Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

Dossier : 2010-1522(IT)G

ENTRE :

BALBIR KAUR BASI,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appels entendus les 12, 13 et 14 septembre 2012,

à Victoria (Colombie-Britannique)

 

Devant : L’honorable juge Wyman W. Webb

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

Me Kash Basi

Avocate de l’intimée :

Me Whitney Dunn

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

Les appels interjetés par l’appelante contre les nouvelles cotisations établies pour ses années d’imposition 2003 et 2005 sont accueillis, et l’affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations, étant entendu que :

 

a)                 l’appelante a réalisé une perte en capital de 289 110,78 $ en 2003;

 

b)                dans le calcul du gain en capital réalisé par l’appelante au titre de la disposition de son bien situé au 918-920, avenue Shearwater, à Victoria (Colombie‑Britannique), en 2003, le produit de disposition du bien pour l’appelante s’est chiffré à 320 000 $;

 

c)                 l’appelante a réalisé une perte en capital de 119 194,33 $ en 2005;

 

d)                dans le calcul du gain en capital réalisé par l’appelante au titre de la disposition de son bien situé au 2714, rue Quadra, à Victoria (Colombie‑Britannique), en 2005, le produit de disposition du bien pour l’appelante s’est chiffré à 550 000 $.

 

          Les parties ont jusqu’au 30 novembre 2012 pour s’entendre sur les dépens qui seront payés par l’intimée à l’appelante, à défaut de quoi il sera statué sur la question des dépens qui seront payés par l’intimée à l’appelante sur la base des conclusions écrites des parties, ces conclusions devant être déposées par l’appelante au plus tard le 25 janvier 2013, et par l’intimée au plus tard le 28 février 2013, et les éventuelles conclusions additionnelles devant être déposées par l’appelante au plus tard le 15 mars 2013.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour d’octobre 2012.

 

 

 

 

« Wyman W. Webb »

Juge Webb

 

Traduction certifiée conforme

ce 12e  jour de février 2013.

 

 

François Brunet, réviseur


 

 

 

Référence : 2012 CCI 345

Date : 20121003

Dossier : 2010-1522(IT)G

 

ENTRE :

BALBIR KAUR BASI,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Webb

 

[1]             Au début de l’audience, les avocats des deux parties ont signalé que les parties s’étaient entendues pour dire que l’appelante avait réalisé une perte en capital de 289 110,78 $ en 2003 et une perte en capital de 119 194,33 $ en 2005. Les seuls points restants à décider étaient les suivants :

 

a)            le calcul du produit de disposition réalisé par l’appelante sur la vente de son bien situé au 918-920, avenue Shearwater, Victoria (C.-B.) (le « bien Shearwater ») en 2003;

 

b)           le calcul du produit de disposition réalisé par l’appelante sur la vente de son bien situé au 2714, rue Quadra, Victoria (C.-B.) (le « bien Quadra ») en 2005.

 

[2]             L’appelante, âgée de plus de 75 ans, a aujourd’hui un revenu restreint. À la suite de certains investissements qui n’ont pas produit les résultats escomptés, l’appelante devait environ 500 000 $ à la société Terrapin Mortgage Investment Corp. en 2003. Cette dette ne pouvait être réglée que si les biens de l’appelante étaient vendus. L’appelante a conclu avec Terrapin Mortgage Investment Corp. une entente qui autorisait l’appelante à vendre ses biens au lieu que ce soit Terrapin Mortgage Investment Corp. qui vende les biens en vertu d’un jugement. Parmi les biens devant être vendus, il y avait le bien Shearwater et le bien Quadra. L’appelante a vendu ses biens pour rembourser sa dette à Terrapin Mortgage Investment Corp. et elle a tout perdu.

 

Le bien Shearwater

 

[3]             Le bien Shearwater était un bien de location comprenant deux logements. Lors de la vente de ce bien, l’un des logements était vacant. Des travaux devaient être exécutés sur l’immeuble avant qu’il puisse être vendu. On a commencé les travaux sur le logement vacant. Les fils de l’appelante ont apporté leur aide dans les rénovations, mais le gros du travail a été effectué par Jagtar Phagura, qui exploitait une entreprise d’aménagement immobilier. Pendant les travaux de rénovation, Jagtar Phagura s’est engagé à acheter ce bien pour la somme de 320 000 $. La copie de la convention d’achat-vente a été produite au cours de l’audience. Avant la conclusion de la vente de ce bien, Jagtar Phagura a accepté de vendre ce bien à Peter Dosanjh pour la somme de 340 000 $. La copie de cette convention d’achat-vente a également été produite au cours de l’audience.

