Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Contenu de la décision

Dossiers : 2012-2127(IT)G

2012-2129(GST)G

ENTRE :

ROBERT H. KEENAN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2120(IT)G

2012-2134(GST)G

ET ENTRE :

WILLIAM E. ADAMS,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2122(IT)G

2012-2133(GST)G

ET ENTRE :

CHARISMATIC INDUSTRIES INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2117(IT)G

2012-2135(GST)G

ET ENTRE :

640950 B.C. LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2123(IT)G

2012-2128(GST)G

ET ENTRE :

WORLD WIDE GOLF (CANADA) LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2124(IT)G

2012-2132(GST)G

ET ENTRE :

LANDMARK CAPITAL PARTNERS LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2125(IT)G

2012-2131(GST)G

ET ENTRE :

LANDMARK OIL & GAS LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2126(IT)G

2012-2130(GST)G

ET ENTRE :

PREFERRED CHOICE ACCOUNTING SERVICES LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Requête entendue le 4 juillet 2018, à Vancouver (Colombie-Britannique)

Devant : L'honorable juge Randall S. Bocock

  Comparutions :

Représentants des appelants :

Robert Harold Keenan

William E. Adams

Avocats de l'intimée :

Me Max Matas

Me Mark Schearer

 

ORDONNANCE

  VU la requête de l'intimée en vue de modifier certaines réponses et de faire annuler certains appels;

  ET VU les observations de l'intimée et le témoignage et les observations de Robert H. Keenan, l'un des appelants;

  LA COUR ORDONNE, conformément aux motifs ci‑joints :

1.  Dans les 30 jours suivant la date de la présente ordonnance, l'intimée peut déposer et signifier les réponses modifiées jointes à titre de pièces « A » à « F » à l'affidavit de Barbara Harvey fait  le 22 janvier 2018 et déposé à la Cour le 24 janvier 2018, ainsi que les modifications aux pièces « A » à « C » de l'affidavit de Marc Roy fait le 11 janvier 2018 et déposé à la Cour le 24 janvier 2018; ces affidavits sont aux onglets 4 et 3 respectivement du dossier de requête de l'intimée déposé le 24 janvier 2018 et portent sur les appels suivants à notre Cour :

a)  Landmark Capital Partners Ltd. c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2124(IT)G et 2012‑2132(GST)G;

b)  Landmark Oil & Gas Ltd. c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2131(GST)G;

c)  640950 B.C. Ltd. c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2117(IT)G et 2012‑2135(GST)G;

d)  Preferred Choice Accounting Services Ltd. c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2126(IT)G et 2012‑2130(GST)G;

e)  World Wide Golf (Canada) Ltd. c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2123(IT)G et 2012‑2128(GST)G;

f)  Robert H. Keenan c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2127(IT)G et 2012‑2129(GST)G;

g)  William E. Adams c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2120(IT)G et 2012‑2134(GST)G.

2.  Les appels interjetés à l'égard des périodes de déclaration du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002 dans Landmark Capital Partners Ltd. c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2132(GST)G, en vertu de l'article 12 de la Loi sur la Cour canadienne de l'impôt, L.R.C. (1985), ch. T‑2 (la Loi), et des articles 169 et 171 de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), 5e suppl., ch. 1, telle que modifiée (la LIR), sont annulés.

3.  Les appels interjetés à l'égard des années d'imposition 2002 et 2003 dans Landmark Oil & Gas Ltd. c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2125(IT)G, en vertu de l'article 12 de la Loi et des articles 169 et 171 de la LIR sont annulés.

4.  Le jugement de la Cour accueillant les appels Charismatic Industries Inc. c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2122(IT)G, et Charismatic Industries Inc. c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2133(GST)G, apparaît dans un jugement distinct, lequel prévoit également l'adjudication des dépens, même s'il en est question dans les motifs ci‑joints.

5.  Il n'y a pas d'adjudication des dépens de la présente requête.

Signé à Toronto (Ontario), ce 29e jour d'août 2018.

