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Dossier : 2012-4948(EI)

ENTRE :

Peterborough Youth Services,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 8 juillet 2013, à Toronto (Ontario)

 

Devant : L’honorable juge Lucie Lamarre

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

Me David W. Chodikoff

Avocat de l’intimé :

Me Ricky Y.M. Tang

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel est accueilli, la décision que le ministre du Revenu national a rendue le 4 septembre 2012 est annulée et la décision de l’agent des décisions relatives au Régime de pensions du Canada et à l’assurance-emploi datée du 15 février 2012 est annulée, compte tenu du fait que Melissa McLaughlin n’exerçait pas un emploi assurable au sens de l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance-emploi lorsqu’elle a travaillé pour l’appelante au cours de la période allant du 1er janvier 2010 au 8 décembre 2011.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de septembre 2013.

 

 

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour de novembre 2013.

 

M.-C. Gervais


 

 

 

Dossier : 2012-4949(CPP)

ENTRE :

Peterborough Youth Services,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 8 juillet 2013, à Toronto (Ontario)

 

Devant : L’honorable juge Lucie Lamarre

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

Me David W. Chodikoff

Avocat de l’intimé :

Me Ricky Y.M. Tang

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel est accueilli, la décision que le ministre du Revenu national a rendue le 4 septembre 2012 est annulée et la décision de l’agent des décisions relatives au Régime de pensions du Canada et à l’assurance-emploi datée du 15 février 2012 est annulée, compte tenu du fait que Melissa McLaughlin n’exerçait pas un emploi ouvrant droit à pension au sens de l’alinéa 6(1)a) du Régime de pensions du Canada lorsqu’elle a travaillé pour l’appelante au cours de la période allant du 1er janvier 2010 au 8 décembre 2011.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de septembre 2013.

 

 

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour de novembre 2013.

 

M.-C. Gervais


 

 

 

Référence : 2013 CCI 291

Date : 20130919

Dossier : 2012-4948(EI)

ENTRE :

Peterborough Youth Services,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

et

 

 

Dossier : 2012-4949(CPP)

ENTRE :

Peterborough Youth Services,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

La juge Lamarre

 

 

[1]             Il s’agit d’un appel d’une décision rendue le 4 septembre 2012, dans laquelle le ministre du Revenu national (le « ministre ») a confirmé une décision de l’agent des décisions relatives au Régime de pensions du Canada (le « RPC ») et à l’assurance-emploi (l’« AE ») datée du 15 février 2012, selon laquelle Mme Melissa McLaughlin (« Melissa ») exerçait un emploi assurable et ouvrant droit à pension au sens de l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance-emploi (la « LAE ») et de l’alinéa 6(1)a) du Régime de pensions du Canada (le « Régime »), respectivement, lorsqu’elle a travaillé pour l’appelante au cours de la période allant du 1er janvier 2010 au 8 décembre 2011.

 

LES HYPOTHÈSES DE FAIT DU MINISTRE

 

[2]             Les faits sur lesquels le ministre se fonde sont énoncés au paragraphe 14 de chaque réponse à l’avis d’appel (la « réponse ») et sont reproduits ci-dessous :

 

[traduction

Hypothèses

14.              Pour déterminer si la travailleuse exerçait un emploi assurable [« ouvrant droit à pension » dans la réponse de l’appel concernant le RPC] lorsqu’elle a travaillé pour l’appelante pendant la période pertinente, le ministre s’est fondé sur les hypothèses de fait suivantes :

L’appelante

a)   l’appelante exploitait un organisme de services sociaux à but non lucratif;

b)   l’appelante fournissait des services de counselling et de soutien aux jeunes et à leurs familles dans le comté de Northumberland, qui comprenait les villes de Peterborough, de Cobourg et de Port Hope, en Ontario;

c)   l’appelante recevait des jeunes âgés de moins de dix-huit ans que leur acheminaient les Services de probation et qui devaient participer au programme, conformément à une ordonnance de la cour, après avoir été déclarés coupables d’une infraction;

d)   l’appelante avait conclu avec la Four Counties Community Support Team (ci‑après l’« équipe de soutien communautaire ») un contrat aux termes duquel elle devait fournir des services de soutien clinique dans le programme de soutien individuel;

e)   Michele Laviolette (coordinatrice du programme de l’équipe de soutien communautaire) et Jamie Emerson (directeur général de l’appelante) contrôlaient les activités quotidiennes de l’organisme de l’appelante;

La travailleuse

f)   au cours de la période pertinente, la travailleuse a fourni ses services conformément à des ententes écrites;

g)   la travailleuse a été engagée par l’appelante à titre de conseillère auprès des jeunes;

h)   la travailleuse accomplissait les tâches suivantes :

(i)   elle fournissait du soutien individuel;

