Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Référence : 2022 CCI 52

Date : 20220601

Dossier : 2017-523(IT)I


ENTRE :

AREK WYWIJAS,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT MODIFIÉS

(Correction de la ponctuation, des majuscules, de l'orthographe, de la division en paragraphes et de l'exactitude et suppression des répétitions dans la transcription des motifs du jugement rendus oralement à l'audience le 11 avril 2022, à Toronto (Ontario))

Le juge Graham

[1] Arek Wywijas a demandé des crédits d'impôt pour des dons qu'il affirme avoir faits au moyen d'un abri fiscal appelé « Global Learning Gifting Initiative » (« GLGI ») en 2007 et en 2008. Le ministre du Revenu national a établi de nouvelles cotisations pour M. Wywijas, dans lesquelles il a refusé ces crédits. M. Wywijas a interjeté appel de ces rejets.

[2] L'intimée a déposé une requête en cassation des appels, pour le motif que M. Wywijas avait renoncé à son droit d'interjeter appel de ces nouvelles cotisations à la Cour.

[3] Après que le ministre a établi les nouvelles cotisations, M. Wywijas a présenté des avis d'opposition. Le ministre lui a finalement envoyé une lettre. Je l'appellerai la « lettre de présentation des choix ». Dans cette lettre, le ministre offre à M. Wywijas quelques choix.

[4] L'un des choix consistait à accepter une offre de règlement et à signer une renonciation au droit d'appel. J'appellerai ce choix l'« accord de règlement ».

[5] Un autre choix à la disposition de M. Wywijas consistait à signer un accord en vue d'être lié par les jugements rendus dans quatre causes types alors en instance devant la Cour de l'impôt. S'il acceptait ce choix, il devait accepter de renoncer à son droit d'appel si le ministre établissait de nouvelles cotisations ou ratifiait les cotisations de M. Wywijas selon les jugements rendus dans les causes types. Un accord à cet effet était joint à la lettre de présentation des choix. Je l'appellerai l'« accord d'être lié ». M. Wywijas a fait ce choix.

[6] En fin de compte, seules deux des quatre causes types ont fait l'objet d'un procès et, dans sa décision intitulée Mariano c. La Reine, le juge Pizzitelli a rejeté les appels de ces deux contribuables. En conséquence, l'ARC a ratifié les nouvelles cotisations de M. Wywijas. Bien qu'il eût accepté de ne pas interjeter appel, M. Wywijas a présenté un avis d'appel à la Cour. Voici où nous en sommes actuellement.

[7] La Couronne a déposé des requêtes semblables en vue d'obtenir la cassation des appels de 27 autres contribuables qui avaient signé l'accord d'être lié. Le juge en chef Rossiter a tranché ces requêtes en cassation dans une décision intitulée Abdalla c. La Reine. Le juge en chef Rossiter a accueilli les requêtes de la Couronne et a cassé les appels. Après avoir examiné attentivement la lettre de présentation des choix, l'accord de règlement et l'accord d'être lié, il a conclu que les contribuables avaient eu quatre choix :

1. accepter d'être liés par les jugements rendus dans les causes types;

2. accepter l'accord de règlement;

3. interjeter appel directement à la Cour;

4. ne rien faire et risquer que le ministre prenne d'autres mesures sans préavis.

[8] Le juge en chef Rossiter a également conclu que tous ces documents étaient accompagnés d'explications suffisantes pour qu'un contribuable comprenne parfaitement les droits auxquels il renoncerait s'il signait l'accord d'être lié. Par conséquent, le juge en chef a conclu que Mme Abdalla avait renoncé à son droit d'appel à la Cour et il a cassé son appel.

[9] Mme Abdalla n'a pas été satisfaite de la décision du juge en chef. Elle a interjeté appel à la Cour d'appel fédérale. La Cour d'appel fédérale a confirmé la décision. Elle a conclu que le juge en chef Rossiter avait correctement cerné les trois exigences en matière de renonciation et qu'il y avait une preuve suffisante pour conclure qu'il était satisfait à ces critères.

[10] Ainsi, comme je viens de le mentionner, la décision Abdalla décrit trois critères auxquels il doit être satisfait pour que la renonciation au droit d'appel de M. Wywijas soit valide. La renonciation doit avoir été faite par écrit, M. Wywijas doit avoir eu parfaitement connaissance de ses droits, et il doit avoir eu une intention claire et consciente de renoncer à ces droits.

[11] Il est manifestement satisfait au premier critère, à savoir l'existence d'une renonciation écrite. Il existe une renonciation écrite et signée. Il est également satisfait au deuxième critère, à savoir que M. Wywijas avait parfaitement connaissance de ses droits. Je souscris à l'analyse faite par le juge en chef Rossiter de la lettre de présentation des choix, de l'accord de règlement et de l'accord d'être lié, ainsi qu'à sa conclusion selon laquelle une personne ayant lu les documents avait parfaitement connaissance des droits auxquels elle renonçait.

[12] Même s'il est possible que M. Wywijas n'ait pas compris ses droits de manière aussi parfaite qu'il l'aurait souhaité, je conclus qu'il les connaissait. Il a expliqué avoir choisi de refuser de signer l'accord de règlement parce qu'il avait signé un accord semblable concernant un autre don et qu'il avait été insatisfait du montant des intérêts annulés en application de cet accord. Il a expliqué que l'épouse de l'ami d'un ami lui avait dit qu'il pouvait interjeter appel directement à la Cour. Il est incontestable que c'était l'un de ses choix. M. Wywijas y a apparemment renoncé. Le ministre lui a expliqué le choix de ne rien faire à deux reprises, une première fois dans la lettre de présentation des choix et une deuxième fois dans une lettre du 23 décembre 2014.

