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Dossier : 2011-1717(IT)I

ENTRE :

BARBARA A. NORLOCK,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 5 avril 2012, à Hamilton (Ontario).

Devant : L’honorable juge Valerie Miller

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

MR. Brent Raby

Avocat de l’intimée :

MChristopher Bartlett

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

L’appel de la nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2008 est rejeté conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

         Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour d’avril 2012.

 

 

« V.A. Miller »

Juge V.A. Miller

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de mai 2012.

 

Marie-Christine Gervais


 

 

 

 

Référence : 2012 CCI 121

Date : 20120413

Dossier : 2011-1717(IT)I

ENTRE :

BARBARA A. NORLOCK,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge V.A. Miller

[1]              Il s’agit d’un appel interjeté par Barbara Norlock de la nouvelle cotisation concernant son année d’imposition 2008. La question soulevée dans le présent appel se rapporte à une pénalité fédérale et à une pénalité provinciale imposées pour omission répétée de déclarer un revenu.

[2]              La présente cour n’a pas compétence à l’égard de la pénalité provinciale. Toutefois, la disposition légale pertinente se rapportant à la pénalité fédérale figure au paragraphe 163(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), qui est rédigé ainsi :

 

(1) Omission répétée de déclarer un revenu – Toute personne qui ne déclare pas un montant à inclure dans le calcul de son revenu dans une déclaration produite conformément à l’article 150 pour une année d’imposition donnée et qui a déjà omis de déclarer un tel montant dans une telle déclaration pour une des trois années d’imposition précédentes est passible d’une pénalité égale à 10 % du montant à inclure dans le calcul de son revenu dans une telle déclaration, sauf si elle est passible d’une pénalité en application du paragraphe (2) sur ce montant.

[3]              Une pénalité imposée conformément au paragraphe 163(1) s’applique lorsque le contribuable omet de déclarer un revenu dans sa déclaration de revenus pour deux années d’imposition au cours d’une période de quatre ans. Le montant de la pénalité s’élève à 10 p. 100 du montant du revenu non déclaré. Dans le présent appel, le revenu en intérêts non déclaré était de 18 376 $ et la pénalité fédérale s’élevait à 1 837,60 $. La pénalité provinciale imposée s’élevait au même montant.

[4]              L’appelante admet avoir omis de déclarer un revenu en intérêts de 876 $ dans sa déclaration de revenus de 2006. Elle admet également qu’en 2008, elle a omis de déclarer un revenu en intérêts de 14 274 $, qu’elle a reçu de TD Waterhouse Canada, ainsi qu’un autre revenu de 4 102 $, qu’elle a reçu du Fonds du marché monétaire Plus TD.

[5]              Dans le présent appel, il s’agit uniquement de savoir si l’appelante a fait preuve de diligence raisonnable lorsqu’elle a omis de déclarer un revenu.

[6]              Au cours de la période pertinente, l’appelante travaillait dans l’industrie des logiciels. Aucun élément de preuve n’a été présenté au sujet des fonctions qu’elle exerçait ou des études qu’elle avait faites. Toutefois, de l’année 2006 à l’année 2008, son revenu annuel s’élevait à plus de 100 000 $ et elle a déclaré qu’en 2002 ou en 2003, elle avait gagné plus de 250 000 $.

[7]              Selon la preuve qu’elle a présentée, l’appelante a vendu sa maison, à Milton, au mois de janvier 2007 pour s’installer dans un logement loué dans le centre‑ville de Toronto. Bien qu’elle ait payé le service des postes afin de faire réacheminer son courrier, elle n’a pas reçu de feuillet T5 à l’égard du revenu en intérêts de 876 $ se rapportant à son année d’imposition 2006.

[8]              L’appelante a déclaré que lorsqu’elle avait fait l’objet de la nouvelle cotisation pour l’année d’imposition 2006, elle n’avait pas contesté le montant du revenu en intérêts inclus dans son revenu. Elle avait simplement payé le montant de la nouvelle cotisation. L’appelante a témoigné n’avoir jamais reçu de feuillet T5 de 876 $ pour son année d’imposition 2006. Elle a supposé que le revenu en intérêts, en 2006, provenait d’un compte d’épargne Amex qu’elle détenait. C’était le seul compte d’épargne qu’elle détenait en 2006. Ses seuls autres placements, en 2006, avaient été effectués dans des REER.

[9]              Lorsque l’appelante a vendu sa maison, à Milton, le produit de la vente a été placé dans un certificat de placement garanti (le « CPG ») et dans le Fonds du marché monétaire Plus, à la Banque Toronto Dominion (la « TD »). Seize mois plus tard, le principal et les intérêts sur ses placements à la TD ont été affectés directement au prix d’achat de sa résidence actuelle. L’appelante a déclaré que la totalité du revenu non déclaré, en 2008, provenait de cette source. Le revenu en intérêts, en 2008, était inhabituel et l’appelante n’a pas reçu de feuillet T5 à cet égard.

[10]         Comme il en a déjà été fait mention, il s’agit ici uniquement de savoir si l’appelante a fait preuve de diligence raisonnable lorsqu’elle a omis de déclarer un revenu.

[11]         L’avocat de l’appelante s’est fondé sur la décision Symonds c. Canada, 2011 CCI 274, à l’appui du principe selon lequel un moyen de défense fondé sur la diligence raisonnable peut être invoqué pour une première ou pour une deuxième omission de déclarer un revenu. Il a déclaré croire qu’un moyen de défense fondé sur la diligence raisonnable ne pouvait pas être invoqué pour l’année d’imposition 2008 et il a axé ses observations sur l’année d’imposition 2006 (soit sur la première omission de déclarer un revenu).

