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Dossier : 2018-3204(IT)I

ENTRE :

JOHN A. WACHAL,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 10 octobre 2019, à Calgary (Alberta)

Devant : L’honorable juge B. Russell


Comparutions :

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l’intimée :

Me Andrew Lawrence

 

JUGEMENT

L’appel est accueilli et l’affaire est renvoyée au ministre pour réexamen et nouvelle décision au motif que l’appelant a droit aux versements de la PFCE refusés pour le début de chaque mois au cours de la période allant de juillet 2013 à mars 2015 inclusivement, et que l’appelant a également droit aux versements du CTPS refusés pour le début de chaque mois de juillet, octobre, janvier et avril au cours de ladite période allant de juillet 2013 à mars 2015 inclusivement.

Signé à Halifax (Nouvelle-Écosse), ce 30e jour de juillet 2020.

« B. Russell »

Le juge Russell


Référence : 2020 CCI 78

Date : 20203007

Dossier : 2018-3204(IT)I

ENTRE :

JOHN A. WACHAL,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Russell

I. Introduction :

[1] L’appelant, John Anthony Wachal, a interjeté appel, en choisissant la « procédure informelle » de la Cour, de diverses décisions rendues par le ministre du Revenu national (ministre) aux termes de la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR) lui refusant certaines prestations fiscales pour enfants prévues par la LIR. Ces décisions ont été rendues le 20 octobre 2016 et le 4 novembre 2016. Les décisions rendues le 20 octobre 2016 portaient sur les demandes de prestations mensuelles de la prestation fiscale canadienne pour enfants (PFCE) pour les années d’imposition de base 2011, 2012, 2013 et 2014, et de prestations mensuelles de l’allocation canadienne pour enfants (ACE) pour l’année de base 2015. Les décisions du 4 novembre 2016 portaient sur la demande de paiements trimestriels de crédit de taxe sur les produits et services (CTPS) pour les années d’imposition de base 2012, 2013, 2014 et 2015.

[2] Comme le précise la réponse de l’intimée, les nouvelles décisions visées par l’appel rejetaient les décisions du ministre, autorisant le versement de la PFCE, de l’ACE et du CTPS à l’appelant. Ces nouvelles décisions ont conduit le ministre à demander à l’appelant le remboursement des prestations fiscales pour enfants comme suit :

a. 2 890 $ (PFCE) pour l’année de base 2012 (périodes mensuelles de juillet 2013 à juin 2014);

b. 3 428 $ (PFCE) pour l’année de base 2013 (périodes mensuelles de juillet 2014 à juin 2015);

c. 2 034 $ (PFCE) pour l’année de base 2014 (périodes mensuelles de juillet 2015 à juin 2016);

d. 1 350 $ (ACE) pour l’année de base 2015 (périodes mensuelles de juillet à septembre 2016);

e. 265 $ (CTPS) pour l’année de base 2012 (périodes trimestrielles de juillet 2013 à juin 2014);

f. 268 $ (CTPS) pour l’année de base 2013 (périodes trimestrielles de juillet 2014 à juin 2015);

g. 272 $ (CTPS) pour l’année de base 2014 (périodes trimestrielles de juillet 2015 à juin 2016);

h. 190 $ (CTPS) pour l’année de base 2015 (périodes trimestrielles de juillet et d’octobre 2016).

II. Questions en litige :

[3] En interjetant appel de ces nouvelles décisions, l’appelant a indiqué dans son avis d’appel que le ministre avait pris en compte, à tort, une ordonnance de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta datée du 1er avril 2015. Dans la réponse de l’intimée (paragraphe 30), la question en litige a été définie de manière très générale comme étant de savoir si le droit de l’appelant aux prestations en question avait été [traduction] « correctement calculé » pour les années d’imposition de base 2011 à 2015. Toutefois, les observations écrites du défendeur après l’audience ont précisé et abordé les quatre questions suivantes :

a. l’appelant est-il admissible à la PFCE pour tout mois antérieur à janvier 2013 de l’année de base 2011, dans la mesure où l’appelant a demandé cette prestation pour la première fois le 27 février 2014;

