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Dossier : 2009-3904(GST)G

 

ENTRE :

SURREY CITY CENTRE MALL LTD.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

Appel entendu les 17, 18 et 19 janvier 2012 à Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Devant : L’honorable juge J.E. Hershfield

Comparutions :

Avocats de l’appelante :

Me Joel A. Nitikman

Me Jessica Fabbro

Avocats de l’intimée :

Me Ron D.F. Wilhelm

Me Bruce Senkpiel

 

JUGEMENT

L’appel de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d’accise, relativement à la période de déclaration du 1er juillet 2002 au 31 juillet 2002, est accueilli, avec dépens, et la cotisation est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, conformément aux motifs énoncés dans les motifs de jugement ci-joints.

 


Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour d’octobre 2012.

 

« J.E. Hershfield »

Juge Hershfield

 

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de mars 2013.

 

 

François Brunet, réviseur


 

 

 

 

Référence : 2012 CCI 346

Date : 20121002

Dossier : 2009-3904(GST)G

 

 

 

ENTRE :

 

SURREY CITY CENTRE MALL LTD.,

 

appelante,

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Hershfield

Le contexte

[1]             L’appelante (Mall Co) a interjeté appel d’une cotisation de TPS (l’« appel ») établie en vertu du paragraphe 182(1) de la Loi sur la taxe d’accise (la « Loi »).

[2]             Pendant toute la période en cause, Mall Co était une filiale en propriété exclusive d’ICBC Properties Ltd. (« IPL ») qui, durant la même période, était une filiale en propriété exclusive de The Insurance Corporation of British Columbia (« ICBC »)[1], une société d’État provinciale administrant un régime obligatoire d’assurance-automobile en Colombie-Britannique. IPL, ou ses filiales, géraient la totalité des investissements immobiliers d’ICBC.

[3]             Pendant toute la période en cause, Mall Co et ICBC étaient toutes deux inscrites aux fins de la partie IX de la Loi.

[4]             Une série d’opérations a amené Mall Co à faire l’acquisition de terrains, à Surrey (Colombie-Britannique), en 1999 et en 2000. Ces terrains devaient servir à la construction d’un centre commercial, ainsi que de locaux universitaires qu’utiliserait la Technical University of British Columbia (« Tech BC »), créée par un texte de loi de l’Assemblée législative de la province de la Colombie‑Britannique (la « Province ») en vue de la possession et de l’exploitation d’une nouvelle université à Surrey.

[5]             Pour consigner leurs engagements respectifs, les parties ont conclu entre elles une série d’ententes, et chacune d’elles est analysée sous la rubrique suivante. Elles comprenaient une entente d’aménagement, qui a été conclue entre Mall Co, ICBC, Tech BC et la Province, représentée par le ministre du Advanced Education Training and Technology Ministry (le « ministère autorisé ») en 2000 et par laquelle, de manière générale, l’appelante convenait d’aménager et de bâtir un centre commercial et les locaux universitaires. Aux termes de cette entente, Mall Co convenait de louer à bail les locaux universitaires à Tech BC, et Tech BC convenait de louer à bail ces locaux de Mall Co. ICBC convenait de financer les obligations souscrites par Mall Co dans le cadre de l’entente en vue de la construction des locaux universitaires.

[6]             Les travaux d’aménagement ont commencé. ICBC a avancé des fonds à IPL, qui, à son tour, les a avancés à Mall Co en vue de la réalisation du projet. Toutefois, en 2002, la Province a fermé Tech BC et annoncé qu’elle ne s’acquitterait pas de ses obligations concernant la location à bail des locaux universitaires[2].

[7]             Après des négociations entre ICBC et la Province, ICBC, Mall Co, IPL, Tech BC et la Province, représentée par le ministère autorisé, ont conclu une transaction aux termes de laquelle Tech BC a convenu en son nom et en celui de la Province de payer à ICBC ou à son représentant la somme de 41,1 M$ (le « paiement ») en contrepartie de la libération - par ICBC, IPL et Mall Co - de Tech BC et de la Province à l’égard de toutes les obligations que prévoyaient l’entente d’aménagement et les ententes connexes[3].

[8]             Le paiement a été fait, mais il y a controverse entre les parties à l’appel sur l’entité à laquelle ce paiement était destiné ou au nom de laquelle il a été reçu; il est toutefois constant qu’il a été dirigé vers le compte en banque d’ICBC et versé dans celui-ci. Il est aussi constant qu’après qu’ICBC eut reçu le paiement, les registres de Mall Co ont fait état d’une réduction de la dette de cette dernière envers IPL d’un montant de 41,1 M$.

[9]             En décembre 2005, le ministre du Revenu national (le « ministre ») a établi à l’endroit d’ICBC une cotisation de TPS concernant le paiement effectué, en vertu du paragraphe 182(1) de la Loi. Cette disposition-là serait celle qui s’appliquerait si ICBC avait reçu le paiement en vue de la résiliation d’une entente destinée à effectuer une fourniture taxable. La fourniture taxable dont les parties était censées avoir convenu était une location à bail. ICBC a été considérée comme le fournisseur du droit de location à bail. Le paragraphe 225(1) de la Loi a servi à calculer la taxe nette payable en fonction du montant qu’ICBC avait reçu. Le ministre a fait valoir, subsidiairement, que Mall Co était la partie qui avait effectué la fourniture taxable mais qu’ICBC, en tant que bénéficiaire du paiement pour le compte de Mall Co, était encore redevable de la taxe nette visée au paragraphe 225(1). ICBC a interjeté appel, faisant valoir notamment que Mall Co était la partie visée par l’entente d’aménagement qui avait effectué la fourniture et qu’elle-même n’avait contracté aucune obligation au sens du paragraphe 182(1).

[10]        Le ministre a consenti à ce que jugement soit rendu en faveur d’ICBC et il a entrepris d’établir la cotisation portée en appel en l’espèce en prenant pour base que c’était Mall Co qui avait effectué la fourniture taxable et reçu le paiement. La cotisation établie à l’encontre de Mall Co s’applique à la période qui s’étend du 1er juillet 2002 au 31 juillet 2002 et elle s’élève à 2 405 055,67 $, plus les pénalités et les intérêts applicables.

[11]        Par l’appel qu’elle a interjeté, Mall Co nie maintenant toute obligation au sens du paragraphe 182(1).

Autres éléments contextuels et détails des ententes et des documents connexes

[12]        Il ressort des documents de base qu’en 1998, ICBC, souhaitant diversifier ses placements, a décidé d’investir dans le secteur immobilier. Elle a pris connaissance d’une occasion de devenir le promoteur principal dans le cadre d’un projet d’envergure intégrant Tech BC à des locaux à bureaux et des locaux pour commerce de détail à Surrey (Colombie-Britannique). ICBC a dressé tous les plans préparatoires en vue d’acheter les terrains requis et de mettre au point et de financer le projet en établissant des objectifs fixes quant aux bénéfices qu’elle tirerait des travaux d’aménagement ainsi qu’au rendement des fonds investis. Des planificateurs et des conseillers financiers dont ICBC avait retenu les services ont procédé à des recherches et à des analyses. Il ne fait aucun doute que Tech BC, en tant que locataire-clé promis, a joué d’emblée un rôle crucial dans tout ce projet. Cependant, comme il est mentionné tout au long des présents motifs, même si cette « promesse » a été faite à la fois par la Province et par Tech BC, c’est sur celle de la Province que les parties se sont fondées en fin de compte.

[13]        En septembre 1999, ICBC, Tech BC et la Province, représentée par le ministère autorisé, ont signé un protocole d’entente (le « PE ») soulignant les contributions importantes d’ICBC, de Tech BC et de la Province, y compris l’investissement financier considérable que proposait ICBC dans le projet. Même si le PE anticipait la chaîne de sociétés filiales qui allait être établie en vue de s’occuper de la propriété, de l’aménagement et de l’exploitation du projet, la responsabilité imposée à ICBC en matière de financement et le fait que toutes les parties au PE dépendaient mutuellement les unes des autres sont des plus évidents.

[14]        Même si l’on peut inférer des actes de procédure que le PE n’est pas une entente qui a force obligatoire[4], il expose le projet d’une manière très détaillée. Le projet tout entier qu’ICBC devait aménager comportait plusieurs éléments et plus d’une phase. Dans le cadre de la première phase, Tech BC devait louer à bail 425 000 pieds carrés de locaux conçus et construits à son intention, et ICBC devait aménager jusqu’à 250 000 pieds carrés pour son propre usage. Selon ma compréhension de la situation, la première phase comportait également le réaménagement du centre commercial adjacent déjà existant – Surrey Place Mall – dont ICBC avait fait l’acquisition (le « centre commercial Surrey »). Les travaux de réaménagement du centre commercial Surrey étaient censés inclure l’aménagement de terrains voisins que Tech BC cèderait au projet dans le cadre d’un partenariat. Le réaménagement du centre commercial Surrey était subordonné à la conclusion d’ententes avec trois grands détaillants dont les baux étaient indispensables au succès de ce volet du projet[5].

[15]        Il ressort également du PE que le loyer de base que Tech BC allait payer à la société qui faisait partie de la chaîne des filiales d’ICBC et qui allait devenir propriétaire en droit du bien en question (qui s’est révélée être Mall Co) a été fixé au moyen d’une formule, laquelle dépendait de deux chiffres : le [traduction] « budget de construction de base » et le [traduction] « tarif de location ». Le tarif de location lui-même était indiqué dans le PE; il s’agissait d’un taux d’intérêt annuel effectif de 7 %. Le budget de construction de base était censément exposé dans une annexe, laquelle n’a pas été produite en preuve, mais je retiens le témoignage du témoin de l’appelante selon lequel ce budget était [traduction] « essentiellement » gelé à un montant de 82,9 M$ au moment de la conclusion du PE. Selon celui-ci, le loyer de base s’établit comme suit : un montant de 7 M$ à verser au début de la location à bail, plus le montant du budget de construction de base moins la somme de 21 M$[6] amortie au tarif de location pendant les vingt-cinq années de la durée du bail, et payable mensuellement, le premier jour de chaque mois, à compter du début du bail.

[16]        Le budget de construction de base était essentiellement un montant qui représentait le coût du projet clés en main et qui exigeait qu’ICBC soit responsable de tout dépassement de coûts, sous réserve d’exceptions très restreintes dans le cadre desquelles des rajustements précisés dans le PE devaient être autorisés. Par exemple, il se pouvait que le budget de construction de base change par suite de rajustements effectués en fonction des coûts définitifs du financement des travaux de construction ainsi que des majorations de coûts imputables à des retards ou à des ordres de modification, occasionnés ou exigés par Tech BC.

[17]        En mars 2000, trois ententes, entrant toutes en vigueur le même jour au mois de mars de cette année-là, furent conclues. La première des trois, l’entente mutuelle en matière de dotation et d’objectifs (l’« EMDO »), fut conclue par Mall Co, les autorités provinciales, représentées par le ministère autorisé, et Tech BC. Par cette entente, les autorités provinciales et Tech BC s’engageaient à céder à Mall Co certains des terrains requis que Tech BC avait le droit d’acquérir de la Ville de Surrey. Ces terrains attribués en dotation, appelés les terrains de Surrey, rapporteraient à Tech BC un paiement de dotation de 1,625 M$ (soit 50 % du profit prescrit des travaux d’aménagement de la phase 1) plus un intérêt de 50 % sur le profit tiré de l’aménagement des parcelles additionnelles de la dotation[7]. L’EMDO confirme aussi que Tech BC fait une autre contribution importante au projet en devenant locataire principal.

[18]        L’EMDO expose de manière assez détaillée les plans d’aménagement futurs des terrains de Surrey. Ces plans prévoient, de façon très générale, l’aménagement de parcelles adjacentes au profit des parties et comprennent le droit qu’a Tech BC de refaire l’acquisition d’une parcelle de terrain au prix de 1 $ en vue de la construction de locaux universitaires additionnels.

[19]        L’EMDO engage clairement Mall Co à aménager les locaux initiaux destinés à Tech BC et elle comporte une disposition d’arbitrage obligatoire.

[20]        L’engagement de Mall Co à l’égard de l’aménagement de locaux initiaux destinés à Tech BC, comme le prévoit l’EMDO, est censément pris dans le cadre du bail de Tech BC, ainsi qu’il est envisagé dans l’entente d’aménagement. Cette entente est la deuxième des trois qui furent signées en mars 2000.

[21]        Les parties à l’entente d’aménagement étaient Mall Co, ICBC, Tech BC et la Province, représentée par le ministère autorisé. Cette entente expose en détail les conditions de construction concernant les locaux initiaux de Tech BC et confirme le budget de construction de base clés en main en prévoyant des rajustements limitatifs non dissemblables de ceux qui sont énoncés dans le PE. Des détails y sont exposés au sujet de l’achèvement des locaux de Tech BC, de leur remise et de la date du début du bail connexe. Le loyer de base est indiqué en fonction de la même formule que celle qui apparaît dans le PE. Il y a une disposition concernant un paiement incitatif à la prise à bail[8] d’un montant de 700 000 $, payable à la remise de certains certificats d’achèvement. L’entente d’aménagement comporte une clause d’arbitrage obligatoire. À titre de partie à cette entente, ICBC a le droit de recourir à l’arbitrage pour n’importe quel litige visé par l’entente. Cela engloberait, semble-t-il, tout litige portant sur le bail, ce qui ne serait pas un fait extraordinaire car, en tant que partie finançant le projet, ICBC a un droit sur ce bail.