« R.S. Bocock »

Le juge Bocock


Référence : 2018 CCI 179

Date : 20180829

Dossiers : 2012-2127(IT)G

2012-2129(GST)G

ENTRE :

ROBERT H. KEENAN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2120(IT)G

2012-2134(GST)G

ET ENTRE :

WILLIAM E. ADAMS,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2122(IT)G

2012-2133(GST)G

ET ENTRE :

CHARISMATIC INDUSTRIES INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2117(IT)G

2012-2135(GST)G

ET ENTRE :

640950 B.C. LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2123(IT)G

2012-2128(GST)G

ET ENTRE :

WORLD WIDE GOLF (CANADA) LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2124(IT)G

2012-2132(GST)G

ET ENTRE :

LANDMARK CAPITAL PARTNERS LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2125(IT)G

2012-2131(GST)G

ET ENTRE :

LANDMARK OIL & GAS LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossiers : 2012-2126(IT)G

2012-2130(GST)G

ET ENTRE :

PREFERRED CHOICE ACCOUNTING SERVICES LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS COMMUNS DE L'ORDONNANCE ET DES JUGEMENTS

Le juge Bocock

[1]  Dans la présente requête, l'intimée sollicite les ordonnances et jugements suivants :

a)  l'autorisation de modifier les réponses pour tous les appels dont la Cour est saisie, à l'exception de deux appels, soit Charismatic Industries Inc., dossiers 2012‑2122(IT)G et 2013‑2133(GST)G; l'intimée reconnaît que la Cour devrait accueillir ces appels;

b)  l'annulation des appels interjetés à l'égard des périodes de déclaration du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002 dans Landmark Capital Partners Ltd. c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2132(GST)G, en vertu de l'article 12 de la Loi sur la Cour canadienne de l'impôt, L.R.C. (1985), ch. T‑2 (la Loi), et des articles 169 et 171 de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), 5e suppl., ch. 1, telle que modifiée (la LIR), ou, à titre subsidiaire, l'octroi à l'intimée d'un délai de 60 jours suivant l'ordonnance pour produire une réponse modifiée à l'avis d'appel modifié une seconde fois;

c)  l'annulation des appels interjetés à l'égard des années d'imposition 2002 et 2003 dans Landmark Oil & Gas Ltd. c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2125(IT)G, en vertu de l'article 12 de la Loi et des articles 169 et 171 de la LIR, ou, à titre subsidiaire, l'octroi à l'intimée d'un délai de 60 jours suivant l'ordonnance pour produire une réponse modifiée à l'avis d'appel modifié une seconde fois;

d)  en raison de la concession de l'intimée au début de l'audition des requêtes, l'accueil intégral des appels suivants :

a)  Charismatic Industries Inc., 2012‑2122(IT)G;

b)  Charismatic Industries Inc., 2012‑2133(GST)G.

I. Les faits

[2]  Les présents appels ont été controversés et très longs. En 2002, l'Agence du revenu du Canada (l'ARC) a commencé à procéder à des vérifications et à des enquêtes au sujet des appelants. Il y a eu des poursuites pénales; en outre, les appels dont la Cour est saisie ont été formés en 2012. Depuis lors, les parties ont présenté des requêtes, des requêtes incidentes et des demandes presque deux fois par année.

[3]  Les appelants croient que l'intimée s'est livrée à une triple guerre juridique en intentant des procédures pénales, en prenant des mesures d'exécution et en établissant de nouvelles cotisations prévues par la loi. Selon l'intimée, les appelants, menés par un comptable général accrédité, M. Keenan, se sont opposés avec obstination aux cotisations que M. Keenan, son associé et ses sociétés liées ne pouvaient éviter, et les ont retardées. En tant que juge des requêtes, je suis certain de deux choses : aucune des parties ne fait preuve de bonne volonté et n'a accordé ni cédé quoi que ce soit. Cela est confirmé par les présentes requêtes en modification des actes de procédure, qui ne font pas l'objet de contestation dans la plupart des appels dont la Cour est saisie. En l'espèce, toutefois, ces questions sont devenues hautement conflictuelles. Par conséquent, en examinant la présente requête, la Cour ne peut qu'espérer remettre la procédure judiciaire sur la bonne voie afin qu'elle passe aux prochaines étapes.

