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Référence : 2012 CCI 290

Date : 2012 08 09

Dossier : 2010-2155(CPP)

ENTRE :

 

VICTOR HAUSAUER exerçant ses activités sous la raison sociale THE MARKET CENTRE,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

 

Dossier : 2010-2156(CPP)

ET ENTRE :

 

VICTOR HAUSAUER exerçant ses activités sous la raison sociale THE MARKET CENTRE,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

Dossier : 2010-2156(CPP)

ET ENTRE :

 

VICTOR HAUSAUER exerçant ses activités sous la raison sociale THE MARKET CENTRE,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

(Établi à partir de la transcription des motifs du jugement rendus oralement à l’audience le 20 mars 2012 à Lethbridge, en Alberta)

 

La juge Campbell

 

  • [1] D’abord, avant de commencer à entendre les appels qui sont prévus ce matin, je vais lire mes motifs figurant au dossier des appels interjetés par Victor Hausauer au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) et de la Loi sur l’assurance-emploi (LAE) que j’ai entendus hier. Et, je crois que M. Hausauer n’est pas dans la salle d’audience; je vais alors lire les motifs en son absence.

 

  • [2] Il s’agit d’appels entendus sur preuve commune d’une décision rendue par le ministre du Revenu national (le « ministre ») selon laquelle le travailleur, Christopher Nicholson, exerçait un emploi assurable et ouvrant droit à pension auprès de l’appelant pour la période allant du 25 mai 2008 au 4 mars 2009. Aux fins des présents motifs, je me reporterai principalement à l’appel interjeté au titre de la Loi sur l’assurance-emploi.

 

  • [3] L’appelant exploite un magasin d’alimentation, connu sous le nom de The Market Centre, qui vend, entre autres, des produits frais et des plantes à massifs. L’entreprise est exploitée à l’année, mais est davantage achalandée au printemps et en été. Le travailleur a été engagé en vue de faire la cueillette de plantes et de légumes, veiller à l’installation de kiosques de produits et à l’arrosage des plantes, assurer un service à la clientèle et vendre des sapins de Noël. La majorité de ces tâches étaient effectuées dans les locaux de l’appelant.

 

  • [4] Le travailleur gagnait 10 $ l’heure durant cette période. Avant la période faisant l’objet de l’appel, le travailleur gagnait 9 $ l’heure lorsqu’il avait été engagé par l’appelant pour effectuer un travail similaire.

 

  • [5] L’appelant avait convenu que c’est le travailleur qui déterminait son taux de rémunération horaire. Le travailleur n’a pas présenté de facture à l’appelant, mais selon son témoignage, il consignait les heures durant lesquelles il travaillait et les présentait à l’appelant. Il supposait que l’appelant consignait également ses heures, mais l’appelant a déclaré dans son témoignage qu’il n’avait jamais conservé de dossier sur les heures pendant lesquelles le travailleur avait travaillé. Le travailleur exerçait ses tâches pendant les heures d’ouverture du marché d’alimentation The Market Centre.

 

  • [6] L’appelant a également déclaré que le travailleur comptait de l’expérience dans ce type de travail et nécessitait qu’une légère supervision dans ses tâches. L’appelant fournissait tous les outils et l’équipement et était propriétaire du camion qui servait à la cueillette des produits.

 

  • [7] Selon la thèse de l’appelant, le travailleur a été embauché à titre d’entrepreneur indépendant et que ceci a été mis en évidence par les nombreux chèques émis au travailleur sur lesquels l’appelant a écrit « contrat », sur le côté inférieur gauche du chèque, et par un bref contrat d’une page, non daté, écrit à la main et signé par le travailleur dans lequel il reconnaissait que son travail était contractuel et pour lequel il était responsable de ses propres déductions.

 

  • [8] Le travailleur a déclaré qu’il s’est toujours considéré comme un employé et qu’il s’était senti obligé de signer le contrat susmentionné.

 

  • [9] Il existe de nombreuses décisions dans ce domaine. De toute évidence, il n’y a pas eu d’entente entre les parties relativement à leur intention. Lorsque cela se produit, les modalités et les conditions de leur relation de travail deviennent encore plus importantes et c’est là que les facteurs établis dans la décision Wiebe Door Services Ltd. c. Ministre du Revenu national (1986), 87 D.T.C. 5025 (« Wiebe Door »)sont essentiels à l’analyse de la question. Les parties peuvent utiliser le terme qu’elles souhaitent pour décrire leur relation, mais les modalités et les conditions de cette relation doivent appuyer l’étiquette qu’elles lui apposent et en tenir compte.

