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Dossier : 2012-3976(IT)I

ENTRE :

ANDREW STRIMAITIS,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 5 juillet 2013, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge Paul Bédard

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l’intimée :

Me Ricky Y. M. Tang

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          L’appel interjeté à l’encontre de la nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2010 est rejeté conformément aux motifs du jugement ci-joints.

 

 

Signé à Montréal (Québec), ce 5e jour de septembre 2013.

 

 

 

« Paul Bédard »

Juge Bédard

 

Traduction certifiée conforme

ce 3e jour d’octobre 2013.

 

Marie-Christine Gervais, traductrice


 

 

 

 

Référence : 2013 CCI 274

Date : 20130905

Dossier : 2012-3976(IT)I

ENTRE :

ANDREW STRIMAITIS,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Bédard

 

[1]             L’appelant interjette appel d’une pénalité de 5 570,20 $ imposée pour l’année d’imposition 2010 par le ministre du Revenu national (le « ministre ») en vertu du paragraphe 163(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »).

 

[2]             Le paragraphe 163(1) énonce les pénalités dont est passible le contribuable qui omet à répétition de déclarer un revenu :

 

(1)        Omission répétée de déclarer un revenu.

 

Toute personne qui ne déclare pas un montant à inclure dans le calcul de son revenu dans une déclaration produite conformément à l’article 150 pour une année d’imposition donnée et qui a déjà omis de déclarer un tel montant dans une telle déclaration pour une des trois années d’imposition précédentes est passible d’une pénalité égale à 10 % du montant à inclure dans le calcul de son revenu dans une telle déclaration, sauf si elle est passible d’une pénalité en application du paragraphe (2) sur ce montant.

 

[3]             Dans la décision Maltais v. The Queen, 91 DTC 1385, le juge Bowman (tel était alors son titre) a statué que l’omission dont il est question au paragraphe 163(1) correspond à une « responsabilité stricte ». Pour justifier l’imposition de la pénalité prévue à ce paragraphe, le ministre doit simplement établir « que le contribuable a omis de déclarer un revenu pour une année et qu’il a déjà omis de déclarer un tel montant dans une déclaration de revenus pour une des trois années d’imposition précédentes » (page 1387). Une fois ce fait établi, il incombe au contribuable de prouver qu’il a fait preuve de « diligence raisonnable » dans la déclaration de son revenu pour éviter toute responsabilité au titre du paragraphe 163(1).

 

[4]             En l’espèce, l’appelant admet qu’il a omis dans ses déclarations pour 2010, 2009 et 2008 certains montants reçus au titre de son emploi. Il admet également qu’il devait payer de l’impôt et des intérêts à l’égard de ces montants, mais demande à la Cour de l’exonérer des pénalités qui lui ont été imposées. À l’appui de cet argument, il a essentiellement affirmé qu’il avait simplement commis une erreur. Étant donné que, dans son témoignage, l’appelant a réitéré les raisons qu’il avait énoncées dans son avis d’appel pour expliquer pourquoi il n’avait pas déclaré la totalité de son revenu, je reproduirai les passages pertinents de son avis d’appel :

 

[traduction]

Les faits pertinents :

 

Je suis pénalisé parce que ma déclaration de revenus ne correspond pas à mon revenu pour l’année d’imposition 2010. Cela est dû à un feuillet T4 manquant qui se trouvait à faire état de la majorité de mes gains pour cette année-là.

 

Je n’ai jamais parlé à la comptable qui s’est occupée de mes impôts et je n’ai jamais rien signé d’elle. Il s’agit de la comptable avec qui mes parents font affaire. Je lui remets donc simplement les formulaires nécessaires et je reçois habituellement un remboursement. On ne m’a jamais demandé de vérifier ni de signer quoi que ce soit, qui confirmait que j’acceptais le montant déclaré avant que ma déclaration soit envoyée pour traitement. Comme la comptable produisait mes déclarations de revenus par voie électronique, je n’ai pas eu à signer ni à confirmer que la déclaration était correcte.

 

Les raisons de l’opposition :

 

Je n’avais pas l’intention de faire quelque chose de mal, il s’agissait d’une simple erreur. En 2010, j’ai travaillé pour deux studios d’animation. J’ai travaillé à un projet pour Cuppa Coffee Studios pendant la majeure partie de l’année, puis j’ai travaillé à deux plus petits projets pour Guru Studio. Guru a traité chaque projet séparément et a délivré deux T4 distincts pour mon travail auprès d’elle. J’ai reçu chacun des T4 séparément par la poste et, vu que j’avais travaillé pour deux entreprises différentes, j’ai pensé que le premier était de Cuppa Coffee et le second, de Guru Studios. Comme il était bientôt temps que je produise ma déclaration de revenus, j’ai envoyé les formulaires à la comptable de la famille. Quelque temps après, j’ai reçu le T4 de Cuppa Coffee par la poste. Je me demandais pourquoi j’avais reçu un autre T4 et j’ai appelé ma mère pour lui demander si elle pouvait se renseigner auprès de la comptable pour vérifier si celle-ci avait tous les formulaires nécessaires me concernant. Ma mère a communiqué avec elle et m’a dit qu’elle avait deux T4 pour cette année-là. Je me suis dit que c’était correct, que j’avais travaillé pour deux entreprises différentes, qu’il y avait deux T4 et que la comptable n’avait rien mentionné au sujet de formulaires manquants. J’ai bêtement mis le T4 dans mon dossier d’impôt à la maison et je ne m’en suis pas autrement occupé. Or, il se trouve que ce T4 faisait état de la majorité de mes gains de cette année‑là, et les deux autres T4 qui ont été traités ne faisaient état que des gains relatifs aux deux plus petits projets de production de Guru Studio.

