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Dossier : 2018-4620(GST)G

ENTRE :

MARC BISHARA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LE ROI

intimé.

 

Appel entendu sur preuve commune
le 27 septembre 2021, à Montréal (Québec).

Devant : L'honorable juge Guy R. Smith


Comparutions :

Avocate des appelants :

Me Vanessa Gregorio

Avocat de l'intimée :

Me Antoine Lamarre

 

JUGEMENT

L’appel de la cotisation établie le 26 octobre 2017 en vertu de la Loi sur la taxe d’accise pour les périodes incluses du 1er mai 2012 au 31 décembre 2012 est rejeté avec dépens, selon les motifs du jugement ci‑joints. La Cour fixe les dépens de 2 500 $.

Signé à Ottawa (Canada), ce 16ième jour de septembre 2022.

« Guy R. Smith »

Juge Smith

 


Dossier : 2018-4622(GST)G

ENTRE :

CARL BISHARA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LE ROI

intimé.

 

Appel entendu sur preuve commune
le 27 septembre 2021, à Montréal (Québec).

Devant : L'honorable juge Guy R. Smith


Comparutions :

Avocate des appelants :

Me Vanessa Gregorio

Avocat de l'intimée :

Me Antoine Lamarre

 

JUGEMENT

L’appel de la cotisation établie le 26 octobre 2017 en vertu de la Loi sur la taxe d’accise pour les périodes incluses du 1er mai 2012 au 31 décembre 2012 est rejeté avec dépens, selon les motifs du jugement ci‑joints. La Cour fixe les dépens de 2 500 $.

Signé à Ottawa (Canada), ce 16ième jour de septembre 2022.

« Guy R. Smith »

Juge Smith

 


Référence : 2022 CCI 105

Date : 20220916

Dossier : 2018-4620(GST)G

ENTRE :

MARC BISHARA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé.

ET ENTRE :

Dossier : 2018-4622(GST)G

CARL BISHARA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé.


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Smith

I. Survol

[1] Marc Bishara et Carl Bishara interjettent appel d’une cotisation établie à leur égard à titre d’administrateurs de la société TricomCanada Inc. (« Tricom ») et ce, en vertu du paragraphe 323(1) de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. 1985, ch. E‑15 (« LTA »). Ces appels ont été entendus ensemble sur preuve commune.

[2] La cotisation a été établie par la ministre du Revenu national (la « ministre ») le 26 octobre 2017 pour tenir les appelants solidairement responsables de la dette fiscale de Tricom pour les périodes incluses du 1er mai 2012 au 31 décembre 2012.

[3] Les appelants invoquent le paragraphe 323(5) de la LTA et affirment que la cotisation est invalide puisqu’elle a été établie plus de deux (2) ans après la date de leurs démissions comme administrateurs.

[4] À titre subsidiaire, les appelants invoquent le paragraphe 323(3) de la LTA dans l’avis d’appel, et affirment qu’ils ont toujours agi avec le degré de soin, de diligence et de compétence requis par la loi. Cependant, ils n’ont produit aucune preuve à cet égard et, lors des remarques préliminaires, ont indiqué qu’ils s’appuyaient uniquement sur le paragraphe 323(5).

[5] La seule question en litige est donc de savoir si les appelants doivent être tenus solidairement responsables de la dette fiscale de Tricom, conformément au paragraphe 323(1) de la LTA.

[6] Pour les raisons exposées ci-dessous, l’appel doit être rejeté au motif que les appelants étaient administrateurs de Tricom lorsque la cotisation a été établie le 26 octobre 2017, le tout avec dépens.

II. Les présomptions de fait de la ministre

[7] La ministre a tenu pour acquis que les appelants sont cousins et les seuls actionnaires et administrateurs de Tricom depuis sa constitution le 19 mars 2012.

[8] La ministre a tenu pour acquis qu’en tout temps pertinent, Tricom déclare les appelants comme étant ses administrateurs et que les appelants eux-mêmes se déclarent comme étant administrateurs de Tricom.

[9] La ministre a tenu pour acquis que le 8 avril 2013, Tricom a été cotisé « pour un montant de 1 276 738 $, en droits, pénalités et intérêts, afin de réduire les crédits de taxe sur les intrants qu’elle a déduits dans le calcul de sa taxe nette relativement à de fausses factures de rebuts d’or » pour les périodes en question.

[10] La ministre a ensuite tenu pour acquis que Tricom s’est opposé à la cotisation et a fait appel à cette Cour dans le dossier 2013-4655(GST)G, que le juge Hogan a rejeté l’appel le 11 janvier 2016 (2016 CCI 8) et que la Cour d’appel fédérale a par la suite rejeté l’appel avec dépens le 4 mai 2017 (2017 CAF 95).

[11] La ministre a tenu pour acquis qu’au moment d’établir la cotisation dans cette instance, la dette de Tricom est de 1 237 453 $ en droits, pénalités et intérêts.

