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Dossier : 2008-1842(IT)G

 

ENTRE :

ELENA SHULKOV,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu du 2 au 5 mai 2011, les 21 et 22 juin 2011, du 5 au 8 décembre 2011, et du 19 au 27 janvier 2012, à Ottawa, Canada.

 

Devant : L'honorable juge Steven K. D'Arcy

 

Comparutions :

 

Avocats de l'appelante :

Me Terry D. McEwan

Me Karine Veilleux

Mme Kristina M. Mahon (stagiaire)

 

Avocats de l'intimée :

Me Ifeanyi Nwachukwu

Me Mélanie Sauriol

Me Shane Aikat

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L'appel de la nouvelle cotisation établie par le ministre du Revenu national le 6 mars 2008 en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu est rejeté avec dépens à l'intimée, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 31e jour de décembre 2012.

 

« S. D'Arcy »

Le juge D'Arcy

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 27e jour de mai 2013.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur

 


 

 

 

 

Référence : 2012 CCI 457

Date : 20121231

Dossier : 2008-1842(IT)G

 

ENTRE :

 

ELENA SHULKOV,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge D'Arcy

 

[1]             L'appelante a interjeté appel de la nouvelle cotisation établie par le ministre du Revenu national (le « ministre ») le 6 mars 2008, en vertu de l'article 160 de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.) (la « Loi »), relativement à des actions transférées à l'appelante par son époux.

 

[2]             L'appelante fait valoir que le ministre a surévalué la juste valeur marchande des actions et a omis de tenir compte de la contrepartie qu'elle a versée à son époux au titre des actions.

 

[3]             L'audition de l'appel a duré 17 jours. Les parties ont déposé un exposé conjoint partiel des faits (l'« ECPF ») de 39 pages, la Cour a entendu le témoignage de huit personnes (y compris trois témoins experts), et elle était saisie de 17 recueils conjoints de documents (renfermant plus de 400 pièces), de plus de 30 pièces produites par l'appelante et de plus de 110 pièces produites par l'intimée.

 

Le résumé des faits

 

[4]             L'appelante était la conjointe de fait de M. Tom Hinke de 1999 jusqu'à leur mariage, en septembre 2005.

 

[5]             Monsieur Hinke a fondé l'entreprise Thermal Energy International Inc. (« TEI »), société canadienne cotée en bourse qui offre des produits en matière d'énergie et de réduction des émissions qui sont adaptés aux besoins des clients.

 

[6]             De 1994 à novembre 2004, M. Hinke était président et chef de la direction de TEI, qui a mis fin à son emploi le 21 juin 2005.

 

[7]             Le 23 février 2006, le ministre a établi, en vertu de l'article 160 de la Loi, une cotisation s'élevant à 708 155 $ relativement au transfert des actions suivantes de TEI par M. Hinke à l'appelante (les « blocs d'actions visés par la cotisation initiale »)[1] :

 

Date de transfert selon l'ARC

Nombre d'actions transférées

Juste valeur marchande selon l'ARC

 

 

 

27 mai 2005

678 500

210 335 $

3 août 2005

426 000

136 320 $

12 octobre 2005

800 000

208 000 $

5 janvier 2006

300 000

 55 500 $

15 février 2006

490 000

 98 000 $

Total

2 694 500

708 155 $

 

[8]             Après avoir reçu les observations de l'appelante, le ministre a établi à l'égard de cette dernière une nouvelle cotisation ayant pour effet de réduire le montant de la cotisation de 161 320 $ de la manière suivante :

 

- Le ministre a exclu les 426 000 actions de TEI que M. Hinke avait transférées à l'appelante le 3 août 2005, selon l'hypothèse antérieure du ministre. Cette mesure s'est traduite par une réduction de 136 320 $ du montant imposé, soit la juste valeur marchande de ces actions à la date où elles ont été transférées à l'appelante, selon l'hypothèse du ministre. Lorsqu'il a effectué cette réduction, le ministre a supposé que l'appelante avait acheté les actions transférées le 3 août 2005 directement de TEI au moyen de ses propres fonds.

 

- Le ministre a conclu que l'appelante avait payé une contrepartie de 25 000 $ pour les actions transférées. Cette contrepartie comprenait les sommes que l'appelante aurait payées pour le compte de M. Hinke au titre de services juridiques.

 

[9]             Après avoir effectué les rajustements susmentionnés, le ministre a établi à l'égard de l'appelante une nouvelle cotisation s'élevant à 546 835 $ relativement au transfert de 2 268 500 actions de TEI (les « blocs d'actions visés par la nouvelle cotisation ») ayant une juste valeur marchande de 571 835 $ moins une contrepartie de 25 000 $. Les blocs d'actions visés par la nouvelle cotisation comprenaient les transferts d'actions suivants :

 

Date de transfert selon l'ARC

Nombre d'actions transférées

Juste valeur marchande selon l'ARC

 

 

 

27 mai 2005

678 500

210 335 $

12 octobre 2005

800 000

208 000 $

5 janvier 2006

300 000

55 500 $

15 février 2006

490 000

98 000 $

Total

2 268 500

571 835 $

 

[10]        J'ai entendu les témoignages de l'appelante et de M. Hinke. Comme je l'expliquerai plus loin dans les présents motifs du jugement, la crédibilité de l'appelante et de M. Hinke a été démolie pendant les six jours au cours desquels ce dernier a été contre‑interrogé.

 

Les questions en litige

 

[11]        Dans l'arrêt Wannan c. La Reine[2], la juge Sharlow de la Cour d'appel fédérale s'est exprimée en ces termes au sujet du paragraphe 160(1) :

 

L'article 160 de la Loi de l'impôt sur le revenu est un instrument important de recouvrement des impôts, parce qu'il contrarie les tentatives d'un contribuable de mettre de l'argent ou d'autres biens hors de la portée du fisc en les transférant censément à des amis. C'est cependant une disposition draconienne. Les recours à l'article 160 ne sont pas tous injustifiés ou injustes, mais un résultat inique est toujours possible. Il n'existe pas de défense de diligence raisonnable à l'encontre de l'application de l'article 160. Cet article peut s'appliquer au cessionnaire de biens qui n'a pas l'intention d'aider le débiteur fiscal primaire à se soustraire à l'impôt. Il peut même s'appliquer au cessionnaire qui n'a pas connaissance de la situation fiscale du débiteur fiscal primaire. Cependant, l'article 160 a été validement promulgué comme partie des lois du Canada. Si la Couronne entend se fonder sur l'article 160 dans un cas donné, elle doit être autorisée à le faire pour autant que les conditions prévues soient remplies.

 

[12]        Le paragraphe 160(1) s'applique lorsqu'une personne transfère des biens, directement ou indirectement, au moyen d'une fiducie ou de toute autre façon, à son époux. L'appelante reconnaît que M. Hinke a transféré des biens à son épouse, à savoir l'appelante elle‑même.

 

[13]        Pour le présent appel, la somme à payer par l'appelante en application du paragraphe 160(1) est établie suivant l'alinéa 160(1)e) et est égale au moins élevé des montants suivants :

 

(i)      l'excédent éventuel de la juste valeur marchande des biens au moment du transfert à l'appelante sur la juste valeur marchande à ce moment de la contrepartie donnée par l'appelante pour les biens;

 

(ii)     le total des montants dont chacun représente un montant que M. Hinke doit payer en vertu de la Loi au cours de l'année d'imposition dans laquelle les biens ont été transférés ou d'une année d'imposition antérieure ou pour une de ces années.

 

[14]        L'obligation fiscale de M. Hinke sous le régime de la Loi n'est nullement contestée. Les parties reconnaissent que de mai 2005 à février 2006 (la « période de transfert »), le montant que devait payer M. Hinke était supérieur à 1,4 million de dollars.

 

[15]        En revanche, les parties ne s'entendent pas sur la somme établie en application du sous‑alinéa 160(1)e)(i). Elles ont soulevé les points suivants : le nombre d'actions de TEI qui ont été transférées à l'appelante, la juste valeur marchande des actions de TEI à la date de leur transfert, et la contrepartie, le cas échéant, payée par l'appelante pour les actions de TEI.

 

[16]        L'intimée a fait valoir que les biens transférés pour l'application de l'article 160 étaient les blocs d'actions visés par la cotisation initiale. L'avocat de l'intimée a avancé que la décision du ministre de retirer les actions transférées le 3 août 2005 de la somme imposée en vertu de l'article 160 constituait une erreur découlant des assertions inexactes faites par l'appelante.

 

[17]        L'appelante n'est pas d'accord. Selon son avocat, les seuls biens transférés étaient les blocs d'actions visés par la nouvelle cotisation.

 

[18]        L'avocat de l'appelante a soutenu que la juste valeur marchande des biens transférés correspondait à la juste valeur marchande des blocs d'actions visés par la nouvelle cotisation, soit 271 895 $ selon ses calculs.

 

[19]        L'avocat de l'intimée a affirmé que la juste valeur marchande des biens transférés équivalait à la juste valeur marchande des blocs d'actions visés par la cotisation initiale, soit 678 535 $ selon ses calculs.

 

[20]        L'avocat de l'appelante a allégué que l'appelante a versé une contrepartie de 199 333 $ à M. Hinke pour les blocs d'actions visés par la nouvelle cotisation.

 

[21]        L'intimée n'est pas d'accord. Son avocat a fait valoir que l'appelante n'avait payé aucune contrepartie à M. Hinke pour les blocs d'actions visés par la cotisation initiale (lesquels englobent les blocs d'actions visés par la nouvelle cotisation).

 

[22]        Bref, l'appelante reconnaît l'obligation fiscale qui lui incombe selon l'article 160 de la Loi, mais elle estime que cette obligation s'élève à 72 562 $ et non à 546 835 $, comme l'a déterminé le ministre dans la nouvelle cotisation. L'intimée croit pour sa part que l'article 160 oblige l'appelante à payer la somme de 546 835 $ visée dans la nouvelle cotisation établie par le ministre.

 

Le nombre d'actions de TEI transférées par M. Hinke à l'appelante

 

[23]        La première question que j'examinerai intéresse le nombre d'actions transférées par M. Hinke à l'appelante au cours de la période pertinente.

 

[24]        Lorsqu'il a établi une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelante, le ministre a exclu les actions transférées le 3 août 2005 des biens transférés parce qu'il a supposé que l'appelante avait acheté ces actions directement de TEI au moyen de ses propres fonds.

 

[25]        Selon l'intimée, le ministre a, à tort, exclu ces actions par suite des assertions inexactes formulées par l'appelante. L'avocat de l'intimée a soutenu que l'appelante n'avait pas acheté ces actions directement de TEI, mais que les actions lui avaient plutôt été transférées par M. Hinke. En outre, il a affirmé que l'appelante n'avait versé aucune contrepartie pour ces actions.

 

[26]        L'intimée a reconnu que la Cour ne peut augmenter l'impôt à payer au‑delà de la somme visée par la cotisation. L'avocat de l'intimée a toutefois avancé que, conformément au paragraphe 152(9), le ministre peut présenter d'autres arguments pour justifier la somme fixée dans la cotisation. En particulier, l'avocat de l'intimée a fait valoir que je devais inclure les actions transférées le 3 août 2005 pour décider si l'obligation fiscale de l'appelante suivant le paragraphe 160(1) s'élevait à au moins 546 835 $, soit la somme faisant l'objet de la cotisation établie par le ministre.

 

[27]        Dans leur témoignage, tant l'appelante que M. Hinke ont affirmé que l'appelante avait reçu les actions transférées le 3 août 2005 directement de TEI par suite de l'exercice, au moyen de fonds fournis par l'appelante, d'une option d'achat d'actions détenue par M. Hinke.