[22]        De plus, l’entente d’aménagement comporte des dispositions précises qui se rapportent aux engagements d’ICBC :

[traduction
Ententes liées au projet actuel

4.1       ICBC Mall Co et ICBC conviennent qu’elles ne vendront pas, directement ou indirectement, une position majoritaire dans le projet actuel, ou qu’elles ne renonceront pas au contrôle de la gestion de ce projet, avant qu’il soit achevé en grande partie mais, sous réserve de ce qui précède, il n’est pas interdit à ICBC Mall Co et à ICBC de, selon le cas :

a)         obtenir un financement à l’égard du projet actuel, tant que l’on respecte les autres conditions de la présente entente et de l’entente relative aux terrains de Surrey;

b)         conclure des coentreprises ou d’autres ententes semblables avec une ou plusieurs autres parties à l’égard de l’ensemble ou de certaines parties du projet actuel, à la condition qu’ICBC Mall Co et ICBC demeurent chacune pleinement responsables de leurs obligations respectives aux termes de la présente entente.

Ententes d’ICBC

4.2       ICBC convient, que l’une quelconque des questions mentionnées au §4.1 qui précède ait eu lieu ou non, de financer :

a)         les obligations d’ICBC Mall Co à l’égard de l’achèvement des locaux universitaires initiaux;

b)         tout paiement requis aux termes de l’entente relative aux terrains de Surrey à l’égard de la réalisation du but d’aménagement no 1 et du but d’aménagement no 2;

c)         tout remboursement ou toute remise du dépôt de sécurité exigé dans le cadre du ou des baux de TechBC, y compris la réduction du dépôt de sécurité à partir de la vingtième année de la durée de l’entente.

[23]        De plus, de nombreuses autres dispositions de cette entente imposent des obligations à ICBC à titre de partie à l’entente d’aménagement. Par exemple, le paragraphe 3.6, qui fait état des calculs du loyer de base (le texte complet est joint aux présents motifs en tant qu’annexe A), comporte une phrase indiquant que les parties ont envisagé que la superficie constructible brute destinée aux locaux locatifs de Tech BC serait d’environ 425 000 pieds carrés, et, selon l’une des dispositions portant sur les ordres de modification à la conception, soit le paragraphe 2.7, c’est ICBC, et non Mall Co, qui est incluse dans l’obligation de respecter les plans de conception et d’indiquer rapidement les changements à apporter à ces derniers. Par ailleurs, le paragraphe 3.8 dispose :

[traduction
Entente relative à la conclusion du bail

3.8       Les parties conviennent qu’elles signeront l’entente relative à la conclusion du bail à laquelle est jointe le formulaire établi du bail de TechBC et qui :

a)         prescrit de consigner les renseignements requis, à mesure qu’ils deviennent disponibles, dans certains espaces en blanc figurant dans le formulaire;

b)         indique comment certains renseignements ou montants seront obtenus ou calculés;

c)         expose de quelle façon sera réglé tout litige concernant la consignation des renseignements requis dans les espaces en blanc ou le calcul d’un montant quelconque.

[24]        Le formulaire de bail dont il est question dans l’entente d’aménagement est joint à cette entente et comporte 56 pages de clauses. Cependant, les clauses de base, qui figurent dans les quatre premières pages du document, comprennent de nombreux espaces en blanc à remplir. L’entente relative à la conclusion du bail comporte des détails sur la manière de déterminer diverses clauses essentielles du bail et de remplir les espaces en blanc sous la forme d’un bail joint à l’entente d’aménagement.

[25]        En plus d’être jointe à l’entente d’aménagement, l’entente relative à la conclusion du bail existe sous forme de document autonome, et il s’agit de la troisième entente signée en mars 2000. Les parties à cette entente étaient Mall Co et Tech BC. L’entente relative à la conclusion du bail comporte une disposition d’arbitrage obligatoire, dont voici le texte :

[traduction
a)         En cas de litige au sujet de la façon de remplir une partie quelconque du bail visé par la présente entente, le litige sera réglé par voie d’arbitrage comme l’envisage l’
entente d’aménagement, mais les clauses du bail continueront de s’appliquer. Si le litige porte sur une question de nature financière, le preneur à bail paiera le montant précisé. [Non souligné dans l’original.]

b)         Dans l’attente de règlement de tout litige concernant le formulaire du bail, le preneur à bail occupera les locaux loués à bail aux conditions (lesquelles comprennent le paiement du loyer) précisées par le bailleur et, après avoir reçu une décision finale par suite de tout arbitrage ou de toute entente de la part des parties, ces dernières feront les rajustements nécessaires, y compris, le cas échéant, le paiement d’intérêts au taux d’intérêt par défaut qui s’appliquera aux montants rajustés.

c)         Au moment de remplir le formulaire du bail, toutes les dispositions ou les instructions présentées entre crochets doivent être supprimées.

d)         Les parties conviennent d’agir de manière raisonnable, avec diligence et de bonne foi en vue de régler au moment opportun les problèmes que sont susceptibles de poser les documents requis dans les présentes ou de régler tout litige ou toute différence concernant la manière de remplir le formulaire du bail.

[26]        Tel était l’état des ententes à l’époque où la construction du projet a débuté. Selon le témoin de l’appelante, la construction du bâtiment conçu pour répondre aux besoins particuliers de Tech BC, était à moitié terminée à peu près en février 2002, quand la Province a annoncé que Tech BC n’exploiterait plus une université et ne s’acquitterait pas de son obligation de signer le bail en question. Une lettre d’ICBC, signée par le président-directeur général en mai 2002, et destinée au sous-ministre des Finances de la province de la Colombie-Britannique,  confirme qu’en février 2002 le gouvernement avait décidé que Tech BC n’occuperait pas les locaux en question. La lettre fait référence au règlement proposé par ICBC, à savoir que le gouvernement paierait à cette dernière la somme de 41,1 M$ pour qu’ICBC libère Tech BC et la Couronne de leurs obligations. Il est fait référence au bail conclu entre Tech BC et la filiale d’ICBC, ainsi qu’aux frais engagés ou promis à l’égard desquels il n’y avait aucune valeur correspondante ou possibilité d’atténuation. En dépit d’une réduction probable et notée de la valeur du bien, la lettre indique qu’ICBC convenait de rembourser des fonds si elle recouvrait plus tard ses coûts selon la valeur actualisée une fois les dépenses payées et, de plus, après un remboursement complet, ICBC partagerait tout montant additionnel en parts égales. Une lettre d’engagement par laquelle le gouvernement souscrivait à ces conditions a censément été transmise à ICBC.

[27]        Le 16 juillet 2002, ICBC, Mall Co, Tech BC, IPL et la Province, représentée par le ministère autorisé, ont conclu une transaction par laquelle Tech BC convenait de payer à ICNC la somme de 41,1 M$, pour son compte et celui de la Province. Le paiement de dotation effectué à Tech BC, d’un montant de 1,625 M$, n’avait pas à être remboursé. En échange, ICBC, IPL et Mall Co libéraient Tech BC et la Province de toutes leurs obligations visées par les ententes de mars 2000 et toutes les ententes connexes (c.-à-d., une indemnisation contre les poursuites d’autres preneurs à bail du centre commercial Surrey).

[28]        Le préambule de l’entente de règlement reconnaît que toutes les parties au règlement ont participé à une série d’ententes concernant l’acquisition et l’aménagement de terrains dans la Ville de Surrey. La transaction constitue, à l’évidence, le règlement définitif de l’ensemble des ententes, des droits et des obligations de toutes les parties à ces diverses ententes. Tech BC et la Province ont renoncé à la totalité de leurs droits sur toutes les phases du projet, sauf le fait de réserver certains locaux loués qui seraient cédés à l’Université Simon-Fraser. ICBC s’engage à assumer la responsabilité financière des obligations des deux filiales d’ICBC.

[29]        La transaction comporte cinq parties. Les parties 2, 3 et 4 ainsi que deux paragraphes de la partie 5 sont reproduits ci-dessous.

[traduction

PARTIE 2
OBLIGATIONS DE PAIEMENT

2.1       Tech BC, pour son propre compte, ainsi que pour le compte et au nom de la Province, convient par les présentes de payer à ICBC, ou à son représentant, les fonds de règlement à la signature de la présente entente.

2.2.      Les parties reconnaissent et conviennent que leurs ententes et obligations respectives décrites dans la présente entente sont subordonnés au paiement des fonds de règlement par Tech BC à ICBC et que les droits et les obligations respectifs qui sont décrits dans les présentes n’entreront pas en vigueur avant que ce paiement soit fait.

PARTIE 3
DROITS CÉDÉS

3.1       Tech BC et la Province renoncent par les présentes, en faveur des sociétés ICBC, à la totalité de leurs droits, titres et participations, de quelque manière que ce soit, à l’égard de l’aménagement et de l’utilisation de n’importe quelle partie du projet de Central City Development.

3.2       Malgré la généralité de ce qui précède, Tech BC cède à ICBC Mall Co la totalité de ses droits, titres et participations visés par l’entente mutuelle en matière de dotation et d’objectifs.

3.3       Malgré la portée générale du §3.1, la Province et Tech BC cèdent par les présentes aux société ICBC la totalité des droits et des avantages qui leur reviennent respectivement ou à l’une ou l’autre d’entre elles en vertu des ententes relatives à Tech BC.

3.4       Indépendamment de toute autre condition de la présente entente, rien dans celle-ci n’a un effet quelconque sur les baux indiqués à l’annexe « A » signés entre Tech BC et ICBC Mall Co à l’égard des locaux situés dans le projet de Central City Development, lesquels baux sont cédés par Tech BC à l’Université Simon-Fraser.

PARTIE 4
LIBÉRATIONS ET INDEMNISATIONS

4.1       Les sociétés ICBC souscrivent à la cession, par la Province et par Tech BC, de la totalité de leurs participations respectives dans les ententes relatives à Tech BC ainsi que dans le projet de Central City Development, et elles reconnaissent que la participation de la Province et de Tech BC dans le projet de Central City Development est annulée et que la totalité des obligations respectives que les ententes relatives à Tech BC imposent à la Province et à Tech BC prennent fin et sont inopérantes.

4.2       En signant la présente entente, les sociétés ICBC libèrent la Province et Tech BC de toute responsabilité à l’égard des pertes, dommages, coûts et dépenses subis ou assumés par les sociétés ICBC par suite de la cessation de la participation de la Province et de Tech BC au projet de Central City Development.

4.3       Les sociétés ICBC libèrent par ailleurs la Province et Tech BC, et chacune d’elles, de toute obligation de participer davantage aux ententes relatives à Tech BC, de même que de l’une quelconque des obligations qui y sont imposées à la Province et à Tech BC.

4.4       Les sociétés ICBC conviennent par les présentes d’indemniser la Province et Tech BC de toutes les réclamations et moyens susceptibles d’être élevés à l’encontre de la Province et de Tech BC par suite de l’annulation, par la Province et Tech BC, de leur participation respective dans le projet de Central City Development, et ce, par, selon le cas :

a)         la Ville de Surrey;

b)         les locataires actuels ou éventuels du projet de Central City Development;

c)         les autres parties ayant subi des dommages par suite de la décision selon laquelle ni Tech BC ni les sociétés ICBC n’occuperont le projet de Central City Development, dans la mesure où ces parties envisageaient initialement de le faire;

il est toutefois entendu que les sociétés ICBC n’indemniseront pas la Province et Tech BC de toute réclamation ou cause d’action découlant de ce qui suit :

d)         les ententes conclues ou les engagements pris par la Province ou Tech BC avec des parties autres que la Ville de Surrey, y compris, notamment, les ententes conclues avec des fournisseurs ou des entrepreneurs en construction en rapport avec la construction, l’aménagement, l’entretien ou la fourniture des locaux de Tech BC au projet de Central City Development,

e)         les activités ou les activités proposées de Tech BC à titre d’établissement d’enseignement, y compris les réclamations faites par des employés, des syndicats, des organismes professionnels, des étudiants ou d’éventuels étudiants.

4.5       Malgré la portée générale des alinéas qui précèdent, les sociétés ICBC reconnaissent que ni la Province ni Tech BC ne sont tenues de leur rembourser une part quelconque du paiement de dotation initial.

4.6       ICBC s’engage expressément par les présentes à assumer la responsabilité financière des obligations des sociétés ICBC qui sont décrites dans les présentes, et elle convient que si l’une quelconque des sociétés ICBC est appelée à payer des fonds conformément à l’entente d’indemnisation prévue dans les présentes, et si, pour une raison quelconque, il lui est impossible de le faire, elle effectuera les paiements en question, comme l’auraient fait les autres sociétés ICBC si elles avaient été capables de le faire.