III. Sommaire de la preuve pertinente et des témoignages

[12] Il y a eu trois témoins, dont Foti Karkavilas, conseiller en recouvrement de dossier complexe pour Revenu Québec et les deux appelants.

i) Témoignage de Foti Karkavilas

[13] Foti Karkavilas est appelé comme premier témoin par les appelants.

[14] Il est agent de recouvrement pour Revenu Québec et le dossier Tricom lui est assigné au printemps 2017. Il continue les efforts de recouvrement entrepris par ses prédécesseurs, mais les recours à l’encontre de Tricom sont épuisés.

[15] Au moment d’établir la cotisation dans cette instance, le montant de la dette fiscale est environ 1,2 $ million. Il n’a pas connaissance d’une saisie ou d’un encaissement qui aurait pu réduire ce montant.

[16] La décision finale d’imposer les appelants est prise vers la fin août 2017.

[17] L’intimée a choisi de ne pas rappeler ce témoin.

ii) Témoignage de Marc Bishara

[18] Marc Bishara (« MB ») se décrit comme étant un homme d’affaires actif depuis 2004 dans divers commerces dont principalement l’opération de pharmacies, en plus de la vente en gros de produits pharmaceutiques, le nettoyage à sec, l’immobilier et, par l’entremise de Tricom, l’achat et la vente de rebuts d’or.

[19] Carl Bishara (« CB ») est associé avec lui dans ces activités commerciales.

[20] Tricom est un inscrit en vertu de la LTA et dépose ses rapports de TPS/TVQ sur une base mensuelle. Elle réclame des remboursements, mais Revenu Québec refuse de reconnaitre la validité des intrants. Tricom est imposé le 8 avril 2013 pour la TPS/TVQ exigible sur ses ventes, mais les intrants sont refusés.

[21] Tricom s’oppose à la cotisation et l’affaire est portée en appel. L’audience se déroule au début 2015. La cour rend son jugement le 11 janvier 2016.

[22] MB indique qu’il est administrateur de Tricom au moment de la constitution de la société en 2012, mais qu’il a démissionné le 15 août 2015. À ce moment-là, la société est inactive depuis le début de 2013.

[23] Cependant MB reste comme actionnaire puisqu’il espère que l’appel de la cotisation va être accueilli et qu’il va pouvoir récupérer son investissement.

[24] Suite à sa démission le 15 août 2015, Anastasios Leventis (« Leventis ») est nommé unique administrateur. Cependant, ce dernier décède en janvier 2017, ayant été abattu devant son immeuble à Toronto.

[25] MB tente de faire la preuve que Leventis avait exprimé un intérêt pour les activités de Tricom, mais l’intimée s’oppose en disant que c’est du ouï-dire.

[26] La Cour prend note de l’objection de l’intimée sans rendre une décision.

[27] MB tente ensuite de présenter en preuve une lettre de démission qu’il a lui-même préparée. Il a aussi préparé une version identique pour la signature de CB. Une fois signés, ils en ont fait une photocopie et remis l’original à Leventis.

[28] La lettre de MB et de CB indique ce qui suit :

[TRADUCTION]

Objet : Démission

Par la présente, je vous informe qu'à compter de ce jour et avec effet immédiat, je démissionne de mon poste d'administrateur de Tricomcanada Inc.

Je vous demande d'enregistrer correctement cette démission dans le livre de minutes de la société et de veiller à ce que tous les documents pertinents soient déposés auprès du « Registraire des Entreprises du Québec ».

[29] L’intimée s’oppose à la présentation en preuve de la lettre en indiquant qu’elle n’est pas adressée à quiconque, qu’il n’y a aucune preuve qu’elle a été envoyée à la société Tricom et qu’il s’agit de simple témoignage.

[30] La Cour prend encore note de l’objection sans rendre une décision.

[31] MB tente ensuite de faire la preuve que le registre des procès-verbaux de Tricom a été remis à Leventis lorsqu’il a été nommé administrateur. Cependant l’intimée s’oppose puisqu’il avait indiqué, lors de l’interrogatoire préalable qui a eu lieu en novembre 2019, qu’il avait remis le registre à Me Martin Raymond.

[32] L’intimée invoque l’article 98 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale) (DORS/90‑688a), (la « Règle 98 »).

[33] Lors de l’interrogatoire préalable, MB avait indiqué ce qui suit :

[TRADUCTION] : Je ne sais même pas où se trouve le livre des minutes. Pour être honnête, je ne sais pas s'il était avec Basil à un moment donné ou Martin, Martin étant un autre avocat d'un autre cabinet, et qu'il circulait. Peut-être que Tasso l'a pris après. Pour être honnête, je n'ai aucune idée d'où il se trouve à ce stade.

[34] MB tente d’expliquer qu’au moment de l’interrogatoire préalable, il est incertain où se trouve le registre, mais que son avocat corporatif avait le registre en 2013. Après l’interrogatoire préalable, il communique avec MRaymond, mais ce dernier n’a pas le registre et n’a aucun souvenir de sa démission ou de la nomination de Leventis. MB conclut donc que Leventis a pris le registre de Tricom.

