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Dossier : 2015-4744(IT)G

ENTRE :

NORMAN CATLOS,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de Miriam Barkley (2015‑4745(IT)G) et de Richard Aaron Barkley (2015‑4746(IT)G), le 12 juin 2018, à London (Ontario).

 

Devant : L'honorable juge B. Russell


Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me David J. Thompson

Avocat de l'intimée :

Me Jack Warren

 

JUGEMENT

  L'appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie le 21 août 2014 aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu (Canada) pour l'année d'imposition 2013 de l'appelant est rejeté, et un seul mémoire de frais est adjugé à l'intimée.

Signé à Halifax (Nouvelle-Écosse), ce 28e jour d'août 2018.

« B. Russell »

Le juge Russell


Dossier : 2015-4745(IT)G

ENTRE :

MIRIAM BARKLEY,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de Norman Catlos (2015‑4744(IT)G) et de Richard Aaron Barkley (2015‑4746(IT)G), le 12 juin 2018, à London (Ontario).

 

Devant : L'honorable juge B. Russell

Comparutions :

Avocat de l'appelante :

Me David J. Thompson

Avocat de l'intimée :

Me Jack Warren

 

JUGEMENT

  L'appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie le 21 août 2014 aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu (Canada) pour l'année d'imposition 2013 de l'appelante est rejeté, et un seul mémoire de frais est adjugé à l'intimée.

Signé à Halifax (Nouvelle-Écosse), ce 28e jour d'août 2018.

« B. Russell »

Le juge Russell


Dossier : 2015-4746(IT)G

ENTRE :

RICHARD AARON BARKLEY,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de Norman Catlos (2015‑4744(IT)G) et de Miriam Barkley (2015‑4745(IT)G), le 12 juin 2018, à London (Ontario).

Devant : L'honorable juge B. Russell

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me David J. Thompson

Avocat de l'intimée :

Me Jack Warren

 

JUGEMENT

  L'appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie le 21 août 2014 aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu (Canada) pour l'année d'imposition 2013 de l'appelant est rejeté, et un seul mémoire de frais est adjugé à l'intimée.

Signé à Halifax (Nouvelle-Écosse), ce 28e jour d'août 2018.

« B. Russell »

Le juge Russell


Référence : 2018 CCI 177

Date : 20180828

Dossier : 2015-4744(IT)G

ENTRE :

NORMAN CATLOS,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossier : 2015-4745(IT)G

ET ENTRE :

MIRIAM BARKLEY,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossier : 2015-4746(IT)G

ET ENTRE :

RICHARD AARON BARKLEY,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Russell

Introduction

[1]  Les appels de M. Catlos (Norman), de Mme Barkley (Miriam) et de M. Barkley (Richard), découlant des mêmes transactions, ont été entendus sur preuve commune. Chaque appelant interjette appel d'une cotisation établie par le ministre du Revenu national (le ministre), à l'égard de son année d'imposition 2013, qui a refusé la demande de déduction de frais judiciaires conformément à l'alinéa 8(1)b) de la Loi de l'impôt sur le revenu (Canada) (la Loi). La déduction pour frais judiciaires demandée par Norman, Miriam et Richard et qui a été refusée s'élevait à 74 030 $, à 74 030 $ et à 100 572 $ respectivement (en chiffres ronds).

Le contexte

[2]  Les appelants Norman Catlos et Miriam Barkley sont frère et sœur; Richard est l'époux de Miriam. Richard et Norman sont des cadres supérieurs d'une société dénommée Tatra Corporation (Tatra), société de portefeuille détenant diverses sociétés exploitantes issues de l'entreprise familiale Catlos fondée par le père défunt de Norman et Miriam, Peter père. Miriam a occupé un emploi à temps plein chez Postes Canada. Les appelants sont tous trois administrateurs de Tatra. Miriam et Norman ont deux autres frères, Brian et Peter fils. En avril 2004, Peter père a fait don de ses actions de Tatra à Miriam, lui donnant ainsi le contrôle de Tatra. À la fin 2004, Miriam détenait 25 918,58 actions ordinaires de Tatra alors que chacun de ses trois frères, Norman, Brian et Peter fils, détenait 3 708,58 actions. Peter père conservait une seule action. Les actions de catégorie B de Tatra appartenaient aux mêmes actionnaires de la même façon, sauf que Peter père n'avait aucune action.