4.7       La Province et Tech BC reconnaissent et conviennent que la totalité des obligations respectives envers la Province et Tech BC que les ententes relatives à Tech BC imposent aux sociétés ICBC prennent fin et sont inopérantes.

4.8       La Province et Tech BC libèrent les sociétés ICBC, et chacune d’elles, de toute obligation de participer davantage aux ententes relatives à Tech BC, ainsi que de l’une quelconque des obligations envers la Province et Tech BC qui sont imposées aux sociétés ICBC.

PARTIE 5
DISPOSITIONS GÉNÉRALES

5.1       La présente entente a pour objet d’accorder aux parties une libération mutuelle complète et intégrale à l’égard des obligations que prévoient les ententes relatives à Tech BC.

5.2       Le paiement par la Province des fonds de règlement vise à libérer entièrement la Province et Tech BC de toute autre participation et responsabilité à l’égard des ententes relatives à Tech BC et du projet de Central City Development.

[30]        La transaction était muette en ce qui concerne la TPS.

[31]        Comme il a déjà été signalé, ICBC a tout d’abord été l’objet d’une cotisation concernant la partie de TPS réputée du paiement, en vertu du paragraphe 182(1) de la Loi. Un jugement sur consentement a été rendu en faveur d’ICBC, et une cotisation correspondante a été établie à l’encontre de l’appelante.

Les observations de l’appelante

[32]        L’appelante soutient que l’entente d’aménagement était un [traduction] « engagement à conclure un accord » non valide. Le fondement de cet argument est que, au cœur même de cette entente, il existe un formulaire de bail annexé qui n’a jamais pris naissance – c’est-à-dire, qu’il n’y a jamais eu de véritable bail en vigueur. Elle allègue que l’entente d’aménagement n’indiquait pas le loyer à payer. Les formules de calcul du loyer étaient soumises à des rajustements précisés et à venir, mais inconnus, ainsi qu’à [traduction] « tout autre montant dont Tech BC et Mall Co peuvent convenir »[9]. Une abondante jurisprudence est citée à l’appui de la doctrine selon laquelle le montant du loyer est un élément essentiel d’un bail valide. Le ministre n’a jamais présumé que les parties avaient convenu du loyer.

[33]        À titre d’argument distinct, mais connexe, l’appelante soutient que si l’entente d’aménagement est une entente valide, il n’y a toujours pas de « fourniture ». La fourniture présumée est le bail. Cependant, il s’agit d’un bail à venir, et un bail à venir n’est pas une fourniture. L’article 133 dispose que la conclusion d’une convention relative à la fourniture d’un bien est une fourniture immédiate, mais cela n’inclut pas un formulaire de bail annexé mais non encore « finalisé ».

[34]        L’appelante soutient par ailleurs que si la Cour conclut que l’entente d’aménagement était une entente valide, il s’ensuit que le paragraphe 182(1) ne joue toujours pas car la partie qui a manqué à l’entente, Tech BC, était le fournisseur applicable et non le bénéficiaire. Elle ajoute que Tech BC a procuré à Mall Co le droit de forcer cette dernière à conclure le bail et à être la locataire clé du centre commercial proposé. C’est donc dire que le paiement a été effectué par le fournisseur prévu dans le cadre de l’entente d’aménagement. La disposition d’assujettissement ne s’applique pas si c’est le fournisseur qui effectue le paiement[10].

[35]        De plus, l’appelante soutient que le paiement n’a pas été « payé » à Mall Co, mais à ICBC, et que le mot « payé » doit vouloir dire « réellement payé ». Le paragraphe 182(1) fait abstraction du raisonnement qui sous-tend le fait que c’est l’inscrit qui est payé, mais uniquement de l’identité de celui qui est payé. L’appelante souligne l’existence de preuves abondantes dont il ressort que le paiement a en fait été fait à ICBC et non à Mall Co. Elle se fonde sur une concession de la Couronne selon laquelle ICBC n’a pas reçu le paiement à titre de mandataire ou de fiduciaire de Mall Co et elle affirme que, dans ce cas-ci, l’obligation juridique consistait uniquement à effectuer le paiement à ICBC et non à Mall Co. Ces fournitures ultérieures de fonds par ICBC à Mall Co pour la construction du centre commercial constituaient des opérations distinctes.

[36]        L’appelante soutient par ailleurs que l’article 17 de la Technical University of British Columbia Act (la « Tech BC Act ») dispose : [traduction] « L’Université n’est assujettie à l’impôt que dans la mesure où l’est le gouvernement ». Il est soutenu que cela veut dire que si la province de Colombie-Britannique n’est pas redevable de la taxe prévue à l’article 165 de la Loi à titre de bénéficiaire de la fourniture, il s’ensuit que Tech BC ne l’est pas non plus. L’appelante souligne que, aux termes de l’alinéa 122b) de la Loi et de l’article 125 de la Loi constitutionnelle, la Province n’aurait pas à payer de taxes à titre de bénéficiaire d’une fourniture.

[37]        Enfin, en réponse au fait que l’intimée se fonde sur le fait que la dette de Mall Co envers IPL a été réduite « par suite » du paiement, l’appelante invoque la jurisprudence Dieni c. La Reine[11]. Elle soutient que le lien de causalité entre la réduction de la dette et le paiement est trop flou pour répondre à l’exigence du paragraphe 182(1).

Les observations de l’intimée

[38]        L’intimée soutient que les conditions à remplir pour que le paragraphe 182(1) s’applique sont toutes réunies en l’espèce.

[39]        L’intimée soutient que même si Tech BC a pu avoir fait le paiement à ICBC, en conséquence, Mall Co devait 41,1 M$ de moins à IPL. Outre la thèse selon laquelle Mall Co a reçu de manière implicite le paiement en raison du droit qu’elle avait, de l’avantage indirect reçu et de l’acquiescement quant à l’endroit où irait le paiement, on défend une lecture large de la disposition en question en vue d’englober tous les paiements effectués, ainsi que toutes les réductions des dettes de l’inscrit occasionnées, par suite de la cessation d’une entente relative à la réalisation d’une fourniture taxable. Le libellé de la disposition n’exige pas que le bénéficiaire de la fourniture soit la personne qui a effectué le paiement au fournisseur inscrit. Dans le même ordre d’idées, le libellé de la disposition n’exige pas que la dette soit réduite par une dette envers le bénéficiaire prévu de la fourniture. Une portée aussi large pour l’application de la disposition en question devrait donc comporter l’intention d’inclure un paiement destiné à une tierce partie dans les cas où ce paiement réduit une créance du fournisseur inscrit. De plus, il est signalé que, lorsque le bénéficiaire prévu de la fourniture n’est pas la personne qui effectue le paiement au fournisseur inscrit, le bénéficiaire prévu de la fourniture obtient le crédit de taxe sur les intrants (« CTI »). De même, lorsque la créance réduite n’est pas une créance envers le bénéficiaire prévu de la fourniture, c’est le bénéficiaire prévu de la fourniture qui obtient le CTI[12]. L’intégrité du système exige que la partie qui reçoit le CTI doit être perçue comme étant le payeur et que le bénéficiaire doit être considéré comme le fournisseur inscrit. Sans cela, il n’y aurait aucune taxe pour compenser le CTI. De plus, on mettrait en échec l’objet du paragraphe 182(1) si l’inscrit pouvait l’éviter en autorisant qu’un paiement de cessation soit orienté vers un créancier ou une partie liée tout en bénéficiant, néanmoins, de son avantage financier.

[40]        Le paiement était un substitut économique du loyer qu’il aurait fallu payer[13]. Une appréciation, fondée sur le bon sens, de toutes les circonstances entourant la présente affaire montre que le paiement était destiné à remplacer une obligation en matière de loyer, une obligation que toutes les ententes pertinentes imposaient à Tech BC pour ce qui était de payer le locateur, Mall Co[14]. Comme en témoigne la correspondance relative au règlement, il est constant que le paiement avait pour but de compenser le défaut de Tech BC de conclure le bail et de s’acquitter de ses obligations envers Mall Co. Cela dit, le paiement doit être taxé en conséquence. Il s’agit là de l’intention évidente de la disposition en question et il faut donner effet à cette intention. À l’appui de cet argument, l’intimée soutient que Mall Co a été constituée en société en vue de posséder et d’exploiter le centre commercial pour son propre compte et que les obligations fondamentales prévues par les ententes visaient Tech BC et Mall Co. Cette obligation consistait à payer un loyer. Les obligations des autres parties étaient simplement accessoires. En présentant cet argument de manière légèrement différente, il est allégué qu’en acceptant que Tech BC répudie le bail, Mall Co avait droit à des dommages-intérêts compensatoires liés aux frais engagés pour répondre aux besoins de location à bail spéciaux de Tech BC, aux frais découlant de la remise en état du bâtiment et au manque à gagner. Le paiement a éteint le droit de Mall Co à des dommages-intérêts compensatoires et a profité à Mall Co en réduisant ses créances en amont.

[41]        Par ailleurs, l’intimée soutient qu’ICBC n’avait aucun droit juridique au paiement et qu’elle n’a donc subi aucune perte directe. Toute perte subie était fondée sur la valeur perdue du centre commercial ou de ses biens. ICBC est intervenue pour le compte de Mall Co à l’égard de sa participation au règlement. Elle n’a tiré aucun avantage net du paiement. Le fait d’avoir indiqué où le paiement devait être fait ne peut pas être déterminant quant à la question en litige. Le fait de payer ICBC a acquitté l’obligation de cette dernière envers Mall Co, et cela suffit pour satisfaire à l’exigence à laquelle donne lieu le mot « payé » au paragraphe 182(1). Cette interprétation du mot « payé » cadre avec l’intention du législateur.

[42]        L’intimée soutient que la fourniture à Mall Co d’un droit à un bail constituait une fourniture taxable. Un droit à un bail est un « bien ». Le bail lui-même n’est pas un bien mais il s’agit de la façon de fournir un bien. Il est reconnu que le droit à un bail ne prend naissance que lorsque les parties ont convenu de ses conditions importantes essentielles. Cependant, il est allégué que toutes ces conditions étaient suffisamment certaines pour lier les parties et que s’il y avait une différence d’opinion sur quelques points, le recours à l’arbitrage la réglerait. Mall Co et Tech BC envisageaient de conclure un contrat de bail ayant force obligatoire et se sont comportées en conséquence.

[43]        S’il est reconnu que le paiement a été effectué par suite de la résiliation des diverses ententes, il est allégué que les parties l’ont négocié pour compenser le fait que Tech BC avait mis fin à son obligation de louer à bail les locaux de Mall Co. Par contre, il est également allégué que le paiement a été fait pour compenser l’extinction du droit qu’avait Tech BC d’utiliser les locaux.

[44]        Répondant à l’argument de l’appelante selon laquelle Tech BC était le fournisseur, l’intimée soutient que cet argument est sans pertinence. Quant à l’argument de l’appelante selon lequel le paiement est revêtu de l’immunité accordée à la Couronne, l’intimée soutient que Tech BC a effectué le paiement pour son propre compte et que le gouvernement de la Colombie-Britannique ne devait aucune indemnisation envers ICBC ou Mall Co en rapport avec l’extinction de l’obligation relative au bail. L’immunité fiscale dont bénéficie la Couronne ne protège pas Tech BC, sauf si celle-ci a effectué le paiement pour le compte de la Province à titre de mandataire. Tech BC n’était ni la mandataire de la Couronne ni de la Province à quelque titre que ce soit. Il faudrait que tout argument fondé sur l’existence d’une relation de mandataire s’appuie sur une disposition expresse dans la loi habilitante ou sur une preuve claire du contrôle qu’exerçait la Province sur le mandat et les activités du mandataire. Ni l’un ni l’autre de ces deux cas n’ont été établis en l’espèce.

[45]        L’intimée soutient, dans l’ensemble, qu’il incombe à Mall Co de verser les taxes censément perçues sur le paiement, conformément à la formule exposée au paragraphe 182(1). L’intimée demande que l’appel soit rejeté, avec dépens.

La question des preuves

[46]        Dans ses actes de procédure, l’appelante a admis que, dans le cadre de l’entente d’aménagement, Tech BC avait convenu de lui payer un loyer mensuel de 426 630 $. L’intimée a admis cette déclaration dans ses actes de plaidoirie[15]. À l’audience, l’intimée s’est opposée au fait que l’appelante tente de faire valoir, en se fondant sur des preuves présentées à l’audience, qu’à l’époque où l’entente d’aménagement et l’entente relative à la conclusion du bail avaient été signées avec le formulaire du bail annexé, aucun loyer mensuel fixe n’avait été convenu. On dit que l’admission lie la partie qui l’a faite et cela dispense de l’obligation de  faire la preuve des faits admis. Autoriser le retrait de cette admission aurait pour effet de changer radicalement la nature de la question controversée; ce serait non seulement  contraire aux Règles de la Cour[16] et à la common law mais constituerait aussi un abus de procédure.