[35] L’avocate des appelants fait valoir que le témoignage de MB n’est pas nécessairement contradictoire parce qu’il a répondu que « Tasso » avait peut-être pris le registre. Ainsi, cette réponse n’exclut pas la possibilité qu’il a donné le registre à Leventis et il tentait de clarifier la réponse donnée.

[36] La Cour prend encore note de l’objection sans rendre une décision.

[37] MB indique qu’entre la date de sa démission et la date de la cotisation en question, il n’a reçu aucune correspondance à titre d’administrateur de Tricom et n’a posé aucun geste à cet effet.

[38] MB reconnait l’extrait du Registre des entreprises du Québec daté de 2019 dans lequel il est indiqué comme administrateur. Selon lui, le registre est inexact et il en a seulement pris connaissance après avoir reçu la cotisation dans cette instance. Il est alors surpris de constater qu’il est encore inscrit puisque Leventis devait effectuer le changement. Il communique immédiatement avec Me Fournier pour voir s’il est possible de faire une modification.

[39] En contre-interrogatoire, MB reconnait qu’il a indiqué lors de l’interrogatoire préalable [TRADUCTION] « qu’ils avaient donné les lettres à l’avocat et nous avions officiellement démissionné ». Il précise cependant que l’original de la lettre a été donné à Leventis et une copie a été remise à l’avocat.

[40] Il reconnait que sa lettre de démission a été signée dans un bureau situé derrière la pharmacie dont ils sont propriétaires. Il admet que seul CB et lui sont présents lors de la signature des deux lettres.

[41] Il admet aussi qu’au moment de leur démission, Tricom n’a pas d’actifs corporels ou incorporels et que les derniers états financiers datent de 2013.

[42] Il n’a aucun souvenir d’une résolution des actionnaires de Tricom pour élire Leventis comme administrateur expliquant [TRADUCTION] « nous l’avons nommé, nous avons spécifiquement dit « tu es le nouvel administrateur » […] c’était clair entre nous qu’il était le nouvel administrateur ».

[43] MB reconnait ensuite que lorsqu’il a pris connaissance du décès de Leventis au mois de janvier 2017, aucune démarche n’a été prise par lui à titre d’actionnaire de Tricom pour le remplacer et nommer un nouvel administrateur.

[44] MB reconnait que l’avocat qui représente Tricom dans l’appel entendu par le juge Hogan entre les mois de janvier et juin 2015 est Me Basil Angelopolous et qu’à titre d’administrateur de Tricom, il lui a donné ce mandat.

[45] MB reconnait ensuite une lettre de Me Angelopoulos daté du 4 février 2015 adressée à Revenu Québec, Direction générale de Recouvrement, dans laquelle il demande au ministre de ne pas entamer de procédures de recouvrement contre les administrateurs avant que le juge Hogan ait rendu sa décision finale.

[46] Me Angelopoulos indique entre autres ce qui suit :

Vu que l’audition dans ce dossier va reprendre devant la CCI le 11 mai 2015, nous vous suggérons fortement de reporter de quelques mois votre intention de cotiser le Contribuable, soit jusqu’à ce que jugement soit rendu par la CCI, et de réévaluer cette intention selon les conclusions du jugement.

Par ailleurs, vu que le contribuable est toujours administrateur de la Société, la question de la prescription de deux (2) ans ne se pose pas et par conséquent le ministre ne subira aucun préjudice en attendant le sort de la cause devant la CCI.

[…]

Pour les motifs plus haut mentionnés, nous sommes d’avis que la décision du ministre de cotiser personnellement le Contribuable devrait être reportée et réévaluée à la lumière du jugement rendu par la CCI dans le dossier portant le numéro 2013-4655(GST)G.

[47] MB indique que le contenu de la lettre est exact, mais qu’il n’a pas mandaté Me Angelopoulos de l’envoyer. Il maintient qu’il a vu la lettre pour la première fois quelque temps avant le début de cet appel.

iii) Témoignage de Carl Bishara

[48] Carl Bishara (« CB ») indique qu’il est associé avec MB dans plusieurs activités commerciales et qu’ils ont fondé Tricom en 2012 voulant profiter de la montée en flèche du prix de l’or.

[49] Cependant, Tricom cesse ses activités après huit mois d’opération puisque l’industrie est très frénétique. Puis ils ont perdu intérêt étant donné les problèmes reliés aux remboursements de la TPS/TVQ.

[50] Il a rencontré Leventis ou « Tasso », dans une salle d’entraînement au début des années 1990, mais ne l’a pas souvent revu depuis cette époque-là.

[51] Il explique que Leventis a tenté d’établir une entreprise d’achat et de vente de rebuts d’or, mais n’a pas connu de succès. Il a exprimé un intérêt pour les affaires de Tricom. L’intimée s’oppose en indiquant que c’est du ouï-dire.

[52] Ils ont expliqué à Leventis le fonctionnement des opérations de Tricom et lui ont offert leurs « ressources », dont les coordonnés de certains acheteurs d’or et un compte avec la société Brinks. Ces renseignements lui sont remis « parce qu’il allait devenir administrateur de Tricom ». CB reconnait que Leventis n’a aucune expérience dans l’industrie et que c’est un marché très difficile d’accès.