[3]  En septembre 2011, Brian et Peter fils ont déposé une demande de tutelle à l'égard de Peter père, devant la Cour supérieure de justice de l'Ontario, contre notamment deux des trois appelants en l'espèce, soit leurs frère et sœur Miriam et Norman, en alléguant que le transfert par Peter père de la majorité des actions de Tatra à Miriam en 2004, ce qui lui donnait le contrôle de Tatra, était inapproprié. En décembre 2011, les deux frères ont obtenu une injonction provisoire interdisant à Miriam de faire quelque opération que ce soit à l'égard des actions de Tatra contestées et empêchant les trois appelants en l'espèce, y compris Richard, à titre d'administrateurs de Tatra, de vendre des éléments d'actif de Tatra, et empêchant également les trois appelants de faire en sorte que Tatra leur verse une rémunération mensuelle supérieure à 10 000 $. À ce moment‑là, Tatra payait à chacun d'eux, à titre de cadre ou de dirigeant, une rémunération allant bien au‑delà de ce montant.

[4]  En mars 2012, la Cour supérieure de l'Ontario a ordonné la tenue d'un procès sur la question de la validité du transfert d'actions de 2004 et a aussi ordonné que Richard soit joint à Miriam et à Norman comme défendeur. Une déclaration a été déposée. En octobre 2012, les appelants en l'espèce ont obtenu une ordonnance annulant l'injonction provisoire. Le redressement recherché, selon l'acte de procédure, comprenait la reddition de comptes et la récupération en equity de tous les salaires, primes, dividendes et autres montants versés par Tatra à chaque particulier (les appelants en l'espèce) depuis le transfert de 2004.

[5]  Pour leur année d'imposition 2012, les appelants ont demandé avec succès la déduction en application de l'alinéa 8(1)b) des frais judiciaires versés lors de l'instance devant la Cour supérieure de l'Ontario. Le ministre semble avoir accepté les déductions pour cette année‑là au motif que les frais ont été versés afin d'obtenir, en octobre 2002, l'annulation de l'injonction provisoire qui avait limité leur revenu de 2012 à 10 000 $ par mois. Cependant, les frais judiciaires versés et déclarés à l'égard de l'année d'imposition 2013 ont été refusés, d'où les présents appels.

La question en litige

[6]  La question en litige est la validité des cotisations portées en appel, qui ont refusé la déduction des frais judiciaires demandée par chaque appelant conformément à l'alinéa 8(1)b) de la Loi pour l'année d'imposition 2013.

Analyse juridique et conclusion

[7]  L'alinéa 8(1)b) de la Loi a été modifié en 2013, avec effet rétroactif à l'année 2001. Le libellé antérieur est celui qui apparaît dans la jurisprudence invoquée par les parties. Le libellé antérieur est le suivant :

Frais judiciaires d'un employé

b) les sommes payées par le contribuable au cours de l'année au titre des frais judiciaires ou extrajudiciaires qu'il a engagés pour recouvrer le traitement ou salaire qui lui est dû par son employeur ou ancien employeur ou pour établir un droit à ceux‑ci;

[8]  Le libellé actuel de l'alinéa 8(1)b), et celui qui s'applique à l'année d'imposition 2013, est le suivant :

Frais judiciaires d'un employé

b) les sommes payées par le contribuable au cours de l'année au titre des frais judiciaires ou extrajudiciaires qu'il a engagés pour recouvrer un montant qui lui est dû et qui, s'il le recevait, serait à inclure en vertu de la présente sous‑section dans le calcul de son revenu, ou pour établir un droit à un tel montant;

[9]  Les appelants font valoir que la disposition s'applique à leurs demandes de déduction au motif que l'élément de base des redressements demandés dans l'instance est la récupération de tous les revenus à déclarer par un employé qui excèdent un montant « raisonnable » non précisé à partir de 2004, et donc notamment durant l'année d'imposition 2013. L'intimée soutient que la disposition ne s'applique pas aux appelants puisque Tatra leur a déjà versé toute la rémunération pour 2013 et parce que l'alinéa 8(1)b) ne s'applique pas aux actions en recouvrement de rémunération excessive. L'intimée fait également valoir que le fait d'alléguer l'enrichissement sans cause ne peut transformer ce qui est fondamentalement une demande en dommages‑intérêts d'une société en un litige entre un employé et un employeur quant au salaire dû, ce qui est l'objet de l'alinéa 8(1)b).