 

[28]        L'extrait suivant tiré d'un affidavit souscrit par M. Hinke devant la Cour fédérale résume avec exactitude les témoignages sous serment rendus par celui‑ci et l'appelante devant le présent tribunal au sujet des 426 000 actions transférées le 3 août 2005 :

 

[TRADUCTION]

 

3 août 2005 : [...] À cette date, j'ai fait en sorte que Mme Shulkov exerce certaines options d'achat d'actions que je détenais relativement à 426 000 actions de TEI au prix de 0,18 $ l'action. J'ai été informé par Mme Shulkov, et je tiens pour véridique, qu'elle a payé à TEI la somme de 76 680 $ pour acquérir les actions vers le 6 juin 2005. J'ai également fait en sorte qu'un associé exerce 50 000 options à cette date, pour le même prix. Cet associé a lui aussi payé à TEI les sommes nécessaires à l'achat des actions[3].

 

[29]        Il ressort sans équivoque de l'examen de la preuve que l'exercice de l'option a eu lieu de la façon suivante :

 

- Le 31 mai 2005, le directeur financier et trésorier de TEI a adressé à M. Hinke une lettre l'informant qu'il détenait un million d'options d'achat d'actions qui expiraient le 6 juin 2005[4].

 

- Le 6 juin 2005, M. Hinke a répondu par lettre au directeur financier et trésorier de TEI qu'il exerçait son option d'achat à l'égard de 500 000 actions de TEI au prix de 0,18 $ l'action, soit 90 000 $[5]. L'appelante a confirmé que la somme de 90 000 $ a été payée au moyen d'une traite bancaire de la Banque TD[6] de 70 000 $ datée du 6 juin 2005 et d'un chèque de 20 000 $ daté du 7 juin 2005 et tiré sur le compte bancaire détenu par l'appelante à la Banque TD[7].

 

- Le 21 juin 2005, TEI a mis fin à l'emploi de M. Hinke[8].

 

- M. Hinke a mentionné ce qui suit dans un courriel envoyé le 22 juin 2005 au directeur financier et directeur général de TEI : [TRADUCTION] « Plus de deux semaines se sont maintenant écoulées depuis le 6 juin 2005, date à laquelle je vous ai remis la somme de 90 000 $ en espèces afin d'exercer mon option d'achat d'actions, au prix de 0,18 $ l'action, visant 500 000 actions ordinaires « librement négociables » de Thermal Energy International Inc. Auriez‑vous l'obligeance de me dire à quel moment et à quel endroit mes 500 000 actions me seront remises[9]? »

 

- Le 22 juin 2005, Computershare a délivré au nom de M. Hinke un certificat d'actions portant le numéro 0748 relativement à 500 000 actions de TEI[10]. M. Hinke a confirmé que ce certificat d'actions visait les actions acquises lors de l'exercice de son option[11].

 

[30]        En résumé, l'option visant les 500 000 actions a été exercée le 6 juin 2005 et les actions ont été émises au nom de M. Hinke le 22 juin 2005, comme en fait foi le certificat d'actions numéro 0748.

 

[31]        Le 18 juillet 2005, M. Hinke a donné à Computershare des instructions écrites concernant le transfert de 700 000 actions de TEI, constatées par neuf certificats d'actions numérotés successivement (de 1758 à 1766). Ces neuf certificats étaient tous datés du 19 février 2004. M. Hinke a donné instructions à Computershare de transférer les 700 000 actions de la manière suivante[12] :

 

- 426 000 actions devaient être transférées à l'appelante;

 

- 50 000 actions devaient être transférées à M. Proulx;

 

- 124 000 actions devaient être transférées, dans différentes proportions, à deux particuliers et à un cabinet d'avocats;

 

- 100 000 actions devaient être conservées par M. Hinke.

 

[32]        Computershare a suivi les instructions de M. Hinke et, plus particulièrement, elle a émis au nom de l'appelante, le 3 août 2005, le certificat d'actions numéro 0844 relativement à 426 000 actions de TEI[13]. M. Hinke a reconnu que le certificat relatif aux 426 000 actions visait les actions transférées le 3 août 2005.

 

[33]        La preuve documentaire objective présentée à la Cour montre qu'en août 2005, l'appelante n'a reçu aucune des 500 000 actions de TEI émises par TEI lors de l'exercice de l'option d'achat d'actions de M. Hinke. Les 426 000 actions transférées le 3 août 2005 reçues par l'appelante faisaient partie des 700 000 actions qui, comme l'établissent les neuf certificats d'actions numérotés successivement, ont été émises en faveur de M. Hinke le 19 février 2004.

 

[34]        Monsieur Hinke a finalement transféré à l'appelante les 500 000 actions de TEI qu'il avait reçues lors de l'exercice de son option d'achat d'actions. Le 7 octobre 2005, il a donné instructions à Computershare de transférer à l'appelante les 500 000 actions de TEI ainsi que 300 000 autres actions de TEI[14].

 

[35]        Au cours du contre‑interrogatoire, l'avocat de l'intimée a demandé à M. Hinke de faire concorder son témoignage voulant que l'appelante ait reçu les actions transférées le 3 août 2005 directement de TEI avec la preuve présentée à la Cour selon laquelle il a transféré ces actions à l'appelante au moyen d'actions qu'il détenait depuis au moins février 2004.

 

[36]        Monsieur Hinke a d'abord expliqué cette contradiction de la façon suivante :

 

[TRADUCTION]

 

J'ai mentionné qu'en raison du temps écoulé entre la date de l'exercice de l'option, le 6 juin, et la date où Thermal m'a congédié, le 21 juin, et a ensuite émis les 500 000 actions visées par l'option d'achat d'actions, ceux qui avaient avancé des fonds pour l'achat des actions [visées par] l'option d'achat d'actions voulaient les actions plus tôt, et c'est donc pourquoi cette lettre est datée du 18 juillet 2005[15].

 

[37]        L'avocat de l'intimée a alors présenté à M. Hinke la preuve dont je viens de faire état et qui montre clairement qu'il a reçu les 500 000 actions le 22 juin 2005, soit près d'un mois avant qu'il ne donne instructions à Computershare de transférer les 426 000 actions transférées le 3 août 2005 à l'appelante. Il a affirmé que sa mémoire faisait défaut en ce qui concerne les événements de juin et de juillet 2005[16].

 

[38]        Monsieur Hinke a ensuite offert une deuxième explication de ce qui s'était passé : [TRADUCTION] « Un certain nombre d'opérations avaient été prévues pendant cette période et donc, pour — pour des raisons d'efficacité, j'ai rédigé à l'attention de Computershare une lettre regroupant toutes les instructions »[17]. Cela n'explique pas la contradiction entre la preuve objective dont je suis saisi et le témoignage de M. Hinke voulant que l'appelante ait acquis les 426 000 actions transférées le 3 août 2005 directement de TEI.

 

[39]        Bref, la preuve documentaire objective dont je suis saisi révèle clairement que l'appelante n'a pas acheté les 426 000 actions transférées le 3 août 2005 de TEI. C'est plutôt M. Hinke qui a transféré ces 426 000 actions à l'appelante en août 2005 au moyen d'actions qu'il détenait depuis février 2004. Pour l'application du paragraphe 160(1), les biens transférés de M. Hinke à l'appelante au cours de la période pertinente comprenaient donc les 426 000 actions transférées le 3 août 2005. En conséquence, les biens transférés par M. Hinke à l'appelante étaient les blocs d'actions visés par la cotisation initiale.

 

[40]        Les témoignages de M. Hinke et de l'appelante en ce qui concerne l'acquisition, par celle‑ci, des actions transférées le 3 août 2005 ont gravement mis en doute (voire démoli) leur crédibilité.

 

La juste valeur marchande des blocs d'actions visés par la cotisation initiale

 

[41]        Je dois maintenant établir la juste valeur marchande des blocs d'actions visés par la cotisation initiale, soit les biens transférés par M. Hinke à l'appelante au cours de la période de transfert.

 

[42]        La Cour a reçu les documents et les rapports suivants des témoins experts que les parties ont appelés à témoigner :

 

- l'affidavit de M. Lindsay Malcolm souscrit le 29 mars 2011[18];

 

- l'affidavit de M. Jamal Hejazi souscrit le 28 mars 2011 (désigné comme le « premier rapport de M. Hejazi »)[19];

 

- la lettre de Mme Cheryl McCann datée du 12 avril 2011 et produite pour réfuter le premier rapport de M. Hejazi[20];

 

- la lettre de Mme McCann datée du 12 avril 2011 et produite pour réfuter l'affidavit de M. Malcolm[21];

 

- le rapport d'évaluation de Mme McCann produit le 18 avril 2011[22];

 

- l'affidavit de M. Hejazi souscrit le 2 mai 2011 (désigné comme le « second rapport de M. Hejazi »)[23];

 

- la lettre de Mme McCann datée du 3 juin 2011 produite pour réfuter le second rapport de M. Hejazi[24].

 

[43]        Les lettres et les rapports intéressent à la fois les blocs d'actions visés par la nouvelle cotisation et les blocs d'actions visés par la cotisation initiale (désignés collectivement les « blocs d'actions »).

 

[44]        L'appelante a appelé M. Lindsay Malcolm comme témoin expert.

 

[45]        Monsieur Malcolm n'a pas remis de curriculum vitae à la Cour. Il a affirmé dans son affidavit qu'il travaille pour son propre compte depuis 27 ans à titre de conseiller en matière d'expansion de l'entreprise et de relations avec les investisseurs.

 

[46]        L'avocat de l'appelante a fait valoir que M. Malcolm possédait des connaissances spécialisées et une expérience particulière qui l'autorisaient à dire à la Cour quel effet avait le placement d'importants blocs d'actions de TEI en bourse. Il a affirmé que M. Malcolm avait qualité pour offrir une opinion tant sur la question de savoir si la vente des blocs d'actions faisait l'objet d'un escompte que sur le montant de celui‑ci[25].

 

[47]        Monsieur Malcolm a reconnu pendant le contre‑interrogatoire que l'opinion qu'il entendait offrir constituait une estimation de la valeur des blocs d'actions[26].

 

[48]        L'avocat de l'intimée s'est opposé à ce que M. Malcolm soit témoin expert. Selon l'intimée, M. Malcolm ne possède pas de connaissances spécialisées ni d'expérience particulière susceptibles d'aider la Cour à évaluer la valeur des blocs d'actions. De plus, l'avocat de l'intimée a affirmé que M. Malcolm n'a pas l'indépendance nécessaire pour agir comme témoin expert.

 

[49]        J'ai différé ma décision sur le point de savoir si je devais reconnaître M. Malcolm comme témoin expert. J'estimais que cette mesure ne causait un préjudice à aucune des parties. Plus important encore, elle permettait de respecter le droit de l'appelante de présenter une preuve la plus complète possible qui soit conforme aux règles en matière de preuve.

 

[50]        Après avoir entendu le témoignage de vive voix de M. Malcolm et avoir observé sa conduite pendant son témoignage, j'ai conclu qu'il n'était pas un témoin digne de foi. Pour cette seule raison, je n'ai accordé aucun poids à son témoignage ou à son rapport. J'ai également conclu que M. Malcolm n'avait pas les compétences particulières ni l'impartialité nécessaires pour offrir à la Cour une opinion sur la juste valeur marchande des blocs d'actions.

 

[51]        Je me pencherai d'abord sur la question de sa crédibilité. Je ne crois pas qu'il se soit montré entièrement franc pendant son témoignage. L'une des raisons à l'origine de ma conclusion tient à l'étroite relation personnelle qu'il entretient avec l'appelante et son époux. Plus important encore, à de nombreuses occasions, il n'était tout simplement pas aussi franc dans son témoignage que ce à quoi la Cour aurait pu s'attendre d'un témoin expert.

 

[52]        Les deux exemples suivants illustrent les préoccupations que me cause le témoignage de M. Malcolm.

 

[53]        Le premier exemple concerne son témoignage relatif aux actions de TEI qu'il a reçues en contrepartie de ses services. M. Malcolm a affirmé dans son affidavit qu'il a reçu des actions de TEI à deux occasions en 2004 : 32 998 actions le 30 avril 2004 et 23 943 actions le 24 septembre 2004. Il a mentionné qu'il avait reçu ces actions en règlement de sommes que TEI lui devait[27].