b. l’appelant est-il le parent principalement responsable de la garde et de l’éducation de son enfant JCW à partir de janvier 2013, et si tel est le cas, est-il admissible à la PFCE, ou à l’ACE, pour toute période postérieure à janvier 2013 de l’année de base 2011;

c. l’appelant est-il admissible à la PFCE pour l’année de base 2011, dans la mesure où il n’a pas produit de déclaration pour son année d’imposition 2011;

d. JCW est-il une « personne à charge admissible » de l’appelant, et si tel est le cas, l’appelant avait-il droit à la prestation trimestrielle du CTPS pour ses années d’imposition 2012 à 2015.

III. Contexte factuel et juridique :

[4] Les éléments de preuve établissent que l’appelant et son ancienne épouse (identifiée par ses anciennes initiales, SLW) sont les parents d’un fils, JCW, né le 1er octobre 1999. À toutes les époques importantes, ces deux parents autrefois mariés ont vécu séparément, en raison de désaccords personnels. L’état civil de l’appelant était soit séparé, soit célibataire, tout au long des « années d’imposition de base » 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015.

[5] L’expression « année de base » désigne, pour les mois de janvier à juin, la deuxième année précédente et, pour les mois de juillet à décembre, l’année précédente. Par exemple, l’année 2012 est l’année de base pour les mois de juillet à décembre 2013 et de janvier à juin 2014. L’année de base est l’année pour laquelle le « revenu modifié » (indiqué ci-dessous) d’un particulier est déterminé, aux fins de l’établissement de l’admissibilité et du montant du paiement mensuel de la PFCE ou de l’ACE à verser pour chaque mois donné (s’il y a lieu).

[6] La PFCE et l’ACE sont mentionnées aux articles 122.6 à 122.63 de la LIR. L’ACE a remplacé la PFCE à compter du 1er juillet 2016, bien que les critères d’admissibilité à l’ACE et à la PFCE soient les mêmes. Le calcul de l’allocation mensuelle est fondé sur le « revenu modifié » d’un « particulier admissible » pour l’année de base, par rapport à une « personne à charge admissible ». Selon l’article 122.5, une personne à charge admissible est l’enfant ou la personne à charge d’un particulier (ou de son conjoint ou conjoint de fait) qui réside avec le particulier, qui est âgé de moins de 19 ans et qui n’est ni un particulier admissible ni une personne à charge admissible pour le mois en question. Le terme « revenu modifié » désigne le revenu des personnes physiques au cours de l’année de base pertinente, y compris, s’il y a lieu, le revenu d’un époux ou d’un conjoint de fait cohabitant à la même adresse. Le montant de l’allocation est réduit si le revenu modifié dépasse un certain seuil. Une personne peut être un « particulier admissible » à l’égard d’une personne à charge admissible au début d’un mois, à condition, conformément au paragraphe 122.62(1), que cette personne ait présenté un avis de la manière prescrite au ministre au plus tard 11 mois après la fin de ce mois. En outre, conformément à l’article 122.6, un particulier admissible doit, au moment pertinent, résider avec la personne à charge admissible (c’est-à-dire qu’elle doit lui fournir un domicile habituel) et être le parent qui assume principalement la responsabilité du « soin et de l’éducation » de la personne à charge admissible, ou être un « parent à garde partagée » de la personne à charge admissible.

[7] La détermination du « soin et de l’éducation » nécessite la prise en compte de huit facteurs énumérés à l’article 6302 du Règlement de l’impôt sur le revenu (Règlement). En résumé, il s’agit de la supervision des activités et des besoins quotidiens de la personne à charge admissible; du maintien d’un environnement sécurisé dans lequel la personne à charge admissible réside; de l’organisation et du transport des besoins médicaux de la personne à charge admissible, s’il y a lieu; de l’organisation, de la participation et du transport des activités éducatives, récréatives, sportives ou similaires de la personne à charge admissible; la prise en charge des besoins de la personne à charge qualifiée lorsqu’elle est malade ou qu’elle a besoin de l’aide d’une autre personne; la prise en charge régulière des besoins hygiéniques de la personne à charge qualifiée; la fourniture générale de conseils et de présence à la personne à charge qualifiée; et l’existence d’une ordonnance judiciaire concernant la personne à charge qualifiée, valable dans le territoire de compétence où elle réside.