(ii)  elle conseillait les jeunes;

(iii) elle conduisait les jeunes au tribunal et à leurs rendez-vous avec le médecin, l’agent de probation et l’école et les amenait également faire leurs courses;

(iv) elle aidait les jeunes à se trouver un emploi et un logement, à s’orienter dans la collectivité et à avoir un niveau d’instruction plus élevé ainsi qu’à obtenir les autres services de soutien dont ils avaient besoin;

i)    la travailleuse était titulaire d’un diplôme en criminologie et avait de l’expérience dans le domaine des services sociaux;

j)    l’appelante a exigé de la travailleuse qu’elle fasse l’objet d’une vérification de ses antécédents criminels;

k)   la travailleuse accomplissait la majorité de ses tâches dans le comté de Northumberland et au centre pour les jeunes de l’appelante;

l)    la travailleuse fournissait ses services sur une base continue à l’appelante depuis octobre 2009;

m)  la travailleuse ne travaille plus pour l’appelante;

n)   l’appelante avait recours à d’autres travailleurs qui fournissaient des services similaires;

Le contrôle

o)   la travailleuse travaillait à temps partiel;

p)   la travailleuse travaillait à différentes heures et pendant différents jours de la semaine;

q)   l’horaire de la travailleuse était souple et variait selon les besoins des clients;

r)    la travailleuse devait travailler vingt heures par mois pour chaque client;

s)   la travailleuse se voyait normalement confier trois jeunes par mois;

t)    l’appelante fournissait des feuilles de temps que la travailleuse devait remplir en y inscrivant ses heures de travail, ses activités et ses frais;

u)   l’appelante fournissait à la travailleuse un résumé des antécédents criminels et de la situation des clients, des risques qu’ils présentaient, ainsi que des buts et objectifs propres à chacun d’eux;

v)   la travailleuse recevait des directives des agents de probation des clients ainsi que de Michele Laviolette afin de bien comprendre les buts et les objectifs des clients et de veiller à ce que ses services soient coordonnés avec ceux que fournissaient d’autres membres des équipes de services aux clients;

w)  les rencontres initiales avec les clients se déroulaient en présence de la travailleuse et de sa superviseure, Michelle Laviolette, et avaient normalement lieu à un bureau de probation ou à un établissement correctionnel;

x)   la travailleuse devait se conformer aux exigences suivantes de l’appelante :

(i)   les normes de conduite;

(ii)  les politiques et les procédures;

(iii) les objectifs établis, qui étaient constamment examinés et réévalués;

(iv) les exigences en matière de présentation de rapports;

(v)  les plans de supervision;

(vi) l’entente de confidentialité;

y)   l’appelante donnait des instructions et des directives à la travailleuse;

z)   la travailleuse devait remettre à l’appelante des rapports mensuels faisant état du progrès accompli par chaque client en ce qui concerne la réalisation de ses buts et de ses objectifs;

aa) la travailleuse devait signaler à l’appelante :

(i)   une absence pendant un certain temps;

(ii)  les incidents qui se produisaient, par exemple lorsqu’un client faisait l’objet d’accusations criminelles ou avait des problèmes de santé;

(iii) les incidents graves, lesquels devaient être signalés immédiatement à l’appelante et à l’agent de probation et être consignés dans un formulaire d’incident grave;

bb) la travailleuse devait obtenir l’approbation de l’appelante avant de prendre certaines mesures, dont les suivantes :

(i)   dépenser des sommes d’argent pour le compte des clients pour des activités, des repas, des loisirs et des besoins personnels, etc.;

(ii)  effectuer des déplacements liés à des activités avec le client;

(iii) dépasser le plafond de 20 heures fixé pour un client donné;

cc) l’appelante déterminait les clients dont les dossiers seraient confiés à la travailleuse;

dd)                                          la travailleuse déterminait l’endroit où elle travaillerait avec le client et les moments auxquels elle le ferait, sauf pour les activités fixées à l’avance;

ee) la travailleuse devait être disponible à la demande de l’appelante ou de l’agent de probation;

ff)  la travailleuse était supervisée par Michele Laviolette;

gg) l’appelante fixait les priorités et les échéances que la travailleuse devait respecter;

hh) les deux parties avaient le droit de mettre fin aux services de la travailleuse en donnant un préavis d’une semaine;

La propriété des outils de travail et du matériel

ii)   l’appelante fournissait à la travailleuse, sans frais, un ordinateur et l’accès au système central pour l’établissement des rapports;

jj)   l’appelante fournissait à la travailleuse les modèles électroniques des feuilles de temps et des rapports;

kk) la travailleuse fournissait un ordinateur, un téléphone cellulaire, un véhicule et une assurance automobile;

ll)   les deux parties devaient assurer l’entretien et la réparation de leurs propres outils de travail et de leur propre matériel;