 

[4]             Les documents produits par l’appelante comprennent aussi un acte par lequel Peter Dosanjh cédait à Ronald Millard son droit d’acheter le bien Shearwater. L’acheteur final du bien fut la société 678664 B.C. Ltd.

 

[5]             À la clôture, le bien a été cédé par l’appelante à 678664 B.C. Ltd., et les documents de clôture indiquent un prix d’achat de 340 000 $. Si l’on tient pour acquis que, lors des cessions de Peter Dosanjh à Ronald Millard et de Ronald Millard à 678664 B.C. Ltd. (et si l’on tient aussi pour acquis que Ronald Millard a cédé ses droits à 678664 B.C. Ltd.), le prix d’achat est demeuré celui indiqué dans la convention d’achat-vente conclue entre Jagtar Phagura et Peter Dosanjh, alors le prix d’achat de 340 000 $ était exact pour ce qui est de 678664 B.C. Ltd.

 

[6]             Cependant, en l’espèce, il faut rechercher si le produit de disposition réalisé par l’appelante était de 320 000 $ ou de 340 000 $.

 

[7]             Par l’arrêt McMillan c. La Reine, 2012 CAF 126, la Cour d’appel fédérale a fait les observations suivantes :

 

[7]   Avant de conclure les présents motifs, nous faisons observer que l’appelante n’a pas mis en doute, dans son mémoire des faits et du droit, la déclaration faite par le juge au paragraphe 19 de ses motifs, déclaration qu’il a réitérée au paragraphe 21 : « l’appelante a la charge initiale de prouver selon la prépondérance des probabilités (c’est-à-dire selon toute vraisemblance) l’inexactitude de l’une ou l’autre des hypothèses que le ministre a émises pour établir la cotisation (ou la nouvelle cotisation) dont l’appelante a fait l’objet et à laquelle l’appelante ne souscrit pas ». À notre humble avis, il est bien établi en droit que la charge initiale dont doit s’acquitter un contribuable qui interjette appel consiste à « démolir » les présomptions (hypothèses) du ministre sur lesquelles repose la cotisation. Le contribuable s’acquitte de cette obligation initiale de « démolir »les présomptions du ministre lorsqu’il produit à tout le moins une preuve prima facie. Après que le contribuable a produit une telle preuve, le fardeau de la preuve passe au ministre, qui doit établir, selon la prépondérance des probabilités, que ses présomptions étaient justes (Hickman Motors Ltd. c. Canada, [1997] 2 R.C.S. 336, aux paragraphes 92 à 94; arrêt House c. Canada, 2011 CAF 234, 422 N.R. 144, au paragraphe 30).

 

[8]             Au départ, la charge qui pèse en l’occurrence sur l’appelante ne consiste donc pas à prouver, selon la prépondérance des probabilités, que la présomption selon laquelle le produit de disposition réalisé par l’appelante était de 340 000 $ est inexacte, mais plutôt de rapporter uniquement la preuve prima facie que le produit de disposition réalisé par elle n’était pas de 340 000 $. Une fois que l’appelante rapporte la preuve prima facie que le produit de disposition réalisé par elle n’était pas de 340 000 $, alors il incombe au ministre de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que le produit de disposition était de 340 000 $.

 

[9]             En l’espèce, il m’apparaît clair que l’appelante a rapporté, à tout le moins, la preuve prima facie que le produit de disposition réalisé par elle était de 320 000 $ et non de 340 000 $. Outre les conventions d’achat-vente conclues entre l’appelante et Jagtar Phagura, et entre Jagtar Phagura et Peter Dosanjh, Ray Basi (le fils de l’appelante, avocat spécialisé en droit immobilier qui s’était occupé de la transaction) et Jagtar Phagura ont témoigné. Selon moi, ces deux témoins ont été crédibles. Ils ont tous deux confirmé que l’appelante a vendu le bien pour la somme de 320 000 $, et que Jagtar Phagura a ensuite revendu le bien avant la clôture pour la somme de 340 000 $. La cession s’est faite de l’appelante à 678664 B.C. Ltd., de sorte que les droits de cession immobilière n’ont été payés qu’une seule fois et non en plusieurs fois.