[12]         L’avocat de l’appelante a soutenu que l’omission de l’appelante de déclarer un revenu était attribuable à une erreur de fait raisonnable. L’appelante n’a pas tenu compte du revenu en intérêts parce que, habituellement, elle ne gagnait pas et ne déclarait pas de revenu en intérêts. D’un point de vue subjectif, l’appelante a commis une erreur innocente puisqu’elle n’était pas au courant du revenu en intérêts de 876 $ qu’elle avait gagné en 2006. D’un point de vue objectif, il s’agissait d’une erreur raisonnable étant donné que le montant du revenu non déclaré, en 2006, représentait moins de un pour cent du revenu que l’appelante avait déclaré.

 

Analyse

[13]         La pénalité imposée conformément au paragraphe 163(1) est une pénalité de responsabilité stricte, mais le contribuable peut contester l’imposition de cette pénalité en établissant qu’il a fait preuve de diligence raisonnable. Dans la décision Saunders c. La Reine, 2006 CCI 51, la juge Woods a dit ce qui suit :

 

[12]      La pénalité visée par le paragraphe 163(1) est un exemple d’un cas de responsabilité stricte, même si la Cour a déjà jugé que cette pénalité pouvait être annulée si le contribuable réussissait à établir qu’il avait fait preuve de diligence raisonnable. […]

[14]         Dans l’arrêt Résidences Majeau Inc. c. R., 2010 CAF 28, le juge Létourneau a décrit ainsi les éléments nécessaires lorsqu’il s’agit d’établir un moyen de défense fondé sur la diligence raisonnable à la suite de l’imposition d’une pénalité :

 

[7]        Quant à la pénalité, nous sommes satisfaits que le juge n’a pas commis d’erreur en la maintenant. Pour y échapper, l’appelante devait établir qu’elle avait fait preuve de diligence raisonnable.

[8]        Selon l’arrêt Corporation de l’école polytechnique c. Canada, 2004 CAF 127, un défendeur bénéficie de la défense de diligence raisonnable s’il établit l’une ou l’autre des deux choses suivantes : soit qu’il a commis une erreur de fait raisonnable, soit qu’il a pris des précautions raisonnables pour empêcher que ne se produise l’événement qui donne naissance à la pénalité.

[9]        L’erreur de fait raisonnable emporte un double test : subjectif et objectif. Le test subjectif est satisfait si le défendeur établit qu’il s’est mépris en ce qu’il a cru en une situation de fait qui, si elle avait existé, aurait éliminé le caractère fautif de son geste ou de son omission. En outre, pour que cet aspect de la défense opère, il faut aussi que l’erreur soit raisonnable, i.e. une erreur qu’une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances aurait commise. Il s’agit là du test objectif.

[10]      Le deuxième volet de la défense requiert, tel que déjà mentionné, que des gestes soient posés ou des mesures prises pour éviter l’événement qui engendre la pénalité.

[15]         Je me rends bien compte que le montant du revenu non déclaré, en 2006, ne correspondait qu’à un pour cent du revenu total de l’appelante et je suis convaincue qu’il s’agissait d’une omission innocente.

[16]         Toutefois, je ne suis pas convaincue qu’une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances aurait commis la même erreur. L’appelante est intelligente et elle semblait être une femme d’affaires avertie. En 2006, elle ne détenait qu’un seul compte d’épargne et elle n’a reçu qu’un seul montant au titre du revenu en intérêts. Or, elle n’a pas déclaré de revenu en intérêts dans sa déclaration de 2006.

[17]         Lorsqu’elle a apporté ses documents chez son comptable pour faire préparer sa déclaration de revenus de 2006, l’appelante aurait dû se rendre compte qu’elle n’avait pas reçu le feuillet T5 indiquant son revenu en intérêts. Or, elle n’a pris aucune mesure en vue d’obtenir ce feuillet d’Amex.

[18]         L’avocat de l’appelante a soutenu que les faits de la présente affaire sont identiques à ceux de l’affaire Symonds, précitée. Je ne suis pas d’accord. Dans la décision Symonds, le juge Webb ne savait pas trop si la contribuable avait reçu et déclaré d’autres revenus en intérêts et il a tiré une déduction défavorable de l’omission de l’intimée de produire la déclaration de revenus de l’appelante. Voici ce qu’il a dit :

 

30   Il convient également de souligner que l’intimée était représentée par une avocate et que l’appelante agissait pour son propre compte. À mon avis, il est possible de tirer une déduction défavorable de l’omission de l’intimée de présenter en preuve la déclaration de revenus que l’appelante avait produite pour l’année 2006. La déduction défavorable que je fais est la suivante : la déclaration aurait révélé tout autre revenu en intérêts qui a été déclaré, de sorte qu’une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances aurait commis la même erreur que l’appelante.

[19]         Eu égard aux circonstances de la présente affaire, je conclus que l’appelante n’a pas établi qu’elle avait fait preuve de diligence raisonnable. L’appelante n’a pas démontré qu’elle avait pris des mesures raisonnables en vue de déclarer la totalité de son revenu en 2006 ou en 2008.

[20]         L’appel est rejeté.

 

         Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour d’avril 2012.

 

« V.A. Miller »

Juge V.A. Miller

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de mai 2012.

 

Marie-Christine Gervais

 


RÉFÉRENCE :                                  2012 CCI 121

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2011-1717(IT)I

 

INTITULÉ :                                       BARBARA A. NORLOCK

                                                          c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Hamilton (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 5 avril 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge Valerie Miller

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 13 avril 2012

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelante :

Me R. Brent Raby

Avocat de l’intimée :

Me Christopher Bartlett

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                          Nom :                      R. Brent Raby

                                                          Avocat

                                                          425, Tonelli Lane

                                                          Milton (Ontario)

                                                          L9T 0N4

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

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