La sous-traitance et l’embauche d’assistants

mm) la travailleuse devait fournir elle-même ses services;

nn) la travailleuse n’a pas engagé d’assistants ou de remplaçants et ne pouvait pas le faire;

oo) l’appelante était responsable de l’embauche et du paiement des remplaçants;

La possibilité de profit et le risque de perte

pp) la travailleuse touchait 20 $ l’heure;

qq) l’appelante déterminait le taux de salaire de la travailleuse;

rr)  l’appelante déterminait la méthode de paiement des sommes destinées à la travailleuse et la fréquence des paiements;

ss)  la travailleuse était payée une fois par mois;

tt)  l’appelante payait la travailleuse par chèque;

uu) les chèques étaient libellés au nom de la travailleuse;

vv) la travailleuse n’était pas tenue de présenter des factures pour être payée;

ww) la travailleuse a été payée pour le temps qu’elle a consacré à la lecture du manuel de la politique et des procédures de l’appelante;

xx) la travailleuse n’a pas reçu d’avantage, de prime, de paie de vacances ni de congé payé;

yy) l’appelante fixait le nombre maximal d’heures que la travailleuse pouvait consacrer à chaque client, et la travailleuse ne pouvait dépasser ce plafond à moins de recevoir l’autorisation de consacrer des heures supplémentaires à un client;

zz) l’appelante a remboursé à la travailleuse les frais que celle-ci a supportés pour faire l’objet d’une vérification de ses antécédents criminels pour les dossiers de l’appelante, ainsi que les frais de stationnement, de repas et de loisirs qu’elle a supportés lors de ses sorties avec des clients;

aaa)  l’appelante a versé à la travailleuse une indemnité de déplacement de 0,30 $ par kilomètre;

bbb)  l’appelante devait trancher en dernier ressort les plaintes des clients qui découlaient du rendement de la travailleuse;

ccc)  la travailleuse a dépensé très peu d’argent pour l’utilisation de son véhicule et de son ordinateur dans l’exercice de ses fonctions;

L’intention

ddd) au cours de la période pertinente, la travailleuse a reçu des feuillets T4 (revenu d’emploi) du Cornerstone Family Violence Centre et du bureau des Services d’emploi de Kingston;

eee)  la travailleuse n’a pas déclaré de revenu d’entreprise ni déduit de pertes d’entreprise dans ses déclarations de revenus personnelles pour les années d’imposition 2009, 2010 et 2011;

fff)   la travailleuse a déclaré le revenu qu’elle a touché de l’appelante à la ligne des autres revenus d’emploi dans ses déclarations de revenus pour 2009 et 2010;

ggg)  la travailleuse n’avait pas ses propres clients; les clients étaient ceux de l’appelante;

hhh)  la travailleuse ne gérait pas son propre personnel;

iii)     la travailleuse n’avait pas de compte bancaire commercial;

jjj)     la travailleuse n’avait pas de nom d’entreprise ou nom commercial enregistré;

kkk)  au cours de la période pertinente, la travailleuse n’avait pas de numéro d’entreprise ni de numéro de TPS/TVH auprès de l’Agence du revenu du Canada;

lll)     la travailleuse n’a facturé aucun montant à l’appelante au titre de la TPS/TVH.

 

[3]             L’avocat de l’appelante n’a pas passé en revue chacune de ces hypothèses afin de les admettre ou de les réfuter; il a plutôt présenté des éléments de preuve, décrits ci-dessous, qui ont démoli certaines d’entre elles.

 

 

LA PREUVE PRÉSENTÉE À LA COUR

 

[4]             L’appelante a appelé à témoigner M. James Emerson, le directeur général de l’appelante, ainsi que Mme Michele Laviolette, la coordonnatrice du programme de justice pour les jeunes de l’appelante. De plus, Melissa a été assignée à témoigner pour le compte de l’appelante, mais elle avait également été assignée à témoigner pour l’intimé. J’ai donc accordé une certaine marge de manœuvre à l’avocat de l’appelante pour la formulation de ses questions au cours de l’interrogatoire en chef de Melissa.

 

[5]             M. Emerson, qui est titulaire d’une maîtrise en psychologie clinique, a expliqué que l’appelante est un organisme à but non lucratif qui est financé en majeure partie par le ministère des Services à l’enfance et à la jeunesse et, dans une moindre mesure, à l’aide d’activités de financement et des fonds reçus de Centraide. L’appelante coordonne deux programmes : un programme de santé mentale à participation volontaire pour les enfants et un programme de justice pour les jeunes à participation obligatoire pour les dossiers qu’elle reçoit des tribunaux et des agents de probation. L’appelante compte 12 employés à temps plein (notamment Mme Laviolette et lui-même) et trois employés à temps partiel. L’appelante fait également appel à des travailleurs de l’extérieur, principalement pour les dossiers provenant des Services de probation. Ces travailleurs sont des personnes comme Melissa, cette dernière ayant été engagée dans le contexte du programme de justice pour les jeunes à participation obligatoire. Melissa a obtenu un diplôme collégial en administration juridique, puis un baccalauréat spécialisé en criminologie. L’appelante ne considérait pas les travailleurs comme Melissa comme des employés.

