Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Dossier : 2014-2460(GST)G

ENTRE :

STEWARDSHIP ONTARIO,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu les 14, 15 et 16 novembre 2017 à Toronto (Ontario)

Devant : L’honorable juge Steven K. D’Arcy


Comparutions :

Avocats de l’appelante :

Me W. Jack Millar

Me Bryan Horrigan

Avocats de l’intimée :

Me Marilyn Vardy

Me Darren Prevost

 

JUGEMENT

  Conformément aux motifs du jugement ci-joints :

1.  L’appel est accueilli, avec dépens, et la cotisation établie au titre de la Loi sur la taxe d’accise pour la période de déclaration de l’appelante du 1er août 2013 au 31 août 2013 est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, qui tiendra compte du fait que l’appelante a droit aux crédits de taxe sur les intrants de 17 962 034,55 $ qu’elle a demandé dans sa déclaration de TPS pour la période de déclaration;

2.  Les parties auront 30 jours à compter de la date du présent jugement pour s’entendre sur les dépens, à défaut de quoi elles doivent déposer leurs observations écrites sur les dépens dans les 60 jours de la date du présent jugement. Ces observations ne dépasseront pas quinze (15) pages.

  Signé à Ottawa, Canada, ce 21e jour de mars 2018.

« S. D’Arcy »

Juge D’Arcy

Traduction certifiée conforme

Ce 16e jour de juillet 2019.

François Brunet, réviseur


Référence : 2018 CCI 59

Date : 20180321

Dossier : 2014-2460(GST)G

ENTRE :

STEWARDSHIP ONTARIO,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

Intimée

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge d’Arcy

[1]  L’appelante a perçu et versé la TPS sur les droits qu’elle a reçus, concernant un programme de recyclage des déchets qu’elle administre en Ontario, et elle a demandé des crédits de taxe sur les intrants pour la TPS qu’elle avait payée relativement aux coûts qu’elle avait engagés pour administrer le programme. Tant les droits reçus que les coûts engagés ont dépassé 50 millions de dollars. Le ministre a conclu que l’appelante n’avait pas fait de fournitures exonérées, mais il a établi la cotisation en se fondant sur le fait que l’appelante n’aurait pas dû percevoir la TPS sur les droits qu’elle avait reçus et n’aurait pas dû demander des crédits de taxe sur les intrants concernant les coûts qu’elle avait engagés pour administrer le programme.

[2]  L’unique question dont est saisie notre Cour est de savoir si les coûts que l’appelante a engagés pour administrer le programme l’ont été pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre d’une activité commerciale au titre de la TPS. Au début de l’audience, l’intimée a renoncé à toutes les autres questions soulevées dans sa réponse.

[3]  L’appelante a cité trois témoins, alors que l’intimée n’en a appelé aucun. En fait, aucun représentant de l’Agence du revenu du Canada n’était présent à l’audience lors de la présentation de la preuve.

[4]  Les témoins de l’appelante étaient Mme Kathleen Kennedy, la directrice financière de l’appelante, M. Mark Reed, le directeur des comptes nationaux du secteur des lubrifiants des activités en aval de Shell Canada, et M. John Coyne, le vice-président des affaires juridiques et externes d’Unilever Canada. M. Reed et M. Coyne sont administrateurs de l’appelante.

[5]  À mon avis, les trois témoins étaient très crédibles.

I. Résumé des faits

[6]  L’appelante est une personne morale à but non lucratif sans capital‑actions qui administre deux programmes de recyclage en Ontario : les programmes Boîte bleue et Dépôt Orange. Le présent appel vise uniquement l’administration par l’appelante du programme Dépôt orange.

[7]  Le programme Dépôt orange de l’appelante est l’un des programmes de recyclage qui a résulté de l’adoption de la Loi de 2002 sur le réacheminement des déchets [1] (la « Loi sur le RD »).

[8]  La Loi sur le RD a créé Réacheminement des déchets Ontario (« RDO »), une personne morale sans capital-actions afin d’« élaborer, de mettre en œuvre et d’administrer des programmes de réacheminement des déchets pour les déchets désignés conformément à la présente loi [la Loi sur le RD] et en surveiller l’efficacité et l’efficience [2]  ».

[9]  L’article 2 de la Loi sur le RD définit les déchets désignés comme des « [d]échets destinés à la boîte bleue ou matières prescrites comme déchets désignés par les règlements ».

[10]  Voici les modalités de la création et de l’administration d’un programme de réacheminement des déchets, comme le programme Dépôt orange, aux termes de la Loi sur le RD :

  • Tout d’abord, le ministre [3] ordonne à RDO d’élaborer un programme de réacheminement des déchets pour des déchets désignés. RDO élabore le programme en collaboration avec un organisme de financement industriel existant ou nouveau. Un organisme de financement industriel est une personne morale sans capital-actions constituée par RDO en application de la partie III de la Loi sur les personnes morales [4] . L’appelante est un organisme de financement industriel.

  • Le programme de réacheminement des déchets peut comporter la totalité ou une partie des volets suivants :

    • o Des activités en vue de réduire, de réutiliser et de recycler les déchets désignés.

    • o Des activités de recherche et de développement portant sur la gestion des déchets désignés.

    • o Des activités de développement et de promotion des produits découlant du programme de réacheminement des déchets.

    • o Des activités d’éducation et de sensibilisation du public à l’appui du programme de réacheminement des déchets [5] .

    • o Le total des droits que versent les responsables de la gérance ne doit pas dépasser la somme des éléments suivants :

      • § Les coûts d’élaboration, de mise en œuvre et d’administration du programme de réacheminement des déchets.

      • § Une part raisonnable des coûts qu’engage RDO en vue de s’acquitter des obligations que lui impose la Loi sur le RD.

      • § Une part raisonnable des coûts qu’engage le ministère de l’Environnement et de l’Énergie en vue d’appliquer la Loi sur le RD.

    • o Les droits que verse un chargé de gérance doivent refléter équitablement la proportion de la somme qui lui est imputable [9] .

  • Le programme de réacheminement des déchets élaboré comprend obligatoirement un accord conclu entre RDO et l’organisme de financement industriel qui collabore avec celle-ci à l’élaboration du programme. Cet accord régit le rôle de l’organisme de financement industriel dans la mise en œuvre et l’administration du programme, et l’exercice des pouvoirs que lui confère la Loi sur le RD [6] . Il s’agit d’un accord lié au programme.

  • Le programme de réacheminement des déchets doit être présenté au ministre en vue de son approbation avant sa mise en œuvre [7] .

  • Lorsque le ministre approuve un programme de réacheminement des déchets, il est mis en œuvre par RDO et l’organisme de financement industriel [8] .

  • L’organisme de financement industriel est habileté à adopter des règles afin de désigner les responsables de la gérance à l’égard des déchets désignés. Les responsables de la gérance sont des personnes qui ont un lien commercial avec les déchets désignés ou avec un produit dont sont dérivés les déchets désignés.

  • Les responsables de la gérance doivent payer des droits à l’organisme de financement industriel. Les droits sont établis par l’organisme de financement industriel sous réserve des règles suivantes :

    • En plus des programmes de réacheminement des déchets élaborés par RDO et un organisme de financement industriel, la Loi sur le RD prévoit un programme de réacheminement des déchets qui peut être élaboré par un chargé de gérance, un groupe de chargés de gérance ou une personne autre qu’un chargé de gérance. Un tel programme de réacheminement des déchets, lorsqu’il est approuvé par RDO, devient un plan de gérance industrielle (un « PGI »). RDO peut approuver un tel plan s’il atteint des objectifs semblables ou supérieurs à ceux du programme de réacheminement des déchets approuvé par RDO et l’organisme de financement industriel.

    • Les chargés de gérance peuvent éviter de payer des droits à l’organisme de financement industriel pour des déchets désignés précis en participant à un PGI visant les mêmes déchets désignés. Si le PGI est administré par un tiers, le chargé de gérance verse alors des droits à l’administrateur du PGI.

    [11]  À un certain moment, le ministre a pris un règlement sous le régime de la Loi sur le RD pour déclarer les neuf produits suivants comme déchets désignés :

    • les peintures, les teintures et les revêtements;

    • les solvants, y compris les diluants, les décapants, les dégraissants;

    • les piles à usage unique;

    • les réservoirs pressurisés qui contiennent du propane, de l’oxygène, de l’hélium ou d’autres gaz;

    • les engrais;

    • les pesticides;

    • les produits antigel et liquides de refroidissement de véhicule;

    • les contenants vides d’huile lubrifiante;

    • les filtres à huile [10] .

    [12]  Collectivement, ces produits sont appelés déchets municipaux dangereux ou spéciaux (les « déchets MDS »).

    [13]  Le ministre a ensuite demandé à RDO d’élaborer un programme de réacheminement des déchets pour les déchets MDS. RDO a choisi de créer le programme avec l’appelante. L’appelante est donc devenue l’organisme de financement industriel à l’égard des déchets MDS.

    [14]  L’appelante a ensuite élaboré et mis en œuvre, au moyen d’un plan de programme (le « plan de programme des déchets MDS »), un programme de réacheminement des déchets pour les déchets MDS (le « programme des déchets MDS »). Le programme des déchets MDS est aussi appelé le programme Dépôt orange.