[13] Si M. Wywijas souhaitait mieux comprendre ses choix, il pouvait demander conseil. Il se plaint de ne pas avoir reçu d'aide lorsqu'il a communiqué avec l'ARC, mais je souligne qu'il a choisi d'appeler le numéro de téléphone principal au lieu de celui de la personne précise qui lui avait écrit au sujet de l'accord d'être lié.

[14] En outre, indépendamment de la personne avec laquelle il a communiqué, l'ARC n'a pas pour mission de lui fournir des conseils juridiques. Le fait qu'elle ait exposé les choix à la disposition de M. Wywijas est suffisant. Si M. Wywijas voulait obtenir des conseils indépendants, il devait engager une personne pour ce faire.

[15] Je souligne par ailleurs qu'il a répondu à l'ARC très rapidement, au lieu de prendre le temps de mieux se renseigner sur les choix à sa disposition. Il avait jusqu'au 21 décembre pour faire un choix. Il l'a fait le 5 décembre. Il ne peut pas reprocher à l'ARC le fait qu'il a décidé d'agir avant de pouvoir mieux comprendre les choix à sa disposition.

[16] En tenant compte de tout ce qui précède, je conclus que M. Wywijas avait parfaitement connaissance de ses droits.

[17] Le troisième critère est l'existence d'une intention claire et consciente de renoncer à ses droits. Je conclus que c'est le cas en l'espèce. Rien dans la preuve ne laisse penser le contraire. Il avait un choix à faire et il l'a fait.

[18] M. Wywijas ne m'a pas convaincu de l'existence d'une influence indue qui l'aurait poussé à signer l'accord d'être lié. Il était certainement nerveux en raison de sa situation financière et de l'échéance imposée par l'ARC, mais cela ne constitue pas une influence indue.

[19] Avant de conclure, je souhaite examiner rapidement un élément de preuve étrange et mentionner la façon dont je l'ai utilisé ou écarté pour parvenir à la conclusion qui précède.

[20] M. Wywijas a signé et présenté deux accords d'être lié différents. L'ARC a rejeté le premier, pour le motif qu'il ne s'agissait pas de l'accord qu'elle avait envoyé à M. Wywijas. Ce premier accord d'être lié aurait conféré à M. Wywijas davantage de droits d'appel si le résultat des causes types ne lui convenait pas.

[21] Dans son témoignage, M. Wywijas a expliqué que l'ARC lui avait sans doute envoyé les deux accords. Cela me semble peu probable. Pourquoi l'ARC lui enverrait‑elle deux accords d'être lié différents, dont un offrait des droits plus favorables, qu'elle rejetterait ensuite au motif qu'elle ne l'a pas envoyé?

[22] Il est plus probable que quelqu'un d'autre a fourni à M. Wywijas le premier accord d'être lié, peut‑être la personne qui a préparé ses avis d'opposition. Cela dit, dans son affidavit, l'intimée n'affirme pas explicitement que l'ARC n'a pas préparé le premier accord d'être lié, et l'avocate de l'intimée n'a pas contre-interrogé M. Wywijas sur le fait qu'il ait pu l'obtenir d'un tiers. Par conséquent, tout en ayant des doutes, j'estime ne pas être en mesure de conclure que cet accord d'être lié a été fourni par un tiers. Il me semble important de préciser ce point, car si j'avais conclu en ce sens, j'aurais considéré qu'il s'agissait d'un élément de preuve solide d'une tentative de M. Wywijas de négocier les modalités de l'accord d'être lié. Cela aurait démontré que M. Wywijas connaissait d'autant mieux ses droits. Néanmoins, je n'ai pas tiré cette conclusion en l'espèce. Par conséquent, je n'ai accordé aucun poids au premier accord d'être lié lorsque j'ai examiné la question de savoir si M. Wywijas avait ou non parfaitement connaissance de ses droits.

[23] Toutefois, le fait que M. Wywijas ait accepté, non pas une fois, mais deux, et selon deux ensembles de modalités distincts, d'être lié par les jugements rendus dans les causes types et de renoncer à interjeter appel à la Cour démontre son intention ferme de renoncer à ses droits. J'ai donc tenu compte du premier accord d'être lié pour parvenir à ma conclusion quant à ce critère.

[24] En résumé, en tenant compte de tout ce qui précède, j'accueille la requête de l'intimée en vue de casser les appels de M. Wywijas à l'égard des années d'imposition 2007 et 2008. Les appels sont cassés.

Les présents motifs du jugement modifiés remplacent les motifs du jugement du 25 mai 2022.

Signé à Ottawa, Canada, ce 1er jour de juin 2022.

« David E. Graham »

Le juge Graham

 


RÉFÉRENCE :

2022 CCI 52

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2017-523(IT)I

INTITULÉ :

AREK WYWIJAS c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L'AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :

Le 11 avril 2022

MOTIFS DU JUGEMENT :

L'honorable juge David E. Graham

DATE DES MOTIFS RENDUS ORALEMENT :

Le 11 avril 2022

DATE DES MOTIFS DU JUGEMENT :

Le 25 mai 2022

DATE DES MOTIFS DU JUGEMENT MODIFIÉS :

Le 1er juin 2022

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :

L'appelant lui‑même

Avocate de l'intimée :

Me Rhoda Lemphers

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l'appelant :

Nom :

[EN BLANC]

Cabinet :

[EN BLANC]

Pour l'intimée :

François Daigle

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

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