 

[6]             M. Emerson a expliqué que les employés recevaient une formation en counselling clinique et qu’ils utilisaient des techniques de psychothérapie très précises. Ils travaillent avec les enfants au cours de séances de psychothérapie hebdomadaires. Tous les employés travaillent depuis le bureau de l’appelante situé à Peterborough. Ils ont un bureau, un ordinateur et un téléphone, en plus d’avoir accès aux services de secrétariat et de réception, au système d’information sur les clients, à deux véhicules appartenant à l’appelante, à de l’espace pour les activités de loisir et à du soutien psychologique. Ils travaillent sous la supervision de M. Emerson, qui communique régulièrement avec eux. Toutes les deux semaines, les employés présentent leurs dossiers à M. Emerson en lui donnant un compte rendu de l’évaluation qu’ils en font, des activités qu’ils poursuivent et des mesures qu’ils comptent prendre pour faire évoluer les dossiers en vue de la fermeture de chacun d’eux. De plus, ils se présentent devant une équipe clinique, dont M. Emerson fait partie, afin de lui soumettre différentes questions qu’ils se posent.

 

[7]             En revanche, les personnes qui, comme Melissa, travaillent à contrat pour l’appelante n’ont pas accès à un ordinateur, à un téléphone, au personnel de bureau, aux deux véhicules, à la formation et au perfectionnement ou encore à des consultations psychologiques.

 

[8]             Mme Laviolette, qui relève de M. Emerson, est la coordonnatrice du programme de l’équipe de soutien communautaire de l’appelante. Elle s’occupe de la mise en œuvre du plan d’intervention établi par les Services de probation à l’intention des jeunes qui sont âgés de moins de dix-huit ans, qui ont été déclarés coupables d’une infraction et auxquels la cour a ordonné de participer à un programme de cette nature. L’appelante fournit ce service dans quatre comtés, dont celui de Northumberland, où Melissa travaillait.

 

[9]             C’est Mme Laviolette qui a engagé Melissa et qui lui a fait signer les deux ententes de services pour les périodes allant d’octobre 2009 à octobre 2010 et d’octobre 2011 à octobre 2012 (pièce A-1, onglets 3 et 4), lesquelles ententes ont été produites en preuve. En signant ces ententes, Melissa acceptait de fournir des services de soutien clinique suivant le programme de soutien individuel à la demande de l’agent de probation ou de la coordonnatrice du programme de l’équipe de soutien communautaire (Mme Laviolette), selon les besoins. Mme Laviolette a accepté de fournir un rapport écrit mensuel dans lequel elle devait consigner le temps passé avec le client (le jeune qui recevait les services), résumer les activités et décrire les progrès accomplis par rapport aux objectifs fixés. Elle avait droit à une rémunération de 20 $ l’heure pour un total de 20 heures par mois passées avec le client. S’il lui apparaissait nécessaire de dépasser ce nombre d’heures pour un jeune, elle devait préalablement obtenir l’approbation de Mme Laviolette. Melissa touchait également une indemnité de déplacement de 0,30 $ par kilomètre. Mme Laviolette a expliqué à l’audience que Melissa avait aussi une allocation de dépenses de 25 $ par mois, soit le montant maximal dont elle pouvait obtenir le remboursement sur présentation de factures. Si Melissa voulait dépenser une somme d’argent plus élevée pour le jeune, elle devait d’abord obtenir l’autorisation de Mme Laviolette. Mme Laviolette a précisé que cette autorisation était assujettie à l’approbation du commis comptable et à la disponibilité des fonds. Il est mentionné dans les ententes que Melissa n’était pas considérée comme une employée et que, par conséquent, aucun montant ne serait retenu au titre de l’impôt sur le revenu, de l’assurance-emploi ou du RPC. De plus, Melissa n’avait droit à aucun avantage, sauf pour ses frais de déplacement et d’autres frais approuvés à l’avance. Le contrat pouvait être résilié moyennant un préavis d’une semaine par l’une ou l’autre des parties. De fait, Melissa a mis fin au deuxième contrat cinq mois après l’entrée en vigueur de celui-ci, parce qu’elle a déménagé à Gananoque, qui se trouvait à l’extérieur des comtés dont s’occupait l’appelante.