 

[10]        Les documents de clôture établis par l’avocat de 678664 B.C. Ltd. et les documents déposés en vertu du Land Title Act de la Colombie‑Britannique confirment le transfert de titre de l’appelante à 678664 B.C. Ltd., ainsi que la somme payée par 678664 B.C. Ltd. La somme payée par 678664 B.C. Ltd. n’était pas cependant la somme pour laquelle l’appelante a vendu le bien Shearwater. L’appelante a vendu le bien Shearwater à Jagtar Phagura pour la somme de 320 000 $, et celui-ci a revendu le bien pour la somme de 340 000 $.

 

[11]        Le seul élément de preuve présenté par le ministre fut le témoignage du vérificateur de l’Agence du revenu du Canada, qui n’a pu que confirmer les chiffres indiqués dans les documents de clôture. Le simple fait que le vérificateur ait confirmé les chiffres indiqués dans des documents qui sont déjà produits en preuve ne dispense pas le ministre de son obligation de prouver que le produit de disposition était de 340 000 $.

 

[12]        En l’espèce, même si l’appelante avait été tenue de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que le produit de disposition qu’elle a réalisé pour le bien Shearwater était de 320 000 $, je conclus que l’appelante se serait acquittée de cette obligation car, selon moi, il est probable que le produit de disposition qu’elle a réalisé sur le bien Shearwater fut de 320 000 $.

 

[13]        En conséquence, l’appel concernant la question du produit de disposition réalisé par l’appelante sur le bien Shearwater est accueilli, et je conclus que le produit de disposition réalisé sur le bien Shearwater fut de 320 000 $.

 

Le bien Quadra

 

[14]        Le bien Quadra était un immeuble à usage commercial, occupé en partie par les fils de l’appelante – Ray Basi et Kash Basi – qui exerçaient comme avocats depuis des bureaux situés à l’intérieur de ce bien. Puisque l’appelante vendait la totalité de ses biens pour régler sa dette à Terrapin Mortgage Investment Corp., il semble évident qu’elle aurait cherché à vendre le bien Quadra à peu près en même temps qu’elle cherchait à vendre le bien Shearwater. Comme le bien Quadra n’a été vendu qu’en 2005, il semble également évident que ce bien ne s’est pas vendu rapidement et que l’appelante a eu du mal à le vendre.

 

[15]        Les fils de l’appelante ont tenté de vendre par eux-mêmes le bien Quadra et, voyant qu’ils n’y parvenaient pas, ils se sont adressés à un agent immobilier, qui a mis le bien sur le marché pendant la période allant du 23 janvier 2004 au 30 avril 2004. Le bien ne s’est toujours pas vendu, et les fils de l’appelante ont tenté à nouveau de le vendre par eux-mêmes. Le prix demandé était de 549 000 $. L’appelante a également produit des copies de deux rapports d’évaluation concernant le bien Quadra. Le premier, établi par Palmer Appraisals Ltd. en 1998, indiquait que la valeur marchande de ce bien était [traduction] « aux alentours de 470 000 $ » au 25 février 1998. Le deuxième rapport d’évaluation a été établi par Blake Appraisals Ltd. en 2003. On pouvait y lire que la valeur marchande de ce bien était de 510 000 $ au 19 juin 2003.

 

[16]        Un accord fut finalement conclu avec Lee Larabie pour la vente du bien Quadra. L’accord fut conclu avec Lee Larabie, mais l’acheteur était une société à numéro (0723585 BC Ltd.), dont les actions étaient détenues par la conjointe de fait de Lee Larabie à l’époque et par les parents de celle-ci. Le prix d’achat, d’après ce qui ressort des documents établis pour l’application du Land Title Act de Colombie‑Britannique, et selon ce qui apparaît dans les états des rajustements établis pour la clôture, était de 650 000 $. L’appelante et Ray Basi ont tous deux témoigné que le seul montant reçu par l’appelante pour le bien était de 550 000 $. Les 100 000 $ restants apparaissaient dans un billet à ordre. Ray Basi a affirmé que, selon ce qu’il croyait savoir, le billet à ordre de 100 000 $ concernait le changement de zonage du bien. Peu après la clôture, il est devenu évident que le changement de zonage ne serait pas approuvé. Aucun paiement n’a été effectué en ce qui concerne le billet à ordre, et Ray Basi n’a jamais cherché à faire exécuter ce billet à ordre.