[47]        Aucun avis n’a été donné au sujet de l’intention de l’appelante de soulever la question de savoir si le loyer avait été fixé, et elle n’a pas sollicité d’ordonnance en vue de faire retirer son admission ou de modifier son acte de plaidoirie. L’intimée soutient que les changements tardifs dans les admissions de faits et le préjudice qui en découle appellent le maintien de l’admission. Le préjudice est irréparable car elle a perdu la chance d’analyser la question plus en détail dans le cadre d’interrogatoires préalables et de produire une preuve contextuelle au sujet des interprétations des diverses parties.

[48]        L’appelante soutient qu’il n’y a eu aucune admission au sujet du loyer réellement fixé mais plutôt qu’il n’y a eu qu’une réitération des références faites au montant de loyer mensuel, indiqué dans les ententes en question, qui pouvait être modifié et n’était pas fixe et que, en tout état de cause, la question de savoir si le loyer était suffisamment fixe pour constituer une condition obligatoire d’une entente, par opposition au fait de justifier une conclusion selon laquelle il n’existait qu’un engagement à conclure une entente, est une question de droit à l’égard de laquelle aucune admission ne peut être faite. L’intimée répond que même si le loyer est une question de droit, les actes de plaidoirie n’en ont pas fait de cas.

[49]        L’appelante soutient par ailleurs que ce sont des instances antérieures qui ont attiré l’attention de l’intimée sur la question et que l’intimée a examiné cette question lors du contre-interrogatoire du témoin de l’appelante, dans le cadre de l’audition du présent appel. L’intimée répond qu’il ressort des instances antérieures, par contraste avec les actes de plaidoirie, que les questions qui étaient en litige dans ces instances ne l’étaient pas en l’espèce et que le contre‑interrogatoire du témoin de l’appelante n’avait ni soulevé la question ni donné une possibilité suffisante de traiter de la question, soulevée seulement dans le cadre des débats.

[50]        Les diverses jurisprudences que l’appelante a invoquées ont été écartées par l’intimée[17].

Les dispositions législatives applicables

[51]        Le paragraphe 182(1) de la Loi dispose :

Renonciation et remise de dette

182. (1) Pour l’application de la présente partie, dans le cas où, à un moment donné, par suite de l’inexécution, de la modification ou de la résiliation, après 1990, d’une convention portant sur la réalisation d’une fourniture taxable au Canada, sauf une fourniture détaxée, par un inscrit au profit d’une personne, un montant est payé à l’inscrit, ou fait l’objet d’une renonciation en sa faveur, autrement qu’à titre de contrepartie de la fourniture, ou encore une dette ou autre obligation de l’inscrit est réduite ou remise sans paiement au titre de la dette ou de l’obligation, les présomptions suivantes s’appliquent :

a) la personne est réputée avoir payé, au moment donné, un montant de contrepartie pour la fourniture égal au résultat du calcul suivant :

(A/B) × C

A         représente 100 %,

B         le pourcentage suivant :

(i) si la taxe prévue au paragraphe 165(2) était payable relativement à la fourniture, la somme de 100%, du taux fixé au paragraphe 165(1) et du taux de taxe applicable à la province participante où la fourniture a été effectuée,

(ii) dans les autres cas, la somme de 100% et du taux fixé au paragraphe 165(1),

C         le montant payé, ayant fait l’objet de la renonciation ou remis, ou le montant dont la dette ou l’obligation a été réduite;

b) la personne est réputée avoir payé, et l’inscrit avoir perçu, au moment donné, la totalité de la taxe relative à la fourniture qui est calculée sur cette contrepartie, laquelle taxe est réputée égale au montant suivant :

(i) si la taxe prévue au paragraphe 165(2) était payable relativement à la fourniture, le total des taxes prévues à ce paragraphe et au paragraphe 165(1) calculées sur cette contrepartie,

(ii) dans les autres cas, la taxe prévue au paragraphe 165(1), calculée sur cette contrepartie.

[52]        Bref, lorsque l’inscrit convient d’effectuer une fourniture taxable à une personne et que, par suite de l’inexécution, de la modification ou de la résiliation de cette entente, un montant est payé à l’inscrit autrement qu’à titre de contrepartie de la fourniture, l’intéressé est réputé avoir payé pour la fourniture un montant de contrepartie qui inclut la TPS, et l’inscrit est réputé avoir perçu ce montant de taxe à l’égard de la fourniture et est tenu de le verser. La cotisation vise à faire confirmer cette obligation de versement imposée à Mall Co au motif qu’elle a convenu d’effectuer une fourniture taxable à Tech BC et que, comme Tech BC a renié l’engagement qu’elle avait pris dans le cadre de cette entente, un paiement incluant la TPS est réputé avoir été fait à Mall Co.

Analyse

Précision des questions en litige

[53]        Bien que j’aie structuré mon analyse des diverses questions qui sont en cause dans le présent appel sous les rubriques distinctes qui sont mentionnées ci‑après, il serait utile de situer deux de ces questions dans leur contexte : l’existence d’un bail ayant force exécutoire et le bénéficiaire du paiement.

[54]        Manifestement, il n’est pas controversé entre les parties que la fourniture taxable en litige est le bail. Mon analyse respectera ce consensus, mais elle révélera aussi qu’il est possible de considérer que le paiement a été fait à l’égard d’un service différent de celui qu’ICBC a fourni à la Province. En ce qui concerne le présent appel, la Loi définit le « service » comme étant tout ce qui n’est pas un bien ou de l’argent. Compte tenu de cette définition large, il ressort de mon analyse qu’ICBC et la Province se sont échangées des engagements mutuels qu’ICBC a honorés, mais pas la Province. Si tel est le cas et si le paiement destiné à ICBC a été fait par la Province en rapport avec un service qu’ICBC a fourni à la Province, il s’ensuit que le paragraphe 182(1) ne peut pas servir à imposer une obligation fiscale à Mall Co. Cela dit, même si mon analyse explicitera cette approche, comme l’exigent mes constations de fait, elle concorde aussi avec la conclusion selon laquelle ICBC avait elle aussi le droit de recevoir le paiement de la Province en rapport avec l’inexécution de la convention portant sur la réalisation de la fourniture taxable en litige, c’est-à-dire le bail.

[55]        Pour ce qui est de la conclusion selon laquelle ICBC a reçu le paiement pour son propre compte, je signale que même si l’appelante disjoint ses arguments en rapport avec la question du bail et avec la question du paiement, il s’agit manifestement d’arguments complémentaires. C’est-à-dire que l’argument selon lequel le paiement a été fait à ICBC pour son propre compte est renforcé s’il n’y a pas de bail.

[56]        Par exemple, ce que l’appelante a soutenu à l’audience, à savoir que le calcul du montant du paiement n’avait rien à voir avec le loyer perdu, aurait non seulement pour effet d’illustrer que le paiement n’était pas rattaché à un bail ayant force obligatoire mais aussi de faire ressortir le droit d’ICBC au paiement. Je conviens qu’il paraît évident que le paiement a été calculé simplement comme égal à 50 % du montant de 82,2 M$, soit le budget de construction de base de 82,9 M$ moins la somme de 700 000 $ au titre de l’obligation incitative à la prise à bail. Cependant, la façon dont le montant des dommages est calculée est sans importance s’il est à payer à l’appelante à cause du défaut de payer le loyer. Le paragraphe 182(1) exige simplement que le paiement soit effectué par suite de la résiliation d’une convention portant sur une fourniture taxable qu’un inscrit a convenu d’effectuer. L’appelante infère donc que ce qu’il faut retirer de la méthode de calcul du montant du paiement des dommages est qu’il était fondé sur les exigences en matière d’investissement d’ICBC. Cette exigence n’était pas une simple garantie, il s’agissait d’une dépense de financement réelle, souscrite par voie contractuelle, à l’égard d’un bâtiment en construction[18]. Il était impossible de revenir en arrière. Les ententes étaient suffisantes pour qu’ICBC ait qualité pour demander et recevoir des dommages-intérêts, indépendamment des droits que pouvait détenir Mall Co. Le fait qu’ICBC pouvait être indirectement indemnisée si le paiement avait été fait à Mall Co ne devrait pas occulter le droit d’ICBC au paiement et de sa réception pour son propre compte.

[57]        En revanche, la conclusion selon laquelle il existait un bail ayant force exécutoire à l’époque où l’entente relative à la conclusion du bail avait été conclue ne porte pas un coup fatal à la thèse de l’appelante selon laquelle ICBC était en droit de recevoir le paiement pour son propre compte. Le fait que l’appelante bénéficiait d’un droit résultant de la résiliation d’un bail existant n’exclut pas la conclusion qu’ICBC jouissait d’un droit semblable, du fait de son engagement à effectuer un investissement. Même s’il existe ici un ensemble de droits et d’obligations entre divers intervenants, l’appelante soutient essentiellement que,  même s’il y a un bail existant, les conditions expresses du règlement, exigeant qu’un paiement soit fait à ICBC, doivent être acceptées comme reflétant son droit avec exactitude.

[58]        Tout en gardant à l’esprit ces observations, j’analyserai l’affaire sous les sept rubriques suivantes :

A.               La question des preuves

B.               Le bail

C.               Le paiement

D.               La réduction de la dette

E.                Tech BC en tant que fournisseur d’une fourniture taxable

F.                La protection constitutionnelle dont bénéficie la Province contre toute obligation en vertu de la Loi.

G.               Les conclusions

A.   La question des preuves

[59]        Comme il a été signalé plus haut, l’intimée s’est opposée à ce que l’appelante soulève ce qui, a-t-il été affirmé, constituait une question nouvelle : l’appelante pouvait-elle faire valoir qu’il n’y avait pas de bail valide parce que le tarif de location à bail ou le montant du loyer mensuel n’avait pas été fixé? Selon l’intimée, les actes de plaidoirie confirmaient que le tarif de location à bail avait été fixé et qu’il n’était pas controversé.

[60]        En bref, je retiens la thèse de l’appelante sur ce point. L’avis d’appel, lu dans son ensemble, met clairement en cause la question de savoir s’il existait une convention de bail exécutoire à l’égard de laquelle le paragraphe 182(1) de la Loi pouvait s’appliquer. L’argument invoqué à l’appui de la conclusion qu’il n’existait qu’un engagement à conclure une entente remet en question, en soi, le fait de savoir si un montant ou une formule de loyer prescrits avaient été fixés. Sinon, il manque une condition essentielle d’un bail, et il n’existe pas de convention de bail exécutoire. Il n’existe plutôt qu’un engagement à convenir d’une convention de bail, ce qui est le fondement de l’argument de l’appelante selon lequel elle n’a effectué aucune fourniture taxable.

[61]        En revanche, il est loisible à l’intimée de faire valoir que le calcul du loyer est suffisamment précis pour satisfaire à l’exigence selon laquelle le montant du loyer, à titre de condition essentielle d’un bail, avait été convenu. D’ailleurs, l’intimée avait en main une preuve documentaire suffisante pour invoquer utilement cet argument, et elle l’a fait. Selon moi, cette apparition tardive d’une nouvelle question litigieuse est peu préjudiciable. L’intimée peut aussi se fonder sur l’hypothèse, formulée dans la réplique, selon laquelle l’appelante avait convenu de louer à bail à Tech BC les locaux initiaux de Tech BC[19]. Cette hypothèse tient intrinsèquement pour acquis que toutes les conditions essentielles à la création d’un bail exécutoire étaient réunies. À moins d’une preuve contraire de la part de l’appelante, il me faudrait conclure qu’il existait bel et bien un bail et que l’on pourrait donc se fonder sur l’article 133 de la Loi, cité dans les observations de l’intimée, même s’il n’existe qu’une entente relative à la conclusion de ce bail. Aux termes de l’article 133, la fourniture objet d’une convention est réputée effectuée à la date de conclusion de cette convention.

[62]        Cela dit, à mon sens, cette question est purement théorique. Je conclus que l’appelante ne s’est pas acquittée de son fardeau de miner l’hypothèse selon laquelle il existait une convention de bail exécutoire à l’époque où a été conclue l’entente relative à la conclusion du bail.

[63]        D’ailleurs, bien au contraire, vu la preuve, je conclus qu’il existait une entente applicable et exécutoire au sujet de la conclusion du bail à l’époque où a été conclue l’entente relative à la conclusion du bail. Il existait donc, comme le prescrit l’article 133, une convention portant sur la réalisation d’une fourniture taxable à l’époque où l’entente relative à la conclusion du bail a été signée. Je reviendrai sur cette conclusion sous la rubrique suivante.