[53] CB reconnait sa signature sur la lettre de démission qu’il a aussi signée dans le bureau arrière de leur pharmacie. Il indique que MB a préparé la lettre qui est identique à la sienne. Il a gardé une copie et remis l’original à MB.

[54] L’intimée s’oppose encore à la présentation de la lettre en preuve en indiquant qu’elle n’est pas adressée à quiconque et qu’il s’agit d’une preuve testimoniale qui dit essentiellement « j’ai démissionné ».

[55] La Cour prend note de l’objection de l’intimée sans rendre une décision.

[56] Lorsque CB reçoit l’avis de cotisation en question, il dit être très surpris parce qu’il n’est plus administrateur. MB et lui ont immédiatement communiqué avec Me Fournier qui a produit un relevé du Registraire des entreprises.

[57] Selon CB, il n’a pris aucune démarche comme administrateur après le mois d’aout 2015 et ne s’est jamais présenté comme administrateur à quiconque.

[58] En dernier, CB indique que Revenu Québec a effectué une saisie de certains comptes bancaires de Tricom auprès de la Banque Royal du Canada. Cependant, ces saisies ont eu lieu avant que la ministre établisse la cotisation en question.

[59] En contre-interrogatoire, CB reconnait qu’il a indiqué lors de l’interrogatoire préalable que l’original de sa lettre de démission avait été remis à ses avocats, soit Me Angelopoulos ou Me Raymond et qu’il a lui-même livré la lettre puisqu’il allait souvent à leur cabinet pour des réunions.

[60] CB reconnait ensuite sa réponse à la question « savez-vous quand Anastasios Leventis a été nommé » et il avait répondu « non je ne le sais pas ».

[61] CB reconnait qu’il n’a pas signé de résolution pour nommer Leventis comme administrateur et que, ayant signé sa lettre de démission, ils l’ont tout simplement nommé comme administrateur. Il reconnait qu’il n’a pris aucune démarche pour nommer un nouvel administrateur après le décès de Leventis en janvier 2017.

IV. Droit applicable et positions des parties

[62] La cotisation en question a été établie en vertu du paragraphe 323(1) de la LTA mais les appelants invoquent le paragraphe 323(5) et prétendent que la cotisation est prescrite puisque plus de deux ans se sont écoulés depuis leur démission comme administrateur. Ils indiquent au paragraphe 12 de l’avis d’appel que « les documents corporatifs sont très clairs et précis et contraignants ».

[63] Ils maintiennent que la lettre qu’ils ont tenté de présenter en preuve remplit les exigences de la loi applicable puisqu’elle comporte leur signature et la date d’entrée en vigueur et qu’elle a été remise à Tricom par l’entremise de Leventis qui était le nouvel administrateur. Ce dernier devait faire la mise à jour au Registre des entreprises, ce qu’il n’a pas fait.

[64] La Loi sur les sociétés par actions, RLRQ C S-31.1 (« LSA ») prévoit au paragraphe 142 que « le mandat d’un administrateur prend fin par son inhabilité ou par sa révocation » et que « la démission prend effet à la date de la réception de l’avis écrit qu’il en donne ou à la date postérieure qui y est indiquée ».

[65] De plus, la Loi sur la publicité légale des entreprises du Québec, RLRQ C. P-44.1 (« LPLE ») impose à l’entreprise l’obligation d’immatriculation qui doit notamment inclure le nom et le domicile de chaque administrateur.

[66] L’article 98 de la LPLE prévoit ensuite que les renseignements déposés au Registraire des entreprises, « sont opposables aux tiers à compter de la date où elles sont inscrites à l’état des informations et font preuve de leur contenu en faveur des tiers de bonne foi les informations suivantes relatives à l’assujetti », dont, notamment, « le nom et domicile de chaque administrateur ».

[67] Les appelants prétendent qu’ils sont « des tiers de bonne foi ».

[68] Ils citent l’affaire Québec (Commission de la construction) c. Marin, 2005 CanLII 50228 (QC CQ) (« Marin ») où la défenderesse avait contesté une cotisation au motif qu’elle avait démissionné comme administratrice de l’entreprise débitrice. La cour a noté que la démission avait été acceptée par résolution du conseil administration le même jour, mais que l’entreprise n’avait jamais produit la déclaration du changement.

[69] La demanderesse soutenait qu’une démission d’un administrateur qui n’a pas fait l’objet d’une inscription au fichier central des entreprises lui serait inopposable.

[70] La cour a cependant conclu que la LPLE crée une présomption selon laquelle les informations relatives à chaque compagnie sont véridiques et font preuve de leur contenu en faveur des tiers de bonne foi, mais qu’il s’agit d’une présomption réfutable. La cour a noté que les personnes dont les noms sont erronément inscrits ou laissés dans les registres de la compagnie peuvent être des tiers de bonne foi.