II. Les requêtes en modification des actes de procédure

[4]  Les requêtes en modification des réponses dans 13 des 16 appels dont la Cour est saisie visent objectivement à éclaircir les questions en litige que la Cour doit trancher : Canderel Ltée c. Canada, [1994] 1 C.F. 3 (C.A.F.), à la page 10.

[5]  Les interrogatoires préalables n'ont pas encore été tenus. Les appelants n'ont pas remis leur liste de documents à l'intimée. Ces deux faits déterminants indiquent que les appelants ne subiront aucun préjudice ni aucune injustice : Canderel, à la page 10. Devant la Cour, les appelants ont fait valoir leur droit de connaître les hypothèses et la thèse auxquelles ils font face. Les modifications proposées apportent des précisions et sont utiles à cet égard.

[6]  Les appelants s'opposent à la modification des actes de procédure parce que les auteurs des affidavits, qui sont deux agents des litiges de l'ARC, n'ont pas participé aux vérifications dès le départ et parce que les appelants ne les connaissent pas. Les agents de l'ARC ont plutôt étudié les dossiers, ont fourni des motifs clairs à l'appui des modifications et ont mis en évidence l'objectif primordial de révéler davantage le véritable litige entre les parties, objectif pouvant être atteint avec les modifications. En outre, le fait que les appelants ne connaissent pas les agents des litiges de l'ARC actuels n'est pas pertinent, à moins que la preuve démontre que les agents avaient une connaissance insuffisante pour souscrire les affidavits. Les appelants n'ont pas présenté cette preuve.

[7]  Puisqu'il est satisfait au critère juridique applicable à la modification des actes de procédure à un stade précoce de l'instance, et en l'absence de préjudice ou d'injustice causé aux appelants (ce serait plutôt l'inverse), la requête de l'intimée en modification des réponses est accueillie.

III. Requête en annulation de l'appel — Aucun avis d'opposition pour certaines périodes de déclaration

[8]  Dans l'appel Landmark Capital Partners Ltd. c. Sa Majesté la Reine, 2012‑2132(GST)G, le ministre du Revenu national (le ministre) soutient n'avoir jamais reçu d'avis d'opposition pour les périodes de déclaration du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002 (les périodes en cause). Le droit applicable aux appels en matière fiscale interjetés à la Cour est clair. Avant d'interjeter appel à la Cour, le contribuable doit signifier un avis d'opposition au ministre dans le délai prescrit. De plus, indépendamment du délai, la signification de l'avis d'opposition à une cotisation est une condition préalable à l'introduction d'un appel d'une cotisation : Bormann c. La Reine, 2006 CAF 83, au paragraphe 3. On a appliqué cette décision aux dispositions pratiquement identiques de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E‑15, dans sa version modifiée (la LTA) : Whitford c. La Reine, 2008 CCI 359, aux paragraphes 7 et 10. Pour ce motif, la question dont je suis saisi en tant que juge des requêtes est de savoir si l'appelante dans cet appel précis visant les périodes en cause a d'abord signifié un avis d'opposition au ministre avant d'interjeter appel à la Cour. Si tel n'est pas le cas, la requête devra être accueillie et l'appel, annulé.

[9]  La preuve de l'intimée était constituée premièrement de la preuve habituelle lors de requêtes de ce genre et de demandes de prorogation contestées, à savoir un affidavit d'un fonctionnaire de l'ARC déclarant sous serment qu'après un examen minutieux, il n'a trouvé aucun avis d'opposition dans les dossiers de l'ARC. L'auteur de l'affidavit déclare toujours exactement cela : l'ARC n'a reçu aucun avis d'opposition pour la période en cause.