B.    Le bail

[64]        À mon avis, tous les renseignements nécessaires pour remplir les espaces en blanc dans le formulaire de bail annexé étaient faciles à déterminer et, s’il se produisait un problème quelconque, il était clair, en lisant de concert toutes les ententes, notamment l’entente d’aménagement et l’entente relative à la conclusion du bail, que ces questions étaient, par la voie d’une formule ou d’autres paramètres prescrits, suffisamment détaillées pour qu’il soit possible de les régler sans devoir soutenir qu’un tribunal aurait à intégrer des conditions essentielles mais absentes[20]. Les éléments essentiels du bail étaient tous prévus : les parties, les lieux, la date de début, la durée et le loyer[21]. Le sentiment d’aise des parties face à l’idée qu’il existait un bail ayant force exécutoire ou une entente relative à la conclusion d’un bail, et ce, à des conditions déterminables et exécutoires, se reflète dans les dispositions d’arbitrage obligatoire présentes dans chaque entente[22] ainsi que dans la conduite des parties qui, par ricochet, reflète l’intention qu’elles avaient d’être liées[23]. Vu la signature de l’entente relative à la conclusion du bail, suivie de l’exécution par les parties de divers engagements imposés dans le cadre des diverses ententes et, en fin de compte aussi, l’entente de règlement elle-même, tous ces éléments attestent l’intention d’être liées par le bail.

[65]        Pour être plus précis, et en me concentrant sur ce qui était essentiellement le seul élément contractuel du bail que les parties remettaient en cause, soit le tarif de location à bail ou le montant du loyer, je conclus, comme il a été mentionné plus tôt, qu’il y avait en place une entente de formulation du loyer établie en 2009, avant que les diverses ententes soient signées. Les formules de fixation du loyer ont ensuite été fixées de manière définitive en mars 2010. Les seules modifications importantes possibles ou dignes de mention étaient celles causées par les frais réels de financement des travaux de construction et les changements de prix dus aux demandes de changement de Tech BC. Il n’existait aucune entente portant sur les frais de rajustement, mais il ne semble pas être exigé que les changements devaient être faits tels qu’ils étaient demandés. Subsidiairement, s’il n’y avait aucune entente portant sur les frais de rajustement, ce qui redéterminerait le loyer, il y avait en place des dispositions en matière d’arbitrage obligatoire en vue de régler la question.

[66]        En fait, l’entente relative à la conclusion du bail elle-même fait largement état de l’existence de l’intention de créer des droits et des obligations opposables. L’existence de cette entente et, quant à cela, l’existence de l’entente d’aménagement, qui est fondée sur le bail, sont incompatibles avec une conclusion selon laquelle il existait, en l’espèce, un engagement à conclure une entente qui n’était pas exécutoire. Les références faites à toutes les jurisprudences portant sur la question de savoir à quel moment un bail devient – ou non - une entente ayant force exécutoire, des décisions que les parties ont citées[24], ne m’ont pas convaincu du contraire au vu des faits de l’espèce. Ces jurisprudences enseignent uniquement qu’il s’agit d’une question de fait.

[67]        Les faits de l’espèce, tels que je les ai constatés, sont que Tech BC était tenue, en droit, d’occuper des locaux suffisamment définis à une date de début aisément déterminable, à un loyer vérifiable convenu et pendant une durée précisée. C’est-à-dire que les conditions du formulaire de bail annexé, lues de pair, le cas échéant, avec l’entente d’aménagement et l’entente relative à la conclusion du bail, ne sont pas dépourvues de la certitude qui est nécessaire pour former une entente ayant force de loi. Comme je l’ai dit, la formule de calcul du loyer - le nœud du litige opposant les parties - ne saurait donner lieu à des incertitudes qu’il serait impossible de régler en fonction d’objectifs et de principes clairement définis. Ces documents guideraient, voire dirigeraient, l’arbitre, s’il s’avérait nécessaire de recourir à l’arbitrage, en offrant une feuille de route permettant de déterminer l’ensemble des droits et des obligations des parties en fonction des principes clairs convenus dans ces documents. Comme je l’ai dit, toutes les parties aux diverses ententes envisageaient et comprenaient qu’il existait une convention de bail ayant force de loi. Toutes se fondaient sur le fait qu’il existait un engagement de location à bail ayant force de loi, et ce, à des conditions suffisamment détaillées pour garantir ce résultat. Soutenir le contraire, comme l’a fait l’avocat de l’appelante, n’est qu’argutie.

[68]        Les questions plus complexes qui se posent en l’espèce sont les suivantes : qui peut obliger à respecter le bail et qui subit un préjudice en cas d’inexécution de celui-ci?

[69]        L’appelante n’a pas fait valoir, sinon indirectement ou implicitement, qu’ICBC avait le droit de faire respecter le bail, mais c’est en réalité ce fait-là qui se trouve au cœur même de la question qui est en litige en l’espèce. Est-il possible que l’appelante, en formulant directement cet argument, irait à l’encontre d’instances antérieures qui portaient sur une cotisation relative à l’assujettissement d’ICBC en application du paragraphe 182(1)? Cependant, quoi qu’il en soit, il n’y a rien dans ces instances antérieures qui impose forcément un point de vue particulier sur les droits et les voies de recours des parties en l’espèce.

[70]        À mon avis, ICBC avait effectivement le droit de faire respecter le bail et elle a manifestement subi un préjudice du fait de son inexécution, comme nous le verrons sous la rubrique suivante.

C.   Le paiement

[71]        Le paragraphe 182(1) vise clairement de la réalisation d’une fourniture par un inscrit au profit d’une personne et considère qu’un paiement est une contrepartie de la fourniture dans les cas où ce paiement est effectué par suite de l’inexécution, de la modification ou de la résiliation d’une convention portant sur la réalisation d’une fourniture taxable, en faveur de l’inscrit qui a convenu de réaliser la fourniture. En l’espèce, l’inscrit dont il est soutenu qu’il a convenu de réaliser la fourniture est Mall Co. Le paiement a toutefois été fait à ICBC.

[72]        Après avoir examiné les preuves de nombreuses fois, je ne puis retenir la thèse de l’intimée selon laquelle les droits d’ICBC découlaient des droits de Mall Co ou de la relation qu’ICBC entretenait avec Mall Co. ICBC avait des droits véritables, donnant ouverture à action, qui découlaient de la décision prise par la Province des mettre fin à l’existence de Tech BC.

[73]        Trois grandes raisons m’amènent à tirer cette conclusion. Premièrement, l’existence distincte de Mall Co n’avait pas pour effet d’amoindrir, d’annuler ou de vicier les garanties mutuelles essentielles et ayant force de loi qui existaient entre ICBC et la Province. Deuxièmement, ICBC avait le droit d’être indemnisée de la diminution de valeur d’un investissement très important qu’elle avait fait en se fondant sur des promesses de la Province. Troisièmement, la transaction reconnaît que le paiement a été fait à ICBC pour son propre compte.

[74]        Pour ce qui est de la première de ces raisons - le fait que l’existence distincte de Mall Co n’avait pas pour effet d’amoindrir, d’annuler ou de vicier les garanties mutuelles essentielles et ayant force de loi qu’il y avait entre ICBC et la Province - les facteurs qui suivent militent en faveur de cette conclusion :

·        ICBC s’est occupée du projet tout entier, depuis les premières études de faisabilité jusqu’à la formulation de la participation de la Province. Sa présence en tant que partie à l’entente d’aménagement et aux clauses établies dans le cadre de cette dernière confirment que son engagement va au-delà d’une entente de financement classique. Il s’agit d’un engagement non limitatif, sans aucune preuve de garantie. Elle a une obligation de financement non plafonnée à l’égard de la phase  d’aménagement initiale et des phases suivantes et, comme il est indiqué au paragraphe 3.8 de l’entente d’aménagement, elle était chargée de l’exécution d’un grand nombre des obligations de Mall Co aux termes de l’entente relative à la conclusion du bail. À toutes fins pratiques, la Province et Tech BC ont gardé ICBC en tant qu’intervenante clé dans ce projet tout entier.

·        Mall Co a été créée après que les modalités du projet ont été convenues dans une large mesure et après que les garanties mutuelles essentielles entre ICBC et la Province ont été données. Je conclus que ces garanties ont survécu à la formation de Mall Co.

·        On ne peut opiner d’aucune façon que l’existence de Mall Co en tant qu’entité distincte a une incidence quelconque sur les garanties mutuelles permanentes entre ICBC et la Province. Le projet tout entier était subordonné à l’engagement d’ICBC en matière de financement ainsi qu’à l’engagement implicite, sinon explicite, de la Province envers ICBC afin d’assurer la participation de Tech BC au projet.

·        ICBC a gardé la haute main sur le projet, indépendamment des droits de Mall Co. Elle pouvait engager un recours en arbitrage obligatoire qui lierait Mall Co, la Province et Tech BC à l’égard de tout différend, y compris n’importe quel différend relatif au bail. En tant que partie à l’entente d’aménagement, elle a souscrit aux conditions du bail et de l’entente relative à la conclusion du bail, et elle était même tenue d’assister à des réunions quand il était apporté des changements à la conception des bâtiments.

[75]        Quant à la deuxième de ces raisons, à savoir qu’ICBC avait le droit d’être indemnisée pour s’être fiée aux promesses que la Province lui avait faites, les facteurs qui suivent étayent cette conclusion :

·        En investissant dans Mall Co, ICBC s’est fondée sur l’engagement que la Province avait pris à son égard afin d’assurer la participation de Tech BC au projet tout entier. Cet engagement n’a pas été respecté et constitue le manquement fondamental qui réside au cœur même du droit d’ICBC, lequel est tout à fait distinct d’une réclamation de la part de Mall Co au sujet du loyer perdu.

·        Pour ce qui est du manquement à cet engagement, ICBC aurait investi dans Mall Co, sous forme de prêts ou d’une autre façon, directement ou indirectement, une part important du coût budgété du projet et elle faisait face à l’incertitude que présentaient les coûts et les risques découlant de la poursuite du financement, ou non, de l’achèvement par Mall Co d’un projet conçu en grande partie pour l’usage de Tech BC. C’est-à-dire que la perte potentielle de la valeur de l’investissement d’ICBC dans Mall Co à laquelle a donné lieu le manquement aux engagements pris par la Province et Tech BC envers ICBC a été considérable. Le fait que la Province ait admis sa responsabilité envers ICBC en finançant le paiement destiné à ICBC ne m’apparaît pas comme une preuve que le droit d’ICBC découlait du droit de Mall Co ou qu’il découlait de l’instruction de Mall Co selon laquelle le paiement devait être fait à ICBC. Au contraire, le paiement a été financé par la Province afin de se décharger de toute responsabilité pour avoir manqué aux engagements pris en faveur d’ICBC.

·        L’admission par la Province de sa responsabilité et son engagement à financer le paiement sont reconnus dans des lettres de règlement. Dans une lettre datée du 2 mai 2002, la Province a souscrit au paiement forfaitaire de 41,1 M$. Dans cette lettre, il était déclaré que le paiement avait pour but de permettre à IPL de décharger Tech BC et la Province de leurs obligations aux termes de l’entente d’aménagement. Aucune mention n’est faite de Mall Co.

·        À la même date, ICBC a répondu à la lettre du 2 mai de la Province :

[traductionICBC a proposé une transaction par laquelle le gouvernement lui versera un paiement forfaitaire de 41,1 millions de dollars afin qu’ICBC libère TechBC et la Couronne de leur obligation […]. L’entente finale n’a pas été mise au point, mais, le 2 mai 2002, le gouvernement a fourni à ICBC une lettre d’engagement souscrivant à ces modalités. [Non souligné dans l’original.]

Cette lettre indique aussi qu’ICBC s’engage à rembourser la Province si, en fin de compte, les recettes tirées des lieux que Tech BC aurait occupés excèdent le montant du règlement.

·        De plus, la Province a été mise au courant par la lettre du 2 mai d’ICBC que le paiement serait consigné par ICBC à titre de revenu dans son premier trimestre. La lettre opérait une distinction entre « ICBC » et [traduction] « la filiale d’ICBC », mais elle ne porte que sur l’amoindrissement de la valeur de son investissement (celui d’ICBC), offrant de libérer la Province et Tech BC en contrepartie du paiement, par la Province et en sa faveur, de la somme de 41,1 M$.

·        Le fait que les parties aient compris que le paiement serait effectué par la Province en tant que partie responsable d’un manquement à un engagement qu’elle avait pris en faveur d’ICBC figure aussi dans une lettre datée du 3 mai, d’ICBC à Tech BC, qui a été paraphée et dont la Province a accusé réception le 6 mai [traduction] « pour indiquer qu’elle souscrivait aux conditions décrites ». Cette lettre du 3 mai, dont il a été accusé réception le 6 mai et que l’avocat de l’appelante appelle « l’entente du 6 mai », indiquait qu’ICBC avait :

[traduction] […] convenu d’une entente avec la Province pour le compte d’ICBC et sa filiale en propriété exclusive, ICBC Properties Ltd., relativement à la résiliation du bail de Tech BC. [Non souligné dans l’original.]

Cette lettre ne fait aucunement référence à Mall Co et a été intégrée par renvoi à la transaction, où, au paragraphe 5.8, elle est appelée la [traduction] « lettre du 3 mai ». Il s’agit de la seule communication, déclaration ou interprétation externe qui, est-il dit, n’est pas remplacée par l’entente de règlement.