 

[54]        Au cours du contre‑interrogatoire, l'avocat de l'intimée lui a demandé s'il avait reçu d'autres actions de TEI. M. Malcolm a répondu qu'il s'agissait des seules actions qu'il avait reçues[28].

 

[55]        L'intimée a ensuite produit deux pièces (R‑3 et R‑4), lesquelles montrent que TEI a émis 100 000 actions à M. Malcolm le 2 juillet 2003 et que M. Malcolm a reçu 60 000 actions de TEI le 20 février 2003.

 

[56]        Lorsque cette preuve lui a été présentée, M. Malcolm a déclaré qu'il n'avait pas reçu à titre bénéficiaire les 100 000 actions de TEI émises le 2 juillet 2003. Il n'a pas précisé qui avait reçu les actions. Il a reconnu qu'il avait reçu 60 000 actions de TEI le 20 février 2003. Il a ensuite modifié son témoignage. Alors qu'il avait antérieurement affirmé qu'il n'avait reçu que les 56 941 actions mentionnées dans son affidavit, il a déclaré, après avoir examiné les pièces R‑3 et R‑4, que les actions visées dans son affidavit ne constituaient que des exemples d'actions qui lui avaient été transférées. Son témoignage sur ce point a sérieusement affaibli sa crédibilité.

 

[57]        Un autre exemple troublant, selon moi, tiré du témoignage de M. Malcolm concerne ses assertions relatives aux travaux qu'il a effectués pour TEI. Selon son affidavit, il a fourni des services à TEI pendant la période allant de décembre 2002 à décembre 2004[29]. Au cours de son témoignage, il a affirmé qu'il exploitait son entreprise de consultation à titre de propriétaire unique depuis 27 ans. Après avoir lu son affidavit et avoir entendu son interrogatoire principal, j'ai pensé qu'il disait à la Cour qu'il offrait ses services à TEI à titre personnel par l'intermédiaire de son entreprise à propriétaire unique.

 

[58]        Or, pendant son contre‑interrogatoire, il est devenu évident qu'il exploitait également son entreprise au moyen d'une société, Compliant Capital Corp. M. Malcolm détenait 100 pour 100 des actions de cette société. De plus, l'intimée a produit une entente de consultation entre Compliant Capital Corp. et M. Hinke (en sa qualité de président de TEI) datée du 1er octobre 2004. L'entente prévoit que M. Malcolm offrira des services de consultation à TEI par l'intermédiaire de Compliant Capital Corp[30]. Je ne suis saisi d'aucun élément de preuve permettant de savoir quand les parties ont mis fin au contrat.

 

[59]        Je ne sais pas au juste pourquoi M. Malcolm a essayé de dissimuler le fait qu'il offrait ses services à TEI par l'intermédiaire de Compliant Capital Corp., mais cette tentative a également porté atteinte à sa crédibilité.

 

[60]        Outre ma conclusion voulant que M. Malcolm ne soit pas un témoin digne de foi, j'estime qu'il ne possède pas les compétences particulières nécessaires pour donner une opinion quant à la valeur des blocs d'actions.

 

[61]        Il n'est pas particulièrement difficile d'avoir des « compétences particulières »; il suffit que [TRADUCTION] « le témoin expert possède des connaissances spécialisées et des compétences particulières qui dépassent celles du juge des faits »[31]. Le témoin peut avoir acquis ces connaissances spécialisées grâce à ses études ou à son expérience. Il importe que les connaissances spécialisées et les compétences particulières de l'expert intéressent l'objet sur lequel porte son opinion.

 

[62]        Monsieur Malcolm a signalé qu'une grande partie de son utilité pour une société touchait les domaines de l'expansion de l'entreprise et des relations avec les personnes investissant dans celle‑ci. Il a affirmé avoir fourni des services à des centaines de sociétés inscrites à la Bourse de croissance TSX (et les bourses qui l'ont précédée). Ses services consistaient principalement à rédiger des communiqués de presse, à conseiller les sociétés sur le meilleur moment pour diffuser ces communiqués [TRADUCTION] « afin d'avoir un effet favorable sur le cours des actions » et à agir comme principal porte‑parole public pour la société. Il a également témoigné qu'il participait à l'élaboration de présentations destinées aux investisseurs et de rapports annuels[32].

 

[63]        Dans son témoignage, il a déclaré que l'évaluation d'actions ne faisait pas partie du rôle qu'il jouait auprès de ses clients. Il a en outre confirmé qu'il n'était ni expert en évaluation d'entreprises, ni comptable agréé, ni analyste financier agréé, ni comptable général accrédité. De plus, il n'a suivi aucun des cours en matière d'évaluation offerts par l'un ou l'autre des ordres qui régissent ces professions[33].

 

[64]        L'avocat de l'appelante a soutenu que M. Malcolm était qualifié pour témoigner à titre d'expert quant à la valeur des blocs d'actions en raison de ses connaissances spécialisées et de ses compétences particulières relatives au fonctionnement de la Bourse de croissance TSX ainsi que de ses connaissances particulières touchant TEI et le cours de ses actions à la Bourse de croissance TSX.

 

[65]        Je ne suis pas d'accord. À mon avis, son expérience personnelle ne lui donne pas les compétences particulières nécessaires pour évaluer les blocs d'actions. M. Malcolm a certainement acquis des connaissances au sujet de la Bourse de croissance TSX et de TEI grâce à son expérience professionnelle. Cependant, cette expérience ne lui a pas permis d'acquérir les compétences d'un évaluateur. Il a reconnu qu'il n'avait aucune formation officielle à ce titre.

 

[66]        Monsieur Malcolm a reconnu un certain nombre des méthodes utilisées pour évaluer les actions, mais il a convenu qu'il n'avait appliqué aucune des méthodes d'évaluation admises pour évaluer les blocs d'actions. Après avoir entendu son témoignage, je conclus que, même s'il connaissait l'existence des méthodes d'évaluation, il ne possédait pas les compétences nécessaires pour appliquer ces méthodes à une situation de fait précise[34].

 

[67]        L'affidavit de M. Malcolm (pièce A‑3) reflète son manque de compétences particulières. À mon sens, l'affidavit constituait une tentative superficielle d'évaluer les actions.

 

[68]        En résumé, compte tenu du manque de compétences particulières de M. Malcolm et de la nature de son rapport, j'estime que ni son rapport ni son témoignage ne sont dignes de foi.

 

[69]        Ma troisième préoccupation touchant M. Malcolm concerne son objectivité.

 

[70]        La partie qui présente le témoin expert proposé doit convaincre le juge des faits non seulement que cette personne possède les compétences particulières nécessaires, mais également qu'elle a l'indépendance requise pour agir à ce titre[35]. Un témoin expert doit fournir une aide indépendante au tribunal et il ne doit pas jouer le rôle de plaideur[36].

 

[71]        Il ressort sans équivoque des témoignages de M. Malcolm et de M. Hinke qu'ils sont de bons amis. M. Malcolm a établi son rapport du fait de cette amitié.

 

[72]        Monsieur Malcolm a témoigné que l'appelante n'avait pas retenu ses services pour fournir le rapport. Il a plutôt rédigé son rapport afin de [TRADUCTION] « se comporter en gentleman » pour aider un ami[37]. Il a précisé qu'on lui avait demandé d'établir le rapport une semaine avant sa production à la Cour[38].

 

[73]        Les relations entre M. Malcolm et M. Hinke ne suffisent pas, en soi, à priver M. Malcolm de la qualité d'expert. Cependant, conjuguées au témoignage qu'il a rendu à l'audience, elles me fondent à conclure qu'il n'avait pas l'indépendance nécessaire pour fournir une opinion d'expert à la Cour.

 

[74]        Une grande partie du témoignage de M. Malcolm s'apparentait à une plaidoirie. Il estimait clairement que son principal rôle comme témoin consistait à défendre les intérêts de son bon ami, M. Hinke.

 

[75]        Pour les raisons qui précèdent, je n'ai accordé aucun poids à l'affidavit de M. Malcolm.

 

[76]        L'appelante a également cité M. Jamal Hejazi comme témoin expert. La plus grande partie du rapport et du témoignage de M. Hejazi vise le rapport d'expert produit par l'intimée. Je vais donc me pencher sur son témoignage après avoir examiné les éléments de preuve présentés par l'expert de l'intimée.

 

[77]        L'intimée a cité Mme Cheryl McCann comme témoin expert. Mme McCann est comptable générale accréditée et experte en évaluation d'entreprises. Après avoir entendu les observations des avocats, j'ai reconnu Mme McCann comme témoin expert pour l'évaluation des actions de TEI en cause.

 

[78]        Dans son témoignage, Mme McCann a affirmé que son rapport d'évaluation[39] constitue un rapport d'évaluation exhaustif établi conformément aux normes de l'Institut canadien des experts en évaluation d'entreprises (ICEÉE)[40]. Son rapport fait état de la juste valeur marchande des blocs d'actions visés par la cotisation initiale et des blocs d'actions visés par la nouvelle cotisation à trois groupes de dates distincts, à savoir les dates de transfert selon l'ARC, les dates de transfert selon l'appelante et les dates d'évaluation selon le SEDI[41].

 

[79]        Conformément aux normes de l'ICEÉE, Mme McCann a d'abord examiné la situation économique au moment de l'évaluation, le secteur dont relevaient les activités de TEI et l'entreprise exploitée par TEI elle‑même, y compris les antécédents de cette entreprise.

 

[80]        Après avoir examiné les antécédents et les activités globales de TEI, Mme McCann a établi qu'il y avait lieu de se fonder sur le principe de la continuité de l'exploitation pour évaluer les actions. Elle a ensuite choisi d'appliquer l'approche fondée sur le marché pour évaluer celles‑ci. Elle a fondé cette décision sur l'hypothèse voulant que les marchés déterminent généralement la valeur des actions d'une société cotée en bourse.

 

[81]        Elle a commencé son évaluation par l'examen de l'information sur la négociation de la société en bourse. Elle s'est penchée sur les données des deux années précédant la première date d'évaluation et sur celles des deux années subséquentes à la dernière date d'évaluation[42]. Selon elle, l'examen de l'information sur la négociation lui a permis de mieux comprendre le marché pour les actions et, [TRADUCTION] « en définitive, la nature des actions »[43].

 

[82]        Elle a présenté son examen de l'information sur la négociation en trois sections : la tendance et les cours et le nombre d'opérations moyens, les jours où les opérations excédaient 250 000 actions, et la nature des actions. Son évaluation se fonde sur cet examen.

 

[83]        La première section de son rapport d'évaluation concernant l'information sur la négociation porte sur les cours et le nombre d'opérations quotidiens moyens de TEI. Après analyse des données, Mme McCann a tiré les conclusions suivantes :

 

1.       Il n'y avait aucune raison de s'attendre à ce que le placement des blocs d'actions sur le marché libre entraîne un fléchissement du cours des actions pendant la période d'évaluation[44].

 

2.       Compte tenu de la négociation fréquente d'actions et du cours en hausse, il n'y avait aucune raison de s'attendre à ce que le placement des blocs d'actions sur le marché libre entraîne un fléchissement du cours des actions pendant la période d'évaluation[45].

 

[84]        La deuxième section de son rapport d'évaluation concernant l'information sur la négociation porte sur les jours où les opérations excédaient 250 000 actions. Mme McCann a mentionné qu'elle voulait voir comment le marché avait réagi par suite d'opérations touchant un nombre important d'actions de TEI afin d'établir s'il lui était possible d'utiliser cette information pour vérifier si la vente des blocs d'actions faisait l'objet d'un escompte pour bloc d'actions[46] et, le cas échéant, déterminer le montant de cet escompte.

