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Dossier : 2011‑1069(GST)I

ENTRE :

SHU WEI CHEN et CHIEN CHUNG TANG,

appelants,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 3 mai 2012 à Halifax (Nouvelle‑Écosse)

 

Par : L’honorable juge Judith Woods

 

Comparutions :

 

Pour les appelants :

Mme Shu Wei Chen

 

Pour l’intimée :

Me Jan Jensen

Mme Mallory Treddenick (stagiaire en droit)

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

L’appel concernant la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d’accise pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2008 est rejeté. Les parties assumeront leurs propres dépens.

 

Signé à Ottawa (Ontario), ce 14jour de juin 2012.

 

 

 

 

 

« J.M. Woods »

Juge Woods

 

Traduction certifiée conforme

ce 25e jour de juillet 2012.

 

S. Tasset


 

 

 

 

 

Référence : 2012 CCI 215

Date : 20120614

Dossier : 2011‑1069(GST)I

 

 

ENTRE :

 

SHU WEI CHEN et CHIEN CHUNG TANG,

appelants,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée.

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

La juge Woods

 

[1]             De l’année 1994 jusqu’à la fin de l’année 2010, les appelants Shu Wei Chen et Chien Chung Tang exploitaient dans le cadre d’une société de personnes une entreprise immobilière sous le nom de Great Tang’s Development.

 

[2]             L’appel concerne une cotisation de taxe nette au titre de la Loi sur la taxe d’accise (la « Loi ») s’élevant à 8 702,91 $ et visant la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2008.

 

[3]             La question est de savoir si les associés auraient dû percevoir la taxe de vente harmonisée (la « TVH ») se rapportant à trois ventes de terrains vacants qui ont eu lieu en 2008. Si elle a lieu de s’appliquer, la TVH relative à ces trois ventes s’élèverait à 11 828,96 $.

 

[4]             Les associés étaient représentés à l’audience par Mme Chen, qui était mariée à M. Tang durant la période pertinente; ils ont divorcé depuis. Bien que M. Tang ne soit plus associé, la société de personnes continue d’exister pour l’application de la TVH aux termes du paragraphe 272.1(6) de la Loi. Mme Chen exploite à présent l’entreprise en tant que propriétaire unique.

 

[5]             Mme Chen fait valoir que les ventes ne sont pas taxables, car les trois terrains ont été acquis à des fins personnelles et non dans le cadre des activités d’une entreprise d’achat et de vente de terrains. Elle ajoute que deux de ces propriétés lui appartenaient à elle seule et non à la société de personnes.

 

Les propriétés appartenaient‑elles à la société de personnes?

         

[6]             J’examinerai d’abord l’argument des appelants selon lequel deux des propriétés appartenaient à Mme Chen et non à la société de personnes. Ces propriétés ont été identifiées comme étant le lot S1, chemin Terence Bay, à Terence Bay (Nouvelle‑Écosse) et le 8, rue Clarence, à Dartmouth (Nouvelle‑Écosse).

 

[7]             Je note que la position des appelants contredit les déclarations de TVH produites par la société de personnes, et qui font état des ventes. Par ailleurs, cet argument n’a pas été soulevé dans l’avis d’appel; il a été invoqué pour la première fois à l’audience.

 

[8]             Ces facteurs ne portent pas un coup fatal aux prétentions des appelants, mais, dans les circonstances, ces derniers doivent présenter une preuve claire et convaincante à l’appui. Malheureusement pour eux, la preuve n’est pas claire.

 

[9]             L’état des déboursés concernant la propriété de Terence Bay, contenu dans la preuve, donne à penser que cette propriété a été vendue par Mme Chen. Cependant, il n’est pas certain si elle la détenait pour son propre compte ou si elle agissait pour celui de la société de personnes, tel qu’il est indiqué dans la déclaration de TVH. Il se peut très bien que la propriété de Terence Bay, comme d’autres, ait été enregistrée au nom de Mme Chen pour le compte de la société de personnes. Prise dans son ensemble, la preuve ne suffit pas à infirmer les déclarations précédentes.

 

[10]        Mme Chen a affirmé que les déclarations de TVH avaient été remplies par un teneur de comptes sur la foi de renseignements fournis par M. Tang. Elle a ajouté que ce dernier s’occupait des déclarations avec peu de soin et qu’elle ne les révisait pas. Ce témoignage n’est pas fait pour avancer la cause des appelants. Même si j’accepte que les déclarations de TVH ont été préparées sans soin, la preuve établissant que les propriétés appartenaient à Mme Chen seulement est insuffisante.

 

Les propriétés étaient‑elles détenues à des fins personnelles?

 

[11]        Les appelants font valoir que les propriétés étaient détenues à des fins personnelles et qu’elles tombent sous le coup de l’exemption prévue au paragraphe 9(2) de la partie I de l’Annexe V de la (Loi). La partie pertinente de la disposition sur l’exemption prévoit ce qui suit :

 

9(2) La fourniture par vente d’un immeuble, effectuée par un particulier ou une fiducie personnelle, à l’exclusion des fournitures suivantes :

 

                                       […]

 

bla fourniture d’un immeuble effectuée :

 

(i) dans le cadre d’une entreprise du particulier ou de la fiducie,

 

(ii) si le particulier ou la fiducie a présenté au ministre, en la forme et selon les modalités déterminées par celui‑ci, un choix contenant les renseignements requis par lui, dans le cadre d’un projet à risques ou d’une affaire de caractère commercial du particulier ou de la fiducie;

                                                                         [Non souligné dans l’original.]