[10]  Il y avait cependant un autre élément de preuve. L'avis d'opposition de l'appelante signifié au ministre et reçu par ce dernier était également joint à l'affidavit. Cet avis d'opposition, rédigé par un avocat, était par ailleurs complet et explicite. Dans une lettre d'accompagnement, on faisait expressément référence, en caractères gras, aux périodes de déclaration du 1er janvier 2003 au 30 septembre 2006. En outre, la lettre d'accompagnement faisait état de l'avis de nouvelle cotisation du 9 août 2010. Le montant total de la nouvelle cotisation selon la lettre d'accompagnement de l'avocat et le montant indiqué dans la nouvelle cotisation du 9 août 2010 annexée concordent : 84 655,84 $. De même, ces deux documents portent sur les mêmes périodes de déclaration que l'avis de nouvelle cotisation, soit du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2006. Aucun de ces trois documents (dont deux ont été rédigés par l'appelante ou son avocat) n'inclut les périodes en cause.

[11]  L'appelante n'a présenté aucune preuve de la signification d'un avis d'opposition portant sur les périodes en cause. L'appelante n'a pas affirmé qu'un avis de nouvelle cotisation avait été établi ou envoyé. Le représentant de l'appelante a affirmé qu'elle a été induite en erreur par une lettre de l'ARC du 17 octobre 2003 qui mentionnait de façon générale ce qui suit : [TRADUCTION] « Cependant, ces articles [sur les crédits de taxe sur les intrants] ne s'appliquent pas à Landmark Capital, puisque vous avez précisé vos activités commerciales au cours de la vérification. » Quel que soit le niveau de confusion ayant pu se produire chez l'appelante, rien ne justifie qu'elle se soit fondée sur cette lettre, puisqu'elle ne concernait pas un avis de cotisation portant sur les périodes en cause.

[12]  En somme, aucun élément de preuve n'établit que l'appelante a déposé un avis d'opposition ou a sollicité une ordonnance de prorogation du délai pour déposer un avis d'opposition avant l'audition de la présente requête, et d'ailleurs seulement oralement.

[13]  En revanche, les éléments de preuve de l'intimée exposent en détail l'historique des oppositions du point de vue de la contribuable et du ministre. L'intimée avait invoqué dès le début la question de l'absence de l'avis d'opposition. L'intimée a soulevé la question de l'absence de dépôt d'un avis d'opposition dans sa réponse initiale en indiquant correctement les périodes en cause. L'avis d'opposition de Landmark Capital se rapportait à une nouvelle cotisation précise, portait sur des périodes de déclaration précises postérieures aux périodes en cause et découlait de la vérification et de l'enquête. Cette nouvelle cotisation ainsi que l'avis d'opposition indiquaient de façon uniforme et exacte les périodes postérieures et ne visaient pas la période en cause. L'appelante ne s'est opposée à l'égard des périodes en cause que le jour de l'audience de la présente requête. Tout bien considéré, la Cour conclut qu'aucun avis d'opposition n'a été signifié au ministre quant aux périodes en cause. La condition préalable énoncée à l'article 302 de la LTA n'a donc pas été remplie. Par conséquent, l'appel interjeté à l'égard des périodes de déclaration du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002, soit les périodes en cause, est annulé.

IV. La requête en annulation des appels des cotisations portant qu'aucun impôt n'est payable

[14]  Le ministre a établi une cotisation à l'égard de Landmark Oil & Gas Ltd. (Landmark Oil) pour les années d'imposition 2002 et 2003 au moyen de nouvelles cotisations distinctes portant la même date, soit le 15 novembre 2010. Les avis de nouvelle cotisation ont été produits comme pièces à l'affidavit d'un fonctionnaire de l'ARC; ces deux avis portaient qu'aucun impôt n'était payable.

