disposition réputée est le 1er janvier 1993, soit 21 ans après le 1er janvier 1972.

 

[13]         Selon le paragraphe 104(5.3) de la Loi, la fiducie peut reporter le jour de disposition réputée si elle fait un choix dans les six mois suivant le jour de disposition réputée dont il est question au paragraphe 104(4) et s’il y a un « bénéficiaire exempté » parmi ses bénéficiaires. La mère de l’appelant est considérée comme un bénéficiaire exempté en vertu du sous-alinéa 104(5.4)b)(ii) de la Loi. La mère de l’appelant, en sa qualité de fiduciaire, a fait un choix le 15 mars 1994, de sorte que le jour de disposition réputée a été reporté jusqu’au 1er janvier 1999 conformément aux dispositions du sous-alinéa 104(5.3)a)(i) de la Loi.

 

[14]         La fiducie n’a pas donné suite à ce choix et, bien qu’une disposition soit réputée avoir eu lieu en 1999, la fiducie n’a pas payé d’impôt sur les gains en capital accumulés jusqu’à ce moment‑là. L’Agence du revenu du Canada aurait donc pu établir une cotisation à l’égard de la fiducie pour cet impôt.

 

[15]         À mon avis, depuis 1999, les gains en capital se sont accumulés dans la fiducie. Le paragraphe 107(2) de la Loi oblige la fiducie à transférer aux bénéficiaires, en franchise d’impôt, les gains en capital accumulés sur une immobilisation, les bénéficiaires étant réputés avoir acquis le bien à un coût à peu près égal au prix de base rajusté de la fiducie. Selon le paragraphe 107(2.001) de la Loi, la fiducie peut choisir de ne pas faire appliquer le paragraphe 107(2) si elle réside au Canada, mais il faut présenter le formulaire prescrit avec la déclaration de revenus de la fiducie au cours de l’année de la distribution si ce paragraphe (107(2.001)) est invoqué. La fiducie n’a pas présenté le formulaire prescrit avec sa déclaration de revenus pour 2007 lorsqu’elle a transmis l’immeuble à l’appelant ainsi qu’à son frère et à ses sœurs. Par conséquent, le paragraphe 107(2) s’applique de façon à effectuer le transfert libre d’impôt du gain en capital accumulé en faveur des bénéficiaires.

 

[16]         La preuve révélait que le vérificateur a fourni à l’appelant la possibilité de faire abstraction de la règle de la disposition réputée. Selon toute vraisemblance, le vérificateur, en pareil cas, aurait utilisé le paragraphe 152(4) en vue d’établir les impôts, les intérêts et les pénalités se rapportant à l’impôt sur les gains en capital qui était dû depuis 1999. Cela aurait sans doute entraîné un résultat bien pire pour l’appelant.

 

[17]         J’ai déjà informé l’appelant, au cours de l’instruction, que ses déductions, pour l’impôt foncier, les services publics et l’entretien général se rapportant à l’immeuble, ont été refusées à juste titre par l’intimée étant donné qu’il n’a pas été établi, selon la prépondérance des probabilités, qu’il avait supporté ces dépenses en vue de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien.

 

[18]         L’appel est rejeté.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de janvier 2012.

 

 

« François Angers »

Juge Angers

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 22e jour de février 2012.

 

Marie-Christine Gervais

 


RÉFÉRENCE :                                  2012 CCI 10

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2011-957(IT)I

 

INTITULÉ :                                       Shaye B. Green

                                                          c.

                                                          Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Victoria (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 3 octobre 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge François Angers

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 10 janvier 2012

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

 

L’appelant lui-même

Avocate de l’intimée :

Me Amandeep K. Sandhu

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                   Nom :                            

 

                   Cabinet :                        

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.