[10]  La déclaration modifiée déposée par les deux frères en avril 2013 (la déclaration initiale avait été déposée en 2012, semble‑t‑il) à titre de tuteurs à l'instance de leur père Peter en tant que demandeur réclame à l'encontre de Miriam un certain nombre de redressements, notamment l'annulation du transfert des actions de Peter père à Miriam, une reddition de comptes en equity de toutes les sommes que Tatra lui a versées depuis le transfert de 2004, [TRADUCTION] « moins les montants raisonnables payables à Miriam pour les services qu'elle a rendus à Tatra pendant cette période », le total qui en découle étant les [TRADUCTION] « profits de Miriam », et une ordonnance [TRADUCTION] « enjoignant à Miriam de verser la totalité des profits de Miriam au demandeur », et des dommages‑intérêts généraux et punitifs.

[11]  De même, la déclaration modifiée réclamait à l'encontre de Norman un certain nombre de redressements, notamment une reddition de comptes en equity de toutes les sommes que Tatra lui a versées depuis le transfert de 2004, [TRADUCTION] « moins les montants raisonnables payables à Norman pour les services qu'il a rendus à Tatra pendant cette période », le total qui en découle étant les [TRADUCTION] « profits de Norman », et une ordonnance [TRADUCTION] « enjoignant à Norman de verser la totalité des profits de Norman au demandeur », et des dommages‑intérêts généraux et punitifs.

[12]  De même, la déclaration modifiée réclamait à l'encontre de Richard un certain nombre de redressements, notamment une reddition de comptes en equity de toutes les sommes que Tatra lui a versées depuis le transfert de 2004, [TRADUCTION] « moins les montants raisonnables payables à Richard pour les services qu'il a rendus à Tatra pendant cette période », le total qui en découle étant les [TRADUCTION] « profits de Richard », et une ordonnance [TRADUCTION] « enjoignant à Richard de verser la totalité des profits de Richard au demandeur », et des dommages‑intérêts généraux et punitifs.

[13]  La déclaration modifiée alléguait également que les redressements étaient réclamés [TRADUCTION] « en raison du non-respect par les défendeurs de leurs obligations fiduciaires envers [le demandeur] découlant du [transfert des actions de 2004 à Miriam] et de leur enrichissement ultérieur qui en a découlé durant une période où ils étaient manifestement en situation de conflit d'intérêts entre leurs obligations envers le demandeur et leur intérêt personnel à conserver les actions et les avantages dont les défendeurs ont joui en conséquence ». La déclaration modifiée comprenait, du paragraphe 42 au paragraphe 47, des revendications sous le titre [TRADUCTION] « L'enrichissement sans cause des défendeurs découlant du transfert ».

[14]  Dans l'arrêt Fenwick c. Canada, 2008 CAF 370, [2009] 2 R.C.F. F‑9, la Cour d'appel fédérale (la C.A.F.) a confirmé une décision de la juge Woods, alors juge de la Cour canadienne de l'impôt (2008 CCI 243), concernant l'interprétation et l'application de l'alinéa 8(1)b). Dans cette affaire, qui n'est pas très différente de l'espèce, l'appelant était le seul administrateur et le directeur général d'une société à dénomination numérique de l'Ontario (la société) qui fabriquait et distribuait des plaquettes de frein d'automobiles. L'entreprise avait été fondée par le père et l'oncle de l'appelant. L'appelant avait reçu toutes les actions avec droit de vote et ses sœurs détenaient certaines actions sans droit de vote, parce qu'on croyait que l'appelant gérerait seul l'entreprise.

[15]  Les sœurs ont intenté une action, en invoquant l'absence de renseignements financiers et le fait que l'appelant avait privé la société d'une occasion d'affaires en lançant sa propre société afin de tirer profit lui‑même de l'occasion. La juge Woods a conclu que l'élément central de la déclaration de 93 pages et des nombreux actes irréguliers reprochés était l'allégation selon laquelle l'appelant s'était versé une rémunération excessive et qu'il avait privé la société d'une occasion d'affaires en la détournant à son profit. La Cour de l'impôt a conclu que ce n'était pas une situation visée par l'alinéa 8(1)b) (tel qu'il était libellé à l'époque).