 

[85]        Après avoir examiné les jours où les opérations excédaient 250 000 actions, elle est arrivée à la conclusion suivante[47] :

 

[TRADUCTION]

 

À la lumière de mes observations, je ne m'attendrais pas à ce que les blocs d'actions fassent l'objet d'un escompte pour bloc d'actions imposé par les opérations sur le marché libre pendant la période d'évaluation étant donné que le cours des actions de la société a connu des hausses moyennes durant les deux années précédant la période d'évaluation aux dates où les opérations excédaient 250 000 actions.

 

[86]        Elle a signalé qu'en rétrospective, on aurait pu envisager un escompte pour bloc d'actions maximal de 4,86 pour 100 fondé sur la baisse moyenne du cours des actions pendant la journée précédente durant la période d'évaluation. Elle a toutefois précisé dans son témoignage qu'elle n'avait pas appliqué l'escompte parce qu'elle estimait injustifié de le faire et parce qu'elle n'avait pas tenu compte de l'information rétrospective[48]. Elle a ajouté qu'un examen rétrospectif commanderait la prise en compte du fait que des hausses moyennes du cours des actions ont été observées pendant les deux années subséquentes à la période d'évaluation[49].

 

[87]        Dans la troisième section de son rapport d'évaluation concernant l'information sur la négociation, Mme McCann s'est penchée sur la nature des actions de TEI. Elle a tiré les conclusions suivantes[50] :

 

1.       Les actions de TEI étaient des actions cotées en cents étant donné qu'elles se négociaient à moins d'un dollar l'action pendant la période examinée.

 

2.       Les actions de TEI étaient des actions spéculatives en raison du fait qu'elles étaient inscrites à la Bourse de croissance TSX ainsi que des antécédents de pertes de TEI et du cours réel des actions.

 

3.       Les actions de TEI n'étaient pas des titres non liquides étant donné qu'elles étaient inscrites à la Bourse de croissance TSX (par opposition à des actions d'une société fermée ou à des actions qui sont négociées hors cote) et qu'il ne s'agissait pas d'actions très peu négociées. Cette dernière conclusion voulant que les actions ne soient pas très peu négociées se fondait sur son examen des titres détenus par le public, par opposition aux titres détenus par des initiés, et du nombre d'opérations visant les actions.

 

4.       Les actions de TEI avaient une volatilité normale à modérée. Mme McCann a utilisé le modèle d'évaluation des options de Black et Scholes pour tirer cette conclusion. Ce modèle, qui a valu un prix Nobel à ses auteurs, permet de calculer un prix d'option d'achat d'actions hypothétique. Mme McCann a signalé qu'un prix de référence élevé par rapport au cours de l'action indique une volatilité élevée. À l'inverse, un prix d'option d'achat d'actions peu élevé indique une faible volatilité[51]. Les calculs montrent que le coût nécessaire pour garantir le prix de vente d'une action de TEI s'élevait à 0,005 cent, soit 1,8 pour 100 du cours moyen pondéré en fonction du nombre d'opérations.

 

[88]        Selon Mme McCann, ses conclusions relatives à la nature des actions n'étayaient pas la conclusion voulant qu'un escompte pour bloc d'actions ait été nécessaire.

 

[89]        Après avoir examiné l'information sur la négociation de TEI, Mme McCann s'est penchée sur les placements et les échanges privés d'actions de TEI. Elle a procédé à cette analyse afin d'établir si la différence (le cas échéant) entre les prix d'émission et les cours et le fait qu'un grand nombre des actions émises étaient assujetties à des restrictions pouvaient servir à déterminer s'il y avait lieu d'appliquer un escompte pour bloc d'actions[52].

 

[90]        L'examen de 22 opérations lui a permis de conclure qu'il n'existait aucun lien perceptible entre les quantités d'actions émises, les restrictions connexes, les prix d'émission et les cours. En conséquence, elle ne pouvait utiliser l'information sur la négociation pour déterminer si l'application d'un escompte pour bloc d'actions était justifiée[53].

 

[91]        La partie suivante du rapport d'expert de Mme McCann porte sur la vente des actions de TEI par l'appelante et son époux ou pour leur compte. Elle voulait voir comment le marché réagissait à la disposition d'importants blocs d'actions au fil du temps[54]. Elle a examiné les ventes sur le marché libre, les ventes négociées de gré à gré et la vente par le ministre d'actions saisies.

 

[92]        Madame McCann s'est d'abord intéressée aux ventes sur le marché libre faites par l'appelante et son époux sur une période de deux ans avant la première date d'évaluation et au cours de la période d'évaluation. Pendant cette période, l'appelante et son époux ont vendu 4,9 millions d'actions, y compris 2,7 millions d'actions de mai 2005 à février 2006 (soit pendant la période de transfert).

 

[93]        L'examen des ventes a mené Mme McCann à la conclusion suivante :

 

[TRADUCTION]

 

[...] il semble que les dispositions d'importants blocs d'actions, pendant une courte période, n'aient pas généralement entraîné un fléchissement du cours du marché. C'est donc dire que, lorsqu'il y a eu disposition d'importants blocs d'actions pendant une courte période, le cours des actions ne faisait pas l'objet d'un escompte pour bloc d'actions imposé par la négociation sur le marché libre[55].

 

[94]        Madame McCann a ensuite analysé les ventes de gré à gré effectuées par l'appelante et son époux. Elle a examiné deux ventes de gré à gré réalisées par l'appelante, l'une visant 100 000 actions et l'autre, 111 000 actions. Elle a déterminé que ces ventes d'actions n'avaient fait l'objet d'aucun escompte pour bloc d'actions.

 

[95]        Le troisième ensemble de ventes faites par l'appelante et son époux que Mme McCann a analysé concernait la vente d'actions saisies par le ministre. Mme McCann a signalé qu'il s'agissait d'information connue après coup dont elle s'était servie pour mettre à l'épreuve l'hypothèse selon laquelle un escompte pour bloc d'actions n'était pas nécessaire.

 

[96]        Les ventes de ces actions ont fait l'objet d'un escompte variant de 20 pour 100 à 29 pour 100 du cours à la bourse. D'après Mme McCann, on s'attendrait à ce que de telles ventes fassent l'objet d'un escompte pour bloc d'actions étant donné que les actions saisies constituaient un bloc d'actions appréciable, sensiblement plus important que n'importe quel des blocs d'actions en cause. Elle a en outre tenu compte du fait que les actions saisies n'avaient pas été vendues sur le marché libre, mais plutôt lors de ventes privées. Elle a conclu que les ventes privées seraient assujetties à des facteurs qui auraient influé sur le prix de vente, mais non sur les cours ni sur la juste valeur marchande.

 

[97]        Après avoir examiné l'information sur la négociation de TEI, les placements et les échanges privés visant des actions de TEI et la vente d'actions de TEI détenues par l'appelante et son époux, Mme McCann s'est intéressée à la jurisprudence touchant l'évaluation d'actions.

 

[98]        J'ai fait abstraction de cette partie de son rapport. Bien qu'il soit parfaitement légitime pour un expert d'examiner de nombreux facteurs relevant de sa formation à titre d'expert en évaluation d'entreprises, il n'est pas acceptable pour cet expert de me donner une opinion quant à l'application de la jurisprudence à l'évaluation d'actions. Cela, à mon sens, constitue une tentative, par l'expert, de fournir une opinion sur le droit interne.

 

[99]        Ma décision de ne pas tenir compte de cette partie du rapport de Mme McCann n'a aucune incidence sur les conclusions tirées dans son rapport. Cette partie du rapport visait à présenter des éléments supplémentaires à l'appui de son opinion d'expert, ce qui, à mon avis, n'était pas nécessaire.

 

[100]   À la lumière des résultats de son travail, Mme McCann est arrivée aux conclusions suivantes[56] :

 

1.       Il n'est pas justifié d'appliquer un escompte pour bloc d'actions pour déterminer la juste valeur marchande des actions.

 

2.       Il pourrait être justifié d'appliquer un escompte pour représenter le coût lié à la vente des actions sur le marché libre pendant une période de temps raisonnable.

 

3.       Pour éviter les possibles distorsions lors d'un seul jour de négociation, la juste valeur marchande des blocs d'actions devrait se fonder sur le cours moyen pondéré selon le nombre d'actions de la société, que l'on calcule en divisant la valeur totale par le nombre total d'actions négociées pendant les cinq jours de bourse précédant immédiatement la date pertinente.

 

[101]   Madame McCann a ensuite établi qu'un escompte allant de 1,3 pour 100 à 3,6 pour 100 correspondrait au coût de vente des actions sur le marché libre pendant une période de temps raisonnable. Elle s'est fondée sur des ventes réelles d'actions de TEI faites par l'appelante et son époux pour estimer la durée d'une période de temps raisonnable pour vendre les actions (de 16 à 44 jours) et elle a utilisé le coût moyen pondéré du capital de TEI (à un taux d'intérêt annuel de 30 pour 100) pour arriver au coût de vente des actions pendant une période donnée[57].

 

[102]   L'avocat de l'appelante a fait valoir que Mme McCann avait commis une erreur dans sa détermination de l'escompte en ne tenant pas compte des jours où la bourse était fermée (c.‑à‑d. les fins de semaine). Si elle avait tenu compte des fins de semaine, l'escompte se serait situé dans une fourchette de 2 pour 100 à 5,5 pour 100. Une si petite différence n'aurait probablement pas d'incidence appréciable sur la conclusion de Mme McCann.

 

[103]   À la lumière de ces conclusions, Mme McCann a calculé les évaluations suivantes pour les blocs d'actions[58] :

 

 

Blocs d'actions visés par la nouvelle cotisation[59]

Blocs d'actions visés par la cotisation initiale[60]

Dates de transfert selon l'ARC

540 496 $

678 535 $

Dates de transfert selon l'appelante

525 867 $

643 676 $

Dates d'évaluation du SEDI

532 964 $

639 771 $

 

[104]   Pendant le contre‑interrogatoire, l'avocat de l'appelante a posé à Mme McCann un certain nombre de questions touchant son rapport. Il a soulevé certains points, notamment le fait qu'elle se soit servie du modèle de Black et Scholes, la façon dont elle a déterminé la durée d'une période de temps raisonnable pour la disposition des actions de TEI, ses conclusions relatives au produit tiré par l'ARC de la vente des actions saisies, la question de savoir si le marché pour les actions de TEI était très peu liquide et l'application d'un escompte pour bloc d'actions. À mon avis, Mme McCann a été en mesure de répondre à chacun des points avancés par l'avocat.

 

[105]   Après avoir examiné le rapport et le témoignage de Mme McCann, j'estime que ses conclusions offrent une évaluation raisonnable de la valeur des blocs d'actions.

 

[106]   Monsieur Hejazi a été appelé à témoigner par l'appelante sur le fondement qu'il est [TRADUCTION] « qualifié pour analyser et interpréter les données et les études statistiques relatives tant aux opérations commerciales où les parties ont un lien de dépendance qu'à celles où elles n'en ont pas et pour formuler une opinion d'expert sur la question de savoir si, et dans quelle mesure, les données et les études étayent ou non les conclusions qui reposent sur cette information »[61].

 

[107]   Monsieur Hejazi est titulaire d'un doctorat en économie et travaille dans des domaines liés à l'établissement des prix de transfert et à la fiscalité. Après avoir entendu les observations des avocats, j'ai reconnu M. Hejazi comme témoin expert en ce qui concerne l'analyse et l'interprétation de données statistiques.

 

[108]   Monsieur Hejazi a présenté deux rapports à la Cour : le « premier rapport de M. Hejazi » et le « second rapport de M. Hejazi ».

 

[109]   Durant son témoignage, M. Hejazi a affirmé que ses compétences particulières ne s'étendaient pas à l'évaluation d'actions et que ses rapports ne visaient pas à évaluer les blocs d'actions en cause[62]. Il a convenu que ses rapports ne fournissaient aucune preuve ni opinion sur les questions fondamentales touchant l'évaluation, comme le point de savoir si un escompte pour bloc d'actions doit s'appliquer au transfert des blocs d'actions[63] et si le marché pour les actions de TEI était peu liquide[64]. Il a en outre témoigné qu'il n'avait effectué aucune analyse relative au nombre d'actions de TEI détenues par des initiés par opposition au nombre de celles détenues par le public[65] ni aux ventes d'actions de TEI faites sur le marché libre par M. Hinke et l'appelante.