[71] La cour a conclu que la défenderesse avait démissionné de son poste et qu’elle n’avait plus exercé de fonction au sein de l’entreprise. Elle a de plus conclu que la preuve était « de nature à repousser la présomption de validité de l’information contenue au fichier central des entreprises » (par. 21).

[72] L’analyse du droit applicable dans Marin et notamment de l’article 98 de la LPLE a été reprise par notre cour dans l’affaire Sandhu c. La Reine, 2009 CCI 175 (« Sandhu ») où le juge Jorré a conclu qu’il n’y avait aucune preuve que l’appelant avait accepté d’être administrateur et qu’il y avait erreur dans la déclaration initiale. Il a donc conclu que l’appelant n’était pas un administrateur.

[73] De plus, dans l’affaire Succession de Bela Miklosi c. La Reine, 2004 CCI 253 (« Miklosi »), les appelants prétendaient que le père, décédé au moment de l’appel, avait remis sa démission à son fils, gestionnaire principal de l’entreprise, plus de deux ans avant de recevoir la cotisation en vertu du paragraphe 323(1) de la LTA.

[74] Le juge Paris était d’avis que l’article 62 de la Loi sur la publicité légale [maintenant l’article 98, LPLE] établit une présomption réfutable et qu’un administrateur a le droit de faire la preuve de la date de sa démission. Cependant, il a conclu que l’appelant n’avait pas réussi à réfuter la présomption contenue dans la loi applicable ou à réfuter la présomption du ministre apparaissant dans la réponse à l'avis d'appel (par. 24).

[75] De même, dans l’affaire Commission de la construction du Québec c. Légaré, 1998 CanLII 10989 (QC CQ), la cour a noté qu’une personne ne pouvait être désignée comme administrateur sans y avoir consenti expressément selon l’article 338, Code civil du Québec, chapitre CCQ-1991 (« CcQ »).

[76] La cour a de plus conclu que la présomption créée par la LPLE n’était pas « irréfragable » (par. 21) et « qu’un administrateur qui a manifesté sa volonté de retirer son consentement […] en annonçant sa démission par écrit à la compagnie perd le titre d’administrateur par le seul accomplissement de cet acte, par la suite, l’obligation de dénoncer cette démission aux autorités compétentes reste, non pas avec l’ancien administrateur, mais plutôt avec la compagnie » (par. 30). La cour a conclu que « la présomption légale invoquée contre elles fut renversée » (par. 35).

[77] Dans cette instance, l’intimée a tenu pour acquis que les appelants sont administrateurs depuis la constitution de Tricom en 2012 et qu’ils n’ont jamais cessé de l’être. Elle maintient que la lettre en question n’est pas valide.

[78] L’intimée reconnait ici qu’un administrateur peut être un « tiers de bonne foi » pour les fins de l’article 98 de la LPLE et qu’il peut tenter de contredire l’information qui a été consignée au Registre des entreprises. Mais elle maintient que la lettre de démission que les appelants ont tenté de déposer en preuve n’a aucun destinataire mentionné et qu’aucun témoin l’a assermenté ou contresigné. Il s’agit donc essentiellement d’un témoignage. L’intimée reconnait qu’un administrateur qui est inscrit au Registre des entreprises peut faire la preuve de sa démission, mais encore faut-il que la preuve soit recevable et probante.

[79] L’intimée maintient que la démission est « un acte juridique » et soulève les articles 2811 et 2860 du CcQ qui prévoient ce qui suit :

Des moyens de preuve

2811. La preuve d’un acte juridique ou d’un fait peut être établie par écrit, par témoignage, par présomption, par aveu ou par la présentation d’un élément matériel, conformément aux règles énoncées dans le présent livre et de la manière indiquée par le Code de procédure civile (chapitre C-25.01) ou par quelque autre loi.

[…]

2860. L’acte juridique constaté dans un écrit ou le contenu d’un écrit doit être prouvé par la production de l’original ou d’une copie qui légalement en tient lieu.

Toutefois, lorsqu’une partie ne peut, malgré sa bonne foi et sa diligence, produire l’original de l’écrit ou la copie qui légalement en tient lieu, la preuve peut être faite par tous moyens.

[80] L’intimée maintient que la lettre de démission en question est une déclaration unilatérale et qu’il n’y a rien, sauf le témoignage des deux appelants, qui indique avec certitude que la lettre a été remise ou livrée à Tricom. De plus elle maintient que le témoignage selon laquelle l’original de la lettre a été remis à Leventis est irrecevable en application de la Règle 98 puisqu’ils ont indiqué lors de l’interrogatoire préalable que l’original avait été remis à leurs avocats.

[81] L’intimée ajoute que puisque les appelants ont choisi de demeurer actionnaires de Tricom, il est peu crédible qu’ils n’aient pas fait de suivi pour vérifier si le changement avait été apporté au Registraire des entreprises. Ils ne l’ont pas fait davantage après le décès de Leventis en janvier 2017.

[82] Selon l’intimée, il n’y a aucune preuve que les appelants ont communiqué avec Revenu Québec pour l’aviser de leurs démissions, un sujet qui avait pourtant été soulevé par Me Angelopoulos dans sa lettre du 14 février 2015.