 

[10]        Melissa devait aussi fournir sa propre assurance-responsabilité professionnelle, veiller à ce que son véhicule soit en état de fonctionnement et s’assurer qu’elle disposait d’une assurance-responsabilité suffisante pour couvrir le transport des clients.

 

[11]        Mme Laviolette a expliqué que, lorsqu’elle recevait une demande de l’agent de probation, elle étudiait le formulaire de renvoi, évaluait les risques et les besoins en se servant, notamment, de l’évaluation des risques et de l’évaluation psychologique fournies par l’agent de probation, et déterminait la personne la plus apte à s’occuper du dossier, eu égard à l’emplacement du jeune ayant besoin de services. Elle téléphonait ensuite à l’entrepreneur qu’elle avait choisi pour savoir s’il était intéressé ou disponible. Mme Laviolette a mentionné que les entrepreneurs comme Melissa servaient de modèles ou de mentors pour les jeunes et qu’ils avaient pour tâche de mettre en place une relation thérapeutique avec le jeune contrevenant. Melissa a expliqué que son travail consistait à guider les jeunes en tentant de les aider à se prévaloir des services offerts dans la collectivité. Plus précisément, elle s’efforçait d’atteindre les buts énoncés dans le plan de traitement établi dans l’ordonnance de probation. Tout commentaire de l’appelante au sujet de Melissa était fondé sur l’ordonnance de probation. Si le client (le jeune en difficulté) n’était pas à l’aise avec l’entrepreneur chargé de s’occuper de lui, Mme Laviolette pouvait confier le dossier à un autre entrepreneur, mais cela ne s’est pas produit, étant donné que le service était offert aux jeunes en probation en vue de faciliter leur réadaptation et que les jeunes n’avaient pas vraiment le choix et devaient se conformer à l’ordonnance de la cour. Mme Laviolette a précisé que, une fois que l’entrepreneur avait accepté de travailler avec un client, il communiquait, à son gré, avec elle ou avec l’agent de probation. Selon Mme Laviolette, aucune règle n’avait été fixée à cet égard. Aucune formation n’était offerte, comme Melissa l’a reconnu. De l’avis de Melissa, elle a été engagée par l’appelante en raison de ses études et de ses compétences existantes.

 

[12]        Les travailleurs à contrat déterminaient leur propre horaire et n’étaient pas tenus de travailler 20 heures par mois avec un client. Ils se fondaient sur le plan d’intervention élaboré par l’agent de probation, mais disposaient de toute la latitude qu’ils voulaient quant à la façon d’accomplir leur travail de soutien. Au cours de son témoignage, Melissa a expliqué qu’elle rencontrait les jeunes n’importe où dans la collectivité (café, école, centre d’hébergement pour jeunes). Elle a confirmé qu’elle déterminait elle-même le calendrier de ses activités avec le jeune concerné en collaboration avec celui-ci.

 

[13]        Par ailleurs, Mme Laviolette a précisé que Melissa accomplissait son travail dans le comté de Northumberland (Melissa a affirmé quant à elle qu’elle travaillait à Peterborough, qui se trouvait dans le comté de Peterborough, et à Cobourg, qui se trouvait dans le comté de Northumberland) et n’était pas tenue de se présenter à l’établissement de l’appelante à Peterborough. Mme Laviolette a rencontré Melissa elle-même une première fois lorsqu’elle l’a engagée, puis deux autres fois par la suite. Elle lui parlait au téléphone peut-être une ou deux fois par mois (Melissa ne se souvenait pas du nombre de fois où elle avait rencontré Mme Laviolette ou lui avait parlé). Mme Laviolette a expliqué que, lorsqu’elle avait fait signer l’entente de services par Melissa, elle lui avait expliqué verbalement les principaux éléments de l’entente, comme le taux de salaire (non négociable), le nombre maximal d’heures pour lesquelles elle serait rémunérée, l’allocation de dépenses, l’indemnité de déplacement et, enfin, le fait qu’elle n’était pas engagée à titre d’employée et qu’aucun montant ne serait retenu sur son salaire au titre de l’impôt, de l’AE et du RPC. Mme Laviolette a ajouté que Melissa ne lui avait pas demandé quelle était la différence entre un employé et un entrepreneur.

 

[14]        Mme Laviolette a souligné qu’il lui arrivait parfois d’assister à la deuxième rencontre avec l’agent de probation, le travailleur et le jeune. D’après le souvenir de Melissa, la rencontre initiale avait lieu dans les locaux des Services de probation, habituellement en présence de l’agent de probation, de Michele Laviolette et du jeune concerné.