[16]  En appel, la C.A.F. s'est dite d'accord avec le rejet de l'appel par la Cour de l'impôt. En particulier, la juge Sharlow de la C.A.F. a fait certaines observations pertinentes. Avant de les aborder, je dois souligner d'abord que cette affaire portait sur la version antérieure de l'alinéa 8(1)b). Tant la version antérieure que la version actuelle qui s'applique à l'appel sont reproduites ci‑dessus. Elles se ressemblent beaucoup. La note marginale, « frais judiciaires d'un employé », demeure la même.

[17]  Les seules différences dans le libellé de la disposition sont les suivantes. Premièrement, les mots « le traitement ou salaire » ont été remplacés par « un montant ». Deuxièmement, l'expression « par son employeur ou ancien employeur » a été remplacée par « qui, s'il le recevait, serait à inclure en vertu de la présente sous‑section dans le calcul de son revenu [...] ». La sous‑section en cause est la sous‑section A de la section B de la partie I de la Loi, intitulée « Revenu ou perte provenant d'une charge ou d'un emploi », qui comprend les articles 5 à 8 de la Loi.

[18]  À mon avis, le changement de libellé a un certain effet. Modifier « le traitement ou salaire » à « un montant [qui] serait à inclure [...] dans le calcul de son revenu » ajoute les pourboires et autres revenus visés par l'article 5, les avantages sociaux et autres revenus visés par l'article 6, ainsi que les options d'achat d'actions visées par l'article 7. (L'article 8 lui‑même traite des déductions du revenu tiré d'un emploi ou d'une charge).

[19]  Dans les présents appels, il n'y a pas de liste exhaustive des types de revenus que les trois appelants ont reçus de Tatra au fil des ans, mais, quoi qu'il en soit, l'alinéa 8(1)b) vise désormais une gamme plus complète de types de revenus tirés d'un emploi ou d'une charge que lorsqu'il n'était question que de traitement et salaire. En outre, aucune des quatre parties dans les trois présents appels n'a soulevé de question de cette nature.

[20]  Ce n'est pertinent en l'espèce que parce que la jurisprudence relative à l'alinéa 8(1)b), notamment l'arrêt Fenwick, que je vais maintenant examiner, traite du libellé antérieur, celui en place jusqu'en 2013 lorsque le nouveau libellé a été appliqué avec effet rétroactif à partir de l'année 2001.

[21]  J'ai décrit les faits de l'arrêt Fenwick, qui ressemblent aux faits des présents appels. Premièrement, la juge Sharlow a fait observer au paragraphe 7 de ses motifs de jugement qu'elle était d'accord avec la juge Woods que le libellé de cette disposition « a une portée relativement restreinte ». Néanmoins, la juge de la C.A.F. a accepté pour les besoins de l'appel dont elle était saisie, sans se prononcer, la conclusion de la juge Woods que la disposition s'applique non seulement à l'égard d'un contribuable qui demande le paiement d'un traitement ou d'un salaire d'un employeur ou d'un ancien employeur, mais également lorsque l'employeur ou l'ancien employeur cherche à se faire rembourser ce revenu.

[22]  Cela est maintenant quelque peu différent, puisque le libellé actuel ne comprend plus les mots « employeur ou ancien employeur ». Je ne suis pas prêt à dire que cette disposition signifie maintenant qu'une tierce partie à la relation de travail ou à la charge qui demande que l'appelant — comme ceux en l'espèce —rembourse le revenu tiré de la charge ou de l'emploi est maintenant visée par l'alinéa 8(1)b). Cela éloignerait toute la portée de l'alinéa 8(1)b) de la charge ou de l'emploi.

[23]  Ma conclusion à cet égard est étayée par la déclaration suivante de la C.A.F., au paragraphe 11 : « [à] mon avis, les allégations d'enrichissement sans cause ne sauraient transformer une poursuite qui consiste essentiellement en une action en dommagesintérêts intentée par une société, en un litige entre employeur et employé concernant le montant de salaire dû », ou, pour reprendre le libellé actuel, un litige au sujet d'une charge ou d'un emploi quant au montant dû à l'égard de la charge ou de l'emploi. En outre, la déclaration modifiée qui désigne comme défendeurs les appelants en l'espèce invoque expressément l'enrichissement sans cause, ce qui, selon ce que la C.A.F. a déclaré dans l'extrait précité, excède la portée de l'alinéa 8(1)b) lorsqu'on l'invoque à l'égard d'une poursuite par une société plutôt qu'à l'égard de l'emploi ou de la charge d'une personne précise.