[76]        Au vu de ce qui précède, il est difficile de retenir l’idée qu’ICBC intervenait exclusivement pour le compte de Mall Co en vue d’en arriver à une transaction. Même si Mall Co a été forcément entraînée dans les libérations, à mon avis, il n’en demeure pas moins qu’ICBC a négocié cette transaction pour elle-même, même s’il est fait maintes fois référence à IPL.

[77]        Quant à la troisième des raisons, à savoir que la transaction reconnaît que le Paiement a été fait à ICBC pour son propre compte, voici les stipulations de cette entente qui vont dans ce sens :

·        Le paragraphe 2.1 stipule clairement que le Paiement doit être fait à ICBC ou à la personne que celle-ci aura désignée par Tech BC pour elle-même ainsi que pour le compte de la Province. Cela concorde tout à fait avec mon opinion selon laquelle, en l’espèce, les engagements généraux ont été pris entre ICBC et la Province. ICBC avait le droit de réorienter le Paiement vers, disons, Mall Co, ou pas. L’affirmation de l’intimée selon laquelle c’est Mall Co qui a réorienté le paiement n’est pas confirmée par le texte explicite de la transaction. Il concorde avec la manière dont les parties comprenaient leurs droits et leurs obligations. La possibilité que la perte potentielle d’ICBC aurait pu être indemnisée de la même façon par le fait d’accepter d’effectuer le Paiement en faveur de Mall Co ne change pas le fait bien réel qu’ICBC avait le droit d’être indemnisée pour le manquement en question.

·        Dans le cadre des parties 3 et 4, sous les rubriques [traduction] « Droits cédés » et [traduction] « Libérations et indemnisations », les références qui sont faites aux sociétés ICBC, lesquelles comprennent ICBC, confirment les droits et les obligations d’ICBC aux termes des diverses ententes. De plus, la partie 5, sous la rubrique [traduction] « Dispositions générales » fait référence aux libérations de la Province qui confirment, vis-à-vis des sociétés ICBC, que la Province joue un rôle clé à l’égard des ententes que Tech BC a conclues. L’entreprise tout entière prend fin comme elle a commencé : les véritables intervenantes - la Province et ICBC - font affaire entre elles directement. Je n’ai aucune raison de croire que les entités distinctes que la Province et ICBC ont créées visaient à exonérer l’une d’elles de ses obligations envers l’autre.

D.      La réduction de la dette

[78]        L’intimée se fonde sur le fait que la dette de Mall Co envers IPL doit être réduite ou éteinte sans qu’elle ait à effectuer un paiement au titre de la dette. C’est-à-dire que, [traduction] « par suite » du Paiement fait à ICBC, l’obligation de Mall Co envers IPL a été réduite du même montant. En outre, l’intimée se fonde sur le fait que Mall Co était la bénéficiaire du paiement. Mall Co était la partie qui avait légalement droit au paiement et elle en était la bénéficiaire économique. Que Mall Co ait donné instruction que le Paiement soit fait à ICBC ou qu’elle ait acquiescé au fait que le paiement lui soit fait doit être forcément inféré de son droit à elle, et non du droit d’ICBC, au paiement.

[79]        La thèse de la réduction ou de la remise de la dette est fondée sur le libellé explicite du paragraphe 182(1) :

Pour l’application de la présente partie, dans le cas où, à un moment donné, par suite de l’inexécution […] d’une convention portant sur la réalisation d’une fourniture taxable […] par un inscrit au profit d’une personne, un montant est payé à l’inscrit, ou fait l’objet d’une renonciation en sa faveur, autrement qu’à titre de contrepartie de la fourniture, ou encore une dette ou autre obligation de l’inscrit est réduite ou remise sans paiement au titre de la dette ou de l’obligation, […] [Non souligné dans l’original.]

[80]        Ce texte exige clairement que Mall Co voie sa dette réduite ou remise par suite de l’inexécution de l’entente de fourniture. On pourrait dire qu’il est implicite que la dette réduite ou remise serait une dette due par Mall Co à Tech BC. En d’autres termes, pourrait-on dire, le texte relatif à la réduction de la dette dans la disposition en question est là pour dissiper tout doute qu’un montant « payé » engloberait le montant de la compensation d’une dette antérieure due au payeur.

[81]        Subsidiairement, comme le soutient essentiellement l’intimée, il y a lieu d’interpréter la stipulation de manière large. Il n’est pas mentionné dans la stipulation en question que la réduction de la dette doit porter sur une dette entre le réalisateur et le bénéficiaire de la fourniture. C’est-à-dire que, du point de vue de l’intimée, lorsque la partie qui effectue la fourniture (Mall Co) voit une dette envers une tierce partie (IPL) réduite par suite de l’inexécution, par le bénéficiaire, de l’entente de fourniture (Tech BC) et qu’un paiement est fait à n’importe quelle autre partie (ICBC), la stipulation joue. Se fondant sur l’article 12 de la Loi d’interprétation du gouvernement fédéral et sur l’analyse historique des changements apportés au paragraphe 182(1), l’intimée soutient que le législateur envisageait que l’on interprète de manière large le paragraphe 182(1) de façon à ce qu’il joue dans les affaires telles que celle dont il est question en l’espèce. L’intimée soutient que la stipulation est libellée d’une manière suffisamment large pour englober à la fois les paiements effectués par une tierce partie et les paiements effectués à une tierce partie lorsque la dette du réalisateur d’une fourniture a été réduite à la suite d’un tel paiement.

[82]        Je retiens l’interprétation de l’intimée de la stipulation portant que selon la réduction ou la remise d’une dette, dans le contexte du paragraphe 182(1), n’exige pas qu’il s’agisse de la réduction ou de la remise d’une dette due à une partie à une entente de fourniture. La simple lecture de la stipulation ne confirme pas une interprétation aussi restrictive. Cependant, j’hésite davantage à retenir la thèse de l’intimée selon laquelle la stipulation est libellée d’une manière suffisamment large pour englober à la fois les paiements effectués par une tierce partie et les paiements effectués à une tierce partie dans les cas où la dette du réalisateur d’une fourniture a été réduite par suite d’un tel paiement. Cela pourrait mener facilement à des cas où l’on imposerait une responsabilité au sens du paragraphe 182(1) à deux fournisseurs pour le même montant, relativement à une fourniture unique, effectuée conjointement, ou à des cas où les deux fournisseurs éviteraient toute responsabilité en se pointant mutuellement du doigt – ce qui semble être le cas en l’espèce.

[83]        Quoi qu’il en soit, en admettant que la réduction ou la remise d’une dette, dans le contexte du paragraphe 182(1), n’exige pas la réduction ou la remise d’une dette due à une partie dans le cadre d’une entente de fourniture, j’ai exprimé l’avis que la stipulation en question va au-delà de la simple application d’un principe de réception implicite. Ce principe exigerait habituellement que Mall Co ait dit au payeur (Tech BC) à qui le paiement (la somme de 41,1 M$) devrait être fait et que la bénéficiaire du paiement (ICBC) ne l’ait pas reçu à titre de compensation à laquelle elle avait droit pour son propre compte.

[84]        C’est-à-dire que le paragraphe 182(1) joue, même si ICBC n’avait pas besoin d’une instruction ou de l’acquiescement de Mall Co pour recevoir le paiement.

[85]        Ce qui m’amène maintenant à la thèse de l’appelante selon laquelle même si Mall Co a profité du paiement, l’avantage, une réduction de sa dette envers IPL, n’a pas eu lieu « par suite » de l’inexécution, par Tech BC, de l’entente de fourniture.

[86]        L’intimée fait état d’inscriptions faites dans le grand livre de Mall Co, lesquelles indiquent que la responsabilité de Mall Co envers IPL a été réduite de 41,1 M$ par suite du paiement effectué par la Province. Elle soutient qu’il s’agissait là d’un avantage découlant de la transaction et du paiement effectué dans le cadre de celle-ci.

[87]        L’appelante soutient que le paiement a été fait par Tech BC et la Province en raison de l’inexécution des trois ententes. Les inscriptions comptables qu’ICBC, IPL et Mall Co ont pu faire ultérieurement ne constituaient que des mesures purement internes des sociétés ICBC. Elle a fait référence au témoignage qu’a fait à l’audience M. Stonnell, qui était le directeur financier de Mall Co et d’IPL en 2002. Celui-ci a déclaré que les écritures de journal de Mall Co n’ont été faites que parce qu’ICBC avait réduit son compte interentreprises avec IPL et qu’ICBC lui avait dit d’effectuer la réduction correspondante.

[88]        L’appelante soutient qu’il y avait cinq étapes à franchir entre l’inexécution des ententes et l’écriture de journal que Mall Co devait faire pour réduire son compte interentreprises avec IPL. Plus précisément, il fallait que l’on accepte de payer ICBC; ICBC devait réduire dans ses comptes le compte qu’elle avait avec IPL; ICBC devait donner instruction à IPL de réduire dans ses comptes le compte qu’elle avait avec ICBC; IPL devait réduire dans ses comptes le compte qu’elle avait avec Mall Co; finalement, IPL devait donner instruction à Mall Co de réduire dans ses comptes le compte qu’elle avait avec IPL. Selon l’appelante, le lien de causalité n’est pas suffisamment établi pour que l’on puisse conclure que l’écriture de journal par laquelle Mall Co avait réduit son compte interentreprises avait été faite « part suite de » l’inexécution de l’entente de fourniture. ICBC a reçu le paiement pour son propre compte en vertu d’un droit, et les inscriptions de journal étaient le résultat des mesures qu’elle avait prises quant à la manière d’établir à l’interne ses comptes parmi la chaine de filiales dans lesquelles elle avait investi.

[89]        La question consiste donc simplement à savoir si l’avantage retiré par Mall Co découle, ou non, de l’inexécution de l’entente de fourniture, et, pour répondre à cette question, il faut alors rechercher s’il convient d’interpréter les mots « par suite de » d’une manière qui appelle l’existence d’un lien de causalité direct ou si un lien indirect suffirait.

[90]        L’intimée convient que les mots « par suite de » requièrent l’existence d’un lien de causalité. Elle allègue toutefois qu’il existe en l’espèce un lien de causalité suffisant car il fallait forcément que le Paiement profite à Mall Co, comme il ressort de la chaîne des écritures comptables relevées et reconnues à l’audience. L’effet domino qui a conféré à Mall Co l’avantage du paiement résultait du paiement fait à ICBC.

[91]        Après avoir examiné ces arguments habiles, je suis d’avis que les réductions de dette dont Mall Co a profité étaient la conséquence du défaut de Tech BC de s’acquitter des obligations que lui imposait l’entente de fourniture. Le fait que le défaut de Tech BC de s’acquitter de ses obligations était une conséquence du défaut de la Province d’honorer son engagement envers ICBC n’empêcherait pas Mall Co de disposer d’un droit d’action à l’encontre de Tech BC. Même si ce droit ne s’étendait pas à la Province, ce qui, selon moi, serait le cas, Mall Co, à titre d’entité distincte, aurait exigé une contrepartie quelconque d’ICBC pour renoncer à son droit à l’encontre de Tech BC, sinon à l’encontre de la Province. Même si cela n’est pas la même chose que d’accepter que son droit à des dommages-intérêts soit transféré à ICBC, il y a là néanmoins un avantage auquel Mall Co avait droit et qu’elle a bel et bien reçu par suite de l’inexécution de l’entente de fourniture. Selon moi, le lien de causalité est suffisant[25].

E.    Tech BC en tant que fournisseur d’une fourniture taxable

[92]        L’appelante soutient que même si Mall Co allait louer à bail le bien à Tech BC, cette dernière fournissait quelque chose en retour à Mall Co. Le fait que Tech BC convienne de devenir le locataire clé du centre commercial constituait la fourniture d’un service de Tech BC à Mall Co. L’appelante a cité un mémorandum sur la TPS/TVH à l’appui de l’opinion selon laquelle un locataire (preneur) peut fournir un service à un bailleur au moment de la conclusion d’un bail[26]. Plus précisément, le mémorandum signale :

Si le bailleur fait un paiement en espèces au preneur pour l’inciter à conclure le bail, le preneur est considéré comme ayant effectué une fourniture taxable au bailleur. Le service de conclure le bail constitue la fourniture taxable. Le preneur, s’il est un inscrit aux fins de la TPS/TVH, doit percevoir et comptabiliser la TPS/TVH relativement à cette fourniture[27].

[93]        Je pourrais bien retenir la thèse de l’Agence du revenu du Canada dans ce mémorandum, mais je ne vois pas en quoi cela favorise la thèse de l’appelante s’il y a aussi la fourniture taxable d’un bail de la part de Mall Co à Tech BC. Le fait que la contrepartie de cette fourniture inclue une fourniture taxable de la part de Tech BC à titre de locataire ne change pas le fait qu’il y a eu fourniture taxable d’un bail à Tech BC. Pour l’appelante, faire valoir que le paiement a été fait par un fournisseur (Tech BC) et que le paragraphe 182(1) ne vise pas les paiements qu’effectue un fournisseur occulte simplement cette réalité qu’il y a eu fourniture taxable d’un bail à Tech BC.