 

Vous pouvez donc voir que cela n’était qu’un simple oubli, quoique quelque peu stupide de ma part, et que cela n’a pas été fait intentionnellement dans le but de commettre quelque fraude que ce soit. Je travaille fort, je paie tous mes impôts, je respecte la loi, et il se trouve que je préfère confier à d’autres le soin de gérer mes finances. Si j’avais communiqué avec la comptable qui a produit ma déclaration pour moi, je me serais sûrement rendu compte qu’elle n’avait pas tous les formulaires nécessaires avant qu’elle ne produise ma déclaration. En l’occurrence, elle a simplement supposé que je n’avais pas fait beaucoup d’argent cette année-là et a produit ma déclaration de revenus sans le T4 qui faisait état de la majorité de mes revenus pour l’année 2010.

 

Vu qu’il se trouve que le T4 manquant fait état de la majorité de mes revenus pour le travail que j’ai fait pendant l’année, la pénalité de 10 % est terriblement élevée pour une personne qui se trouve dans une situation comme la mienne et qui a un revenu comme le mien. Je ne vais pas me plaindre que je suis pauvre et dire que cela me ruinerait et me jetterait à la rue. Je ne suis pas une personne qui accumule les dettes, je fais des dessins animés pour enfants moyennant un bon salaire. Je viens de me marier et je fais de mon mieux pour assurer l’avenir de ma femme et des enfants que nous espérons avoir dans les années à venir. Cette pénalité serait un très dur coup pour nous, qui désirons fonder une famille. Compte tenu du fait que j’ai expliqué qu’il s’agissait d’un simple oubli et non d’un acte malhonnête, je vous demande de renoncer à cette pénalité afin que je puisse me concentrer à bâtir un avenir pour ma famille et continuer de créer des dessins animés stimulants pour les jeunes du Canada. J’embaucherai dorénavant mon propre comptable avec lequel je pourrai communiquer afin qu’une erreur comme celle‑ci ne se reproduise plus.

 

[5]             Je ne doute pas de la véracité du témoignage de l’appelant. Le problème, c’est que les raisons qu’il donne afin d’expliquer son omission de déclarer son revenu correctement ne lui permettent pas d’établir qu’il a fait preuve du degré de « diligence raisonnable » nécessaire pour éviter la pénalité prévue au paragraphe 163(1).

 

[6]             Selon l’arrêt Corporation de l’école polytechnique c. Canada, 2004 CAF 127, [2004] G.S.T.C. 102, 325 N.R. 64, un défendeur bénéficie de la défense de diligence raisonnable s’il établit l’une ou l’autre des deux choses suivantes : soit qu’il a commis une erreur de fait raisonnable, soit qu’il a pris des précautions raisonnables pour empêcher que ne se produise l’évènement qui donne naissance à la pénalité.

 

[7]             L’erreur de fait raisonnable emporte un double test : subjectif et objectif. Le test subjectif est satisfait si le défendeur établit qu’il s’est mépris en ce qu’il a cru en une situation de fait qui, si elle avait existé, aurait éliminé le caractère fautif de son geste ou de son omission. En outre, pour que cet aspect de la défense opère, il faut aussi que l’erreur soit raisonnable, c’est-à-dire une erreur qu’une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances aurait commise. Il s’agit là du test objectif.

 

[8]             Le deuxième volet de la défense requiert, tel que je l’ai déjà mentionné, que des gestes soient posés ou des mesures prises pour éviter l’événement qui engendre la pénalité.

 

[9]             Dans ce cas-ci, aucune erreur de fait raisonnable n’a été commise. Il serait difficile de conclure que l’appelant a commis une erreur de fait raisonnable en ce qui concerne la déclaration de la totalité de son revenu d’emploi de Cast & Crew Entertainment Services Inc. pour l’année d’imposition 2010 (le montant non déclaré s’élevant à 55 702 $) du fait qu’il avait envoyé (par l’entremise de sa mère) les feuillets T4 à sa comptable sans même avoir ouvert les enveloppes dans lesquelles il avait reçu les feuillets T4 ni examiné sa déclaration de revenus. De même, l’appelant ne peut prouver qu’il a pris des mesures raisonnables pour éviter les faits qui ont mené à l’imposition de la pénalité. Ces faits sont l’omission par l’appelant de déclarer la majorité de son revenu d’emploi pour 2010. Le fait que l’appelant n’ait pas ouvert les enveloppes dans lesquelles ses feuillets T4 ont été transmis à sa comptable (par l’entremise de sa mère) ni examiné les feuillets ou ses déclarations de revenus montre qu’il n’a pas pris des mesures raisonnables pour éviter l’omission de revenus dans ses déclarations de revenus.

 

[10]        Par conséquent, l’appel est rejeté.

 

 

Signé à Montréal (Québec), ce 5e jour de septembre 2013.

 

 

 

« Paul Bédard »

Juge Bédard

 

Traduction certifiée conforme

ce 3e jour d’octobre 2013.

 

Marie-Christine Gervais, traductrice

 


RÉFÉRENCE :                                 2013 CCI 274

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :   2012-3976(IT)I

 

INTITULÉ :                                      ANDREW STRIMAITIS c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE:                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 5 juillet 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L’honorable juge Paul Bédard

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 5 septembre 2013

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l’intimée :

Me Ricky Y. M. Tang

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                             Nom :                  

 

                            Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                          William F. Pentney

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

 

 

 

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