 

[110]   Le premier rapport de M. Hejazi comporte deux pages et demie[66] et porte sur une étude mentionnée dans un rapport d'évaluation fondé sur une estimation de la valeur établi par M. Gilles Lapointe, de l'ARC. Il semble que l'ARC a utilisé ce rapport pour étayer la cotisation à l'étape de l'opposition. Le ministre n'a pas invoqué ce rapport lorsqu'il a établi la cotisation à l'égard de l'appelante. De même, l'intimée n'invoque pas non plus ce rapport en l'espèce. Elle s'appuie plutôt sur le rapport d'évaluation exhaustif rédigé par Mme McCann.

 

[111]   Le premier rapport de M. Hejazi n'est pas utile à la Cour. M. Hejazi a précisé que son premier rapport ne présente aucune opinion sur la valeur des actions en cause et ne vise nullement à réfuter le rapport exhaustif de Mme McCann. Il s'agit d'un rapport portant sur une étude utilisée par un évaluateur de l'ARC dans la préparation d'un rapport d'évaluation fondé sur une estimation de la valeur. Comme je viens de le signaler, le ministre n'a pas invoqué le rapport d'évaluation fondé sur une estimation de la valeur lorsqu'il a établi la cotisation à l'égard de l'appelante, et l'intimée n'invoque pas ce document dans le présent appel. M. Hejazi a affirmé, en contre‑interrogatoire, qu'il ignorait que l'intimée n'invoquait pas le rapport d'évaluation fondé sur une estimation de la valeur[67].

 

[112]   Je me pencherai maintenant sur le second rapport de M. Hejazi.

 

[113]   La nature et l'admissibilité du second rapport de M. Hejazi ont constitué des points litigieux à l'audience. L'avocat de l'appelante a fait valoir que le second rapport était un rapport supplémentaire produit en réponse au rapport de l'expert de l'intimée, Mme McCann. Selon lui, la meilleure façon de décrire ce document serait de dire qu'il a été présenté pour réfuter le rapport de Mme McCann.

 

[114]   L'avocat de l'intimée a soutenu que le second rapport n'avait pas été produit pour réfuter le rapport de Mme McCann, mais plutôt comme rapport offrant une valeur estimative des actions. Dans un cas comme dans l'autre, l'intimée s'est opposée à la production du second rapport au motif que l'appelante ne l'avait pas produit dans le délai fixé par les règles de la Cour.

 

[115]   Le problème tient au fait que l'appelante a produit le second rapport de M. Hejazi moins de 15 jours avant le début de l'audience. Or, selon le paragraphe 145(3) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale), s'il s'agissait d'un rapport présenté pour réfuter un rapport d'expert, il ne pouvait être produit aussi tardivement qu'avec l'autorisation de la Cour.

 

[116]   Après un long débat, l'intimée a retiré son opposition à l'admission du second rapport de M. Hejazi à la condition qu'elle puisse produire un rapport pour le réfuter au plus tard 15 jours avant la reprise de l'audience en juin 2011. La Cour a alors autorisé l'appelante à produire le second rapport de M. Hejazi. Le 3 juin 2011, l'intimée a présenté une preuve visant à réfuter ce second rapport[68].

 

[117]   Le second rapport de M. Hejazi comporte trois pages et demie. M. Hejazi commence son rapport en citant le paragraphe 119 du rapport d'évaluation de Mme McCann :

 

[TRADUCTION]

 

J'ai utilisé l'information relative aux ventes réelles d'actions de la société faites par l'appelante et son époux afin de déterminer combien de temps serait raisonnablement nécessaire pour vendre les blocs d'actions. Avec une moyenne de 18 312 actions par jour (voir le paragraphe 109), il faudrait de 16 à 44 jours pour vendre chacun des blocs d'actions [...][69].

 

[118]   La période de vente de 16 à 44 jours est l'une des deux hypothèses sur lesquelles s'est appuyée Mme McCann pour conclure qu'un escompte variant de 1,3 pour 100 à 3,6 pour 100 correspondrait au coût de vente des actions sur le marché libre pendant une période de temps raisonnable. Elle a en outre conclu que la juste valeur marchande des blocs d'actions devait se fonder sur le prix de vente moyen pondéré des actions au cours des cinq jours de bourse précédant immédiatement la date d'évaluation pertinente, sans aucun escompte pour bloc d'actions.

 

[119]   Après avoir cité les propos de Mme McCann, M. Hejazi, dans son second rapport, utilise les prix de vente réels des actions de TEI sur le marché pour calculer le produit qu'aurait pu tirer une personne si elle avait vendu les blocs d'actions en blocs de 15 000, de 17 500 ou de 20 000 actions dans les jours suivant immédiatement les jours où M. Hinke a transféré les actions à l'appelante. Le rapport mentionne que ce calcul a été effectué pour analyser la disposition, au fil du temps, de petits blocs d'actions de TEI.

 

[120]   Après avoir fait ces calculs, M. Hejazi signale ce qui suit au paragraphe 14 de son rapport :

 

[TRADUCTION]

 

Ces données me portent à croire qu'un escompte d'environ 15 pour 100 s'appliquera lorsque des blocs d'actions de TEI sont vendus selon les quantités présumées, pendant un certain temps, aux prix du marché publiés. Les liens étroits entre les trois résultats relatifs aux différentes tailles des blocs d'actions indiquent une conclusion solide. Je tire de cette analyse la conclusion suivante : si elles étaient vendues de cette façon aux prix du marché publiés, les actions de TEI feraient l'objet d'un escompte de 15 pour 100.

 

[121]   Ces observations ne constituent pas une évaluation des blocs d'actions. Comme il est mentionné plus haut, M. Hejazi a affirmé dans son témoignage qu'il n'était pas un expert en évaluation d'actions et que son rapport ne constituait pas une évaluation des actions en cause.

 

[122]   Pendant son contre‑interrogatoire, il a déclaré qu'il ne conclut pas, dans son second rapport, qu'il y a lieu d'appliquer un escompte de 15 pour 100 à la vente des blocs d'actions. Il a témoigné qu'il était arrivé à la conclusion selon laquelle la vente hypothétique des actions de TEI en blocs de 15 000, de 17 500 et de 20 000 actions donnerait lieu à un escompte de 15 pour 100[70].

 

[123]   Je ne vois pas très bien quel est l'objet des calculs hypothétiques figurant dans le second rapport de M. Hejazi. Il ne s'agit pas d'un escompte pour bloc d'actions, étant donné que M. Hejazi a témoigné que son rapport ne présentait aucune preuve ou opinion quant au point de savoir si le transfert des blocs d'actions devait faire l'objet d'un escompte pour bloc d'actions.

 

[124]   Si le second rapport de M. Hejazi vise à mettre en doute les conclusions de Mme McCann relatives au coût de la vente des actions de TEI pendant une certaine période de temps, il soulève alors à mon sens deux préoccupations.

 

[125]   Premièrement, il s'agit d'un escompte déterminé après coup. Or, l'information connue après coup est en général inadmissible, à moins d'être utilisée pour vérifier le caractère raisonnable d'une hypothèse[71]. M. Hejazi n'a pas réussi à expliquer à la Cour comment un escompte de 15 pour 100 sur la vente hypothétique des blocs d'actions avait un lien avec l'évaluation des blocs d'actions ou le rapport d'expert de Mme McCann. En particulier, il n'a pas établi de lien entre les calculs et l'une ou l'autre des hypothèses utilisées par Mme McCann pour évaluer les blocs d'actions. Il me semble que l'on tente, par les calculs hypothétiques, d'évaluer les blocs d'actions à la lumière d'information connue après coup.

 

[126]   Ma seconde préoccupation concerne la nature des calculs qui constituent le fondement du rapport. Ce sont de simples calculs mathématiques qui reposent sur des éléments de preuve versés au dossier. J'estime ne pas avoir besoin qu'un témoin expert m'explique de simples calculs mathématiques.

 

[127]   Pour les raisons qui précèdent, je conclus que le premier rapport et le second rapport de M. Hejazi ne renferment aucun avis d'expert utile à la Cour, et je ne leur accorde donc aucun poids.

 

[128]   En résumé, la seule preuve d'expert digne de foi et utile présentée à la Cour était le rapport d'expert de Mme McCann.

 

[129]   Au moment de formuler ses conclusions finales, l'avocat de l'appelante a fait état d'un certain nombre de préoccupations que soulevait, selon lui, le rapport de Mme McCann. Ces préoccupations concernent principalement la façon dont Mme McCann a appliqué ses compétences particulières. À mon avis, si elle voulait contester les conclusions d'expert de Mme McCann, l'appelante aurait dû présenter son propre évaluateur expert.

 

[130]   L'avocat de l'appelante a signalé dans ses conclusions finales que le fait que l'appelante n'ait pas présenté un évaluateur posait problème. Ce fait ne pose problème qu'à l'appelante. Je dois rendre ma décision sur le fondement de la preuve produite devant moi. La seule preuve d'expert digne de foi et utile à la Cour dont je suis saisi est le rapport d'expert de Mme McCann. J'accepte sa conclusion voulant que la valeur des blocs d'actions visés par la cotisation initiale ait été, à la date des transferts, de 639 771 $ à 678 535 $, selon les dates de transfert retenues.

 

[131]   Les parties ne s'entendent pas sur les dates de transfert applicables. Le ministre a établi la cotisation en fonction du fait que M. Hinke avait transféré les actions de TEI à l'appelante à la date figurant sur les certificats d'actions émis. L'avocat de l'appelante a soutenu que M. Hinke a transféré les actions à la date où il a remis en personne les certificats d'actions à l'appelante. Je n'aurai à trancher ce point que si j'arrive à la conclusion que l'appelante a payé à M. Hinke une contrepartie pour les blocs d'actions visés par la cotisation initiale.

 

La contrepartie payée par l'appelante, le cas échéant

 

[132]   Je me pencherai maintenant sur la question de savoir si l'appelante a versé à M. Hinke une quelconque contrepartie pour les blocs d'actions visés par la cotisation initiale.

 

[133]   L'appelante fait valoir que le transfert des actions de TEI tenait lieu de remboursement d'une dette que lui devait M. Hinke. L'avocat de l'appelante a allégué que cette dette découlait de la mauvaise situation financière de M. Hinke, par suite de laquelle l'appelante a assumé les obligations et les dettes personnelles de ce dernier. L'appelante a signalé qu'en vertu de cette entente, elle a versé des paiements totalisant 199 334 $ à M. Hinke, ou pour le compte de celui‑ci.

 

[134]   Durant son contre‑interrogatoire, M. Hinke a résumé ainsi l'entente intervenue entre lui et l'appelante[72] :

 

[TRADUCTION]

 

Q.        Et vous n'avez aucune reconnaissance ou quittance relative à cette dette?

 

R.        Non. C'est comme ça que nous fonctionnions pendant cette période. Elle m'aidait selon mes besoins quand je n'étais pas en mesure de générer des rentrées de fonds suffisantes, et je la remboursais avec des actions. C'est ce que nous avons fait pendant toute cette période, lorsqu'il était nécessaire de le faire. Il ne s'agissait pas d'une entente en bonne et due forme, sauf que j'avais fait la même chose avec d'autres créanciers, avec Thermal, et j'obtenais des reconnaissances écrites. Mais nous étions pour l'essentiel époux. J'étais l'homme de la famille et nous avions une relation traditionnelle, et elle s'attendait à ce que je prenne les mesures nécessaires pour assurer notre survie financière. Et, par conséquent, je n'estimais pas qu'il y avait lieu d'établir des documents écrits entre nous pendant cette période.