[24]  De plus, comme l'explique la C.A.F. aux paragraphes 5 et 6 de ses motifs, la prétention du contribuable dans l'arrêt Fenwick selon laquelle il « a dû démontrer que la rémunération qu'il a reçue était justifiée pour pouvoir prouver qu'il avait légalement le droit de la recevoir et de la conserver », de sorte que ses frais judiciaires étaient déductibles, était une interprétation trop large de cette disposition. La prétention est la même en l'espèce : les appelants s'opposaient à une demande de récupération de l'ensemble des versements qu'ils avaient reçus de Tatra — deux des appelants sont employés et dirigeants, et le troisième est dirigeant et administrateur — moins tout paiement auquel ils auraient raisonnablement droit. Je pense que, tout comme dans l'arrêt Fenwick, cela excède le champ d'application de l'alinéa 8(1)b).

[25]  Je me reporte également au paragraphe 8 de l'arrêt Fenwick. Dans ce paragraphe, la C.A.F. établit une distinction avec « un litige dans lequel des dommages‑intérêts sont réclamés par suite de différends autres que ceux qui ont trait aux conditions d'emploi, du seul fait que le droit du défendeur à une rémunération donnée constitue un élément de la demande ». Je considère que la même distinction peut être établie concernant les présents appels, et la différence de libellé de l'alinéa 8(1)b) ne modifie en rien cette conclusion. Là encore, je pense, en accord avec l'arrêt Fenwick, que l'alinéa 8(1)b) ne s'applique pas à des circonstances comme celles de l'espèce.

[26]  Je dois ajouter, en ce qui a trait au paragraphe 9 des motifs de jugement de la C.A.F., que je suis d'accord avec l'affirmation selon laquelle la nature essentielle des allégations doit être établie à partir des actes de procédure eux‑mêmes, et non à partir d'une source comme le témoignage de l'avocat au litige, ce qui est un témoignage d'opinion, et n'est peut‑être pas indépendant. Par conséquent, j'ai axé mon analyse sur le contenu des actes de procédure, plus précisément de la déclaration modifiée.

[27]  De plus, la C.A.F., au paragraphe 10 de ses motifs, a conclu qu'il était raisonnablement loisible à la juge Woods de conclure que la déduction prévue à l'alinéa 8(1)b) ne s'appliquait pas au contribuable au motif que la réclamation contre lui excédait la relation employé‑employeur. De même, en l'espèce, comme je l'ai dit ci‑dessus, les réclamations faites contre les appelants ont une origine très différente, soit l'enrichissement sans cause et le non‑respect d'obligations fiduciaires.

[28]  Par conséquent, en me fondant sur l'arrêt Fenwick, et malgré les observations valables de Me Thompson pour les appelants, je conclus que les frais judiciaires en cause excèdent le champ d'application de l'alinéa 8(1)b), qui « a une portée relativement restreinte » et ainsi ne s'applique pas aux réclamations d'une société qui demande de nombreux redressements fondés sur l'enrichissement sans cause et le non‑respect des obligations fiduciaires.

[29]  Les trois appels sont rejetés. Un seul mémoire de frais est adjugé à l'intimée.

Signé à Halifax (Nouvelle-Écosse), ce 28e jour d'août 2018.

« B. Russell »

Le juge Russell


RÉFÉRENCE :

2018 CCI 177

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2015-4744(IT)G

INTITULÉ :

NORMAN CATLOS ET SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L'AUDIENCE :

London (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :

Le 12 juin 2018

MOTIFS DU JUGEMENT :

L'honorable juge B. Russell

DATE DU JUGEMENT :

Le 28 août 2018

COMPARUTIONS :

Avocat de l'appelant :

Me David J. Thompson

Avocat de l'intimée :

Me Jack Warren

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l'appelant :

Nom :

Me David J. Thompson

 

Cabinet :

David J. Thompson Professional Corporation

Pour l'intimée :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

 

 

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