[83] L’intimée maintient que la décision du juge Hogan a été rendue le 11 janvier 2016 et que l’appel devant la Cour d’appel fédérale a été entendu le 4 mai 2017, soit après la date du décès de Leventis. Selon l’intimée, seuls les appelants représentaient Tricom dans ces instances comme administrateurs.

[84] L’intimée demande à la Cour de tirer une inférence négative de l’absence de Me Angelopoulos, MRaymond et de MFournier, qui représentaient Tricom et les appelants pendant les années en question et qui auraient pu témoigner pour confirmer qu’ils avaient connaissance de la démission des appelants en août 2015.

[85] De plus, l’intimée demande à la Cour de tirer une inférence négative du fait que les appelants, en date de 2019, et probablement aujourd’hui, sont toujours inscrits au registre des entreprises comme les seuls deux administrateurs de Tricom.

[86] L’intimée soulève l’affaire Canada c. Chriss, 2016 CAF 236 (« Chriss »), qui était une situation similaire puisque deux administrateurs avaient demandé qu’un cabinet juridique prépare une lettre de démission pour eux, mais la lettre était restée au dossier et n’avait jamais été signé. Les appelants ont plaidé qu’ils croyaient avoir démissionné, mais la Cour d’appel fédérale a indiqué ce qui suit:

[19] La croyance d’un administrateur selon laquelle il a démissionné n’a pas de rapport ou de lien avec les objectifs sous-jacents du paragraphe 121(2) de la LSAO ni avec l’importance qu’il accorde à la communication objectivement vérifiable d’une démission à la société. Le fait de permettre qu’une intention subjective prenne soudainement naissance lorsque cela convient, dans l’intérêt de l’administrateur ou pour les besoins de la société, viendrait compromettre considérablement la gouvernance de la société. Une croyance raisonnable selon laquelle une personne a démissionné doit respecter de beaucoup plus près les conditions nécessaires pour rendre une démission valide. En outre, la démission n’a pas été communiquée à la société. Les ébauches de lettres n’ont jamais quitté le bureau du cabinet juridique. L’exigence selon laquelle il doit y avoir réception par la société des lettres de démission ne peut être laissée de côté.

[Mon soulignement]

[87] De même, dans l’affaire Mueller c. La Reine, 2018 CCI 260 (« Mueller »), le juge Bocock, citant la décision Chriss, a indiqué que la démission d’un administrateur devait être « manifeste dans les faits » et « qu’il ne suffit pas que la personne croie avoir démissionné (…) » (par. 11).

[88] De plus, dans l’affaire Hattem c. La Reine, 2008 CCI 32, l’appelante prétendait avoir démissionné comme administrateur, mais la cour a indiqué ce qui suit :

[29] Je suis d’avis que, dans la présente affaire, la preuve n’a pas été faite de l’authenticité même de la démission de l’appelante en mars 2002. L’avocat qui est censé l’avoir rédigée n’est pas venu témoigner ou n’a produit aucune lettre ou aucun document contemporain à la prétendue démission. En fait le nom de cet avocat paraît une seule fois dans la preuve présentée et c’est à la procuration signée en 2005.

[…]

[31] Si un administrateur démissionne du conseil d’administration d’une société débitrice fiscale et veut que cette démission soit un acte juridique valide à l’égard du ministre, selon la Loi sur les compagnies du Québec, cet administrateur doit informer le ministre de sa démission lors des échanges de lettres relatifs à la dette fiscale de la société et à ceux relatifs à la responsabilité des administrateurs. Je ne crois pas que les lois des autres provinces ainsi que la loi fédérale sur les compagnies soient différentes à cet égard.

[Mon soulignement]

[89] L’intimée réitère donc qu’il n’y a aucune preuve que la prétendue démission a été communiquée à la société, qu’une déclaration modificative a été envoyée au Registraire des entreprises ou qu’un avis a été envoyé à l’Agence du revenu du Canada ou du Québec. En conséquence, la seule information valide à l’égard des autorités fiscales est que les appelants sont toujours administrateurs de Tricom.

[90] L’intimé soutient finalement que les appelants n’ont pas fait la preuve de leur démission. Au contraire, ils ont démontré « une désinvolture évidente et accommodante pour s’assurer que le délai de deux ans ne parte jamais ».

[91] En réplique, les appelants indiquent que la lettre de démission est « un acte unilatéral », mais aussi « un acte juridique » et qu’ils en ont fait la preuve par leur « témoignage », ce qui satisfait aux exigences de l’article 2811 CcQ.

[92] Les appelants ajoutent qu’ils n’ont plus l’original de la lettre de démission qui a été remis à Leventis, mais qu’ils ont « déposé en preuve une copie qui est fiable » en indiquant qu’il s’agissait d’une « photocopie ». Ils indiquent que le témoignage peut être utilisé par le tribunal pour contredire le Registre des entreprises. Ils indiquent de plus qu’étant donné le décès de Leventis, leur témoignage fait exception à la règle du ouï-dire puisqu’il est « nécessaire et fiable ».