[8] En outre, selon l’alinéa f) de la définition de « particulier admissible », lorsque la personne à charge admissible réside avec le parent féminin, ce parent est présumé être le parent qui assume principalement la responsabilité du soin et de l’éducation de la personne à charge admissible.

[9] Les parents qui ont la « garde partagée » peuvent se partager les allocations. Chaque parent doit résider avec la personne à charge admissible sur une base « quasi égale » et être le principal responsable lorsque l’enfant dépend de ce parent. Ce n’est pas ce qui est avancé dans le présent appel. Les détails concernant le CTPS figurent à l’article 122.5 de la LIR. Les exigences du CTPS sont similaires à celles de la PFCE et de l’ACE. De même, lorsque la personne à charge admissible est telle pour les deux parents, le parent qui a droit aux versements de la PFCE et de l’ACE a également droit au CTPS pour la même personne à charge admissible. Les paiements du CTPS sont versés trimestriellement plutôt que mensuellement.

A. L’appelant est-il admissible à la PFCE pour les mois précédant janvier 2013?

[10] La première question est de savoir si l’appelant a droit aux versements mensuels de la PFCE pour les mois précédant janvier 2013. L’intimée a soutenu dans sa réponse (paragraphe 29[f]) l’hypothèse selon laquelle le ministre a reçu le 27 février 2014 l’avis (la demande) de l’appelant en vue de recevoir la PFCE et l’ACE. L’appelant n’a présenté aucun élément de preuve à l’audience contredisant cette hypothèse. Par conséquent, cette hypothèse de fait est admise comme étant correcte.

[11] Le paragraphe 122.62(1) de la LIR précise qu’un particulier admissible doit avoir produit l’avis requis avec les renseignements prescrits au plus tard 11 mois après tout mois pour lequel des versements de la PFCE sont demandés. Rien ne prouve que le ministre ait prolongé le délai de l’avis comme le permet le paragraphe 122.62(2). Il semble que le ministre ait eu raison de refuser les prestations de la PFCE pour tous les mois précédant janvier 2013, la fin de tous ces mois se trouvant à plus de 11 mois de la date de dépôt de l’avis du 27 février 2014. Ainsi, le ministre a correctement refusé les paiements de la PFCE que l’appelant demandait pour les mois des années civiles 2011 et 2012.

B. L’appelant était-il le parent qui assumait principalement la responsabilité du soin et de l’éducation du JCW à partir de janvier 2013?

[12] La deuxième question est de savoir si l’appelant était le parent principalement responsable du soin et de l’éducation de son enfant JCW de janvier 2013 à juin 2017 inclusivement, et donc admissible à recevoir des versements mensuels de la PFCE et de l’ACE pour une partie ou la totalité de cette période de 54 mois.

[13] Dans la réponse, les hypothèses de fait suivantes (paragraphe 29) sont invoquées à l’appui des décisions du ministre : [traduction]

a. l’appelante a épousé [SLW] le 9 août 2003;

b. à toutes les périodes matérielles, l’appelante et SLW étaient séparés et ne cohabitaient plus;

c. tout au long des années d’imposition de base 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015, l’état civil de l’appelant était soit séparé, soit célibataire;

d. l’appelant et SLW ont divorcé avec effet au 31e jour après la date du jugement de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta rendu le 7 février 2016, à moins qu’il n’ait été fait appel avant ce 31e jour;

e. l’appelant et SLW sont les parents d’un fils né en octobre 1999 dont les initiales sont JCW;

f. le 27 février 2014, le ministre a reçu la demande de l’appelant en vue de recevoir des PFCE;

g. l’appelant n’était pas le parent principalement responsable du soin et de l’éducation du JCW de janvier à juin 2013 de l’année de base 2011;

h. l’appelant n’était pas le parent principalement responsable du soin et de l’éducation du JCW pendant les années d’imposition de base 2012, 2013, 2014 et 2015;

i. l’appelant n’a pas produit sa déclaration de revenus pour l’année d’imposition 2011;

j. le « revenu modifié » de l’appelant était....... pour les années d’imposition 2012, 2013, 2014 et 2015, respectivement.