 

[17]        L’intimée n’admet pas qu’il existait un billet à ordre et, même s’il y en avait un, elle fait valoir que le montant indiqué sur le billet devrait être inclus dans le calcul du produit de disposition réalisé par l’appelante sur le bien Quadra. L’avocate de l’intimée s’est référée à une décision du juge Rip (tel était alors on titre), Sénécal c. The Minister of National Revenue, [1993] 2 C.T.C. 2218, 93 DTC 1149, à l’appui de la thèse de l’intimée portant que le produit de disposition réalisé par l’appelante englobait le montant indiqué sur le billet à ordre. Toutefois, comme l’on peut le lire dans cette décision :

 

26  [...]

 

      La preuve produite par le contribuable ne venait pas à l’appui de sa position, selon laquelle les biens transférés à ses enfants avaient une valeur inférieure à celle du billet à ordre. S’il y avait eu suffisamment d’éléments de preuve en ce sens, l’arrêt Demers aurait peut-être pu s’appliquer. La détermination du produit d’une disposition doit être considérée de façon réaliste si quelque chose laisse à penser que le prix de vente comprenait un élément autre que la contrepartie du bien proprement dit. Dans l’affaire Demers, ce quelque chose était l’obligation d’acheter une créance à sa valeur nominale, ce qui gonflait le prix de vente des actions. Dans l’affaire Attis, ce quelque chose était l’existence possible d’une prime en sus de la valeur des biens.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

[18]        Il me semble que l’appelante a rapporté une preuve suffisante laquelle, non seulement constitue une preuve prima facie, mais encore établit, selon la prépondérance des probabilités (alors même que l’unique obligation de l’appelante est d’apporter une preuve prima facie), que la contrepartie comprenait un billet à ordre de 100 000 $ et que ce billet à ordre avait été émis à titre de contrepartie pour autre chose que le bien Quadra.

 

[19]        Le montant représentant l’acompte versé par l’acheteur, sur l’état des rajustements de l’acheteur établi pour la clôture, était de 200 000 $. Cependant, sur l’état des rajustements du vendeur, ce montant était biffé et le montant de 201 500 $ était écrit au-dessus du montant biffé. Les témoins n’ont pas pu se souvenir pourquoi le montant initial avait été modifié. Quoi qu’il en soit, Ray Basi a déclaré que l’acompte englobait le billet à ordre de 100 000 $. Autrement, cela voudrait dire que l’appelante avait reçu, avant la clôture, un acompte en espèces de 200 000 $ ou de 201 500 $ sur un bien qui était vendu pour la somme de 650 000 $. Et cet acompte aurait alors représenté environ 31 p. 100 du prix d’achat. Il n’a pas été établi que l’appelante avait reçu un acompte de 200 000 $ ou 201 500 $ en espèces pour le bien Quadra. Il me semble donc qu’il est probable que l’acompte comprenait un billet à ordre de 100 000 $ et un acompte en espèces de 100 000 $ ou 101 500 $, et que l’appelante n’avait pas reçu un acompte de 200 000 $ ou 201 500 $ en espèces.

 

[20]        Il me semble également que le billet à ordre concernait autre chose que le prix d’achat du bien Quadra. Selon le rapport d’évaluation de ce bien, la valeur marchande du bien en 2003 (année au cours de laquelle l’appelante avait tenté la première fois de vendre ce bien) était de 510 000 $. Le prix demandé à l’époque où le bien a été mis sur le marché par l’agent immobilier au début de 2004 était de 549 000 $, et le prix demandé n’a pas changé quand les fils de l’appelante ont tenté de vendre le bien par eux-mêmes après l’expiration du mandat de vente. Le bien a donc été en vente pendant plus d’un an à ce prix-là avant que Lee Larabie ne décide de l’acheter. Il n’a pas décidé de l’acheter après l’avoir vu une seule fois. Lee Larabie a vu le bien plus d’une fois et en a discuté avec Ray Basi au cours d’une certaine période avant de finalement décider d’acheter le bien. L’achat du bien n’intéressait d’ailleurs personne d’autre.