 

[15]        Selon Mme Laviolette, Melissa a travaillé avec quatre jeunes contrevenants au total, ce que Melissa a confirmé. Mme Laviolette a ajouté que, lorsque le jeune présentait des risques élevés, l’agent de probation intervenait davantage et rencontrait plus souvent le travailleur contractuel. L’agent de probation était la personne responsable du dossier. Mme Laviolette rencontrait rarement Melissa sans l’agent de probation. Même si Melissa informait l’agent de probation des progrès de son client, elle pouvait téléphoner à Mme Laviolette pour lui en parler sur une base informelle. Melissa a précisé qu’elle recevait de Mme Laviolette elle-même ou de l’agent de probation les directives concernant chaque jeune.

 

[16]        Les travailleurs contractuels devaient facturer le nombre d’heures travaillées et ils remplissaient des feuilles de temps afin d’être payés. Les factures de Melissa ont été produites sous la cote R-1, onglet 5. Il appert de ces factures qu’il lui arrivait parfois de travailler moins de 20 heures par mois, et parfois davantage. Le nombre d’heures travaillées variait d’un mois à l’autre. À l’instar de tous les autres travailleurs, Melissa déposait ses rapports mensuels par l’entremise de Mme Laviolette, qui les approuvait et les paraphait avant d’envoyer les factures au commis comptable afin que Melissa puisse être payée.

 

[17]        Sur le formulaire intitulé [traduction] « Questionnaire à l’intention du payeur » (pièce A-1, onglet 1), Mme Laviolette a répondu par la négative à la question de savoir si le travailleur était autorisé à recourir à un sous-traitant pour l’exécution de son travail, mais elle a dit à l’audience que cette situation ne s’était jamais présentée. Mme Laviolette a également mentionné sur le même formulaire que le travailleur n’était pas autorisé à envoyer une autre personne pour accomplir ses tâches à sa place, mais elle a précisé au cours de son témoignage que, si Melissa ne pouvait se rendre à un rendez-vous, elle en changeait simplement la date et l’heure.

 

[18]        Mme Laviolette a expliqué qu’en cas de plainte de l’agent de probation au sujet d’un travailleur, elle téléphonait le plus souvent à celui-ci afin de lui demander de régler le problème et, au besoin, fixait parfois une rencontre avec les parties concernées. Melissa a mentionné que, si une plainte avait été déposée contre elle au cours d’un mandat qui lui avait été confié, elle aurait parlé à Mme Laviolette afin de régler la plainte en question. Cependant, elle a reconnu qu’elle ignorait la procédure à suivre et que, en fait, elle n’avait jamais fait l’objet d’une plainte.

 

[19]        Melissa a reconnu qu’elle avait également travaillé pour une autre organisation (Northumberland Services for Women) sur une base contractuelle pendant quelque temps au cours de son deuxième contrat avec l’appelante. Lorsqu’elle avait signé son contrat avec celle-ci, elle avait compris qu’elle n’était pas une employée permanente, qu’elle était engagée sur une base contractuelle et qu’aucun montant ne serait retenu sur sa paie. Cependant, elle ne se considérait pas comme une entrepreneure indépendante, parce qu’elle n’exploitait pas sa propre entreprise en qualité de consultante. Elle croyait qu’elle était une employée. Elle savait qu’elle devait fournir son propre véhicule automobile et payer son essence; cependant, même si elle avait sa propre assurance, elle n’avait pas obtenu la protection exigée par son contrat. Elle avait lu le contrat très rapidement et ne se souvenait pas que Mme Laviolette ait expressément porté à son attention la question de l’assurance. Elle avait fourni son propre ordinateur, et l’appelante ne lui en avait prêté aucun.

 

[20]        Melissa a ajouté que, selon ce qu’elle avait compris, Mme Laviolette était sa superviseure, car c’était elle qui déterminait le nombre d’heures de travail à consacrer à chaque jeune. Elle disposait de 20 heures par mois pour travailler avec chaque jeune et, en cas de situation de crise, elle faisait appel aux connaissances spécialisées de Mme Laviolette. Celle‑ci devait également approuver à l’avance les achats plus importants destinés aux jeunes.

 

[21]        Melissa a ajouté que, si elle avait besoin de soutien, elle communiquait avec Mme Laviolette ou avec l’agent de probation, mais qu’elle consultait principalement Mme Laviolette pour avoir des conseils, selon le jeune avec lequel elle travaillait. Ainsi, si elle devait conduire un jeune à l’extérieur d’une collectivité donnée et que l’ordonnance de probation restreignait les déplacements, Melissa s’adressait d’abord à Mme Laviolette. Cependant, elle n’a pu dire combien de fois elle avait communiqué avec celle-ci.

 

[22]        Lorsqu’elle voulait s’absenter pour une longue période (une à trois semaines) alors qu’elle était en contact avec un jeune toutes les semaines, Melissa informait assurément Mme Laviolette. De plus, Melissa a précisé que ce n’était pas elle qui déterminait le nombre d’heures au cours desquelles elle devait travailler avec un jeune. Elle ne se rappelait pas avoir refusé de s’occuper d’un jeune dont le dossier lui avait été confié.