V. ANALYSE

[93] Tel que le reconnaissent les appelants, il s’agit ici surtout d’une question de faits et de crédibilité. Or, la Cour est d’avis que les appelants n’ont pas témoigné avec candeur et franchise, que la narration des faits était peu convaincante et qu’il y avait des incohérences dans leurs témoignages.

[94] Dans un premier temps, la Cour est d’avis que la lettre que les appelants ont chacun tenté de déposer en preuve est irrecevable puisqu’elle n’est pas adressée à Tricom et il n’y a aucune preuve qu’elle a été envoyée à celle-ci.

[95] Tel que l’explique la Cour d’appel fédérale dans Chriss, l’objectif de la législation est d’assurer une « communication objectivement vérifiable » et « l’exigence selon laquelle il doit y avoir réception par la société des lettres de démission ne peut être laissée de côté » (par. 19).

[96] Le paragraphe 142 de la LSA précise d’ailleurs que la démission prend effet « à la date de la réception de l’avis écrit » et non pas la date de la signature.

[97] La Cour doit conclure que la réception de l’avis écrit par la société est un critère essentiel qui doit être « objectivement vérifiable » et « manifeste dans les faits », (Chriss et Mueller), ce qui n’est pas le cas dans cette instance.

[98] À titre subsidiaire, si la Cour accepte que les lettres de démission ont été validement envoyées et reçues par la société Tricom, elle est d’avis que les appelants sont néanmoins liés par la réponse donnée aux interrogatoires préalables, à savoir que l’original de la lettre a été remis à leur avocat. Ils ont d’ailleurs indiqué qu’ils avaient comme habitude de longue date de remettre les documents corporatifs à leur avocat. Ayant conclu avant l’audience de cette instance que la réponse donnée aux interrogatoires « était inexacte ou incomplète » ou encore « n’était plus exacte et complète », les appelants avaient l’obligation selon la Règle 98 de « fournir immédiatement ce renseignement par écrit à toutes les autres parties », ce qu’ils n’ont pas tenté de faire. Puisque la preuve testimoniale voulant qu’ils aient donné l’original de la lettre à Leventis est plutôt favorable à eux, la lettre peut seulement être acceptée en preuve avec l’autorisation de la Cour.

[99] La Règle 98 prévoit ce qui suit :

Renseignement obtenu ultérieurement

98 (1) La partie interrogée au préalable, ou la personne qui l’est au nom, à la place ou en plus de cette partie, qui découvre ultérieurement qu’une réponse à une question de l’interrogatoire :

a) était inexacte ou incomplète;

b) n’est plus exacte et complète,

doit fournir immédiatement ce renseignement par écrit à toutes les autres parties.

(2) Si une partie fournit un renseignement par écrit en application du paragraphe (1) :

a) une partie opposée peut exiger qu’il soit appuyé d’une déclaration sous serment ou qu’il fasse l’objet d’un nouvel interrogatoire préalable;

b) ce renseignement peut être traité lors d’une audience comme s’il faisait partie de l’interrogatoire initial de la personne interrogée.

(3) Si une partie ne se conforme pas au paragraphe (1) ou à l’alinéa (2)a) et que le renseignement obtenu ultérieurement est :

a) favorable à sa cause, elle ne peut le présenter en preuve à l’instance qu’avec l’autorisation du juge;

b) défavorable à sa cause, la Cour peut rendre des directives appropriées.

[Mon soulignement]

[100] L’application de la Règle 98 a été revue dans l’affaire Kallis c. La Reine, 2021 CCI 58 où la juge Wong a refusé d’accepter la preuve contradictoire (par. 9). Cependant, dans l’affaire Sydney Mines Fireman’s Club c. La Reine, 2011 CCI 403 (par. 17-19 et 21-22) la juge Campbell a conclu qu’il valait mieux admettre l’énoncé contradictoire en preuve puisqu’elle avait « le pouvoir discrétionnaire d’attribuer à la preuve l’importance appropriée, le cas échéant » (par. 21). En d’autres mots, la preuve contradictoire peut être admise, mais c’est à la cour de déterminer la valeur probante à accorder à chaque élément de preuve.

[101] Donc, si la Cour accepte la preuve contradictoire, c’est-à-dire que les originaux des lettres de démission ont été remis à Leventis, elle doit se demander si cette preuve a une valeur probante. La Cour constate d’abord que les appelants ont dit une chose aux interrogatoires préalables et une autre à l’audience. Ils se sont donc contredits, ce qui mine évidemment leur crédibilité et porte la Cour à croire qu’il s’agit d’une histoire sans fondement.

[102] La Cour doit conclure que la lettre de démission a été confectionnée pour les fins de ce litige et que ni l’original ni une copie n’a été transmis à Me Raymond ou à Me Angelopoulos. Le témoignage des appelants sur cette question n'a pas été corroboré par un tiers indépendant et la Cour doit nécessairement tirer une inférence négative du fait que ces avocats n’ont pas témoigné à l'audience.