[14] Les hypothèses du ministre invoquées dans la réponse, en ce qui concerne les décisions selon lesquelles l’appelant n’était pas le parent principalement responsable du soin et de l’éducation du JCW pendant les périodes visées, comme il est indiqué immédiatement ci-dessus, font gravement défaut. L’intimée affirme simplement (paragraphes 29[g] et [h]) que l’appelant « n’était pas le parent principalement responsable du soin et de l’éducation du JCW de janvier à juin 2013 de l’année de base 2011 »; et qu’il ne l’était pas non plus, « pendant les années d’imposition de base 2012, 2013, 2014 et 2015 ».

[15] Ces hypothèses ne sont pas du tout suffisamment précises ou complètes pour avoir fourni à l’appelant un avis approprié de la preuve à réfuter. Aucune hypothèse n’a été invoquée dans la réponse pour expliquer pourquoi le ministre a conclu que, pendant les nombreux mois couverts par ces plusieurs années d’imposition de base, l’appelant n’était pas le parent principalement responsable du soin et de l’éducation du JCW.

[16] Dans l’arrêt Canada c. Anchor Pointe Energy Ltée, 2003 DTC 5512 (CAF), le juge Rothstein, alors de la Cour d’appel fédérale, a déclaré ce qui suit :

[23] Alléguer l’existence d’hypothèses confère comme avantage important à la Couronne de renverser le fardeau de preuve, de sorte que le contribuable doive réfuter les hypothèses du ministre. Les faits allégués comme hypothèses doivent être précis et exacts afin que le contribuable sache bien clairement ce qu’il lui faudra prouver.

[17] Dans la décision D’Elia c. La Reine, 2012 CCI 180, le juge Webb, alors membre de notre Cour, a repris la déclaration du juge Rothstein citée ci-dessus, et a poursuivi comme suit :

[36] L’omission de plaider des hypothèses se rapportant à l’un des critères concernant le soin et l’éducation énoncés à l’article 6302 du Règlement veut dire que l’appelante ne connaît pas la thèse à réfuter à l’égard de ces critères [...]

[18] Il n’y a pas non plus de références précises ailleurs dans la réponse pour étayer la conclusion selon laquelle l’appelant n’était pas le parent principalement responsable de l’enfant. Au plus, l’intimée se rapproche de cette question dans sa réponse en déclarant de manière cryptique et répétitive, pour chaque année de base concernée, que si le ministre avait auparavant conclu que l’appelant [traduction] « avait un enfant admissible (son fils) », maintenant [traduction] « il y a eu un changement dans les enfants admissibles [de l’appelant] ». (Dans les paragraphes se référant aux demandes de CTPS, l’adjectif « qualifié » au lieu de « admissible » a été utilisé.) Voir réponse, paragraphes. 4, 6(c), 7(c), 8(c), 10(c), 11(c), 12(c), 13(c), 14(c), 15(c), 16(c), 17(c), 18(c), 19(c), 20(c), 21(c), 22(c), 23(c) et 24(c).

[19] Dans le cadre du présent appel suivant la procédure informelle, l’appelant s’est représenté lui-même. Il n’avait pas de formation en droit, en comptabilité ou en fiscalité. Le régime législatif de ces prestations fiscales pour enfants (PFCE, ACE et CTPS) est assez complexe. Au cours de la période précédant l’audience, il n’y a eu, à ma connaissance, aucune tentative de la part de l’intimée en vue de modifier la réponse de manière à ce qu’elle expose de manière complète et précise les hypothèses factuelles qui sous-tendent les décisions visées par l’appel afin de montrer clairement les motifs pour lesquels l’appelant n’était plus considéré comme le parent principalement responsable du soin et de l’éducation de la personne à charge, JCW. Inversement, si l’intimée estime que le ministre n’a pas fait d’autres hypothèses que celles qui sont invoquées, nonobstant le silence sur les éléments précis concernant ce qui constitue la « prise en charge et l’éducation » d’une personne à charge qualifiée, indiqués à l’article 6302 des Règles, alors je dois dire que les hypothèses telles qu’elles sont invoquées sont simplement insuffisantes pour justifier les décisions contestées.