 

 

Les arguments de l’appelante

 

[23]        L’appelante a résumé brièvement l’évolution de la jurisprudence et a commencé son analyse de la question de savoir si Melissa travaillait aux termes d’un contrat de louage de services (en qualité d’employée) ou d’un contrat d’entreprise (en qualité d’entrepreneure indépendante) en citant le critère à quatre volets énoncé dans l’arrêt Wiebe Door Services Ltd. c. M.R.N., [1986] 3 C.F. 553, [1986] 2 C.T.C. 200. Bien que la liste ne soit pas exhaustive, les facteurs suivants sont les quatre facteurs les plus souvent mentionnés dans la jurisprudence : a) le degré ou l’absence de contrôle exercé par le prétendu employeur; b) la propriété des instruments de travail; c) les chances de bénéfice et les risques de perte et d) l’intégration des travaux effectués par le prétendu employé dans l’entreprise de l’employeur présumé (Wiebe Door, à la page 556, C.F.). Le critère général à quatre volets consiste à « examiner l’ensemble des divers éléments qui composent la relation entre les parties » (Wiebe Door, à la page 560, C.F.).

 

[24]        L’appelante a souligné que l’organisme comptait deux types de travailleurs. D’une part, il y avait des travailleurs qui étaient clairement des employés qui travaillaient dans ses locaux, avaient leurs propres bureaux et leurs propres ordinateurs à cet endroit, avaient accès aux véhicules de l’appelante et étaient invités aux réunions et aux activités du personnel. D’autre part, il y avait des travailleurs sur le terrain, comme Melissa, qui travaillaient pour l’appelante sur une base contractuelle.

 

[25]        Analysant le facteur du contrôle du critère, l’appelante a souligné que, dans la présente affaire, il était question d’une relation quadripartite entre le travailleur (en l’occurrence, Melissa), le jeune en difficulté, l’agent de probation et Mme Laviolette. Cette dernière confiait le dossier du jeune à Melissa, mais c’est celle-ci qui décidait comment aider le jeune à l’intérieur des paramètres fixés par l’agent de probation. Il s’agissait d’une relation individuelle entre le mentor (Melissa) et le jeune en difficulté. Mme Laviolette servait simplement d’intermédiaire entre le travailleur et l’agent de probation, qui détenait des pouvoirs en vertu de l’ordonnance judiciaire et avait reçu des directives de la cour quant aux mesures à prendre. Le fait que l’appelante était un organisme à but non lucratif qui venait en aide à une clientèle nombreuse – dans le but global de permettre aux jeunes en difficulté de réintégrer la société – permet de comprendre pourquoi le nombre d’heures que le travailleur pouvait consacrer à chaque jeune était limité.

 

[26]        En ce qui concerne la propriété des instruments de travail, l’appelante a fait valoir qu’aucune question ne se posait à ce sujet, parce qu’il n’y avait pas vraiment d’instruments de travail. En fait, Melissa utilisait son propre véhicule automobile, qu’elle assurait pour ses propres besoins, et elle touchait une indemnité de déplacement. Selon le contrat, elle devait souscrire une assurance-responsabilité supplémentaire, mais elle ne l’a pas fait, parce qu’elle n’avait pas lu cette clause du contrat.

 

[27]        Quant aux chances de bénéfice et aux risques de perte, l’appelante a souligné que, dans le contexte d’un organisme à but non lucratif, ces éléments ne sont pas vraiment pertinents, car toute l’organisation, y compris les personnes travaillant pour celle-ci, est axée sur la prestation de services sociaux et non sur la réalisation de bénéfices. En fait, 90 pour cent des fonds de l’appelante proviennent du gouvernement et le reste, d’activités de financement et de Centraide.

 

[28]        Enfin, selon l’appelante, il est possible d’examiner le facteur de l’intégration en se demandant si le travail de Melissa, bien qu’il ait été fait pour l’organisation, n’était pas intégré dans l’organisation et était seulement accessoire à celle-ci (Wiebe Door, à la page 560, C.F.). De l’avis de l’appelante, le simple fait que Melissa a quitté son travail sept mois avant la fin du deuxième contrat en donnant un préavis d’une seule semaine, sans que cela pose problème, montre que le travail qu’elle accomplissait n’était pas essentiel à l’organisation et ne faisait pas partie intégrante de celle-ci.