[103] De plus, la Cour doit conclure qu’il est peu probable que l’original de la lettre de démission a été remis à Leventis. Les appelants indiquent que si Leventis n’avait pas accepté d’assumer le rôle d’administrateur, ils n’auraient pas démissionné. Or, il n’y a aucune preuve que Leventis a « accepté » d’agir comme administrateur et il n’y a aucun écrit ou preuve documentaire pour appuyer cette affirmation. Il y a seulement le témoignage intéressé des appelants.

[104] La Cour doit conclure que l’histoire de la nomination de Leventis comme administrateur est invraisemblable. En fin de compte, même si la Cour accepte que l’original de la lettre de démission lui a été remis, il s’agit d’un tiers qui n’a aucun lien juridique avec la société, ce qui ne peut constituer une « communication objectivement vérifiable » de la démission à la société selon Chriss.

[105] De plus, tel que le soutient l’intimée, le témoignage des appelants selon laquelle Leventis a « accepté » de devenir administrateur est une déclaration extrajudiciaire offerte en preuve pour établir la véracité des faits qu’elle contient. Il s’agit donc de ouï-dire qui est irrecevable, sauf exception.

[106] L’article 2870 du CcQ prévoit ce qui suit :

2870. La déclaration faite par une personne qui ne comparait pas comme témoin, sur des faits au sujet desquels elle aurait pu légalement déposer, peut être admise à titre de témoignage, pourvu que, sur demande et après qu’avis ait été donné à la partie adverse, le tribunal l’autorise.

Celui-ci doit cependant s’assurer qu’il est impossible d’obtenir la comparution du déclarant comme témoin, ou déraisonnable de l’exiger, et que les circonstances entourant la déclaration donnent à celle-ci des garanties suffisamment sérieuses pour pouvoir s’y fier.

[Mon soulignement]

[107] La Cour doit donc se demander s’il y a « des garanties suffisamment sérieuses » ou si, selon la règle de la common law, la déclaration extrajudiciaire satisfait aux critères de nécessité et de fiabilité : Royal Victoria Hospital et al. c. Morrow, [1974] R.C.S. 501.

[108] Puisque Leventis est décédé, le critère de la « nécessité » est établi. Cependant, la Cour n’est pas satisfaite quant au critère de fiabilité pour de multiples raisons, dont le témoignage peu crédible des appelants et l’absence d’un écrit signé par Leventis, notamment le consentement exigé par l’article 338 du CcQ.

[109] D’ailleurs les appelants reconnaissent qu’ils n’ont pas signé de résolution des actionnaires pour confirmer que Leventis a été nommé comme administrateur. Selon leur témoignage, ils ont tout simplement déclaré qu’il était le nouvel administrateur ce qui ne peut satisfaire aux exigences de la loi. L’article 110 de la LSA, prévoit que « les administrateurs sont élus par les actionnaires ». Encore faut-il qu’il y ait une résolution écrite ce qui n’est pas le cas dans cette instance.

[110] Il y a ensuite tout le débat entourant le registre des procès-verbaux de Tricom, à savoir s’il a réellement été remis à Leventis. Seule Me Raymond aurait pu expliquer pourquoi il avait le registre en 2013, mais ne l’avait plus lorsque les appelants ont communiqué avec lui après les interrogatoires préalables. Il n’a pas témoigné et donc la Cour doit en tirer une inférence négative.

VI. Conclusion

[111] La Cour doit finalement conclure que la supposée démission des appelants à titre d’administrateur de Tricom n’était pas valide en fait et en droit.

[112] Contrairement à la conclusion dans Marin, citée par les appelants, la Cour est d’avis que la preuve des appelants n’était pas « de nature à repousser la présomption de validité de l’information contenue au fichier central des entreprises » (par. 21). C’est-à-dire que les appelants sont toujours administrateurs parce qu’ils n’ont pas à réfuter la présomption établie par l’article 98 de la LPLE.

[113] Conséquemment, la Cour conclut que les appelants étaient administrateurs de la société Tricom lorsque la cotisation a été établie le 26 octobre 2017.

[114] Les appels sont donc rejetés avec dépens de 2 500 $ pour chaque appelant.

Signé à Ottawa (Canada), ce 16ième jour de septembre 2022.

« Guy R. Smith »

Juge Smith


RÉFÉRENCE :

2022 CCI 105

Nº DES DOSSIERS DE LA COUR :

2018-4620(GST)G

2018-4622(GST)G

LES INTITULÉS DE LA CAUSE :

MARC BISHARA ET
SA MAJESTÉ LE ROI
CARL BISHARA ET
SA MAJESTÉ LE ROI

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 27 septembre 2021

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :

L'honorable juge Guy R. Smith

DATE DU JUGEMENT :

Le 16 septembre 2022

COMPARUTIONS :

Avocate des appelants :

Me Vanessa Gregoria

 

Avocat de l'intimée :

Me Antoine Lamarre

AVOCATE INSCRITE AUX DOSSIERS :

Pour les appelants:

Nom :

Me Vanessa Gregoria

Cabinet :

BCF s.e.n.c.r.l.

Pour l’intimée :

François Daigle

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Canada)

 

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