[15]  Le droit applicable à un appel d'une cotisation portant qu'aucun impôt n'est payable est clair : on ne peut interjeter appel. Voir Bormann, précité, aux paragraphes 7 et 8, et Bérubé c. La Reine, 2014 CCI 304, au paragraphe 50. En l'absence d'une cotisation établissant un impôt à payer, il n'y a simplement pas d'objet de litige.

[16]  L'appelante s'est opposée à la requête au motif qu'il pourrait y avoir un litige sur des déterminations de pertes, que les cotisations pourraient comprendre d'autres refus quant aux dépenses, et que ces cotisations s'appuient sur des affirmations formulées par les fonctionnaires de l'ARC.

[17]  La Cour n'a été saisie d'aucun élément de preuve indiquant qu'on ait demandé la détermination d'une perte ou que la demande ait été refusée, qu'on ait refusé de reconnaître d'autres dépenses ou qu'on se soit fondé sur des détails qui n'apparaissent pas dans la cotisation de Landmark Oil portant qu'aucun impôt n'est payable. Par conséquent, la requête est accueillie et l'appel de Landmark Oil, 2012‑2125(IT)G, interjeté à l'égard des années d'imposition 2002 et 2003 est également annulé.

V. Les appels de Charismatic

[18]  L'intimée a reconnu que ces appels devraient être accueillis. L'appelante le reconnaît, mais soulève trois préoccupations principales que la Cour résume ainsi :

(i)  le risque que les faits incidents soulevés dans Charismatic Industries Inc. perdent leur pertinence pendant l'instruction des autres appels;
(ii)  la conduite de l'intimée, de ses mandataires, de son avocat et de ses agents, qui n'ont pas reconnu plus tôt que la nouvelle cotisation à l'égard de Charismatic était erronée;
(iii)  la nécessité d'adjuger des dépens majorés étant donné qu'il s'est écoulé 16 ans ou plus entre le début de l'enquête et la poursuite et l'aveu et la concession actuels concernant les nouvelles cotisations erronées.

[19]  L'existence de faits étroitement liés dans les appels de Charismatic et des autres appelants n'est pas une raison logique ou théorique valable que peut invoquer Charismatic ou tout autre appelant pour s'opposer à un jugement disposant des appels de Charismatic. Logiquement, cela permet de retirer deux appels de l'ensemble des appels et donne gain de cause à l'appelante Charismatic. Rien n'empêche les appelants de présenter des éléments de preuve incidents ou étroitement liés concernant Charismatic, pourvu que ces éléments de preuve respectent les critères habituels de la pertinence, de la valeur probante et de la fiabilité pendant l'instruction des appels restants. Théoriquement, les hypothèses du ministre dans les appels de Charismatic n'existent plus, et le ministre a accepté la thèse de Charismatic lors des deux appels qui ont maintenant été tranchés en faveur de Charismatic, bien que ce soit en raison d'une concession.

[20]  Il faut plutôt tenir compte de la concession tardive du ministre et de la longueur des procédures lors de l'adjudication des dépens. Bien qu'il arrive fréquemment qu'on adjuge les dépens lors de la conclusion de l'ensemble des litiges, la concession du ministre est unilatérale, non sollicitée et fondée sur une simple reconnaissance : la nouvelle cotisation a été établie après la dissolution de la contribuable, en se fondant sur des conclusions et des hypothèses erronées, et était invalide. Par conséquent, Charismatic a entièrement obtenu gain de cause. La Cour adjuge les dépens de la requête à Charismatic.

[21]  Par le passé, le ministre semble avoir brossé un tableau très grossier de Charismatic. C'était peut‑être compréhensible. Toutefois, l'avis de ratification du 5 mars 2012 semble curieusement stéréotypé et n'a ni soulevé ni abordé la dissolution de Charismatic ou les déclarations de revenus produites. Bien que cette conduite ne soit pas particulièrement flagrante, elle traduit l'inattention, voire la négligence de l'intimée. Elle cadre fort bien avec la perception des appelants, qui se voient comme des « contribuables lésés ». De plus, cela a peut‑être mené à l'intransigeance des appelants sur des questions qui devraient être réglées avec le consentement des parties, à savoir les requêtes en modification.