[94]        À part le paiement incitatif identifiable de 700 000 $ dont il a été question plus tôt dans les présents motifs, il y a peu de raisons de croire que le bail lui-même, de par ses conditions, ne reflétait pas la pleine contrepartie à payer pour la fourniture d’un locataire-clé effectuée par Tech BC. En ce sens, il y a une opération de troc qui est subsumée dans la convention de bail. C’est-à-dire que les conditions du bail reflètent et intègrent la contrepartie payable pour la présence d’un locataire-clé. La pénalité payée pour manquement à cette obligation, tant à titre de payeur de loyer qu’à titre de locataire-clé, est inextricablement rattachée aux obligations que le bail impose à Tech BC.

[95]        Le fait qu’il existe deux fournisseurs, effectuant chacun une fourniture à l’autre, ne diminue pas l’obligation qu’a chaque bénéficiaire d’une fourniture taxable d’acquitter le montant de TPS qui correspond à la fourniture acquise. Tech BC était la bénéficiaire d’une fourniture taxable pleinement intégrée dans le bail fourni par Mall Co. Cela constitue une réponse complète à la thèse qu’invoque l’appelante.

F.    La protection constitutionnelle dont bénéficie la Province contre toute obligation en vertu de la Loi

[96]        Si je conclus qu’ICBC avait le droit de recevoir le Paiement par suite du défaut de Tech BC d’honorer le bail, ce qui fait, en soi, échec à la cotisation établie à l’encontre de Mall Co n’eût été de la disposition que comporte le paragraphe 182(1) en matière de réduction de dette, je conclus également que la Province, étant la partie responsable de ce défaut, se trouvait dans l’obligation d’effectuer le Paiement.

[97]        C’est-à-dire que, conformément à ma conclusion selon laquelle ICBC a reçu le paiement pour son propre compte, je suis d’avis que la Province avait une responsabilité contractuelle envers ICBC et que ses obligations ne découlaient pas seulement de la relation qu’elle entretenait avec Tech BC. Les obligations de la Province envers ICBC sont nées de sa décision de mettre fin à l’existence de Tech BC et de l’exclure du projet. Il s’agissait là d’une inobservation fondamentale de son engagement envers ICBC. Ni ICBC ni la Province n’avaient l’intention de se soustraire à leurs obligations mutuelles respectives en rapport avec ce projet, qui était parrainé conjointement. Comme je l’ai dit, l’existence distincte de Tech BC n’avait pas pour effet de diminuer, d’annuler ou de vicier les obligations essentielles et exécutoires de la Province dans le cadre de cette opération.

[98]        Nous savons que la Province est à l’origine de la résiliation du bail. Nous savons qu’elle a financé le paiement. Le paragraphe 2.1 de l’entente de règlement reconnaît que le paiement a été fait pour le compte de la Province. La lettre du 3 mai, qui a été reconnue par la Province et intégrée à l’entente de règlement, confirme que la négociation du Paiement a eu lieu entre ICBC et la Province. Dans cette lettre, ICBC déclare :

[traduction] […] la présente confirme que nous avons convenu d’une entente avec la Province pour le compte d’ICBC […].

[99]        La lettre confirme, par ailleurs, que si la valeur d’un bail ultérieur excédait les coûts et le paiement fait à ICBC, celle-ci rembourserait alors à la Province un montant maximal de 41,1 M$. Tout recouvrement additionnel dont profiterait ICBC serait partagé en parts égales entre ICBC et la Province. Il ressort de cette modalité de remboursement et de partage des profits que c’était la Province, et non Tech BC, qui était la dirigeante avec laquelle ICBC faisait affaire. Cela ne prouve pas que la Province effectuait le paiement pour le compte de Tech BC.

[100]   Des références faites dans toute la transaction reconnaissent que la Province avait qualité pour intervenir comme partie jouissant de droits et d’obligations dont elle a été libérée par le Paiement fait à ICBC.

[101]   Les obligations de la Province ont été exposées dans l’EMDO, dont le paragraphe 2.4 indique ce qui suit :

[traduction] Les objectifs et les principes seront appliqués de bonne foi par les parties dans le cadre de l’interprétation et de l’exécution des intentions du présent accord, et TechBC, la Couronne et ICBC Mall Co agiront raisonnablement de temps à autre pour mettre en équilibre les droits et les obligations que la présente entente confère à chacune d’elles, en reconnaissance de ces objectifs et de ces contributions. [Non souligné dans l’original.]

[102]   La série entière de documents et les prémisses qui leur ont servi de fondement illustrent très clairement qu’il y a eu, de la part de la Province, rupture d’un engagement pris envers ICBC, à savoir que le bail serait honoré. Cet engagement a subsisté, même si Tech BC assumait des obligations et même si ICBC a été autorisée à nommer Mall Co pour être propriétaire du bien en question et pour conclure le bail. ICBC n’aurait pas pu considérer que l’engagement de la Province avait uniquement pour but de s’assurer que Tech BC signe le bail. L’engagement de la Province, reconnu par le fait qu’elle avait financé le Paiement, consistait à assurer la présence d’un locataire viable pour le projet. Cet engagement a été pris principalement envers ICBC, et non envers Mall Co.

[103]   Il faut donc rechercher si Mall Co, que l’on pourrait aussi considérer comme la bénéficiaire d’une fourniture, c’est-à-dire le bail, est tenue de payer la taxe applicable, même si c’est la Province qui a fait le Paiement à ICBC. Elle a effectivement bénéficié d’une réduction de dette par suite du Paiement. Outre les réticences que l’on peut éprouver face à une interprétation du paragraphe 182(1) qui permet à plus d’une partie d’être redevable d’une taxe à l’égard du même paiement, je suis d’avis que Mall Co bénéficie de la même immunité fiscale que la Province.

[104]   Dans son argumentation, l’intimée a reconnu ce fait également, en affirmant que l’immunité de la Couronne ne s’appliquerait que si la Province était la bénéficiaire du bail. J’ai conclu que tel était le cas. Le fait que Tech BC, à titre de bénéficiaire d’une fourniture, avait une obligation dont elle a été libérée grâce au Paiement était accessoire au besoin qu’avait la Province d’être libérée de son obligation. À mon avis, cette conclusion devrait suffire comme motif pour ne pas tenir Mall Co responsable du paiement par suite de l’application du paragraphe 182(1). De plus, je retiens la thèse de l’appelante portant que l’article 17 de la Tech BC Act doit être interprété de manière conforme à cette solution. C’est-à-dire que même si j’en venais à conclure que Tech BC était elle aussi bénéficiaire de la fourniture, elle devrait se trouver dans la même situation que la Province et bénéficier de l’immunité fiscale provinciale, faisant ainsi disparaître l’obligation de versement de Mall Co.

[105]   Avant de conclure les présents motifs, il est nécessaire d’en dire un peu plus sur l’immunité fiscale dont jouit la Province. L’appelante a invoqué deux moyens : l’article 122 de la Loi et la Loi constitutionnelle.

[106]   L’article 122 de la Loi porte sur l’application de la partie IX de cette dernière, qui inclut le paragraphe 182(1), à un gouvernement provincial. Aux termes de l’alinéa 122b), l’article 182 lie :

b) Sa Majesté du chef d’une province en ce qui concerne une obligation à titre de fournisseur de percevoir et de verser la taxe relative aux fournitures taxables qu’elle effectue. [Non souligné dans l’original.] 

[107]   Cela, selon moi, dit plus que la Province a titre de bénéficiaire d’une fourniture n’est pas assujettie à la taxe en vertu de l’alinéa 122b)[28]. L’extrait dit : la Province, sauf si elle agit comme fournisseur, n’est pas assujettie à la taxe en vertu de l’alinéa 122b). Même si l’intimée n’a pas soutenu que la Province avait effectué une fourniture taxable, je retiens la thèse de l’appelante qu’en fait la Province a bel et bien effectué une fourniture : la fourniture d’un locataire-clé. Cela étant le cas, je ne puis que conclure que le paragraphe 182(1) joue, indépendamment du fait qu’elle était également la bénéficiaire d’une fourniture, à savoir le bail et l’engagement d’ICBC en matière de financement. C’est le côté « fournisseur » de l’opération qui exclut la Province de la protection que confère l’alinéa 122b).

[108]   Cela m’amène finalement à la thèse de l’appelante portant que les provinces sont protégées constitutionnellement contre toute taxation. Cette thèse doit sûrement être correcte. Par l’arrêt Renvoi relatif à la taxe sur les produits et services[29], la Cour suprême du Canada a passé en revue la validité constitutionnelle de la TPS fédérale au sein de la partie IX de la Loi et, en se fondant sur la jurisprudence Renvoi relatif à la taxe sur le gaz naturel exporté[30], elle a conclu que les gouvernements des provinces ne sont pas tenus de payer la taxe sur leurs achats. L’article 125 de la Loi constitutionnelle de 1867 dispose :

Nulle terre ou propriété appartenant au Canada ou à aucune province en particulier ne sera sujette à la taxation.

[109]   Citant la jurisprudence Renvoi relatif à la taxe sur le gaz naturel exporté, la majorité de la Cour, par l’arrêt Renvoi relatif à la taxe sur les produits et services a observé :

L’article 125 stipule, de façon générale, que nulle terre ou propriété appartenant à la Couronne du chef du Canada ou d’une province ne sera « sujette à taxation ». Cette immunité, comme nous l’avons déjà constaté, vise à empêcher un palier de gouvernement de s’approprier, pour son propre usage, les biens de l’autre palier de gouvernement ou les fruits de ces biens. Cette immunité serait illusoire si elle s’appliquait uniquement aux taxes « sur les biens » et non à une taxe qui frappe la Couronne relativement à une opération touchant ses biens ou à une taxe sur l’opération elle-même. L’immunité serait illusoire puisque, simplement en adoptant une formulation qui crée une taxe « in personam » au lieu d’une taxe « in rem », un palier de gouvernement pourrait impunément, au moyen de cette taxe, enlever à l’autre palier de gouvernement les fruits provenant des biens de ce dernier. La protection fondamentale qu’offre l’art. 125 de la Constitution ne peut pas reposer sur des nuances subtiles en ce qui concerne la forme.

[110]   La jurisprudence est donc bien fixée : la Province n’est pas tenue de payer la taxe en vertu de la Loi.

[111]   Il a toutefois été soutenu que l’immunité des provinces est assujettie à des ententes provinciales-fédérales et que, en l’espèce, certaines des conditions prévues par ces ententes n’ont pas été réunies[31]. En présumant que la province de la Colombie-Britannique envisagerait de respecter ces ententes, il semble nécessaire dans ce cas d’examiner l’entente que la Province avait conclue avec le gouvernement fédéral. À l’époque pertinente, le gouvernement fédéral et certaines provinces, dont la Colombie-Britannique, avaient conclu une entente par laquelle les ministères provinciaux ne paieraient pas la TPS sur les achats effectués si la province attestait que les biens ou les services en question étaient achetés par le gouvernement provincial[32].

[112]   À part l’utilisation de certificats, il semblerait que d’autres preuves documentaires d’achats de la part d’un gouvernement provincial suffiraient. Par exemple, il est signalé dans le mémorandum 400‑4 que : [traduction] « les fournisseurs ne sont pas tenus de facturer la TPS/TVH sur leurs fournitures taxables de biens et de services faites à des “entités inscrites” si ces fournisseurs conservent une preuve documentaire suffisante indiquant qu’une entité inscrite était la bénéficiaire du fournisseur ». Cette preuve documentaire inclut [traduction] « n’importe quel document valablement délivré ou signé par l’entité du gouvernement provincial qui est inscrite aux fins de la TPS/TVH en rapport avec l’achat effectué ». L’ « entité inscrite » s’entend d’un ministère provincial qui a le droit d’effectuer des achats sans payer la TPS/TVH, ce qui inclut la province de la Colombie-Britannique et ses ministères, en vue d’opérations qui ont eu lieu avant le 1er juillet 2010.

[113]   À l’évidence, en l’espèce, il n’existe aucune preuve documentaire du type de celle qu’envisage ce régime administratif. Cependant, il est tout aussi manifeste à mes yeux qu’un tel régime de preuve ne facilite que l’application du droit que tirent de la constitution les provinces de ne pas être assujetties à la taxe. Tout défaut de se conformer à de telles exigences en matière de preuve ne peut priver une province de ce droit dans les cas où, en fait, une province a été reconnue par la Cour comme la bénéficiaire de la fourniture à l’égard de laquelle elle a effectué un paiement. C’est le cas en l’espèce, même s’il peut être préoccupant dans le cas présent que la revendication d’immunité soit formulée par l’avocat de l’appelante, agissant pour l’appelante, et non pour la Province. Je conclus tout de même que le fait que l’appelante se fonde sur l’article 17 de la Tech BC Act constitue une réponse suffisante. Selon moi, cette disposition est la voix de la Province qui réclame l’immunité pour Tech BC.