    [15]  Comme l’exige la Loi sur le RD, RDO a conclu un accord lié au programme avec l’appelante (l’« accord lié au programme des déchets MDS »). L’accord lié au programme des déchets MDS régit le rôle de l’appelante dans la mise en œuvre et l’administration du programme des déchets MDS.

    [16]  Les parties ont remis à la Cour des copies du plan de programme des déchets MDS et de l’accord lié au programme des déchets MDS qui étaient en vigueur pendant la période pertinente [11] . Ces deux documents exposent en détail l’administration du programme. Mme Kennedy, pendant son témoignage, a fait le résumé du programme des déchets MDS.

    [17]  Elle a noté que l’appelante a mis en œuvre un système permettant la collecte, le transport, la gestion et le traitement des déchets. Le processus commence par les chargés de gérance, qui importent le produit pertinent dans la province. Les consommateurs, les ménages et les entreprises achètent ensuite le produit et créent les déchets lorsqu’ils n’ont plus besoin du produit.

    [18]  Le programme des déchets MDS commence par la collecte des déchets MDS. L’appelante utilise un certain nombre d’initiatives en vue de la collecte des déchets, comme les sites de collecte municipaux, les sites de retour au détaillant (c.‑à‑d. retour des déchets, comme de la peinture ou des piles, au détaillant qui a vendu le produit connexe à l’origine), les dépôts de collecte mobiles, les programmes incitatifs et les activités spéciales de collecte, comme les journées de collecte de déchets municipaux dangereux.

    [19]  En 2011, ces initiatives comprenaient les suivantes :

    • 87 centres municipaux de récupération des déchets ménagers dangereux visant les neuf types de déchets MDS.

    • Près de 200 lieux de retour au détaillant (peintures, teintures et revêtements, ainsi que piles).

    • Près de 600 points de chute libre-service pour automobiles (liquide de refroidissement, contenants d’huiles et filtres à huile).

    • Plus de 12 000 centres de services automobiles (liquide de refroidissement, contenants d’huiles et filtres à huile) à l’intention des utilisateurs commerciaux.

    • Près de 350 activités de collecte annuelles.

    • 102 parcs provinciaux et privés où les bonbonnes de propane non rechargeables sont récupérées auprès des campeurs.

    • Plus de 3 500 points de dépôt de piles [12] .

    [20]  L’étape suivante du programme des déchets MDS est le transport des déchets MDS des sites de collecte vers les sites de traitement. L’appelante recourt à des tiers pour obtenir ce service de transport.

    [21]  On décide ensuite si les déchets MDS peuvent être recyclés. Les déchets peuvent être recyclés au moyen du traitement afin de [traduction] « récupérer et utiliser leurs propriétés physiques, chimiques ou biologiques ». Cela résultera en la réutilisation de la totalité ou d’une partie des déchets. Par exemple, il y a l’acier, qui est récupéré à partir des contenants de peinture, des contenants pressurisés et des filtres à huile, ainsi que la peinture, qui est triée par type et couleur pour fabriquer de la peinture recyclée [13] .

    [22]  Les déchets MDS qui ne peuvent être recyclés sont envoyés à un site d’élimination sûr, comme un site d’enfouissement sécuritaire ou une installation d’incinération.

    [23]  L’appelante engage les coûts d’administration du programme des déchets MDS. Elle verse des frais aux entreprises de collecte des déchets, aux sociétés de transport qui transportent les déchets, aux entreprises de traitement qui traitent les déchets, aux exploitants des sites d’élimination sûrs et aux autres tiers qui offrent des biens et des services en ce qui concerne le programme (les « fournisseurs de services tiers »). L’ensemble des fournisseurs de services tiers ajoutaient la TPS aux frais qu’ils facturaient à l’appelante.

    [24]  Pour chacune des années 2011 et 2012, les frais facturés par les fournisseurs de services tiers ont dépassé 50 millions de dollars.

    [25]  De plus, comme le permet la Loi sur le RD, RDO facture à l’appelante des droits annuels, plus la TPS, pour assumer ses fonctions aux termes de la Loi sur le RD.

    [26]  Conformément aux dispositions de la Loi sur le RD, le programme des déchets MDS prévoit des règles qui permettent de décider qui est un chargé de gérance en ce qui concerne les déchets MDS (les « chargés de gérance des DMDS ») et le montant des droits que chaque responsable de la gérance doit payer à l’appelante (les « droits à payer par le chargé de gérance des DMDS »).

    [27]  Les chargés de gérance des DMDS sont définis au plan de programme des déchets MDS de façon à inclure les propriétaires de marque et les premiers importateurs de produits désignés comme des matières municipales dangereuses ou spéciales (« MMDS ») en vue de leur vente et utilisation en Ontario qui entraînent des déchets MDS. Le plan de programme des déchets MDS signale que les MMDS renvoient à des produits qui sont vendus ou livrés en Ontario aux consommateurs ou qui sont consommés ou utilisés par des entreprises désignées et qui entraînent la génération de déchets MDS [14] .

    [28]  Les mots « propriétaire de marque » et les mots « premier importateur » sont définis comme une personne en Ontario qui est la propriétaire ou la titulaire de licence d’une marque de commerce au titre de laquelle les MMDS sont vendues ou par ailleurs distribuées en Ontario, qu’elles aient été enregistrées ou non, ou une personne qui importe en Ontario des MMDS en vue de la vente ou d’une autre distribution [15] .

    [29]  Mme Kennedy a fait remarquer que les responsables de la gérance des DMDS sont [traduction] « le fabricant, le propriétaire des données fondamentales, l’importateur ou le fournisseur des produits sur le marché. Ils ont un lien commercial avec les produits qui deviennent au bout du compte les déchets que nous gérons [16]  ».

    [30]  Le plan de programme des déchets MDS signale qu’un chargé de gérance des MDS a deux options selon lesquelles il peut s’acquitter de ses obligations légales aux termes de Loi sur le RD. Il peut s’enregistrer, déclarer les données et verser des droits à l’appelante ou il peut présenter une demande à RDO pour approbation d’un PGI [17] .

    [31]  Les responsables de la gérance des DMDS qui ne sont pas membres d’un PGI doivent déposer un rapport trimestriel auprès de l’appelante. Ce rapport doit contenir des renseignements précis qui décrivent la quantité globale de produits qui génèrent les déchets MDS que le responsable de la gérance des MDS ou son franchisé [traduction] « a vendus, loués, utilisés, dont il a disposé, dont il a transféré la possession ou le titre, ou qu’il a par ailleurs rendus disponibles ou distribués pour usage dans la province de l’Ontario [18]  ».

    [32]  Le rapport trimestriel d’un responsable de la gérance des DMDS est utilisé afin d’établir le montant des droits que le responsable de la gérance des DMDS doit payer à l’appelante. Les droits sont calculés en multipliant la quantité globale de chaque produit mentionnée dans le rapport trimestriel par le taux applicable établi à l’annexe G de l’accord lié au programme des déchets MDS. Par exemple, en 2010, le taux de l’antigel emballé était de 0,09 $ le litre. Le taux pour les filtres à huile d’une taille inférieure ou égale à huit pouces était de 0,60 $ par unité [19] . L’appelante a établi le taux pour chaque produit, et RDO a par la suite approuvé le taux.

    [33]  Le plan de programme des déchets MDS contient les principes directeurs suivants que l’appelante a suivis lorsqu’elle a établi les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS :

    • Le coût de gestion des déchets MDS dans chaque catégorie de déchet MDS aux termes du programme des déchets MDS sera établi par une méthode transparente de répartition des coûts.

    • Les coûts communs et partagés seront évalués parmi tous les responsables de la gérance des DMDS d’une manière équitable et transparente.

    • Les coûts de la gestion des produits qui ne sont plus fournis en Ontario seront attribués aux responsables de la gérance d’une manière équitable et raisonnable.

    • Les droits appliqués aux responsables de la gérance seront fondés sur la quantité de produits générant les déchets que les responsables de la gérance des DMDS fournissent sur le marché ontarien, mais ils couvriront les coûts de l’appelante.

    • L’appelante répartira les coûts dans des catégories de matières, le cas échéant, afin de tenir compte des coûts différents de gestion et d’incitation à un plus grand réacheminement des déchets [20] .

    [34]  Mme Kennedy a déclaré dans son témoignage que ces principes étaient conformes à la règle énoncée à la disposition 30(3)2 de la Loi sur le RD, qui prévoit que les droits que verse le responsable de la gérance doivent refléter équitablement la proportion de la somme totale qui lui est imputable.

    [35]  Elle a reconnu que les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS sont destinés à payer l’ensemble des coûts du programme des déchets MDS. L’appelante ne reçoit pas de subvention du gouvernement pour le programme des déchets MDS.

    [36]  En 2010, l’appelante a facturé aux responsables de la gérance des DMDS des droits totaux d’environ 40 millions de dollars. Les droits visant les autres années pertinentes étaient plus élevés, dépassant 50 millions de dollars. L’appelante a facturé, perçu et versé la TPS en ce qui concerne les droits qu’elle a facturés aux responsables de la gérance des DMDS.

    [37]  Mme Kennedy a expliqué comment un responsable de la gérance des DMDS pouvait éviter de payer les droits à l’appelante en créant un PGI avec un groupe de responsables de la gérance des DMDS ou en créant son propre PGI.