 

[21]        Lee Larabie n’a pas témoigné au cours de l’audience. Malgré leurs efforts, les fils de l’appelante n’ont pas réussi à le trouver. L’appelante a produit une note rédigée par Ray Basi et Lee Larabie par laquelle Lee Larabie confirmait que la contrepartie comprenait le billet à ordre de 100 000 $ et que cette [traduction] « prime » reposait sur l’idée que le bien pouvait être mis en valeur. L’appelante s’est également adressée à un graphologue qui a confirmé que [traduction] « il est très probable » que Lee Larabie ait signé la lettre.

 

[22]        L’appelante a également appelé à témoigner Yen Vu, qui était la conjointe de fait de Lee Larabie quand le bien avait été acheté et qui, avec ses parents, détenait les actions de la société qui avait fait l’acquisition du bien Quadra. Yen Vu a confirmé que Lee Larabie avait négocié l’entente et qu’elle ne savait pas où il se trouvait. Elle était également la signataire autorisée de la société qui avait dû signer la déclaration de revenus de 2005 de la société. Dans cette déclaration de revenus, la société indiquait que le coût du bien Quadra était de 562 454 $. Le comptable de la société à numéro qui avait acheté le bien Quadra (il était également le comptable de l’appelante) a lui aussi témoigné, et il a confirmé que, au moment d’établir la déclaration de revenus de cette société, il avait indiqué comme coût du bien Quadra la somme de 562 454 $, c’est-à-dire le prix d’achat de 550 000 $, plus les droits de  cession immobilière et les honoraires d’avocat. La société à numéro a vendu le bien Quadra en 2008 pour la somme de 513 000 $.

 

[23]        L’avocate de l’intimée a insisté sur le fait que la déclaration de revenus de la société 0723585 BC Ltd. pour son année d’imposition 2005 (qui s’est terminée le 31 décembre 2005) n’avait été produite qu’en juillet 2007, après que l’Agence du revenu du Canada eut entrepris une vérification de l’appelante. Cependant, à cette époque, comment les dirigeants de cette société auraient-ils pu savoir que la société vendrait le bien un an plus tard (en 2008) pour 513 000 $? Quand cette société a produit sa déclaration de revenus en 2007, elle n’aurait pas indiqué un prix de base rajusté (ou un coût en capital) inférieur à la somme qu’elle avait payée pour le bien, car le prix de base rajusté (ou le coût en capital) servirait à calculer le gain ou la perte que la société réaliserait lors de la disposition du bien. Pourquoi la société indiquerait-elle un prix de base rajusté (ou un coût en capital) fondé sur un prix d’achat de 550 000 $ en juillet 2007 si le prix d’achat n’était pas 550 000 $?

 

[24]        Hormis le fait qu’ils avaient le même comptable, il n’y avait aucun lien ni aucune relation entre les actionnaires de 0723585 BC Ltd. et l’appelante. Il semble évident que les actionnaires de cette société à numéro et l’appelante n’avaient aucun lien de dépendance. Il n’y a aucune raison de croire ni même de donner à penser que 0723585 BC Ltd. aurait fait état en juillet 2007 d’un prix de base rajusté moindre (ou d’un coût en capital moindre) simplement pour rendre service à l’appelante. Il me semble donc que, même si la déclaration de revenus de 2005 ne fut produite qu’en 2007, comme cette déclaration fut produite plusieurs mois avant que le bien ne fût vendu par la société (la vente a eu lieu au cours de 2008), elle va quand même dans le sens de la thèse de l’appelante selon laquelle le prix d’achat du bien Quadra était de 550 000 $ et non de 650 000 $.

 

[25]        Il me semble donc évident que le prix d’achat du bien était de 550 000 $ (c’est‑à‑dire seulement 1 000 $ de plus que le prix demandé de 549 000 $) et que le billet à ordre de 100 000 $ concernait une aide pour l’obtention d’une approbation de changement de zonage de sorte que le bien puisse être mis en valeur.

 

[26]        L’appel concernant la question du produit de disposition réalisé par l’appelante sur le bien Quadra est donc accueilli, et je conclus que le produit de disposition réalisé sur ce bien était de 550 000 $.