 

[12]        À titre d’observation préliminaire, l’intimée a essayé de soulever l’argument selon lequel l’exemption ne s’applique pas dans les circonstances parce que les propriétés appartiennent à une société de personnes et que l’exemption ne s’applique pas aux sociétés de personnes. Il n’est pas nécessaire que je me prononce sur cet argument parce que l’intimée l’a retiré en ne l’incluant pas dans la réponse.

 

[13]        La seule question à trancher est donc de savoir si la vente des terrains vacants a eu lieu dans le cadre des activités d’une entreprise.

 

[14]        La preuve révèle que la société de personnes était particulièrement active et que les appelants avaient aussi d’autres intérêts immobiliers en dehors de la société de personnes.

 

[15]        Ils possédaient notamment d’assez nombreuses propriétés de type divers, qu’il s’agisse de parcelles de terrains vacants, de propriétés commerciales ou d’appartements en copropriété. Certaines d’entre elles étaient importantes, d’autres avaient été achetées par Mme Chen à des ventes pour défaut de paiement des impôts. Outre les biens détenus par la société de personnes, Mme Chen et M. Tang étaient aussi les propriétaires d’une société possédant d’autres biens immobiliers. Un document fourni par Mme Chen à l’intimée fait état de six ventes de propriétés en 2008 (pièce R‑1, onglet 1).

 

[16]        Je note aussi que les documents d’enregistrement de la société de personnes précisent que celle‑ci exerce des activités d’investissement et d’aménagement immobiliers. Qui plus est, Mme Chen détenait également son permis d’agent immobilier pendant un certain temps.

 

[17]        Ces éléments de preuve donnent fortement à penser que les trois terrains vacants vendus en 2008 ont été vendus dans le cadre des activités d’une entreprise de vente et d’achat de terrains.

 

[18]        Mme Chen fait valoir que les appelants n’avaient jamais eu l’intention de devenir des promoteurs immobiliers et d’aménager les terrains vacants. Cela ne change rien pour les appelants, car le critère n’est pas là.

 

[19]        Agir en vue de tirer un profit constitue la marque distinctive d’une entreprise. Par conséquent, une démarche visant à tirer un profit de l’achat et de la vente de terrains vacants est également une entreprise. Le fait que les appelants n’aient pas eu l’intention de jouer aux promoteurs immobiliers n’a aucune importance.

 

[20]        L’ensemble de la preuve établit de manière écrasante que les appelants s’employaient activement à acheter et à vendre des terrains pour en tirer profit. Ils cherchaient des propriétés dont la valeur leur semblait faible, en espérant les revendre à profit ultérieurement. Dans les circonstances, l’exemption n’a pas lieu de s’appliquer.

 

[21]        Mme Chen a déclaré qu’elle ne vendait des terrains que lorsqu’elle avait besoin d’argent. Cela c’est peut-être vrai, mais cet argument ne lui est d’aucun secours dans le présent appel. Il se peut que les appelants aient eu l’intention de conserver des terrains pendant une période indéfinie. Mais c’est l’intention de réaliser un profit à un moment donné qui est cruciale. Les appelants exploitaient activement une entreprise visant à tirer profit de la vente de terrains. Ceci porte un coup fatal à l’appel.

 

[22]        Mme Chen a déclaré qu’elle possédait un certain nombre de propriétés qu’elle avait l’intention de donner à ses fils, et que la propriété de Terence Bay était une propriété de loisirs. La preuve sur ce point était bien trop vague et pauvre en détails pour être convaincante.

 

[23]        Mme Chen soutient également que la cotisation est sévère, et que les appelants auraient perçu la TVH auprès des acheteurs s’ils avaient su que les ventes étaient visées par cette taxe.

 

[24]        Le résultat peut être sévère, mais il incombe aux contribuables d’obtenir de bons conseils fiscaux concernant leurs obligations au titre de la Loi. Rien n’indique que les appelants l’aient fait. Du reste, la sévérité du résultat ne justifie pas de mesures de redressement. La Cour doit appliquer la loi telle que le législateur l’a adoptée.

 

[25]        L’appel est rejeté. Les parties assumeront chacune leurs dépens.

 

 

Signé à Ottawa (Ontario), ce 14jour de juin 2012.

 

 

 

« J.M. Woods »

Juge Woods

 

Traduction certifiée conforme

ce 25e jour de juillet 2012.

 

S. Tasset

 


RÉFÉRENCE :                                 2012 CCI 215

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :    2011‑1069(GST)I

 

INTITULÉ :                                      SHU WEI CHEN et CHIEN CHUNG TANG c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                Halifax (Nouvelle‑Écosse)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 3 mai 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L’honorable juge J.M. Woods

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 14 juin 2012

 

COMPARUTIONS :

 

Pour les appelants :

Mme Shu Wei Chen

 

Pour l’intimée :

Me Jan Jensen

Mme Mallory Treddenick (stagiaire en droit)

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour les appelants :

 

                          Nom :                      s. o.

 

 

                      Cabinet :                     

 

       Pour l’intimée :                          Myles J. Kirvan

                                                          Sous‑procureur général du Canada

                                                          Ottawa (Ontario)

 

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