    [38]  Pendant la période pertinente, aucun PGI n’a été établi aux termes des dispositions pertinentes de la Loi sur le RD. Toutefois, pendant cette période, RDO a envoyé un document détaillé qui expliquait les procédures de création d’un PGI aux termes de la Loi sur le RD [21] .

    [39]  Mme Kennedy a déclaré dans son témoignage que les trois PGI suivants étaient administrés en Ontario à ce moment‑là :

    • Un PGI portant sur la peinture a commencé à être administré au milieu de 2015. Il est géré par une société appelée Product Care Association, qui est présente dans sept autres provinces. Product Care Association administre le PGI au nom de certains responsables de la gérance des DMDS.

    • Un PGI portant sur les pesticides, les solvants et les engrais a commencé à être administré au cours du deuxième trimestre de 2016; il est également géré par Product Care Association.

    • Un PGI appelé Automotive Material Stewardship ISP a commencé à être administré en avril 2017. Ce PGI porte sur trois produits automobiles : les filtres à huile, les contenants d’huiles et l’antigel.

    [40]  La Cour n’a reçu aucun renseignement quant à la manière dont les nombreux responsables de la gérance des DMDS ont choisi de participer au PGI portant sur les pesticides, les solvants et les engrais ou au PGI portant sur les produits automobiles. Toutefois, Mme Kennedy a noté qu’environ 60 p. 100 des responsables de la gérance des DMDS qui importaient de la peinture en Ontario participaient au PGI sur la peinture. Les autres responsables de la gérance des DMDS, soit 40 p. 100, continuaient de participer au programme des déchets MDS. Elle a fait remarquer que les responsables de la gérance des DMDS qui participaient à l’un des trois PGI susmentionnés ne versaient pas de droits de responsable de la gérance des DMDS à l’appelante.

    [41]  Il ressort des éléments de preuve dont je suis saisi que chaque PGI perçoit la TPS sur les droits qu’il facture aux responsables de la gérance des DMDS et demande des crédits de taxe sur les intrants pour la TPS qu’il paie concernant les coûts liés à la collecte et au recyclage des déchets désignés par lui. L’ARC reconnait que les PGI ont le droit de demander les crédits de taxe sur les intrants [22] .

    [42]  Mme Kennedy a noté qu’une société appelée Sodastream administrait son propre PGI portant uniquement sur le produit qu’elle vendait en Ontario. De plus, elle ne versait pas à l’appelante les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS.

    [43]  Mme Kennedy et M. Reed ont tous deux évoqué la participation importante des responsables de la gérance des DMDS à l’élaboration et à l’administration du programme des déchets MDS. Par exemple, des groupes de travail, composés d’employées des responsables de la gérance des DMDS, ont élaboré une partie importante du plan de programme des déchets MDS. De plus, des employées des responsables de la gérance des DMDS représentaient 12 des 14 administrateurs de l’appelante, et des employées des responsables de la gérance des DMDS participaient à l’établissement des taux visant les produits qui généraient les déchets MDS.

    [44]  Lorsqu’elle a produit ses déclarations de TPS pour les périodes pertinentes, l’appelante a ajouté à sa taxe nette la TPS qu’elle avait facturée aux responsables de la gérance des DMDS et perçue de ces derniers. Autrement dit, elle a versé la TPS qu’elle avait facturée aux responsables de la gérance des DMDS.

    [45]  Au départ, l’appelante n’a pas demandé les crédits de taxe sur les intrants au titre de la TPS qu’elle avait payée aux fournisseurs de services tiers et à RDO. Mme Kennedy a expliqué que, durant cette période, l’appelante discutait avec l’Agence du revenu du Canada au sujet de son droit à des crédits de taxe sur les intrants. Toutefois, en août 2013, l’appelante était exposée à l’expiration de son délai de quatre ans prévu par la loi pour demander des crédits de taxes sur les intrants. Elle a donc demandé dans sa déclaration de TPS pour la période de déclaration mensuelle du mois d’août des crédits de taxe sur les intrants de 17 962 034 $ concernant la TPS qu’elle avait payée entre le 1er janvier 2010 et le 31 août 2013.

    [46]  Le ministre a par la suite établi une cotisation à l’égard de l’appelante rejetant les crédits de taxe sur les intrants demandés dans sa déclaration de TPS d’août 2013.

    II. La question en litige déférée la Cour

    [47]  La Cour doit rechercher si l’appelante a droit aux crédits de taxe sur les intrants à l’égard de la TPS qu’elle a payée aux fournisseurs de services tiers et à RDO.

    III. Les dispositions pertinentes de la Loi sur la TPS

    [48]  Le paragraphe 169(1) de la Loi sur la TPS contient les règles générales en matière de demandes de crédit de taxes sur les intrants. Les parties pertinentes du paragraphe 169(1) se lisent comme suit :

    Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, un crédit de taxe sur les intrants d’une personne, pour sa période de déclaration au cours de laquelle elle est un inscrit, relativement à un bien ou à un service qu’elle acquiert, importe ou transfère dans une province participante, correspond au résultat du calcul suivant si, au cours de cette période, la taxe relative à la fourniture, à l’importation ou au transfert devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu’elle soit devenue payable :

    A x B

    où :

    A représente la taxe relative à la fourniture, à l’importation ou au transfert, selon le cas, qui, au cours de la période de déclaration, devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu’elle soit devenue payable;

    B :

    [...]

    c) [...] le pourcentage qui représente la mesure dans laquelle la personne a acquis ou importé le bien ou le service, ou l’a transféré dans la province, selon le cas, pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ses activités commerciales.

    [49]  En raison du libellé du paragraphe 169(1), la capacité de l’appelante à demander un crédit de taxe sur les intrants dépend de la mesure dans laquelle elle a acquis ou importé le bien ou le service pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ses activités commerciales.

    [50]  Les mots « activité commerciale » sont définis au paragraphe 123(1). Aux fins du présent appel, voici les parties pertinentes de la définition :

    [...]

    a)  l’exploitation d’une entreprise [...], sauf dans la mesure où l’entreprise comporte la réalisation par la personne de fournitures exonérées;

    b)  les projets à risque et les affaires de caractère commercial [...], sauf dans la mesure où le projet ou l’affaire comporte la réalisation par la personne de fournitures exonérées;

    [...]

    [51]  Le paragraphe 123(1) définit ainsi le mot « entreprise » :

    « entreprise » Sont compris parmi les entreprises les commerces, les industries, les professions et toutes affaires quelconques avec ou sans but lucratif, ainsi que les activités exercées de façon régulière ou continue qui comportent la fourniture de biens par bail, licence ou accord semblable. En sont exclus les charges et les emplois.

    [52]  Aux termes de la Loi sur la TPS, l’entreprise d’une personne a un sens plus large que son activité commerciale. Une entreprise comprend la totalité des activités d’une personne, peu importe que ces activités se rattachent à la réalisation de fournitures taxables ou de fournitures exonérées.

    [53]  Toutefois, une activité commerciale comprend uniquement les activités de l’entreprise qui ne portent pas sur la réalisation de fournitures exonérées. Toute l’entreprise d’une personne qui n’effectue pas des fournitures exonérées constitue une activité commerciale.

    [54]  Comme je le discuterai sous peu, l’intimée cite les paragraphes 141.01(2) et (3). J’ai expliqué l’opération des paragraphes 141.01(2) et (3) aux paragraphes 94 à 109 de mes motifs de la décision University of Calgary c. La Reine [23] (l’« appel University of Calgary ») ainsi :

    [94]  L’application du paragraphe 169(1) à la taxe payée pour les biens ou les services acquis par un inscrit pour son entreprise pour consommation ou utilisation directe lors d’une fourniture donnée est relativement simple. Par exemple, si l’inscrit acquiert le bien ou le service uniquement aux fins de consommation ou d’utilisation directe lors d’une fourniture taxable, alors le bien est consommé ou utilisé dans le cadre de l’activité commerciale de l’inscrit et l’inscrit a le droit de demander la totalité du crédit de taxe sur les intrants relativement à la taxe payée lors de l’acquisition du bien ou du service. En revanche, aucun crédit de taxe sur les intrants ne peut être demandé si l’inscrit acquiert le bien ou le service uniquement afin de le consommer ou de l’utiliser directement pour effectuer des fournitures exonérées.

    [95]  L’application du paragraphe 169(1) aux « coûts indirects », soit ceux liés aux biens ou aux services qui ne sont pas utilisés directement pour effectuer une fourniture taxable ou une fourniture exonérée, n’est pas aussi simple. Pour trancher une telle question, il faut tenir compte des règles sur la répartition des crédits de taxe sur les intrants à l’article 141.01.

    [96]  Les coûts indirects comprennent notamment les frais administratifs, les frais généraux et les frais à l’égard des aires communes tant à l’intérieur qu’à l’extérieur d’un édifice. Par exemple, dans la plupart des cas, le service de la paie d’une société qui réalise à la fois des fournitures taxables et des fournitures exonérées ne participera pas directement à la réalisation de fournitures par cette société.