 

[135]   L'avocat de l'intimée a soutenu que, dans les faits, l'appelante n'avait consenti aucun prêt à M. Hinke. L'appelante n'avait pas de ressources financières indépendantes suffisantes pour faire les avances alléguées à M. Hinke.

 

[136]   Selon l'intimée, les fonds utilisés pour payer les dépenses familiales provenaient des diverses actions de TEI que M. Hinke a transférées à l'appelante du 3 février 2000 au 15 février 2006. De plus, l'avocat de l'intimée a affirmé que M. Hinke avait continué d'exercer le contrôle sur ces actions après les avoir transférées à l'appelante.

 

[137]   L'avocat de l'intimée a en outre avancé que, même si l'appelante avait consenti un prêt à M. Hinke, le remboursement de ce prêt ne constituait pas une contrepartie pour l'application du paragraphe 160(1).

 

[138]   Au cours des 17 jours d'audience, une grande part des témoignages a porté sur les antécédents personnels et financiers de l'appelante et de M. Hinke de 1999 à 2006. Les parties ont mentionné les trois ensembles de transferts suivants effectués pendant cette période :

 

- les 500 339 actions de TEI que M. Hinke a transférées à l'appelante du 3 février 2000 au 31 octobre 2004 (les « transferts d'actions antérieurs à novembre 2004 »);

 

- les 1 242 507 actions de TEI que M. Hinke a transférées à l'appelante en novembre 2004 (le « transfert d'actions de novembre 2004 »);

 

- les 2 694 500 actions de TEI qui faisaient l'objet de la cotisation fondée sur le paragraphe 160(1) et qui ont été transférées à l'appelante du 27 mai 2005 au 15 février 2006, soit les blocs d'actions visés par la cotisation initiale.

 

[139]   Chacun de ces transferts est pertinent pour trancher la question de savoir si l'appelante a ou non payé à M. Hinke une contrepartie pour les blocs d'actions visés par la cotisation initiale. Avant d'examiner ces transferts, je présenterai brièvement la situation financière de l'appelante pendant la période en question.

 

[140]   L'appelante et M. Hinke ont commencé à vivre en union de fait en septembre 1999. Il ressort de la preuve dont je suis saisi qu'au moment où cette relation a débuté, l'appelante disposait de ressources financières limitées. Par exemple, elle et M. Hinke ont témoigné que ce dernier lui avait donné 100 000 actions de TEI en novembre 2000. M. Hinke a déclaré qu'il avait donné les actions à l'appelante pour aider cette dernière à faire venir sa mère au Canada. Il a affirmé que l'appelante avait besoin des actions [TRADUCTION] « pour montrer qu'elle disposait de moyens financiers suffisants de sorte que les autorités canadiennes en matière d'immigration lui permettent de parrainer sa mère afin qu'elle vienne au Canada »[73].

 

[141]   L'appelante a gagné un modeste revenu de juillet 2000 à mai 2005 (mois où M. Hinke a transféré les premières actions des blocs d'actions visés par la cotisation initiale). Le fils de l'appelante et de M. Hinke est né le 12 juillet 2000. L'appelante a alors pris un congé de maternité d'un an.

 

[142]   À l'été 2001, l'appelante a constitué une société appelée Elena's Creations Inc. Elle était l'unique employée de la société. Elle a témoigné qu'elle cousait des vêtements sur commande, réparait des vêtements, concevait des vêtements et offrait une gamme de prêt‑à‑porter. Elle a déclaré un revenu total de 7 040 $, de 4 213 $ et de 18 290 $ pour les années d'imposition 2002, 2003 et 2004, respectivement[74].

 

[143]   Pendant cette période, M. Hinke a fait l'objet d'importantes cotisations fiscales. Il semble qu'il se soit rendu compte pour la première fois en mars 2000 qu'il faisait face à une possible dette fiscale par suite de son défaut de produire des déclarations de revenus pour les années d'imposition 1996, 1997 et 1998[75].

 

[144]   Le 23 mai 2001, le ministre a établi à l'égard de M. Hinke une cotisation s'élevant à 439 296 $ relativement aux années d'imposition 1996 à 1998[76]. Le 11 juillet 2002, le ministre a établi une cotisation supplémentaire relativement aux années d'imposition 1999 à 2001 de M. Hinke. Après la deuxième cotisation, M. Hinke devait plus de 1,5 million de dollars[77]. En mai 2002, l'ARC a commencé à prendre des mesures de recouvrement, lesquelles se sont poursuivies tout au long de 2003 et de 2004[78].

 

Les transferts d'actions antérieurs à novembre 2004

 

[145]   De février 2000 à octobre 2004, M. Hinke a effectué les transferts d'actions antérieurs à novembre 2004. Plus précisément, du 3 février 2000 au 31 octobre 2004, M. Hinke a transféré à l'appelante 500 339 actions de la manière suivante :

 

- 20 000 actions le 3 février 2000 (le « transfert de février 2000 »);

 

- 100 000 actions le 6 novembre 2000 (le « transfert de novembre 2000 »);

 

- 200 000 actions le 22 avril 2002 (le « transfert d'avril 2002 »);

 

- 180 339 actions le 19 février 2004 (le « transfert de février 2004 »)[79].

 

[146]   Selon l'appelante, les transferts d'actions antérieurs à novembre 2004 constituaient des dons offerts par M. Hinke[80]. Ce dernier a fait état de nombreuses raisons pour expliquer les transferts.

 

[147]   Il a d'abord affirmé que seul le transfert de novembre 2000 était un don. Il a précisé qu'il avait transféré les autres actions à l'appelante afin de lui rembourser les avances et l'aide qu'elle lui avait fournies pour lui permettre de payer ses dépenses. M. Hinke a témoigné que, pendant cette période, il ne générait pas de [TRADUCTION] « rentrées de fonds suffisantes ». Il n'a pu fournir de renseignements précis sur l'aide financière qu'il aurait reçue de l'appelante[81].

 

[148]   Monsieur Hinke a ensuite mentionné que le transfert de février 2000 ne visait pas à rembourser un prêt que lui avait consenti l'appelante, mais qu'il s'agissait plutôt d'un prêt que lui‑même avait consenti à l'appelante[82].

 

[149]   Monsieur Hinke a également changé sa version des faits en ce qui concerne le transfert de février 2004. Il a déclaré qu'il ne s'agissait pas d'une opération de [TRADUCTION] « remplacement d'une créance par des actions », mais plutôt d'une contribution du conjoint à un régime d'épargne‑retraite. Au cours de la poursuite du contre‑interrogatoire, il a de nouveau modifié son récit pour affirmer que le transfert de février 2004 constituait effectivement une opération de [TRADUCTION] « remplacement d'une créance par des actions »[83].

 

[150]   Lorsque les certificats d'actions relatifs aux transferts d'actions antérieurs à novembre 2004 ont été émis au nom de l'appelante, les actions ont été déposées dans l'un de ses comptes de placement suivants :

 

- un compte de régime enregistré d'épargne‑retraite autogéré ouvert en février 2000 à la CIBC Wood Gundy, lequel a été désigné comme le « compte CIBC 938 »;

 

- un compte de courtage ouvert en novembre 2000 à la CIBC Wood Gundy, lequel a été désigné comme le « compte CIBC 525 »;

 

- un compte personnel de services financiers AAA ouvert en mai 2001 à la CIBC Wood Gundy, lequel a été désigné comme le « compte CIBC 521 »[84].

 

[151]   Pendant le contre‑interrogatoire, on a demandé à M. Hinke s'il avait une procuration visant l'un ou l'autre des comptes de placement de l'appelante à la CIBC Wood Gundy. Il a d'abord été vague, mais il a ensuite affirmé qu'il n'avait jamais eu de procuration sur les comptes de placement de l'appelante à la CIBC Wood Gundy[85].

 

[152]   L'avocat de l'intimée a alors produit des procurations par lesquelles l'appelante donnait à M. Hinke pleins pouvoirs en ce qui concernait ses comptes de placement à la CIBC Wood Gundy. L'appelante a signé les procurations relatives au compte CIBC 525 et au compte CIBC 521 au moment de l'ouverture de ces comptes[86]. Elle a signé la procuration relative au compte CIBC 938 le 3 novembre 2000, soit neuf mois après l'ouverture du compte et immédiatement avant que M. Hinke ne transfère les 100 000 actions de TEI le 6 novembre 2000[87].

 

[153]   Le récit de M. Hinke a changé lorsqu'on lui a montré les procurations. Après avoir reconnu l'existence de celles‑ci, il a mentionné qu'il ne les utilisait que lorsque l'appelante lui donnait instructions en ce sens. Selon sa propre expression, elles ne servaient pas [TRADUCTION] « bon gré mal gré »[88].

 

[154]   En réalité, M. Hinke utilisait constamment les procurations pour procéder à toutes les opérations visant les comptes de placement de l'appelante à la CIBC Wood Gundy.

 

[155]   La Cour a entendu le témoignage de M. Glen Evans, le conseiller en placement de la CIBC Wood Gundy qui était principalement responsable des comptes de placement de l'appelante dans cet établissement. M. Evans a témoigné que seul M. Hinke donnait à la CIBC Wood Gundy des instructions touchant les opérations relatives aux actions effectuées dans les comptes de l'appelante. Il ne recevait aucune instruction de l'appelante elle‑même[89].

 

[156]   Monsieur Evans a mentionné que les opérations effectuées dans les comptes de placement de l'appelante à la CIBC Wood Gundy étaient surtout d'une nature « spontanée », c'est‑à‑dire qu'il s'agissait d'opérations à l'égard desquelles M. Evans ne formulait aucune recommandation quant à la vente ou à l'achat d'actions. Le client était à l'origine de toutes les opérations. Dans le cas des comptes de l'appelante, M. Hinke a effectué l'ensemble des opérations en ayant recours aux procurations[90].

 

[157]   Selon M. Evans, M. Hinke connaissait très bien le marché des actions de TEI. Il a précisé que l'appelante n'était pas très informée en matière d'opérations sur valeurs mobilières[91].

 

[158]   À mon avis, la preuve dont je suis saisi révèle clairement que les transferts d'actions antérieurs à novembre 2004 ne constituaient ni un don ni des opérations de « remplacement d'une créance par des actions ». Bien qu'il ait transféré les actions au nom de l'appelante, M. Hinke tentait ainsi d'échapper à ses créanciers, dont l'ARC. Grâce aux procurations, M. Hinke conservait le contrôle sur les actions. Il a utilisé le produit de la vente des actions en vue de financer ses dépenses personnelles et familiales et de remplir ses obligations financières continues.

 

[159]   Le témoignage de M. Hinke concernant les transferts d'actions antérieurs à novembre 2004, en particulier le fait qu'il ait nié l'existence des procurations, a détruit le peu de crédibilité qu'il lui restait après son témoignage antérieur.

 

Le transfert d'actions de novembre 2004

 

[160]   Pendant la deuxième moitié de 2004, les difficultés financières auxquelles M. Hinke faisait face depuis 2001 ont empiré. Son impôt à payer excédait 1,6 million de dollars[92]. Le 30 juin 2004, la Cour supérieure de justice de l'Ontario, Cour de la famille, a rendu une ordonnance enjoignant à M. Hinke de payer à son ex‑épouse d'importantes sommes à titre de pension alimentaire[93]. Le 2 novembre 2004, l'ARC a adressé à TEI une demande péremptoire de paiement visant 50 pour 100 des sommes dues à M. Hinke[94]. Le 5 novembre 2004, l'ARC a adressé une demande péremptoire de paiement à l'entreprise d'investissement Bolder Investment Partners[95] (« Bolder ») et, en novembre 2004, l'ARC a délivré une demande péremptoire de paiement visant les comptes de courtage de M. Hinke à la CIBC Wood Gundy[96]. De plus, en novembre 2004, M. Hinke a cessé d'être le président de TEI[97].

 

[161]   Au cours de cette période, M. Hinke a procédé au transfert d'actions de novembre 2004. Plus précisément, le 17 novembre 2004, M. Hinke a donné instructions à Computershare de transférer 1 242 507 actions de TEI à l'appelante[98].