[22]  La Cour se prononce en faveur de Charismatic, en fait ses ayants droit. Les nouvelles cotisations portées en appel sont annulées. Des dépens de 5 000 $ sont adjugés à l'appelante Charismatic, ce qui représente 2 500 $ pour chaque appel.

VI. Conclusions et dépens

[23]  À la fin de l'audience, M. Keenan, qui a représenté les appelants tout au long de l'instance, a demandé de façon générale que les requêtes soient « suspendues » pour les motifs suivants :

(i)  il avait récemment déposé des avis de question constitutionnelle qui devraient avoir préséance sur les présentes requêtes de nature procédurale;
(ii)  une décision sur les questions constitutionnelles entraînera l'annulation de tous les appels (M. Keenan a vraisemblablement voulu dire que les nouvelles cotisations seraient annulées ou que les appels seraient accueillis);
(iii)  les appelants souhaitaient modifier tous leurs avis d'appel et obtenir la radiation de tous les actes de procédure de l'intimée;
(iv)  la récusation récente d'un juge chargé de la gestion de l'instance à la suite d'accusations de partialité avait [TRADUCTION] « invalidé toutes les procédures » à ce jour.

[24]  Abstraction faite de la question de savoir s'il y a un fondement juridique à ces affirmations, ce dont la Cour doute, aucune de ces affirmations ne justifie de retarder les présentes requêtes. Les ordonnances et les jugements prévus dans les présentes aident les deux parties et précisent le litige. Dans deux cas, les appels sont accueillis. Les appels restants se poursuivent, les questions sont moins confuses, et toute requête subséquente, en matière constitutionnelle ou non (indépendamment de son bien‑fondé), n'est ni compromise ni retardée. En fait, c'est exactement le contraire qui se produit. L'octroi du « sursis » demandé a pour effet de mettre de côté ces résolutions de nature procédurale. Toute précision ou simplicité obtenue serait perdue. Ce « sursis » ne sera pas accordé.

[25]  Pour tous ces motifs, la Cour rend les ordonnances et jugements qui précèdent. À part les dépens dans les appels de Charismatic, aucuns dépens ne seront adjugés. La Cour a par ailleurs tenu compte de la répartition des dépens entre les diverses requêtes en tenant compte des conclusions.

Signé à Toronto (Ontario), ce 29e jour d'août 2018.

« R.S. Bocock »

Le juge Bocock


RÉFÉRENCE :

2018 CCI 179

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :

2012-2127(IT)G, 2012‑2129(GST)G, 2012‑2120(IT)G, 2012‑2134(GST)G, 2012‑2122(IT)G, 2012‑2133(GST)G, 2012‑2117(IT)G, 2012‑2135(GST)G, 2012‑2123(IT)G, 2012‑2128(GST)G, 2012‑2124(IT)G, 2012‑2132(GST)G, 2012‑2125(IT)G, 2012‑2131(GST)G, 2012‑2126(IT)G, 2012‑2130(GST)G

INTITULÉS :

ROBERT H. KEENAN, WILLIAM E. ADAMS, CHARISMATIC INDUSTRIES INC., 640950 B.C. LTD., WORLD WIDE GOLF (CANADA) LTD., LANDMARK CAPITAL PARTNERS LTD., LANDMARK OIL & GAS LTD., PREFERRED CHOICE ACCOUNTING SERVICES LTD.

c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L'AUDIENCE :

Vancouver (Colombie‑Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :

Le 4 juillet 2018

MOTIFS DU JUGEMENT :

L'honorable juge Randall S. Bocock

DATE DU JUGEMENT :

Le 29 août 2018

COMPARUTIONS :

Représentants des appelants :

Robert Harold Keenan

William E. Adams

Avocats de l'intimée :

Me Max Matas

Me Mark Schearer

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour les appelants :

Nom :

Robert Harold Keenan

William E. Adams

Cabinet :

 

Pour l'intimée :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

 

 

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