    [97]  Les dépenses du service de la paie sont engagées dans le cadre de l’entreprise de l’inscrit. La totalité de l’entreprise de l’inscrit constitue son activité commerciale, sauf pour les activités de l’entreprise qui ont trait à la réalisation de fournitures exonérées. On peut soutenir que puisque le service de la paie ne participe pas directement à la réalisation de fournitures exonérées, il ne fait pas partie des activités de l’entreprise de l’inscrit qui consistent à effectuer les fournitures exonérées. S’il fallait accepter cet argument, alors toutes les activités du service de la paie seraient considérées comme ayant été exercées dans le cadre de l’activité commerciale de l’inscrit. Une telle interprétation permettrait à un inscrit qui réalise à la fois des fournitures taxables et des fournitures exonérées de demander la totalité des crédits de taxe sur les intrants pour compenser les coûts indirects comme ceux engagés par son service de la paie.

    [98]  Le législateur a abordé cette question par l’ajout de l’article 141.01 en 1994, avec entrée en vigueur rétroactive à l’introduction de la TPS. Les paragraphes 141.01(2) et 141.01(3) précisent qu’au moment d’établir les crédits de taxe sur les intrants pour un inscrit qui se livre à la fois à des activités taxables et à des activités exonérées, il convient d’affecter tous les coûts de l’inscrit à la réalisation de fournitures.

    [99]  Le paragraphe 141.01(2) énonce une règle déterminative qui s’applique à l’acquisition d’un bien ou d’un service[59]. Le paragraphe est libellé comme suit :

    La personne qui acquiert ou importe un bien ou un service, ou le transfère dans une province participante, pour consommation ou utilisation dans le cadre de son initiative est réputée, pour l’application de la présente partie, l’acquérir, l’importer ou le transférer dans la province, selon le cas, pour consommation ou utilisation :

    a) dans le cadre de ses activités commerciales, dans la mesure où elle l’acquiert, l’importe ou le transfère dans la province afin d’effectuer, pour une contrepartie, une fourniture taxable dans le cadre de l’initiative;

    b) hors du cadre de ses activités commerciales, dans la mesure où elle l’acquiert, l’importe ou le transfère dans la province :

    (i) afin d’effectuer, dans le cadre de l’initiative, une fourniture autre qu’une fourniture taxable effectuée pour une contrepartie,

    (ii) à une fin autre que celle d’effectuer une fourniture dans le cadre de l’initiative.

    [100]  Le paragraphe 141.01(1) définit le terme « initiatives » comme signifiant les entreprises d’une personne, ses projets à risque et ses affaires de caractère commercial, et la réalisation de fournitures d’immeubles lui appartenant.

    [101]  Par exemple, les initiatives d’une personne exploitant une seule entreprise englobent toutes les activités de l’entreprise, y compris la réalisation de fournitures taxables et la réalisation de fournitures exonérées.

    [102]  Le paragraphe 141.01(2) s’applique à un bien ou à un service acquis[60] par la personne pour consommation ou utilisation dans le cadre de son entreprise. Conformément à l’alinéa 141.01(2)a), la personne est réputée, pour les besoins de la Loi, avoir acquis le bien ou le service pour consommation ou utilisation dans le cadre de ses activités commerciales dans la mesure où elle l’acquiert afin d’effectuer, pour une contrepartie, une fourniture taxable dans le cadre de l’initiative.

    [103]  En revanche, en vertu du sous-alinéa 141.01(2)b)(i), la personne est réputée avoir acquis le bien ou le service pour consommation ou utilisation hors du cadre de ses activités commerciales dans la mesure où elle l’acquiert afin d’effectuer, dans le cadre de son initiative, une fourniture autre qu’une fourniture taxable effectuée pour une contrepartie. Normalement, cette fourniture serait considérée comme une fourniture exonérée et une fourniture taxable réalisée sans contrepartie ou pour une contrepartie symbolique[61].

    [104]  De plus, en vertu du sous-alinéa 141.01(2)b)(ii), la personne est réputée avoir acquis le bien ou le service afin de le consommer ou de l’utiliser hors du cadre de ses activités commerciales dans la mesure où elle acquiert le bien ou le service à une fin autre que celle d’effectuer une fourniture dans le cadre de l’initiative. Cette disposition s’applique lorsqu’une personne supporte des dépenses qui ne sont pas liées à l’entreprise de cette personne. D’ordinaire, ces dépenses sont des dépenses personnelles du propriétaire de l’entreprise ou d’une personne liée au propriétaire.

    [105]  Le paragraphe 141.01(2) vise le but poursuivi par la personne lorsqu’elle acquiert le bien ou le service, c’est-à-dire la consommation ou l’utilisation prévue du bien ou du service. Il s’agit notamment d’établir si l’intention était d’utiliser le bien ou le service pour effectuer des fournitures taxables pour une contrepartie, pour effectuer des fournitures exonérées ou pour réaliser une combinaison de ces fournitures[62]. La personne n'a le droit de demander un crédit de taxe sur les intrants relativement à la taxe payée pour le bien ou le service que dans la mesure où elle avait l'intention d'utiliser le bien ou le service pour effectuer des fournitures taxables pour une contrepartie.

    [106]  À mon avis, si une société engage une dépense dans le cadre de son entreprise (ou de son initiative), alors cette dépense sera toujours engagée dans le but d’effectuer une ou plusieurs fournitures. L’objet de l’entreprise est de tirer un revenu, c.-à-d. d’effectuer des fournitures. Par conséquent, le paragraphe 141.01(2) vise à ce que tous les coûts engagés par une personne dans le cadre de son entreprise soient liés à une fourniture donnée ou à plusieurs fournitures à l’égard desquelles ils ont été engagés.

    [107]  Il s’agit là d’un exercice relativement facile pour les biens ou les services qui peuvent être liés directement à la réalisation d’une fourniture taxable ou d’une fourniture exonérée. Le défi est de lier les coûts indirects aux diverses fournitures connexes.

    [108]  Mon avis correspond à celui exprimé par le ministère des Finances dans sa note technique de février 1994, laquelle explique de la manière suivante l’objet de l’article 141.01 en ce qui concerne les coûts indirects :

    De nombreux biens et services nécessaires à l’exploitation d’une entreprise ne servent pas directement à effectuer une fourniture. Appelons-les des « intrants indirects ». À titre d’exemple, citons ceux relatifs aux frais généraux et les intrants affectés aux services de « soutien » de l’entreprise, comme ceux du personnel et de la vérification interne. Les fonctions de soutien, notamment celles du personnel, de la gestion et de l’administration d’une entreprise, font partie des mesures prises afin d’effectuer des fournitures, puisque ces fonctions sont exécutées pour que l’entreprise puisse atteindre son objectif ultime qui consiste à effectuer des fournitures. [...]

    L’ajout de l’article 141.01 vise uniquement à renforcer le principe selon lequel la fin ultime qui consiste à effectuer une fourniture quelconque fait appel à tous les éléments d’une entreprise. En fait, cet article prévoit la répartition de tous les coûts engagés dans la réalisation d’une fourniture. [...]

    [Non souligné dans l’original.]

    [109]  Le paragraphe 141.01(3) renferme des règles identiques, sauf qu’il s’applique à la consommation ou à l’utilisation réelle du bien ou du service plutôt qu’à la consommation ou à l’utilisation prévue du bien ou du service au moment de son acquisition. Ce paragraphe est pertinent lorsqu’il est question des dispositions de la Loi qui visent la consommation ou l’utilisation réelle d’un bien ou d’un service au cours d’une période donnée, comme les règles sur le changement d’utilisation à l’article 206.

    ___________________________

    [59] Cette règle s’applique aussi à l’importation d’un bien ou d’un service.

    [60] Ce paragraphe s’applique aussi aux biens ou aux services importés au Canada et aux biens ou aux services transférés dans une province participante.

    [61] Le paragraphe 141.01(4) prévoit que les biens ou les services acquis dans le but d’effectuer une fourniture taxable sans contrepartie ou pour une contrepartie symbolique peuvent être réputés avoir été acquis en vue d’effectuer une fourniture taxable pour une contrepartie.

    [62] En plus des fournitures taxables pour une contrepartie et des fournitures exonérées, la personne peut effectuer des fournitures taxables sans contrepartie ou pour une contrepartie symbolique. En règle générale, en vertu du paragraphe 141.04(4), ces fournitures sont considérées soit comme des fournitures taxables pour une contrepartie, soit comme des fournitures exonérées.

    IV. La position de l’intimée

    [55]  Dans ses écritures, l’intimée a d’abord soutenu que l’appelante n’avait pas acquis les services des fournisseurs de services tiers pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ses activités commerciales. En avançant cette thèse, elle a cité les paragraphes 169(1) ainsi que 141.01(2) et (3).

    [56]  Elle a soutenu la possibilité qu’une affaire constituant une « entreprise » ou une « initiative » ne comporte pas la réalisation de fournitures.

    [57]  En outre, même si l’on suppose que l’appelante exploite une « entreprise » aux termes de la Loi sur la TPS, elle n’acquiert pas nécessairement des biens ou des services dans le cadre de ses activités pour une fin (ou pour la fin ultime) qui consiste à effectuer des fournitures.

    [58]  L’intimée a déclaré que, lorsqu’elle exécutait le programme des déchets MDS, l’appelante assumait ses propres obligations légales et agissait pour son propre compte. L’appelante ne fournissait pas un service aux responsables de la gérance des DMDS aux fins de la TPS.

