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Dossier : 2020-825(GST)I

ENTRE :

COLMVEST HOLDINGS CORPORATION,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appels entendus le 23 mars et le 13 avril 2022, à Toronto (Ontario)

Devant : L’honorable juge David E. Graham


Comparutions :

Représentant de l’appelante :

Roman Raskin

Avocats de l’intimée :

Me Janice Liu

 

JUGEMENT

Les appels interjetés par l’appelante à l’encontre des nouvelles cotisations établies pour les périodes de déclaration allant du 1er avril 2014 au 30 juin 2015 sont rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 28e jour de juin 2022.

« David E. Graham »

Le juge Graham

 


Référence : 2022 CCI 70

Date : 20220628

Dossier : 2020-825(GST)I

ENTRE :

COLMVEST HOLDINGS CORPORATION,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Graham

[1] L’appelante est une société de portefeuille. Au cours des périodes de déclaration trimestrielles allant du 1er avril 2014 au 30 juin 2015, l’appelante a demandé divers crédits de taxe sur les intrants. Le ministre du Revenu national a rejeté certains de ces crédits. L’appelante a interjeté appel du rejet de crédits de taxe sur les intrants à hauteur de 47 592 $ se rapportant à des honoraires d’avocat engagés par l’appelante.

[2] Ces honoraires d’avocat découlent d’un arbitrage entre l’appelante et l’autre actionnaire de la société 443307 Ontario Inc. concernant la distribution des dividendes de la même société.

[3] L’appelante n’a pas engagé d’honoraires d’avocat pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ses propres activités commerciales, mais bien à l’égard de la société 443307. En temps normal, cette situation empêcherait l’appelante de demander les crédits de taxe sur les intrants relativement aux honoraires d’avocat. Cependant, l’appelante soutient que le paragraphe 186(1) de la Loi sur la taxe d’accise lui confère le droit de demander les crédits en raison de ces frais.

[4] Pour demander les crédits de taxe sur les intrants prévus au paragraphe 186(1), l’inscrit doit satisfaire à plusieurs exigences différentes. Dans le cadre des présents appels, l’exigence principale que l’appelante doit respecter est celle d’être liée à la société 443307. L’appelante soutient qu’elle est liée à cette société. Je ne suis pas de cet avis.

A. Être lié

[5] Le mot « lié » est défini au paragraphe 126(2) de la Loi sur la taxe d’accise. Ce paragraphe énonce que les personnes sont liées au sens de la Loi de l’impôt sur le revenu lorsqu’elles sont liées aux termes des paragraphes 251(2) à (6) de cette même loi. Par conséquent, la principale question que je dois trancher est celle de savoir si l’appelante et la société 443307 sont liées aux termes des paragraphes 251(2) à (6) de la Loi de l’impôt sur le revenu. J’estime que non.

B. Contrôle de droit

Contrôle exercé par une société

[6] Selon le sous-alinéa 251(2)b)(i), une société est liée à la personne qui contrôle cette société. Pour l’application des paragraphes 251(2) à (6), « contrôle » signifie « contrôle de droit ». L’appelante détient 25 % de la société 443307. La société Quorum Facilitate Inc. détient le 75 % restant. En se fiant uniquement aux actions, il faudrait conclure que Quorum détient le contrôle de droit de la société 443307.

Convention unanime des actionnaires

[7] L’appelante fait mention de ce qu’elle appelle une convention unanime des actionnaires de la société 443307. Dans l’arrêt Duha Printers (Western) Ltd. c. Canada [1] , la Cour suprême du Canada a conclu qu’une convention unanime des actionnaires devrait être considérée aux fins de l’examen du contrôle de droit.

[8] Le sous-alinéa 251(5)b)(i) de la Loi de l’impôt sur le revenu dispose que la personne qui, aux termes d’un contrat, a un droit, immédiat ou futur, conditionnel ou non, à des actions d’une société, est réputée occuper la même position relativement au contrôle de la société que si elle était propriétaire des actions à ce moment-là. L’appelante soutient que l’article 3.2 de la convention unanime des actionnaires donne à l’appelante un droit de premier refus concernant l’achat des actions de Quorum dans l’éventualité où Quorum recevrait une offre de bonne foi d’un tiers. L’appelante prétend que ce droit est le type de droit qui est visé par le sous-alinéa 251(5)b)(i). Par conséquent, l’appelante considère que, pour l’application du paragraphe 251(2), elle doit être réputée avoir le contrôle de toutes les actions de 443307.

[9] Selon l’intimée, la convention unanime des actionnaires ne couvre pas la société 443307. Cette convention avait été rédigée de manière à couvrir plusieurs sociétés différentes. Il est difficile de déterminer si la société 443307 en faisait partie. Il se trouve que je n’ai pas à trancher cette question.