 

[162]   L'appelante et M. Hinke ont tous deux témoigné que le transfert d'actions de novembre 2004 avait servi au règlement d'une dette de 40 000 $ que M. Hinke devait à l'appelante. À l'appui de leur témoignage, l'appelante a produit une reconnaissance et quittance manuscrite datée du 20 octobre 2004 qui était signée à la fois par l'appelante et par M. Hinke. Selon cette reconnaissance, l'appelante [TRADUCTION] « s'engage à accepter 1 242 507 actions ordinaires de Thermal Energy en vertu d'un « transfert d'actions au conjoint » en règlement complet et définitif de la somme due de 40 000 $ ». La reconnaissance précise en outre que la dette a été contractée pour régler des dépenses personnelles et commerciales supportées au cours des trois ans et demi précédents (c.‑à‑d. de la mi‑2001 jusqu'à la fin de 2004), principalement au titre des frais liés à une voiture et des frais de garde de leur fils[99].

 

[163]   Malgré la pièce A‑4, la preuve dont je suis saisi ne permet pas d'étayer une conclusion de fait voulant que M. Hinke ait transféré 1 242 507 actions de TEI à l'appelante pour régler une dette de 40 000 $.

 

[164]   À la fin d'octobre 2004, M. Hinke détenait 2 242 507 actions de TEI dans ses comptes de placement chez Bolder. Pendant l'interrogatoire principal, M. Hinke a déclaré que, pour effectuer le transfert des 1 242 507 actions à l'appelante, il avait donné instructions à son courtier chez Bolder, un certain M. Jeske, d'arrêter de vendre ces actions, de faire établir des certificats d'actions, et de les lui faire parvenir. Il a témoigné qu'il avait donné ces instructions entre le 14 octobre 2004 et la dernière semaine d'octobre 2004[100].

 

[165]   Selon la preuve documentaire dont je suis saisi, Bolder n'a donné instructions à son fournisseur de services administratifs (Haywood Securities Inc.) de convertir les 2 242 507 actions de TEI de M. Hinke en certificat d'actions que le 5 novembre 2004[101].

 

[166]   Monsieur Hinke a témoigné que ce retard était normal et qu'il avait rappelé à M. Jeske à la fin d'octobre de faire établir des certificats.

 

[167]   La preuve en l'espèce n'étaye pas le témoignage de M. Hinke voulant qu'il ait donné instructions à M. Jeske en octobre 2004 de faire établir des certificats d'actions. À la lumière de la preuve présentée en l'espèce, je conclus plutôt que M. Hinke a donné les instructions à M. Jeske le 5 novembre 2004, soit le jour où l'ARC a signifié la demande péremptoire de paiement à Bolder.

 

[168]   Je me suis appuyé sur la série suivante de communications internes de Bolder, lesquelles ont toutes été envoyées le 5 novembre 2004 (les communications sont énumérées en ordre chronologique), pour tirer cette conclusion :

 

- un courriel interne de Bolder dans lequel l'auteur mentionne que Bolder a reçu une demande péremptoire de paiement de l'ARC relativement à l'impôt de 1,7 million de dollars à payer par M. Hinke[102] (M. Jeske a fait parvenir ce courriel à M. Hinke[103]);

 

- un courriel interne de Bolder dans lequel M. Jeske affirme que M. Hinke [TRADUCTION] « veut retirer sa position de façon urgente »[104];

 

- un courriel interne de Bolder signalant que Bolder ne peut pas payer M. Hinke en espèces compte tenu de la demande péremptoire de paiement de l'ARC, mais que Bolder peut remettre les actions en personne à M. Hinke[105];

 

- un document envoyé par télécopieur dans lequel Bolder donne instructions à Haywood Securities d'établir au nom de M. Hinke un certificat d'actions visant les 2 242 507 actions[106].

 

[169]   À mon avis, la décision de M. Hinke de faire établir un certificat pour les 2 242 507 actions n'avait rien à voir avec une présumée dette qu'il devait à l'appelante, et avait plutôt pour seul objet de faire échec à la demande péremptoire de paiement que l'ARC a adressée à Bolder le 5 novembre 2004.

 

[170]   Quant à la pièce A‑4, il s'agit d'un document intéressé qui ne permet pas d'établir l'existence d'une dette réelle entre l'appelante et M. Hinke.

 

[171]   Après avoir reçu le certificat d'actions visant les 2 242 507 actions de TEI, le 17 novembre 2004, M. Hinke a remis ce document à Computershare, avec instructions de transférer 1 242 507 actions à l'appelante et d'établir à son propre nom dix certificats d'actions visant 100 000 actions chacun.

 

[172]   L'appelante a ensuite déposé les 1 242 507 actions de TEI dans un compte de placement qu'elle avait ouvert en août 2004 chez Bolder. Il s'agissait de la première opération effectuée dans ce compte.

 

[173]   Monsieur Hinke nie également qu'il avait une procuration pour le compte de placement de l'appelante chez Bolder. L'intimée n'a pas produit de procuration pour ce compte. Cependant, au cours du contre‑interrogatoire, M. Hinke a reconnu qu'il avait, [TRADUCTION] « à l'occasion », donné à M. Jeske des instructions au sujet du compte de placement de l'appelante chez Bolder[107]. En d'autres termes, M. Hinke était en mesure d'exercer le même contrôle sur le compte de placement de l'appelante chez Bolder que celui qu'il exerçait sur les comptes de placement de l'appelante à la CIBC Wood Gundy.

 

[174]   La preuve présentée devant la Cour relativement au transfert d'actions de novembre 2004 a sérieusement miné la crédibilité de l'appelante.

 

Les blocs d'actions visés par la cotisation initiale

 

[175]   Les difficultés financières de M. Hinke se sont poursuivies après novembre 2004. Par suite des saisies‑arrêts de son revenu d'emploi effectuées par l'ARC, des demandes péremptoires de paiement visant ses comptes de placement et de la saisie‑arrêt relative aux paiements de pension alimentaire, il ne disposait que de très peu d'argent[108]. Puis, le 21 juin 2005, TEI a mis fin à son emploi[109].

 

[176]   Pendant la période de transfert (du 27 mai 2005 au 15 février 2006), M. Hinke a transféré à l'appelante les blocs d'actions visés par la cotisation initiale (2 694 500 actions de TEI).

 

[177]   Comme il est mentionné plus haut, l'appelante soutient qu'elle a payé une contrepartie de 199 335 $ pour les actions faisant partie des blocs d'actions visés par la cotisation initiale. Elle affirme que cette contrepartie consistait en le remboursement de prêts qu'elle avait antérieurement consentis à M. Hinke au moyen d'avances de fonds et de paiements versés à des tiers pour le compte de M. Hinke. Plus précisément, l'appelante allègue avoir fait, du 1er décembre 2004 à mars 2006, les paiements suivants à M. Hinke et à des tiers pour le compte de ce dernier :

 

o        prêts en espèces à M. Hinke;

 

o        paiements d'assurance automobile;

 

o        paiements mensuels de location d'automobile;

 

o        paiements hypothécaires pour la résidence familiale;

 

o        paiements de pension alimentaire pour conjoint et enfants (mariage précédent);

 

o        frais juridiques (litiges en matière d'emploi, en matière de droit de la famille et en matière fiscale);

 

o        frais comptables (analyse touchant l'impôt et le revenu);

 

o        frais de mariage;

 

o        voyages d'affaires et visites familiales;

 

o        diverses dépenses du ménage;

 

o        divers paiements à des tiers[110].

 

[178]   Les avances de fonds faites à M. Hinke correspondaient à une part de 69 900 $ du prêt allégué[111].

 

[179]   Dans l'arrêt R. c. Livingston[112], la Cour d'appel fédérale a formulé les observations suivantes lors de l'analyse des critères prévus au paragraphe 160(1) :

 

[...] Dans l'arrêt Medland c. Canada, 98 DTC 6358 (C.A.F.) (Medland), notre Cour a conclu que l'objet et l'esprit de ce paragraphe « consistent à empêcher un contribuable de transférer ses biens à son conjoint [ou encore à un mineur ou à une personne avec qui il a un lien de dépendance] afin de faire échec aux efforts déployés par le ministre pour percevoir l'argent qui lui est dû ». Voir aussi le paragraphe 10 de Heavyside c. Canada, [1996] A.C.F. no 1608 (C.A.) [QL] (Heavyside). De façon encore plus pertinente pour la présente espèce, la Cour canadienne de l'impôt a posé en principe qu'il serait contraire à l'objet du paragraphe 160(1) que l'auteur d'un transfert permette au bénéficiaire de celui‑ci d'utiliser les sommes transférées pour payer les dettes dudit auteur en favorisant des créanciers déterminés aux dépens de l'ARC; voir le paragraphe 19 de Raphael c. Canada, 2000 DTC 2434.

 

[180]   Il ressort de la preuve dont je suis saisi que M. Hinke a commencé à transférer des actions de TEI à l'appelante en 2000 dans une tentative d'obtenir des fonds pour payer ses dépenses personnelles. M. Hinke a transféré à l'appelante le titre juridique afférent aux actions pertinentes de TEI tout en conservant le contrôle sur ces actions. Il s'agissait notamment des transferts d'actions antérieurs à novembre 2004, du transfert d'actions de novembre 2004 et des blocs d'actions visés par la cotisation initiale (collectivement, les « actions de TEI transférées »).

 

[181]   Au moment de formuler ses conclusions finales, l'avocat de l'intimée m'a présenté un résumé détaillé de la preuve versée au dossier en ce qui concerne l'activité observée du 3 février 2000 (date du premier transfert) à juin 2006 dans les comptes de placement que détient l'appelante à la CIBC Wood Gundy et chez Bolder. Le résumé fait état des retraits effectués dans ces comptes, des transferts au compte bancaire personnel de l'appelante (détenu à la Banque Toronto‑Dominion) et des paiements faits à partir du compte à la Banque Toronto‑Dominion et de l'un des comptes à la CIBC Wood Gundy.

 

[182]   Je conviens avec l'avocat de l'intimée que, selon ce résumé, l'appelante a payé la somme de 199 334 $, soit les dépenses et les avances à M. Hinke qui constituent le prêt allégué, au moyen du produit de la vente des actions de TEI transférées. Dans de nombreux cas, les fonds peuvent être liés directement à la vente des actions de TEI. Dans d'autres, les fonds provenaient de la vente d'actions autres que les actions de TEI. Ces autres actions avaient toutefois été achetées à l'aide du produit d'une vente antérieure d'actions de TEI.

 

[183]   Bref, M. Hinke exerçait un contrôle sur les actions mêmes que l'appelante et lui ont utilisées pour financer les paiements à des tiers et pour faire les avances à M. Hinke.

 

[184]   Par exemple, de novembre 2004 au 14 février 2006, environ 643 000 $ ont été tirés de la vente des actions de TEI transférées. Cela constituait presque la totalité des ressources financières de l'appelante pendant cette période.

 

[185]   Monsieur Hinke a fait exactement ce que le paragraphe 160(1) vise à empêcher. Il a transféré des biens à son épouse dans une tentative de privilégier certains créanciers au détriment de l'ARC. Par suite des instructions de M. Hinke, les biens ont subséquemment été vendus et le produit de la vente a servi à payer ses dettes et à financer ses dépenses personnelles.

 

[186]   L'appelante et M. Hinke ont tenté d'assimiler les transferts au remboursement de différents prêts. Selon moi, il n'y avait aucun prêt. La totalité des fonds provenait des actions de TEI transférées, actions sur lesquelles M. Hinke a continué d'exercer un contrôle après leur transfert à l'appelante.

 

[187]   Pour les raisons qui précèdent, je conclus que l'appelante n'a payé aucune contrepartie pour les blocs d'actions visés par la cotisation initiale.