    [59]  Comme l’appelante n’a pas effectué de fourniture de service aux responsables de la gérance des DMDS dans l’administration du programme des déchets MDS, elle n’a pas, vu les paragraphes 141.01(2) et (3), acquis les services des fournisseurs de services tiers pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ses activités commerciales, au sens du paragraphe 169(1) de la LTA, et l’appelante n’a pas droit aux crédits de taxe sur les intrants qu’elle a demandés dans sa déclaration de TPS [24] .

    [60]  Subsidiairement, l’intimée a soutenu que l’appelante n’exploitait pas une « entreprise » ou une « initiative » aux fins de la Loi sur la TPS, parce qu’elle n’avait pas effectué de fournitures à l’intention de responsables de la gérance des DMDS et n’avait pas acquis les services de tiers pour une fin ou pour la fin ultime qui consiste à effectuer une fourniture taxable ou exonérée.

    [61]  L’intimée a également soutenu que les droits que les responsables de la gérance des DMDS étaient légalement tenus de verser à l’appelante aux termes des règles du programme des déchets MDS (comme le prévoit la Loi sur le RD) ne constituaient pas la contrepartie d’une fourniture.

    [62]  Lors des débats, l’avocate de l’intimée a soutenu que, selon l’interprétation loyale des dispositions applicables de la Loi sur la TPS, l’appelante exploitait une entreprise, en ce qu’il existait une affaire quelconque ou une activité, mais qu’en raison de l’application des dispositions déterminatives des paragraphes 141.01(2) et (3), l’appelante était réputée ne pas avoir acquis de services de tiers dans le cadre d’une activité commerciale.

    [63]  La position de l’intimée n’est pas fondée sur l’hypothèse selon laquelle l’appelante a effectué des fournitures exonérées. D’ailleurs, l’avocate de l’intimée a déclaré lors des débats que l’appelante n’effectuait pas de fournitures exonérées.

    [64]  En outre, puisque l’intimée croit que les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS ne constituent pas la contrepartie d’une fourniture taxable, elle soutient que ces droits ne sont pas assujettis à la TPS.

    V. La position de l’appelante

    [65]  L’argument de l’appelante est simple : son administration du programme des déchets MDS constitue une activité commerciale, et les biens ainsi que les services en question ont été acquis pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de cette activité commerciale. L’appelante avait donc le droit de demander les crédits de taxe sur les intrants à l’égard de la TPS qu’elle a payée aux fournisseurs de services tiers et à RDO. En outre, l’avocat de l’appelante a soutenu que les droits payés par les responsables de la gérance des DMDS constituaient la contrepartie de la fourniture taxable par l’appelante des services qu’elle a rendus au moment de l’administration du programme des déchets MDS. Par conséquent, l’appelante était tenue de percevoir et de verser la TPS à l’égard des droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS.

    VI. L’application du droit aux faits

    [66]  Le présent appel est unique, en ce que l’intimée, tout en reconnaissant que l’appelante n’a pas effectué de fournitures exonérées, soutient qu’elle n’aurait pas dû percevoir la TPS sur les droits qu’elle a reçus des responsables de la gérance des DMDS et de RDO. De prime abord, on pourrait penser que cette position résulterait en une perte de recettes fiscales. Toutefois, comme je l’expliquerai, la position du ministre résulte plutôt en une manne pour la Couronne.

    [67]  Je commencerai par rechercher si l’appelante avait le droit de demander les crédits de taxe sur les intrants au titre du paragraphe 169(1).

    [68]  L’appelante a payé la TPS en question concernant les biens et les services qu’elle a acquis auprès des fournisseurs de services tiers et de RDO. L’appelante a droit aux crédits de taxe sur les intrants à l’égard de cette TPS si elle a acquis les biens et les services pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ses activités commerciales.

    [69]  Comme je l’ai déjà fait remarquer, l’activité commerciale d’une personne est définie, en partie, comme l’exploitation d’une entreprise, sauf dans la mesure où l’entreprise comporte la réalisation par la personne d’une fourniture exonérée. Le mot « entreprise » est défini en termes généraux de façon à inclure toutes affaires quelconques avec ou sans but lucratif.

    [70]  Lors des débats, l’avocate de l’intimée hésitait à dire à la Cour si elle croyait que l’appelante exploitait une entreprise [25] . Toutefois, après plusieurs questions de la Cour visant à clarifier la position de l’intimée, au final, elle a admis que les activités menées par l’appelante durant la période pertinente constituaient une entreprise.

    [71]  L’appelante a élaboré et mis en œuvre un plan très détaillé et sophistiqué en vue de la collecte, du transport, de la gestion, du traitement et du recyclage des déchets MDS. Ces activités comprenaient clairement « toutes affaires quelconques ». Le fait que l’appelante ait exploité cette affaire selon le principe du recouvrement des coûts n’est pas pertinent. L’affaire n’a pas à être exploitée en vue de réaliser des profits pour constituer une entreprise aux termes de la Loi sur la TPS.

    [72]  En résumé, l’administration du programme des déchets MDS par l’appelante constituait une entreprise aux termes de la Loi sur la TPS. L’intimée a admis que l’appelante n’avait pas effectué de fournitures exonérées pendant la période pertinente. Par conséquent, l’ensemble des activités de l’entreprise exploitée par l’appelante constituaient une activité commerciale.

    [73]  Selon les éléments de preuve dont je suis saisi, l’ensemble des services des biens que l’appelante a acquis auprès des fournisseurs de services tiers et de RDO ont été acquis pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de l’administration du programme des déchets MDS. Les fournisseurs de services tiers ont fourni collectivement les services mêmes nécessaires pour administrer le programme, à savoir la collecte, le transport, la gestion, le traitement et de recyclage des déchets MDS. Autrement dit, les biens et services ont été acquis par l’appelante uniquement pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ses activités commerciales.

    [74]  Les services acquis de RDO semblent être des services administratifs liés au programme des déchets MDS, et ils ont été acquis uniquement pour être consommés ou utilisés dans le cadre des activités commerciales de l’appelante.

    [75]  Par conséquent, aux termes du paragraphe 169(1), l’appelante a droit aux crédits de taxe sur les intrants complets au titre de la TPS payée concernant les biens et les services acquis auprès des fournisseurs de services tiers et de RDO. Toutefois, aux termes du paragraphe 169(1), elle est assujettie aux autres dispositions de la Loi sur la TPS, y compris l’article 141.01.

    [76]  Comme je l’ai mentionné dans mes motifs de la décision University of Calgary, précitée, l’objet de l’article 141.01 consiste à préciser l’application du paragraphe 169(1) à la TPS payée pour les biens et les services qui ne sont pas utilisés directement lors d’une fourniture donnée dans le cas où la personne fait à la fois des fournitures taxables et exonérées. Cela comprend son application aux coûts indirects ainsi qu’aux biens et services acquis dans le but d’effectuer une fourniture taxable sans contrepartie ou pour une contrepartie symbolique. La disposition contient des règles spéciales qui jouent si la fourniture est effectuée sans contrepartie ou pour une contrepartie symbolique. De manière générale, les biens ou les services qui sont utilisés dans la réalisation de fournitures taxables sans contrepartie ou pour une contrepartie symbolique sont réputés être utilisés pour effectuer des fournitures taxables pour une contrepartie ou des fournitures exonérées [26] . Cette disposition précise également qu’une personne ne peut pas demander un crédit de taxe sur les intrants à l’égard de dépenses qui ne sont pas liées à l’entreprise de cette personne [27] .

    [77]  Je ne pense pas que l’article 141.01 résulte au refus des crédits de taxe sur les intrants par ailleurs établis au titre du paragraphe 169(1) dans le cas où une personne exerce uniquement des activités commerciales.

    [78]  L’avocate de l’intimée a soutenu que l’appelante ne fournissait rien à un tiers; elle exerçait simplement son obligation légale de recycler des déchets MDS. En prenant cette hypothèse, l’intimée a soutenu que l’appelante avait acquis les biens et les services des fournisseurs de services tiers ainsi que de RDO pour une fin autre que celle d’effectuer une fourniture dans le cadre de son entreprise. Il semble que l’intimée soutient que, dans un tel cas, selon les sous‑alinéas 141.01(2)b)(ii) et 141.01(3)b)(ii) l’appelante est réputée avoir acquis les biens ou les services pertinents pour consommation, utilisation ou fourniture autrement que dans le cadre de ses activités commerciales.

    [79]  L’intimée me demande de conclure que la personne qui exerce uniquement des activités commerciales n’a pas droit aux crédits de taxe sur les intrants à l’égard des biens et des services qu’elle a acquis pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ces activités commerciales. En outre, l’intimée me demande de conclure que l’appelante n’a pas droit aux crédits de taxe sur les intrants, alors qu’une autre entité (un PGI), qui exerce la même activité commerciale en rapport avec les mêmes déchets désignés, y a droit.

    [80]  Je rejette la thèse de l’intimée.

    [81]  Les parties de l’article 141.01 qui jouent sont les alinéas 141.01(2)a) et 141.01(3)a). Comme je l’ai expliqué dans mes motifs de la décision University of Calgary, aux termes de l’alinéa 141.01(2)a), les biens et les services sont réputés avoir été acquis pour consommation ou utilisation dans le cadre d’une activité commerciale d’une personne si elle les a acquis afin d’effectuer, pour une contrepartie, une fourniture taxable. L’alinéa 141.01(3)a) contient des règles identiques, sauf qu’il vise la consommation ou l’utilisation réelle du bien ou du service.