G.   Conclusions

[114]   En conséquence, je suis d’avis qu’il convient d’accueillir l’appel, avec dépens, et ce pour les motifs susmentionnés. Les dépens adjugés dans le cadre des présentes excluent ceux qui se rapportent à l’audition de la demande de l’appelante en vue de présenter une requête en vertu de l’article 58 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale), qui a eu lieu à Vancouver (Colombie-Britannique) le 3 septembre 2010. Chaque partie supportera les dépens qui lui sont propres à l’égard de cette audience.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour d’octobre 2012.

 

 

« J.E. Hershfield »

Juge Hershfield

 

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de mars 2013.

 

 

François Brunet, réviseur

 

 

 

 


Annexe A

 

[traduction]

 

Paiement du loyer de base

 

3.6            Le loyer de base sera payable comme suit :

 

a)                 la somme de 7 000 000 $, à payer 120 jours après la date de début du bail;

 

b)                un loyer de base annuel, payable tous les mois et réparti proportionnellement de la manière prévue ci-après, 120 jours après la date de remise concernant les locaux de TechBC situés dans le bâtiment Quadrangle ainsi que dans l’atrium de l’entrée et la mezzanine, et se poursuivant jusqu’à 120 jours après la date de remise de la galerie;

 

c)                 un loyer de base annuel, payable tous les mois, à compter de 120 jours après la date de remise de la galerie, et ce, pour l’ensemble des locaux loués à bail conformément au bail conclu avec TechBC.

 

Un montant réparti proportionnellement du loyer de base annuel calculé ou estimatif, fondé sur le budget des bâtiments de base connu au moment en question et amorti de la manière envisagée au §3.5 sera payé pour la période débutant 120 jours après la date de début du bail (soit la date de remise du bâtiment Quadrangle et de la mezzanine) et prenant fin 120 jours après la date de remise de la galerie, et un montant calculé ou estimatif égal au loyer de base annuel entier, déterminé de la même façon, sera payé après cette dernière période de 120 jours. Les paiements seront rajustés en fonction de la version finale du budget des bâtiments de base lorsqu’elle sera déterminée de façon à pouvoir calculer le loyer de base annuel final. TechBC et ICBC Mall Co effectueront les rajustements appropriés. Pour ce qui est de l’estimation et de la détermination du loyer de base annuel, les locaux présents dans n’importe quelle(s) partie(s) du projet actuel  auront la même valeur au pied carré.

 

Les parties ont envisagé que la superficie constructible brute (SCB) des locaux universitaires initiaux sera d’environ 425 000 pieds carrés. Le locataire convient que le locateur rajustera le loyer de base annuel si la SCB des locaux loués est d’une superficie de moins de 425 000 pieds carrés, c’est-à-dire que si TechBC obtient une SCB de 420 000 pieds carrés ou plus, il n’y aura pas de rajustement à la hausse ou à la baisse. Si la SCB est inférieure à 420 000 pieds carrés, le loyer de base annuel sera rajusté proportionnellement par une fraction dont le numérateur sera la différence entre la superficie de 420 000 pieds carrés et la superficie réelle et le dénominateur sera 425 000 pieds carrés.

 


RÉFÉRENCE :                                 2012 CCI 346

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :    2009-3904(GST)G

 

INTITULÉ :                                      SURREY CITY CENTRE MALL LTD. ET SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Les 17, 18 et 19 janvier 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L’honorable juge J.E. Hershfield

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 2 octobre 2012

 

COMPARUTIONS :

 

Avocats de l’appelante :

Me Joel A. Nitikman

Me Jessica Fabbro

 

Avocats de l’intimée :

Me Ron D.F. Wilhelm

Me Bruce Senkpiel

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                          Nom :                     Me Joel A. Nitikman

                                                          Me Jessica Fabbro

 

                          Cabinet :                 Fraser Milner Casgrain

                                                          250, Howe Street, 20e étage

                                                          Vancouver (Colombie-Britannique)

                                                          V6C 3R8

 

       Pour l’intimée :                          Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1] Telle était la structure qui existait en 2002, à l’époque où est intervenue l’opération qui a donné lieu à la cotisation portée en appel. Selon les actes de procédure, IPL a été liquidée en 2004 et, à ce moment,  l’appelante, Mall Co, est devenue une filiale en propriété exclusive d’ICBC.

[2] Selon les actes de procédure, Tech BC a été dissoute en 2003.

[3] Tech BC a donné son accord en son nom et en celui de la Province – cela dénote l’existence d’une relation de mandataire.

[4] Ce fait est affirmé dans l’avis d’appel et admis dans la réplique. De plus, une page de couverture signée qui accompagne le PE indique que ce dernier représente [traduction] « l’essence d’une entente ». Cependant, il est également affirmé dans l’avis d’appel et admis dans la réplique qu’en septembre 2009 les autorités provinciales ont approuvé la proposition d’aménagement conjointe mettant en cause ICBC et Tech BC.

[5] Voir le paragraphe 6.2 de l’entente mutuelle en matière de dotation et d’objectifs, qui prévoit l’obligation de conclure des ententes avec les magasins suivants : La Baie, Sears et Extra Foods.

[6] Selon les actes de procédure, la réduction de 21 M$ du budget de construction de base qui devait être amortie dans le calcul du loyer était de 7 M$, soit le paiement de loyer initial, au début du bail, plus le paiement d’une commission d’option de 14 M$ à la fin du bail.

[7] L’EMDO calcule ce paiement de dotation initial comme étant égal à 50 % du profit prescrit de 10 $/pi2 qui se rapporte à un pourcentage réputé des travaux d’aménagement de la phase 1 de 1 000 000 pi2. Le pourcentage réputé est la proportion que représente la superficie de 325 000 pi2 non visée par un engagement par rapport à la superficie louable totale de 1 000 000 pi2. C’est-à-dire : 50 % × 32,5 % × (1 000 000 × 10 $).

[8] Le paiement de 700 000 $ est inclus aux paragraphes 3.6 et 3.7 de l’entente d’aménagement à titre de [traduction] « paiement unique ». Ce paiement de 700 000 $ est qualifié de paiement incitatif à la prise à bail dans les observations écrites de l’appelante et de l’intimée.

[9] L’alinéa 2.3g) de l’entente d’aménagement est intégré par renvoi au paragraphe 3.5 de l’entente d’aménagement ainsi qu’à la section II(A) de l’entente relative à la conclusion du bail.

[10] En invoquant cet argument, l’appelante se fonde sur diverses politiques et lignes directrices de l’ARC. Voir l’Énoncé de politique P‑218R de l’ARC – « Statut fiscal des montants versés en dédommagement, qu’ils soient ou non visés par l’article 182 de la Loi sur la taxe d’accise », 25 mai 1998, document révisé le 9 août 2007; Mémorandum sur la TPS/TVH no 19.4.1 – « Immeubles commerciaux – Ventes et locations », août 1999; communiqué de presse du ministère des Finances no 90‑169, 18 décembre 1990; Projet de loi C‑112, notes explicatives, 11 février 1993, clause no 46.

[11] 2001 DTC 290 (CCI).

[12] Articles 32 et 176 de la Loi.

[13] L’intimée cite une longue liste d’exemples (observations écrites, note de bas de page 94), attestés par des pièces, que tous considèrent le paiement comme une indemnisation découlant de la résiliation du bail.

[14] Les décisions étayant cette approche sur lesquelles l’intimée se fonde comprennent : Société en commandite Sigma-Lamaque c. Sa Majesté la Reine (2010), 2011 GTC 906, 2010 CarswellNat 4438 (CCI).

[15] Par contre, il était indiqué dans la réplique que le ministre présumait que le loyer s’élevait à 376 000 $.

[16] Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale).

[17] Les jurisprudences que l’appelante a invoquées et que l’intimée a écartées sont les suivantes : Hammill c. Canada, [2005] ACF no 1197 (CA) (QL); Sinclair c. Blue Top Brewing Co. Ltd., [1947] 4 DLR 561 (CSC); Abrahams c. Minister of National Revenue (No. 2), 1966 CarswellNat 312 (C.É.); Wardean Drilling Co. c. Ministre du Revenu national, 1978 CarswellNat 189 (CAF); McAdam c. La Reine, 1978 CarswellNat 182 (CAF); Ha c. La Reine, 2011 DTC 1214 (CCI) et Kerry Properties Ltd. c. Sa Majesté la Reine, 2008 DTC 2729 (CCI). Les décisions que l’intimée a invoquées sont les suivantes : Canderel Ltd. c. Canada, [1993] ACF no 777 (CA) (QL); Merck & Co. c. Apotex Inc., [2003] ACF no 1925 (CA) (QL) et 11675 Société en commandite c. Canada, [2002] ACI no 636 (QL).

[18] Il n’a pas été allégué que cette fourniture était la fourniture exonérée d’un service financier, même si cela aurait bien pu être un argument soulevé à l’époque de la première cotisation établie à l’endroit d’ICBC.

[19] Alinéa 14(f) i) de la réplique.

[20] Voir Deshugh Estates Ltd. c. Robin’s Food Inc. (1998), 19 RPR (3d) 40 (BCSC), aux paragraphes 22 et 23 [Deshugh]; Sacks c. Canada Mortgage and Housing Corp., [2001] BCJ no 511 (SC) (QL), aux paragraphes 118, 127 et 128 [Sacks]; Dolphin Transport Ltd. c. Weather B Transport Co., (1993) 30 RPR (2d) 11, à la page 117 [Dolphin Transport]; Canada Square Corp. c. Versafood Services Ltd. (1981), 130 DLR (3d) 205 (CA Ont.), aux pages 217 et 218 [Canada Square] et Le Soleil Hotel & Suites Ltd. c. Le Soleil Management Inc., 2009 BCSC 1303, aux paragraphes 330 à 333 [Le Soleil].

[21] Voir Bentley, McNair, Butkus, Williams et Rhodes, Canadian Law of Landlord and Tenant (6e éd.., feuilles mobiles, Carswell), chapitre 3; Deshugh, au paragraphe 22, et Canada Square, à la page 214.

[22] Voir Dolphin Transport, à la page 117.

[23] Canada Square, pages 216 et 217; Le Soleil, aux paragraphes 327 à 334; et Sacks, aux paragraphes 118 à 119.

[24] Canada Square, aux pages 216 et 217; Gutter Filter Co., LLC c. Gutter Filter Canada Inc., 2011 FC 234; UBS Securities Canada Inc. c. Sands Brothers Canada Ltd., 45 BLR (4th) 105; Deshugh; Sacks; Dolphin Transport; Le Soleil et Gichuru c. Ash Estate, 2010 BCSC 849.

[25] Canada Trustco Mortgage Co. c. R., 2005 CSC 54, aux paragraphes 10; Ministre du Revenu national c. Armstrong, [1956] R.C.S. 446, aux pages 447 et 449; et R. c. Melford Developments Inc., [1981] 2 C.F. 627 (CAF), au paragraphe 21.

[26] Mémorandum sur la TPS/TVH no 19.4.1 – « Immeubles commerciaux – Ventes et locations », août 1999.

[27] Paragraphe 43.

[28] Nouvelle série des mémorandums sur la TPS/TVH de l’ARC, chapitre 18.2, « Gouvernements provinciaux », mai 2010; Commentaire CCH, « Imposition of Tax » paragraph 122(b) [¶4510]; Analyse/Commentaire – Analyse de David Sherman, 122 – Application of the GST and HST to Governments (taxnetpro); Topical Research Paper TRP-09 de l’ARC, « Sales to Provincial Governments ».

[29] Renvoi relatif à la taxe sur les produits et services, [1992] 2 R.C.S. 445, aux paragraphes 53 à 55.

[30] Renvoi relatif à la taxe sur le gaz naturel exporté, [1982] 1 R.C.S. 1004, à la page 1078.

[31] Selon ces arrêts de la Cour suprême du Canada, il ne devrait faire aucun doute que la protection constitutionnelle des provinces contre la taxation inclut le fait d’être protégé de l’application de la TPS à l’égard de la fourniture de services. Même si l’on ne s’est pas encore prononcé sur le caractère exécutoire d’une entente provinciale-fédérale qui vise à renoncer à la protection constitutionnelle dont bénéficie une province contre la taxation, des arrêts tels que Vander Zalm c. British Columbia, [2010] G.S.T.C. 139 (CSCB) (une décision qui fait actuellement l’objet d’un appel) évoquent l’existence d’un fédéralisme coopératif qui écarte la nécessité du recours à une immunité fiscale intergouvernementale.

[32] Feuille d’Info TPS/TVH GI-073 « Ontario et Colombie-Britannique : Transition à la taxe de vente harmonisée – Paiement de la TPS/TVH par les entités des gouvernements de l’Ontario et de la Colombie-Britannique », mai 2010; publications gouvernementales – Mémorandum no 400‑4 sur la TPS – « Organismes du secteur public », 18 janvier 1991.

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