[20] À l’audience, l’appelant a témoigné et produit quelques documents, notamment des lettres de l’école de l’enfant et de la ligue de baseball, tendant à montrer que la seule adresse dont ils disposaient pour le domicile de JCW était celle de l’appelant. L’appelant a témoigné qu’il avait eu la responsabilité principale du soin et de l’éducation du JCW pendant ces périodes. L’intimé n’a pas fait produit de preuve de vive voix, mais il a produit une preuve par l’intermédiaire du contre-interrogatoire tiré de certaines ordonnances certifiées de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta, dont l’appelant a pris acte. Ces documents n’avaient pas été communiqués auparavant à l’appelant, bien qu’il en ait généralement eu connaissance puisqu’il était représenté comme partie dans chacune d’elles.

[21] Aucune ordonnance judiciaire n’a été mentionnée dans la réponse, outre l’ordonnance de divorce susmentionnée. Je note que les ordonnances des tribunaux sont seulement l’un des huit critères permettant de déterminer si une personne est le principal responsable du soin et de l’éducation d’une personne à charge admissible. Le recueil des ordonnances produit par les deux parties (l’appelant et l’intimée) ne comprend pas toutes les ordonnances rendues pendant la période concernée. Une ordonnance de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta, invoquée par l’intimée, a été rendue le 1er avril 2015, déclarant que SLW, en tant que mère de JCW, [traduction] « continuera à assurer la majeure partie du soin et de la surveillance quotidiens de l’enfant [JCW] [...] ». L’une d’entre elles, datée du 28 février 2012, prévoit que l’appelant [traduction] « aura la garde exclusive et la responsabilité principale du soin et de l’éducation de l’enfant [JCW] ».

[22] Je suis réticent à critiquer le dossier de l’appelant, qui n’est pas un juriste. Bien qu’il y ait droit, ce qui lui manquait était une réponse de l’intimée exposant clairement la preuve que l’appelant devait réfuter.

[23] Comme je l’ai mentionné, les ordonnances des tribunaux ne sont que l’un des huit facteurs permettant de déterminer la responsabilité principale. Compte tenu de ce qui précède, des observations déficientes de l’intimée, du témoignage et de la documentation de l’appelant lui-même, qui constituent au moins de légers éléments de preuve tendant à étayer le fait que, pendant au moins certaines périodes pertinentes, il était le parent principalement responsable du soin et de l’éducation de l’enfant, ce qui n’a pas été directement contesté lors du contre-interrogatoire, je conclus que l’appelant était la personne principalement responsable du soin et de l’éducation de JCW pendant toute la période allant de janvier 2013 à mars 2015 inclusivement. Le témoignage de l’appelant m’a donné l’impression qu’au moins à partir d’avril 2015, il n’a pas contesté le fait que son ancienne épouse, SLW, assumait la responsabilité principale du soin et de l’éducation du JCW.

C. L’appelant était-il admissible à la PFCE pour l’année de base 2011 (juillet 2012 à juin 2013)?

[24] La troisième question est la suivante : l’appelant était-il admissible aux versements mensuels de la PFCE demandés pour l’année de base 2011 (soit pour les périodes mensuelles de juillet 2012 à juin 2013 inclusivement), étant donné qu’il n’avait pas produit sa déclaration de revenus de 2011?

[25] Comme il est mentionné précédemment, l’intimée a invoqué au paragraphe 29(1) de la réponse l’hypothèse de fait du ministre selon laquelle l’appelant n’avait pas produit de déclaration d’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2011. Aucun élément de preuve du contraire n’a été fourni lors de l’audition de cette affaire. Par conséquent, cette hypothèse est acceptée comme un fait avéré.