    [82]  À mon avis, ces dispositions s’appliquent aux faits dont je suis saisi, puisque tous les biens et les services acquis par l’appelante auprès des fournisseurs de services tiers ont été acquis pour effectuer des fournitures taxables pour une contrepartie ou ont été consommés ou utilisés dans la réalisation de fournitures taxables pour une contrepartie.

    VII. La fourniture taxable faite par l’appelante

    [83]  La fourniture taxable est définie au paragraphe 123(1) de la Loi sur la TPS comme la fourniture effectuée dans le cadre d’une activité commerciale.

    [84]  La fourniture est définie au paragraphe 123(1) comme la livraison de biens ou la prestation de services, notamment par vente, transfert, troc, échange, louage, licence, donation ou aliénation. Les mots « bien » et « service » sont également définis dans la Loi sur la TPS [28] .

    [85]  Le bien est défini comme, à l’exclusion d’argent, de tous biens – meubles et immeubles – tant corporels qu’incorporels, y compris un droit quelconque.

    [86]  Le service est défini de façon encore plus large comme tout ce qui n’est ni un bien, ni de l’argent, ni fourni à un employeur par une personne qui est un salarié, un dirigeant ou certaines autres personnes. La définition du « service » est très générale. Si quelque chose n’est pas un bien, de l’argent ou ce qu’on pourrait appeler le « service d’un salarié », elle est alors réputée être un service.

    [87]  En raison des définitions larges de la fourniture, du bien et du service, la prestation de toute chose d’une quelconque manière constituera une fourniture.

    [88]  Lorsque l’appelante fait la collecte de déchets MDS au moyen de son vaste réseau de collecte et qu’elle les gère ensuite afin de s’assurer qu’ils sont recyclés ou que les fournisseurs de services tiers les éliminent d’une manière sécuritaire, elle fournit quelque chose. Ce quelque chose est le service de collecte, de recyclage et/ou d’élimination sécuritaire des déchets MDS (les « services de recyclage »). En fait, l’appelante administre le programme des déchets MDS afin d’offrir les services de recyclage.

    [89]  L’appelante offrait les services de recyclage aux personnes qui avaient la possession physique des déchets MDS avant leur collecte par l’appelante et aux responsables de la gérance des DMDS, qui, comme je l’indiquerai, avaient une obligation légale d’engager le coût de la collecte et du recyclage des déchets MDS. Comme l’appelante a offert un service, elle a effectué une fourniture.

    [90]  Je me pencherai maintenant sur l’argument de l’intimée selon lequel l’appelante ne fournissait rien à un tiers, parce qu’elle exerçait son obligation législative de recycler des déchets MDS.

    [91]  Cet argument ne peut être retenu, et ce, pour deux motifs. Tout d’abord, la seule question qui est pertinente au moment de décider cette personne a fait une fourniture est de savoir si la personne a fourni quelque chose. La raison pour laquelle une personne a fourni quelque chose n’est pas pertinente lorsqu’il faut établir si une elle a, concrètement, effectué une fourniture.

    [92]  En l’espèce, il ne s’agit pas de savoir si l’appelante avait une obligation légale de faire de la collecte, du recyclage et/ou de l’élimination des déchets MDS, mais plutôt de savoir si, au moment de la collecte, du recyclage et/ou de l’élimination des déchets MDS, l’appelante a fourni quelque chose. Comme je viens de le signaler, l’appelante a réellement fourni quelque chose : les services de recyclage.

    [93]  Le second motif pour lequel l’argument de l’intimée ne peut être retenu, c’est le fait que l’appelante, lorsqu’elle fournissait les services de recyclage, ne le faisait pas au titre d’une obligation légale, elle les fournissait plutôt dans le cadre de la mise en œuvre et de l’administration du programme des déchets MDS, aux termes de l’accord lié au programme des déchets MDS [29] .

    [94]  Conformément au paragraphe 23(1) de la Loi sur le RD, c’est RDO, et non l’appelante, qui a l’obligation législative d’élaborer un programme de réacheminement des déchets pour des déchets désignés. En outre, aux termes du paragraphe 25(3) de la Loi sur le RD, l’organisme de financement industriel qui est choisi pour élaborer le programme en collaboration avec RDO ne met pas en œuvre et n’administre pas le programme au titre d’un mandat légal, mais le fait plutôt aux termes des modalités de l’accord lié au programme.

    [95]  L’organisme de financement industriel est dans la même position qu’un PGI qui peut, aux termes de l’article 34 de la Loi sur le RD, élaborer, mettre en œuvre et administrer un programme de réacheminement des déchets pour les mêmes déchets désignés. La seule différence entre l’organisme de financement industriel et un PGI est que ce dernier élabore le programme de réacheminement des déchets de sa propre initiative, alors que l’organisme de financement industriel aide RDO à élaborer le programme.

    [96]  En résumé, pendant la période pertinente, lorsqu’elle a mis en œuvre et administré le programme des déchets MDS, l’appelante a effectué des fournitures de services de recyclage. L’appelante a fait ces fournitures dans le cadre de son entreprise et de son activité commerciale, les fournitures étaient donc des fournitures taxables.

    [97]  Dans ses observations écrites, l’intimée a cité certaines parties d’un arrêt de la Cour suprême du Canada, Calgary (Ville) c. Canada [30] , (« Calgary c. Canada ») à l’appui de sa position selon laquelle l’appelante n’avait effectué aucune fourniture. En particulier, elle cite les parties du jugement qui portent sur certaines dispositions législatives relatives à l’exploitation par la Ville de Calgary de son système de transport et à certaines ententes conclues entre la Ville et la Province de l’Alberta.

    [98]  Je ne crois pas que ces parties de l’arrêt de la Cour suprême du Canada sont utiles pour trancher la question de savoir si l’appelante, en l’espèce, a effectué ou non une fourniture. En ce qui concerne l’affaire Calgary c. Canada, la Cour suprême du Canada ne recherchait pas si la Ville de Calgary avait fait au moins une fourniture; elle recherchait plutôt si la Ville avait fait une fourniture exonérée unique ou une fourniture exonérée et une fourniture taxable.

    [99]  La Ville de Calgary soutenait qu’elle avait effectué deux fournitures. La première fourniture – celle de « services de transport en commun » – consistait en l’exploitation de ses installations de transport. Il s’agissait d’une fourniture exonérée. La deuxième fourniture – celle de « services liés aux installations de transport » – consistait en l’acquisition et la construction des installations de transport et leur mise à la disposition des citoyens de Calgary. La Ville soutenait que cette deuxième fourniture était taxable [31] .

    [100]  La Cour suprême du Canada a suivi pour la première fois le critère consacré par notre cour par la décision O.A. Brown Ltd. c. Canada [32] afin de déterminer si la Ville de Calgary avait fait une fourniture unique ou des fournitures multiples. Après avoir appliqué ce critère, la Cour suprême a tiré la conclusion suivante :

    À mon avis, le bon sens veut que, de par leur nature véritable, les « services liés aux installations de transport » fournis par la ville soient préparatoires à la fourniture d’un service municipal de transport à la population. Les installations de transport ont été construites, acquises et mises à disposition en vue de la fourniture d’un service municipal de transport aux résidants de Calgary. J’en conclus que les « services liés aux installations de transport » que l’on prétend distincts sont en fait un élément de la fourniture globale de « services de transport en commun » aux citoyens de Calgary [33] .

    [101]  Par conséquent, la Cour suprême du Canada a conclu que l’application du critère pour établir qu’il y avait eu une seule fourniture ou des fournitures multiples indiquait qu’il n’y avait eu qu’une seule fourniture. Toutefois, avant de parvenir à une conclusion finale, elle a pris en compte d’autres éléments pertinents. En particulier, elle a tenu compte de la nature des obligations qui incombaient respectivement à la Ville de Calgary et à la province de l’Alberta suivant certains accords, « compte tenu du contexte législatif [34]  ».

    [102]  Après avoir examiné certaines dispositions législatives visant l’exploitation par la Ville de Calgary de son système de transport et après avoir tenu compte de certains accords conclus entre la Ville de Calgary et la Province de l’Alberta, la Cour suprême du Canada a confirmé sa conclusion antérieure selon laquelle la Ville de Calgary n’avait fait qu’une fourniture unique. Elle a observé :

    Selon la jurisprudence relative à l’existence d’une fourniture unique ou de fournitures multiples, la construction et l’acquisition des installations de transport constituent des intrants dans la fourniture du « service municipal de transport » à la population. En outre, ni les dispositions législatives applicables ni les accords intervenus ne permettent de conclure à l’existence de la fourniture distincte, par la ville à la province, de « services liés aux installations de transport ». Pour ces motifs, la ville n’a effectué qu’une seule fourniture en l’espèce, celle d’un service municipal de transport [35] .