 

[27]        Il me semble que le recours de l’appelante pourrait être accueilli ici selon un autre fondement. Il m’apparaît évident que la contrepartie comprenait un billet à ordre de 100 000 $. Si le produit de disposition était de 650 000 $, alors le prix de base rajusté du billet à ordre serait de 100 000 $. Il me semble que, lorsqu’il est devenu manifeste que le bien ne pourrait pas faire l’objet d’un changement de zonage, il est devenu tout aussi manifeste que le billet à ordre de 100 000 $ ne serait pas payé. Le billet à ordre aurait donc été annulé, résultant en une disposition de ce billet[1]. Comme la société a indiqué dans sa déclaration de revenus de 2005 que le coût pour elle du bien Quadra était de 550 000 $ (plus les droits de cession immobilière et les honoraires d’avocat) et comme, selon les témoignages non contredits, il est devenu évident, peu après la clôture, que le bien ne pourrait pas faire l’objet d’un changement de zonage, il m’apparaît probable que le billet à ordre aurait été annulé avant la fin de 2005. L’annulation aurait donné lieu à une perte en capital de 100 000 $[2] en 2005. Cette perte en capital aurait été déduite du gain en capital additionnel qui aurait été réalisé si le produit de disposition avait été de 650 000 $ au lieu de 550 000 $. Le gain en capital net imposable réalisé en 2005 serait donc le même, que le produit de disposition soit de 650 000 $ avec une perte en capital de 100 000 $ au titre de l’annulation du billet à ordre ou qu’il soit de 550 000 $ (sans perte en capital au titre de l’annulation du billet à ordre).

 

Conclusion

 

[28]        Les appels interjetés par l’appelante des nouvelles cotisations établies pour ses années d’imposition 2003 et 2005 sont accueillis, et l’affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations, étant entendu que :

 

a)                 l’appelante a réalisé une perte en capital de 289 110,78 $ en 2003;

 

b)                dans le calcul du gain en capital réalisé par l’appelante au titre de la disposition de son bien situé au 918-920, avenue Shearwater, à Victoria (Colombie‑Britannique), en 2003, le produit de disposition du bien pour l’appelante s’est chiffré à 320 000 $;

 

c)                 l’appelante a réalisé une perte en capital de 119 194,33 $ en 2005;

 

d)                dans le calcul du gain en capital réalisé par l’appelante au titre de la disposition de son bien situé au 2714, rue Quadra, à Victoria (Colombie‑Britannique), en 2005, le produit de disposition du bien pour l’appelante s’est chiffré à 550 000 $.

 

[29]        Les parties auront jusqu’au 30 novembre 2012 pour s’entendre sur les dépens qui seront payés par l’intimée à l’appelante, à défaut de quoi il sera statué sur la question des dépens qui seront payés par l’intimée à l’appelante sur la base des conclusions écrites des parties, ces conclusions devant être déposées par l’appelante au plus tard le 25 janvier 2013, et par l’intimée au plus tard le 28 février 2013, et les éventuelles conclusions additionnelles devant être déposées par l’appelante au plus tard le 15 mars 2013.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour d’octobre 2012.

 

 

 

 

« Wyman W. Webb »

Juge Webb

 

Traduction certifiée conforme

ce 12e  jour de février 2013.

 

 

François Brunet, réviseur

 

 


RÉFÉRENCE :                                 2012 CCI 345

 

N° DU DOSSIER DE LA COUR :   2010-1522(IT)G

 

INTITULÉ :                                      BALBIR KAUR BASI c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                Victoria (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Les 12, 13 et 14 septembre 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L’honorable juge Wyman W. Webb

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 3 octobre 2012

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelante :

Me Kash Basi

Avocate de l’intimée :

Me Whitney Dunn

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante:

 

                          Nom :                     Kash Basi

 

                          Cabinet :                 Kash Basi

                                                          Victoria (Colombie-Britannique)

 

       Pour l’intimée :                          Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1] Sous-alinéas b)(i) ou (ii) de la définition de « disposition » du paragraphe 248(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu.

 

[2] La perte en capital ne serait pas refusée aux termes du sous-alinéa 40(2)g)(ii) de la Loi de l'impôt sur le revenu parce que le billet à ordre aurait fait partie intégrante de la contrepartie de la disposition d’une immobilisation en faveur d’une personne avec qui l’appelante n’avait aucun lien de dépendance.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.