[10] Les éléments de preuve nous indiquent que, dans la mesure où la convention unanime des actionnaires devait couvrir la société 443307, les parties agissaient régulièrement comme si ce n’était pas le cas. Il semble qu’aucune des dispositions en matière de gouvernance qui exigent un consentement unanime n’ait jamais été suivie. En fait, je n’ai entendu aucun témoignage qui m’amènerait à conclure qu’un aspect quelconque de cette convention n’a jamais été suivi.

[11] Aucun élément de preuve n’indique que les dispositions de l’article 3.2 portant sur le droit de premier refus n’aient jamais été en vigueur. Par conséquent, je n’ai aucune façon de savoir si les parties de cette convention unanime des actionnaires se sentaient liées par l’article 3.2 ou s’ils en faisaient fi tout comme ils le faisaient à l’égard des dispositions en matière de gouvernance.

[12] Vu ces circonstances, je ne suis pas prêt à conclure que l’article 3.2 de la convention donnait des droits à l’appelante. Ayant tiré cette conclusion, je n’ai pas à trancher si le type de droit de premier refus qui figure à l’article 3.2 est un droit qui est visé par le sous-alinéa 251(5)b)(i), et je vais m’abstenir de le faire.

Contrôle par un groupe

[13] Le sous-alinéa 251(2)c)(i) dispose que deux sociétés sont liées si elles sont contrôlées par la même personne ou le même groupe de personnes. Pour déterminer si c’est le cas en l’espèce, je dois examiner les actions détenues par l’appelante et Quorum.

[14] L’appelante appartient exclusivement à William Meany. Par conséquent, M. Meany contrôle l’appelante. Quorum appartient exclusivement à un individu appelé John Regan. Par conséquent, M. Regan contrôle Quorum.

[15] Même en présumant que M. Regan et M. Meany forment un groupe de personnes qui contrôlent la société 443307, ce même groupe ne contrôlait pas l’appelante, de sorte que l’appelante et la société 443307 ne sont pas liées aux termes du sous-alinéa 251(2)c)(i).

Contrôle par un groupe lié

[16] Le sous-alinéa 251(2)c)(iii) dispose que deux sociétés sont liées si l’une des sociétés est contrôlée par une personne et si cette personne est liée à un membre d’un groupe lié qui contrôle l’autre société.

[17] L’appelante est contrôlée par une personne, M. Meany. Cependant, même en présumant que M. Regan et M. Meany forment un groupe de personnes qui contrôle la société 443307, je ne puis conclure qu’ils forment un groupe lié.

[18] Selon la définition du paragraphe 251(4), un groupe lié est un groupe de personnes dont chaque membre est lié à chaque autre membre du groupe. M. Meany et M. Regan ne sont pas liés par des liens familiaux ou maritaux. Par conséquent, l’appelante et la société 443307 ne sont pas liées aux termes du sous-alinéa 251(2)c)(iii).

C. Contrôle de fait

[19] Subsidiairement, l’appelante soutient qu’elle exerçait un contrôle de fait sur la société 443307. Je n’ai pas à trancher si cette affirmation est vraie ou non. Dans la Loi de l’impôt sur le revenu, les mots « contrôlée, directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit » indiquent que je dois envisager le contrôle de fait. Ces mots sont utilisés dans les dispositions sur les sociétés connexes de l’article 256 et sont définis au paragraphe 256(5.1). Ces mots ne figurent pas dans les paragraphes 251(2) à (6) puisque ceux-ci ne traitent que du contrôle de droit. Le contrôle de fait ne s’applique pas à ces paragraphes et ne peut donc pas s’appliquer au paragraphe 126(2) de la Loi sur la taxe d’accise.

D. Conclusion

[20] En résumé, je conclus que l’appelante n’était pas liée à la société 443307. Étant donné que cette condition pour l’application de l’article 186 n’est pas satisfaite, l’appelante ne peut pas invoquer ce paragraphe pour demander des crédits de taxe sur les intrants concernant les honoraires d’avocat. Je n’ai pas à trancher si l’appelante satisfaisait aux autres conditions de l’article 186.

[21] Par conséquent, les appels interjetés par l’appelante à l’encontre des nouvelles cotisations établies pour les périodes de déclaration allant du 1er avril 2014 au 30 juin 2015 sont rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 28e jour de juin 2022.

« David E. Graham »

Le juge Graham

 


RÉFÉRENCE :

2022 CCI 70

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2020-825(GST)I

INTITULÉ :

COLMVEST HOLDINGS CORPORATION c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Les 23 mars et 13 avril 2022

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge David E. Graham

DATE DU JUGEMENT :

Le 28 juin 2022

COMPARUTIONS :

Représentant de l’appelante :

Roman Raskin

Avocats de l’intimée :

Me Janice Liu

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelante :

Nom :

[EN BLANC]

Cabinet :

[EN BLANC]

Pour l’intimée :

Me François Daigle

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 



[1] [1998] 1 RCS 795.

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