    [103]  L’analyse par la Cour suprême du Canada des accords conclus entre la Ville de Calgary et la Province de l’Alberta ainsi que son examen des dispositions législatives applicables doivent être interprétés au regard du contexte. La Cour a mené cette analyse afin de déterminer si la Ville de Calgary avait fait des fournitures multiples, et non pour décider si elle avait fait au moins une fourniture. En fait, l’analyse de la Cour suprême du Canada est fondée sur l’hypothèse selon laquelle la Ville de Calgary avait bel et bien fait au moins une fourniture, la fourniture exonérée d’un service municipal de transport à la population.

    VIII. La contrepartie de la fourniture taxable effectuée par l’appelante

    [104]  S’en remettant principalement à la définition de la « contrepartie » figurant au paragraphe 123(1) de la Loi sur la TPS, l’appelante soutient que les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS constituent la contrepartie de la fourniture taxable par l’appelante des services de recyclage.

    [105]  L’intimée soutient que les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS ne constituent pas une contrepartie, mais plutôt des redevances de nature réglementaire qui ne sont pas des droits d’utilisateur. Au paragraphe 87 de ses écritures, l’intimée déclare :

    [traduction]

    Ces types de redevances de nature réglementaire doivent être distingués des droits d’utilisateur. Ces derniers sont des droits prélevés par le gouvernement pour l’utilisation d’installations ou de services gouvernementaux. Par contre, les redevances de nature réglementaire ne sont pas exigées pour la fourniture d’installations ou de services particuliers. Elles sont habituellement exigées à l’égard de droits ou d’avantages accordés par le gouvernement. Les sommes perçues sous le régime de réglementation servent à financer le régime ou visent à modifier les comportements. [...]

    [106]  Je retiens la thèse de l’appelante; les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS constituaient la contrepartie de la fourniture taxable par l’appelante des services de recyclage.

    [107]  La contrepartie est définie au paragraphe 123(1) de la Loi sur la TPS, de telle sorte qu’est englobé tout montant qui, par opération de la loi, est payable pour une fourniture.

    [108]  Les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS sont payables par les responsables de la gérance des DMDS à l’appelante, par opération de la loi. En particulier, l’article 30 ainsi que les paragraphes 31(1) et 34(6) de la Loi sur le RD prévoient que, si une personne a un lien commercial avec les déchets désignés ou avec un produit dont sont dérivés les déchets désignés, cette personne (c.-à-d. un responsable de la gérance) doit payer une partie des coûts d’élaboration, de mise en œuvre et d’administration par l’appelante d’un programme de réacheminement des déchets concernant les déchets désignés, sauf si elle se joint à un PGI ou si elle a son propre programme de réacheminement des déchets approuvé.

    [109]  En outre, ces droits sont payables pour une fourniture effectuée par l’appelante. Lorsqu’il s’avère qu’une personne a, aux termes de l’accord relatif au programme des déchets MDS, le lien commercial requis avec les déchets MDS, elle est réputée être responsable de la gérance des DMDS. À mon avis, en raison de l’application des articles 30 à 34 de la Loi sur le RD, lorsque la personne devient responsable de la gérance des DMDS, elle est tenue de payer les coûts de la collecte et du recyclage des déchets désignés.

    [110]  Cela découle des articles 30 à 34 de la Loi sur le RD, lesquels prévoient que, dans le premier cas, le responsable de la gérance des DMDS peut se soustraire au paiement des droits à un tiers à l’égard des déchets désignés s’il administre un programme de réacheminement des déchets approuvé. Autrement dit, s’il engage lui-même les coûts de la collecte, du recyclage et/ou de l’élimination sécuritaire des déchets MDS.

    [111]  Si le responsable de la gérance des DMDS ne souhaite pas administrer son propre programme, il a alors deux options. La première option consiste à se joindre à un PGI, et à le payer, pour offrir le service de collecte, de recyclage et/ou d’élimination sécuritaire des déchets MDS aux termes d’un programme de réacheminement des déchets approuvé par RDO. Si le responsable de la gérance des DMDS ne se joint pas à un programme administré par un PGI, il doit alors se joindre au programme des déchets MDS et, en substance, retenir les services de l’appelante en vue de la collecte, de recyclage et/ou de l’élimination sécuritaire des déchets MDS. Dans l’un ou l’autre cas, un tiers (un PGI ou l’appelante) offre (c.‑à‑d. fournit) le service de collecte, de recyclage et/ou d’élimination sécuritaire des déchets MDS [36] .

    [112]  Si le responsable de la gérance des DMDS se joint au programme des déchets MDS, l’appelante fournit alors les services de réacheminement des déchets, et le responsable de la gérance des DMDS est tenu, aux termes du paragraphe 31(1) de la Loi sur le RD, de verser les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS pour la fourniture de ces services. Par conséquent, les droits sont payés par opération de la loi pour la fourniture et ils sont réputés, aux fins de la TPS, être la contrepartie de la fourniture.

    [113]  Vu la méthode de calcul des droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS utilisée, les responsables de la gérance des DMDS sont tenus de payer les droits pour la fourniture des services de recyclage. La Loi sur le RD prévoit que les droits payés par un responsable de la gérance à un organisme de financement industriel, comme l’appelante, doivent refléter équitablement la proportion des coûts d’élaboration, de mise en œuvre et d’administration du programme de réacheminement des déchets qui est imputable à ce responsable de la gérance en particulier [37] .

    [114]  L’appelante a respecté les dispositions de la Loi sur le RD en fondant les droits payés par un responsable de la gérance des DMDS sur la quantité des produits générant les déchets que le responsable de la gérance a vendus ou a par ailleurs distribués sur le marché ontarien ainsi que sur une estimation de la quantité de déchets MDS générés du produit dont l’appelante a fait la collecte. Comme Mme Kennedy l’a déclaré, dans son témoignage, lorsqu’elle a expliqué la méthode que l’appelante avait utilisée pour établir les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS :

    [traduction]

    Fondamentalement, il s’agit de [la méthode utilisée par l’appelante] pour faire un lien entre les coûts associés au programme en vue de la collecte, du transport, du traitement et de l’administration du programme, qui sont divisés par la quantité totale de matières vendues sur le marché, puis multipliés par la quantité de matières que le responsable de la gérance vend sur le marché.

    [...]

    Il s’agit de [droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS] proportionnels aux matières [des responsables de la gérance des DMDS] vendues sur le marché. Il y a donc un lien entre les volumes qu’ils produisent, génèrent et vendent et ce qu’ils paient [38] .

    [115]  En résumé, les droits sont une estimation des coûts que l’appelante a engagés dans le cadre de la collecte et du recyclage des déchets MDS à l’égard desquels le responsable de la gérance a un lien commercial au titre de la Loi sur le RD.

    IX. Conclusion

    [116]  Pour les motifs qui précèdent, je conclus que l’appelante a effectué une fourniture taxable des services de recyclage et que les responsables de la gérance des DMDS ont payé une contrepartie (c.-à-d. les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS) pour la fourniture. En outre, l’appelante a acquis les biens et les services pertinents des fournisseurs de services tiers et de RDO afin d’effectuer des fournitures taxables, pour une contrepartie, des services de recyclage. Par conséquent, aux termes du paragraphe 169(1), l’appelante avait droit aux crédits de taxe sur les intrants au titre de la TPS payée sur la contrepartie des biens et des services acquis auprès des fournisseurs de services tiers et de RDO.

    [117]  Bien que cela tranche les questions en litige dont je suis saisi, je discuterai deux autres arguments ou questions soulevés par les parties.

    [118]  Les parties ont parlé de la personne qui était l’acquéreur de la fourniture des services de l’appelante. L’identité de l’acquéreur de la fourniture n’est pas déterminante quant à la question de savoir si l’appelante a effectué une fourniture pour une contrepartie. Toutefois, je discuterai brièvement cette question.

    [119]  Aux termes de l’alinéa b) de la définition d’acquéreur du paragraphe 123(1) de la Loi sur la TPS, les responsables de la gérance des DMDS sont réputés être les acquéreurs de la fourniture, puisqu’ils étaient les personnes tenues de payer la contrepartie de la fourniture.

    [120]  La deuxième question que je souhaite discuter est la citation au début des écritures de l’intimée du passage souvent cité d’un arrêt de la Cour suprême du Canada, dans Hypothèques Trustco Canada c. Canada [39] , lequel indique qu’il faut lire les termes de la loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur.

    [121]  La difficulté que j’éprouve est que l’intimée me demande d’interpréter les dispositions applicables de la Loi sur la TPS d’une manière qui serait contraire à deux de ses principaux objectifs, soit « empêcher les prélèvements successifs de TPS et permettre que l’obligation d’acquitter la TPS passe au consommateur final [40]  ».

    [122]  Par exemple, en 2011, l’appelante a engagé des coûts directs pour administrer le programme des déchets MDS d’environ 50 millions de dollars [41] . Je suppose qu’elle a payé la TVH de 13 p. 100 (la TPS au taux de 13 p. 100 de la TVH) sur la somme de 50 millions de dollars, ou 6,5 millions de dollars.

    [123]  Selon la décision de la Cour, la TPS s’appliquera tout au long de la chaîne de production et de distribution ainsi :

    • L’appelante a le droit de demander un crédit de taxe sur les intrants pour la somme de 6,5 millions de dollars payée sur la contrepartie pour les coûts directs. Le coût net d’administration du programme pour l’appelante est donc de 50 millions de dollars.