[26] Le paragraphe 122.61(1) de la LIR prévoit, entre autres, ce qui suit :

Lorsqu’une personne [...] à la fin d’une année d’imposition [produit] une déclaration de revenu pour l’année, un paiement en trop au titre des sommes dont la personne est redevable en vertu de la présente partie pour l’année est réputé se produire au cours d’un mois par rapport auquel l’année est l’année de base. Ce paiement correspond à la somme obtenue par la formule suivante [...]

[27] Je souligne que le mécanisme de trop-perçu d’impôt réputé, figurant dans les dispositions susmentionnées, est utilisé pour établir les paiements de la PFCE et de l’ACE. Cela garantit que ces prestations sont traitées comme étant non imposables. La disposition précise que la production d’une déclaration d’impôt pour l’année de base visée est une condition préalable nécessaire au trop-perçu d’impôt réputé. Étant donné qu’aucune déclaration de revenus n’a été produite par l’appelant pour l’année d’imposition 2011, il n’est pas admissible aux paiements mensuels de la PFCE pour les mois compris entre juillet 2012 et juin 2013. Cela s’ajoute bien sûr à la conclusion susmentionnée selon laquelle l’appelant n’a pas droit aux paiements de la PFCE pour les périodes précédant le mois de janvier 2013.

D. JCW était-il une « personne à charge admissible » aux fins du CTPS pour les années d’imposition 2012 à 2015?

[28] La quatrième et dernière question est la suivante : JCW était-il une « personne à charge admissible » de l’appelant, rendant ainsi l’appelant admissible à recevoir les paiements trimestriels associés au CTPS pour les années d’imposition 2012 à 2015.

[29] Selon l’alinéa 122.5(6)b) de la LIR, il est prévu, en ce qui concerne le CTPS :

[...] des particuliers qui, au début de ce mois, sont des particuliers admissibles (au sens de l’article 122.6, le terme « personne à charge admissible » à cet article s’entendant au sens du paragraphe (1)) à son égard;

[30] Ainsi, l’admissibilité de l’appelant aux versements trimestriels du CTPS est établie suivant le même critère que l’admissibilité à l’ACE. Si la personne est un « particulier admissible » au sens de l’article 122.6, cela lui donne également le droit de recevoir les versements trimestriels du CTPS effectués chaque année.

[31] J’ai conclu que l’appelant correspondait au critère établi par l’article 122.6 pour la période allant de juillet 2013 à mars 2015 inclus. Il devrait en être de même pour le droit au CTPS.

IV. Conclusion :

[32] L’appel est accueilli et l’affaire est renvoyée au ministre pour réexamen et nouvelle décision au motif que l’appelant a droit aux versements de la PFCE refusés pour le début de chaque mois au cours de la période allant de juillet 2013 à mars 2015 inclusivement, et que l’appelant a également droit aux versements du CTPS refusés pour le début de chaque mois de juillet, octobre, janvier et avril au cours de la période allant de juillet 2013 à mars 2015 inclusivement. L’intimée devra verser la somme de 300 $ à titre de dépens à l’appelant à l’intérieur d’un délai de 30 jours suivant la délivrance du jugement en l’espèce aux termes du paragraphe 10(1) des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure informelle) et en raison des lacunes dans les actes de procédures de l’intimée.

Signé à Halifax (Nouvelle-Écosse), ce 30e jour de juillet 2020.

« B. Russell »

Le juge Russell


RÉFÉRENCE :

2020 CCI 78

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2018-3204(IT)I

INTITULÉ :

JOHN A. WACHAL c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Calgary (Alberta)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 10 octobre 2019

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge B. Russell

DATE DU JUGEMENT :

Le 30 juillet 2020

COMPARUTIONS :

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l’intimée :

Me Andrew Lawrence

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelant :

Nom :

[EN BLANC]

 

Cabinet :

[EN BLANC]

Pour l’intimée :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

 

 

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