 

Conclusion

 

[188]   Du 27 mai 2005 au 15 février 2006, M. Hinke a transféré à l'appelante 2 694 500 actions de TEI dont la juste valeur marchande se situait entre 639 771 $ et 678 535 $. L'appelante n'a versé aucune contrepartie pour ces actions. En conséquence, la somme déterminée en application de l'alinéa 160(1)e) est d'au moins 639 771 $. Comme cette somme est plus élevée que la somme de 546 835 $ visée par la cotisation du ministre, l'appel sera rejeté avec dépens à l'intimée.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 31e jour de décembre 2012.

 

 

« S. D'Arcy »

Le juge D'Arcy

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 27e jour de mai 2013.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur

 


RÉFÉRENCE :                                 2012 CCI 457

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :   2008-1842(IT)G

 

INTITULÉ :                                      Elena Shulkov c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                 Ottawa, Canada

 

DATES DE L'AUDIENCE :             Du 2 au 5 mai 2011, les 21 et 22 juin 2011, du 5 au 8 décembre 2011, et du 19 au 27 janvier 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L'honorable juge Steven K. D'Arcy

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 31 décembre 2012

 

COMPARUTIONS :

 

Avocats de l'appelante :

Me Terry D. McEwan

Me Karine Veilleux

Mme Kristina M. Mahon (stagiaire)

Avocats de l'intimée :

Me Ifeanyi Nwachukwu

Me Mélanie Sauriol

Me Shane Aikat

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

          Pour l'appelante :

                   Noms :        Terry D. McEwan, Karine Veilleux, Kristina M. Mahon

                   Cabinet :     Gowling Lafleur Henderson S.E.N.C.R.L., s.r.l.

                                       Avocats

                                       2600-160, rue Elgin

                                       Ottawa (Ontario)

                                      K1P 1C3

 

          Pour l'intimée :     William F. Pentney

                                       Sous-procureur général du Canada

                                       Ottawa, Canada

 



[1]           ECPF, paragraphe 3.

 

[2]           2003 CAF 423, paragraphe 3.

 

[3]           Pièce R‑21, onglet 1, page 9.

 

[4]           Recueil conjoint de documents, volume 7, onglet 69.

 

[5]           Recueil conjoint de documents, volume 7, onglet 73.

 

[6]           La traite bancaire a été achetée au moyen d'une somme de 52 000 $ provenant du compte « TD 294 » de l'appelante et d'une somme de 18 000 $ provenant du compte « TD 962 » de M. Hinke. Les 18 000 $ ont été fournis à M. Hinke par un ami, un certain M. Proulx. Bien que M. Hinke ait présenté une preuve contradictoire, il semble, à la lumière de la preuve documentaire objective dont je suis saisi, qu'une somme de 9 000 $, sur les 18 000 $, constituait un prêt de M. Proulx à M. Hinke et que le solde de 9 000 $ ait été payé en contrepartie de l'achat de 50 000 actions de TEI. Voir le recueil conjoint de documents, volume 7, onglets 70, 71 et 104.

 

[7]           Recueil conjoint de documents, volume 7, onglet 73(A); transcription, 4 mai 2011, pages 513 et 514; transcription, 8 décembre 2011, page 11. Le compte bancaire de la Banque TD a été désigné comme le compte TD 294.

 

[8]           Recueil conjoint de documents, volume 16, onglet 167.

 

[9]           Recueil conjoint de documents, volume 16, onglet 168. Voir aussi la transcription du 8 décembre 2011, pages 13 à 15.

 

[10]          Pièce R‑43, onglet 18. Computershare était l'agent des transferts autorisé de TEI.

 

[11]          Transcription, 8 décembre 2011, pages 16 et 17.

 

[12]          Recueil conjoint de documents, volume 7, onglets 74 et 75.

 

[13]          Recueil conjoint de documents, volume 7, onglet 82.

 

[14]          Pièce R‑43, onglets 18 et 18(B).

 

[15]          Transcription, 8 décembre 2011, page 33.

 

[16]          Transcription, 8 décembre 2011, pages 34 à 36.

 

[17]          Transcription, 8 décembre 2011, page 37.

 

[18]          Pièce A‑3.

 

[19]          Pièce A‑1.

 

[20]          Pièce R‑100.

 

[21]          Pièce R‑102.

 

[22]          Pièces R‑98 et R‑99.

 

[23]          Pièce A‑2.

 

[24]          Pièce R‑101.

 

[25]          Transcription, 2 mai 2011, page 188.

 

[26]          Ibid., page 143.

 

[27]          Pièce A‑3, paragraphe 13.

 

[28]          Transcription, 2 mai 2011, page 171.

 

[29]          Pièce A‑3, paragraphe 12.

 

[30]          Pièce R‑14.

 

[31]          David M. Paciocco et Lee Stuesser, The Law of Evidence, 5e éd., Toronto, Irwin Law, 2008, page 203.

 

[32]          Transcription, 2 mai 2011, pages 128 à 135.

 

[33]          Transcription, 2 mai 2011, pages 142 et 143.

 

[34]          Transcription, 2 mai 2011, pages 144 à 146.

 

[35]          Deemar v. College of Veterinarians of Ontario, 2008 ONCA 600, 92 R.J.O. (3e) 197 (C.A. Ont.).

 

[36]          Alan Bryant, Sidney N. Lederman et Michelle K. Fuerst, The Law of Evidence in Canada, 3e éd., Markham (Ontario), LexisNexis, 2009, page 823.

 

[37]          Transcription, 2 mai 2011, page 165.

 

[38]          Transcription, 3 mai 2011, page 205.

 

[39]          Pièce R‑98.

 

[40]          Mme McCann a signalé qu'il existe trois sortes de rapports d'évaluation : le rapport d'évaluation fondé sur des calculs de valeur, le rapport d'évaluation fondé sur une estimation de la valeur, et le rapport d'évaluation exhaustif (le rapport d'évaluation exhaustif étant le plus complet des trois).

 

[41]          Soit la date signalée dans le Système électronique de déclarations des initiés (SEDI), lequel a été mis sur pied par les organismes canadiens de réglementation des valeurs mobilières.

 

[42]          Mme McCann a signalé que l'information rétrospective ne peut être utilisée pour déterminer la valeur à une date donnée, mais qu'elle peut servir à vérifier la qualité des hypothèses formulées à la date de l'évaluation.

 

[43]          Transcription, 23 janvier 2012, page 176.

 

[44]          Pièce R‑98, paragraphe 66.

 

[45]          Transcription, 23 janvier 2012, pages 178 et 179.

 

[46]          Pour son rapport, Mme McCann a utilisé la définition suivante, donnée par l'Institut canadien des experts en évaluation d'entreprises, de l'expression « escompte pour bloc d'actions » : « Montant ou pourcentage déduit du prix de marché courant d'une action négociée en bourse pour refléter la réduction de la valeur par action d'un bloc d'actions qui, en raison de sa taille, ne pourrait être vendu dans un délai raisonnable compte tenu du volume normal des opérations sur le marché ». Pièce R‑98, paragraphe 7.

 

[47]          Pièce R‑98, paragraphe 72.

 

[48]          Transcription, 23 janvier 2012, pages 182 et 183.

 

[49]          Pièce R‑98, paragraphe 72.

 

[50]          Pièce R‑98, paragraphes 74 à 82.

 

[51]          Transcription, 23 janvier 2012, page 188.

 

[52]          Ibid., aux pages 197 et 198.

 

[53]          Ibid., page 200.

 

[54]          Ibid., page 201.

 

[55]          Pièce R‑98, paragraphe 93.

 

[56]          Ibid., paragraphe 118.

 

[57]          Ibid., paragraphe 119.

 

[58]          Les valeurs constituent un point milieu entre la valeur calculée sans escompte au titre du coût de vente des actions sur le marché libre et la valeur calculée avec un escompte de 4 pour 100.

 

[59]          Désignés dans le rapport d'évaluation comme les [TRADUCTION] « quatre blocs d'actions ».

 

[60]          Désignés dans le rapport d'évaluation comme les [TRADUCTION] « cinq blocs d'actions ».

 

[61]          Transcription, 2 mai 2011, page 31.

 

[62]          Transcription, 2 mai 2011, pages 100, 101, 112 et 113.

 

[63]          Ibid., page 103.

 

[64]          Ibid., page 110.

 

[65]          Ibid., pages 110 et 111.

 

[66]          Pièce A‑1.

 

[67]          Transcription, 2 mai 2011, page 36.

 

[68]          Pièce R‑101.

 

[69]          Pièce A‑2, paragraphe 2.

 

[70]          Transcription, 2 mai 2011, pages 116 et 117.

 

[71]          Voir Debora v. Debora, 2006 CanLII 40663, 83 R.J.O. (3e) 81 (C.A. Ont.).

 

[72]          Transcription, 5 décembre 2011, pages 174 et 175.

 

[73]          Transcription, 21 juin 2011, pages 638 et 639.

 

[74]          ECPF, paragraphes 7 et 10; transcription, 3 mai 2011, pages 323 et 324.

 

[75]          Pièce R‑24.

 

[76]          Recueil conjoint de documents, volume 13, onglet 2A, page 1.

 

[77]          Ibid., page 2.

 

[78]          Recueil conjoint de documents, volume 11, onglets 27 à 34; pièces R‑41 et R‑46.

 

[79]          ECPF, paragraphes 22, 24 à 26 et 29.

 

[80]          Transcription, 3 mai 2011, pages 365 à 370.

 

[81]          Transcription, 5 décembre 2011, pages 171, 172, 174 et 175.

 

[82]          Transcription, 5 décembre 2011, pages 166 à 168.

 

[83]          Transcription, 5 décembre 2011, pages 161 à 164.

 

[84]          ECPF, paragraphes 22, 24 à 26 et 29, et annexe C; pièces R‑78, R‑79 et R‑80.

 

[85]          Transcription, 19 janvier 2012, pages 198 et 199.

 

[86]          Pièces R‑68 et R‑69.

 

[87]          Pièce R‑68.

 

[88]          Transcription, 19 janvier 2012, page 200.

 

[89]          Transcription, 23 janvier 2012, pages 49 et 50.

 

[90]          Transcription, 23 janvier 2012, pages 37, 42, 43, 49, 50 et 55.

 

[91]          Transcription, 23 janvier 2012, page 55.

 

[92]          Recueil conjoint de documents, volume 11, onglets 33 et 34.

 

[93]          Recueil conjoint de documents, volume 11, onglet 36H.

 

[94]          Pièce R‑41.

 

[95]          Pièce R‑66; transcription, 19 janvier 2012, page 81.

 

[96]          Transcription, 19 janvier 2012, page 102.

 

[97]          ECPF, paragraphe 13.

 

[98]          ECPF, paragraphe 33; recueil conjoint de documents, volume 7, onglet 54.

 

[99]          Pièce A‑4.

 

[100]        Transcription, 21 juin 2011, pages 695 à 697. M. Hinke a témoigné que les actions peuvent être détenues de deux façons : elles peuvent être immatriculées au nom d'une maison de courtage ou elles peuvent être constatées par un certificat d'actions. Seules les actions immatriculées au nom d'une maison de courtage peuvent être négociées en bourse.

 

[101]        Pièce R‑58, paragraphe 6a), et pièce A.

 

[102]        Pièce R-57, pièce B.

 

[103]        Pièce R-70.

 

[104]        Pièce R-57, pièce B.

 

[105]        Pièce R-57, pièces B et C.

 

[106]        Pièce R-57, pièce D.

 

[107]        Transcription, 19 janvier 2012, page 213.

 

[108]        Transcription, 21 juin 2011, pages 669 à 770.

 

[109]        ECPF, paragraphe 13; recueil conjoint de documents, volume 16, onglet 167.

 

[110]        ECPF, paragraphes 43, 55, 66, 81 et 94, et annexe D; recueil conjoint de documents, volume 17, onglets 52, 54, 68 et 69.

 

[111]        ECPF, paragraphes 43, 55 et 66.

 

[112]        2008 CAF 89, paragraphe 18.

 

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