    • L’appelante récupère les coûts directs en facturant les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS de 50 millions de dollars, plus la TVH de 6,5 millions de dollars. Les responsables de la gérance des DMDS ont droit aux crédits de taxe sur les intrants pour la TVH de 6,5 millions de dollars payée à l’appelante, puisqu’ils ont acquis les services rendus par l’appelante dans le cadre de leur activité commerciale de vente de produits connexes, par exemple, l’huile à moteur vendue par les sociétés pétrolières et gazières, comme l’employeur de M. Reed, Shell Canada. Par conséquent, le coût net pour les responsables de la gérance des DMDS des droits qu’ils ont à payer est de 50 millions de dollars.

    • Les responsables de la gérance des DMDS récupèrent les coûts des droits qu’ils ont à payer DMDS en augmentant le prix de vente de leurs produits. Si on suppose qu’ils augmentent le prix de vente de leurs produits du montant des droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS, ils factureront et percevront alors la TVH de 6,5 millions de dollars sur l’augmentation de 50 millions de dollars du coût de leur produit.

    • Si l’on suppose également que des personnes achètent les produits auprès des responsables de la gérance des DMDS pour leur consommation personnelle, et non pas pour les utiliser dans le cadre d’une activité commerciale au titre de la TPS (c.-à-d. qu’il s’agit des consommateurs finaux du produit), ces personnes n’auront alors pas droit aux crédits de taxe sur les intrants au titre de la TVH de 6,5 millions de dollars payée aux responsables de la gérance des DMDS.

    [124]  Par conséquent, conformément à l’intention du législateur, la TVH de 6,5 millions de dollars sur la somme de 50 millions de dollars des coûts engagés par l’appelante est transférée au consommateur final. De plus, il n’y a pas de taxe sur la taxe, c.‑à‑d. de prélèvements successifs de la taxe.

    [125]  Voici ce qui arrive selon la position retenue par le ministre lorsqu’il a établi la cotisation à l’égard de l’appelante :

    • L’appelante n’a pas droit aux crédits de taxe sur les intrants pour la TVH qu’elle a payée concernant ses coûts directs de 50 millions de dollars et ne facture pas la TPS sur les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS. Par conséquent, le coût net d’administration du programme des déchets MDS pour l’appelante est de 56,5 millions de dollars (50 millions de dollars, plus la TVH non remboursable de 6,5 millions de dollars payée à ses fournisseurs).

    • L’appelante récupère les coûts directs en facturant les droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS de 56,5 millions de dollars. Les responsables de la gérance des DMDS n’ont pas le droit de demander des crédits de taxe sur les intrants à l’égard des droits, puisque l’appelante n’a pas facturé la TPS et que toute la somme de 56,5 millions dollars est donc la contrepartie.

    • Les responsables de la gérance des DMDS récupèrent les coûts des droits à payer par le responsable de la gérance des DMDS en augmentant le prix de vente de leurs produits de 56,5 millions de dollars. Les responsables de la gérance des DMDS percevront et verseront la TVH de 7,345 millions de dollars (13 p. 100 de 56,5 millions de dollars) sur l’augmentation du coût de leurs produits.

    • Si l’on suppose encore une fois que les produits des responsables de la gérance des DMDS sont achetés par des personnes pour leur consommation personnelle, et non pas pour les utiliser dans le cadre d’une activité commerciale au titre de la TPS, ces personnes (les consommateurs finaux du produit) n’auront donc pas droit aux crédits de taxe sur les intrants au titre de la TVH de 7,345 millions de dollars payée aux responsables de la gérance des DMDS.

    [126]  La position du ministre résulte en une taxe totale de 13,845 millions de dollars. La taxe est payée tant par le consommateur final du produit que par l’appelante. En outre, la position du ministre entraîne des prélèvements successifs de la taxe (taxe sur la taxe), puisque les responsables de la gérance des DMDS doivent facturer la TPS sur la somme de 56,5 millions de dollars, dont le montant de 6,5 millions de dollars représente la taxe payée par l’appelante.

    [127]  De toute évidence, la position du ministre en matière de cotisation est en contradiction des principaux objectifs de la Loi sur la TPS. Elle résulte également en une manne pour la Couronne de 7,345 millions de dollars.

    [128]  Pour les motifs qui précèdent, l’appel est accueilli, avec dépens, et la cotisation établie au titre de la Loi sur la TPS pour la période de déclaration de l’appelante du 1er août 2013 au 31 août 2013 est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation; il tiendra compte du fait que l’appelante a droit aux crédits de taxe sur les intrants de 17 962 034,55 $ qu’elle a demandé dans sa déclaration de TPS pour la période de déclaration.

    [129]  Les parties auront 30 jours à compter de la date du présent jugement pour s’entendre sur les dépens, à défaut de quoi elles doivent déposer leurs observations écrites sur les dépens dans les 60 jours de la date du présent jugement. Ces observations ne dépasseront pas quinze (15) pages.

      Signé à Ottawa, Canada, ce 21e jour de mars 2018.

    « S. D’Arcy »

    Juge D’Arcy

    Traduction certifiée conforme

    Ce 16e jour de juillet 2019.

    François Brunet, réviseur


    RÉFÉRENCE :

    2018 CCI 59

    No DU DOSSIER DE LA COUR :

    2014-2460(GST)G

    INTITULÉ :

    STEWARDSHIP ONTARIO c. SA MAJESTÉ LA REINE

    LIEU DE L’AUDIENCE :

    Toronto (Ontario)

    DATE DE L’AUDIENCE :

    Les 14, 15 et 16 novembre 2017

    MOTIFS DU JUGEMENT :

    L’honorable juge Steven K. D’Arcy

    DATE DU JUGEMENT :

    Le 21 mars 2018

    COMPARUTIONS :

    Avocats de l’appelante :

    Me W. Jack Millar

    Me Bryan Horrigan

    Avocats de l’intimée :

    Me Marilyn Vardy

    Me Darren Prevost

    AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

    Pour l’appelante :

    Nom

    W. Jack Millar

    Ka Yuk (Jenny) Siu

    Cabinet :

    Millar Kreklewetz LLP

    Toronto (Ontario)

    Pour l’intimée

    Nathalie G. Drouin

    Sous-procureure générale du Canada

    Ottawa, Canada

     



    [1] L.O. 2002, chap. 6.

    [2] Loi sur le RD, articles 3 et 5.

    [3] Défini au paragraphe 2(1) comme le ministre de l’Environnement et de l’Énergie ou l’autre membre du Conseil exécutif qui est chargé de l’application de la présente loi en vertu de la Loi sur le Conseil exécutif.

    [4] Loi sur le RD, articles 23 et 24, ainsi que paragraphe 2(1).

    [5] Loi sur le RD, paragraphe 25(1).

    [6] Loi sur le RD, paragraphe 25(3).

    [7] Loi sur le RD, paragraphe 26(1).

    [8] Loi sur le RD, paragraphe 29(1).

    [9] Loi sur le RD, articles 30 et 31.

    [10] Pièce AR‑2, page 1.

    [11] Pièces AR-3 et AR-4.

    [12] Pièce AR-2, pages 1 et 2.

    [13] Ibid., page 2.

    [14] Pièce AR-3, pages 9 et 11.

    [15] Pièce AR-3, page 8.

    [16] Transcription, page 32.

    [17] Pièce AR‑3, page 74.

    [18] Pièce AR-4, pages 17, 18 et 19, y compris les définitions du rapport du responsable de la gérance des MMDS et des matières fournies.

    [19] Pièce AR‑4, page 34.

    [20] Pièce AR‑3, page 106.

    [21] Pièce AR‑10.

    [22] Extraits des témoignages des représentants de l’appelante tirés des interrogatoires préalables, page 72.

    [23] 2015 CCI 321 (CanLII).

    [24] Voir les arguments écrits de l’intimée, paragraphes 3, 5 et 52 à 62.

    [25] Transcription, pages 306 à 311.

    [26] Voir le paragraphe 141.01(4).

    [27] Telle est l’incidence du sous‑alinéa 141.01(2)b)(ii) examiné à l’occasion de l’affaire University of Calgary.

    [28] Paragraphe 123(1).

    [29] Voir la pièce AR-4, pages 1 et 6.

    [30] [2012] 1 R.C.S. 689, 2012 CSC 20.

    [31] Calgary c. Canada, au paragraphe 26.

    [32] [1995] G.S.T.C. 40 (CCI).

    [33] Calgary c. Canada, au paragraphe 43.

    [34] Ibid., au paragraphe 46.

    [35] Ibid., au paragraphe 60.

    [36] Je reconnais que, durant la période pertinente, aucun PGI n’était administré. Toutefois, la structure légale existait pour ces PGI, et les responsables de la gérance auraient pu choisir, comme ils l’ont fait au cours des années ultérieures, de former conjointement un PGI.

    [37] Les coûts prévus aux articles 30 et 31 de la Loi sur le RD comprennent les coûts engagés par RDO pour assumer ses responsabilités aux termes de la Loi sur le RD.

    [38] Transcription, pages 43 et 45.

    [39] [2005] 2 R.C.S. 601, 2005 CSC 54, au paragraphe 10.

    [40] Calgary (Ville) c. Canada, [2012] 1 R.C.S. 689, 2012 CSC 20, au paragraphe 16.

    [41] Pièce AR‑18, page 46.

     Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.