 

  • [10] Dans les circonstances de ces appels, les facteurs de la décision Wiebe Door appuient la thèse du ministre voulant que le travailleur soit un employé et tel est le cas, malgré le fait que le travailleur a offert un témoignage très peu impressionnant. Le critère a été clairement énoncé dans l’arrêt 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., 2001 C.S.C. 59, aux paragraphes 47 et 48, et je cite :

 

47  [...] La question centrale est de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte. Pour répondre à cette question, il faut toujours prendre en considération le degré de contrôle que l’employeur exerce sur les activités du travailleur. Cependant, il faut aussi se demander, notamment, si le travailleur fournit son propre outillage, s’il engage lui-même ses assistants, quelle est l’étendue de ses risques financiers, jusqu’à quel point il est responsable des mises de fonds et de la gestion et jusqu’à quel point il peut tirer profit de l’exécution de ses tâches.

 

48  Ces facteurs, il est bon de le répéter, ne sont pas exhaustifs et il n’y a pas de manière préétablie de les appliquer.

 

  • [11] L’appelant a clairement exercé un contrôle sur le travailleur et sur le rendement des tâches qu’il a accomplies. L’appelant a établi le salaire horaire du travailleur et son nombre d’heures de travail. Il a garanti le travail du travailleur. Si le travailleur n’était pas disponible, l’appelant s’acquittait des fonctions de celui-ci. Étant donné que le travailleur comptait de l’expérience dans ce type d’activités, il ne nécessitait qu’une légère supervision. Cependant, l’appelant a témoigné que, dans certains cas, le travailleur devait obtenir l’approbation de l’appelant pour accomplir certaines tâches. Quoi qu’il en soit, c’est le droit de contrôler et non le contrôle lui‑même qui peut avoir été exercé et les faits en l’espèce appuient ma conclusion selon laquelle l’appelant a conservé le droit ultime de contrôler le travailleur dans ses tâches s’il le jugeait nécessaire.

 

  • [12] Le facteur relatif à l’outillage étaye également la conclusion que le travailleur était un employé, tout simplement parce que tout ce qui était nécessaire au travailleur à l’accomplissement de ses tâches était fourni par l’appelant dans ses locaux commerciaux. Cet outillage comprenait un véhicule, qui appartenait à l’appelant et qui était utilisé dans le cadre des activités de l’entreprise et pour lequel l’appelant payait l’essence, l’entretien et l’assurance.

 

  • [13] Le travailleur n’avait pas la possibilité de faire un profit ou de subir une perte. Il a reçu un salaire horaire fixé en fonction de ses heures de travail qui ont été établies par l’appelant. Il ne s’investissait pas dans l’entreprise d’un point de vue financier ni même dans la gestion de celle-ci, et il n’était pas responsable des dépenses, quelles qu’elles soient, de l’entreprise. Ces facteurs justifient la conclusion selon laquelle le travailleur est un employé.

 

  • [14] Outre ces facteurs, il n’y a eu aucune preuve que le travailleur a travaillé pour quelqu’un d’autre au cours de cette période, qu’il a fait de la publicité pour obtenir du travail, ou qu’il détenait un nom commercial ou un numéro d’entreprise ou de TPS. La preuve de l’appelant a également établi que le travailleur ne pouvait pas embaucher de remplaçants.

 

  • [15] Dans ces circonstances, le travailleur n’exploite pas une entreprise à son propre compte. Les faits ne permettant pas d’étayer la thèse de l’appelant voulant que le travailleur ait été un entrepreneur indépendant, malgré l’intention déclarée sur les chèques, le contrat et le témoignage de vive voix de l’appelant. Pour ces motifs, je rejette l’appel parce que la preuve valide ma conclusion selon laquelle le travailleur exerçait un emploi assurable et donnant droit à pension au cours de la période visée par l’appel.

 

  • [16] Cela conclut mes motifs pour les deux appels d’hier.

 

 

 

Signé à Summerside (Île-du-Prince-Édouard), ce 9e jour du mois d’août 2012.

 

 

« Diane Campbell »

La juge Campbell

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