 

[29]        L’appelante a terminé son analyse du critère à quatre volets en citant les observations suivantes que la Cour suprême du Canada a formulées dans l’arrêt 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., [2001] 2 R.C.S. 983, [2001] 4 C.T.C. 139, au paragraphe 48 : « ces facteurs [...] ne sont pas exhaustifs et il n’y a pas de manière préétablie de les appliquer. Leur importance relative respective dépend des circonstances et des faits particuliers de l’affaire. »

 

[30]        L’appelante a ensuite cité l’arrêt que la Cour d’appel fédérale a récemment rendu dans l’affaire 392644 Ontario Inc., S/N Connor Homes c. Canada (Ministre du Revenu national), [2013] A.C.F. n° 327 (QL), 2013 CAF 85, ainsi que celui qu’elle a rendu dans l’arrêt Wolf c. Canada, 2002 CAF 96, [2002] 4 C.F. 396, [2002] A.C.F. n375 (QL), pour faire valoir qu’il est maintenant nécessaire de déterminer également quelle était essentiellement l’intention des parties. De plus, l’appelante a cité l’arrêt TBT Personnel Services Inc. c. Canada, [2011] A.C.F. n° 1340 (QL), 2011 CAF 256, au paragraphe 35, où la Cour d’appel fédérale souligne ce qui suit : « [l]es facteurs énoncés dans l’arrêt Wiebe Door doivent également être examinés afin de déterminer si l’intention de parties contractantes qui semble découler des clauses d’intention se concilie avec les autres modalités du contrat et avec la relation contractuelle qui existait véritablement entre les parties ». Dans la présente affaire, l’appelante soutient que, bien qu’elle ait manifestement eu l’intention de conclure un contrat d’entreprise avec Melissa, celle-ci désirait faire valoir qu’elle n’était rien de plus qu’une employée. Cependant, l’appelante estime que, compte tenu du niveau d’instruction de Mélissa et du fait qu’elle pouvait déterminer son propre horaire, qu’elle devait simplement aviser l’appelante si elle désirait s’absenter, qu’elle ne recevait aucun avantage, qu’elle n’avait pas de bureau et qu’elle devait fournir son propre véhicule automobile, ordinateur et téléphone, Melissa connaissait la véritable nature de la relation qu’elle avait avec l’appelante et savait qu’elle avait été engagée en qualité d’entrepreneure indépendante.

 

[31]        Enfin, l’appelante a fait un parallèle entre la présente affaire et celle dont le juge Rip, alors juge de la Cour canadienne de l’impôt, a été saisi dans l’affaire Family Services Perth-Huron c. Canada (Ministre du Revenu national), [2000] A.C.I. no 2 (QL), 2000 CarswellNat 3714, qui concernait une œuvre de bienfaisance sans but lucratif. Dans cette affaire-là, l’agence offrait une gamme complète de services sociaux sur une base volontaire, et le juge Rip a conclu que le prestataire de services spéciaux qu’elle avait engagé, qui devait également préparer des rapports d’étape au sujet de ses clients et rencontrer le coordonnateur dans l’exercice de ses fonctions, ne relevait pas du contrôle de l’agence. Après avoir analysé tous les autres facteurs, le juge Rip a conclu que le prestataire de services n’était pas un employé.

 

[32]        L’appelante conclut que la réalité de la relation entre les parties, déterminée à l’aide des faits objectifs de l’espèce, donne à penser que la travailleuse était une entrepreneure indépendante.

 

Les arguments de l’intimé

 

[33]        L’intimé a cité l’arrêt Connor Homes et mentionné que cette affaire concernait également des personnes travaillant auprès des jeunes en difficulté. L’intimé a affirmé qu’il était nécessaire d’examiner l’intention des parties, mais que cette intention devrait être prise en compte uniquement s’il y avait intention commune. Aux yeux de l’appelante, il est clair que les travailleurs contractuels étaient des entrepreneurs indépendants. Dans le cas de Melissa, c’était son premier travail, étant donné qu’elle venait de terminer ses études. L’appelante lui a offert un contrat d’entreprise, mais elle a dit qu’elle ignorait la différence entre un employé et un entrepreneur indépendant. Cependant, il est indéniable qu’elle n’a jamais eu l’intention d’exploiter sa propre entreprise. Elle a compris qu’elle était une [traduction] « employée contractuelle », comme elle l’a mentionné dans sa réponse à une question du questionnaire que lui a remis l’ARC (pièce R-1, onglet 2, page 7 de 8), c’est-à-dire qu’elle n’était pas une employée à temps plein. Comme la Cour d’appel fédérale l’a souligné dans le l’arrêt Connor Homes, précité, aux paragraphes 33 à 37, il ne suffit pas d’énoncer dans le contrat que le travailleur fournit les services en tant qu’entrepreneur indépendant pour que soit effectivement le cas. L’intention doit traduire la réalité objective de la relation.

 

[34]        Examinant les différents critères élaborés dans la jurisprudence que l’appelante a invoqués et qui ont été résumés plus haut, l’intimé a fait valoir, en ce qui a trait au contrôle, que ce facteur devrait être considéré comme un élément neutre en l’espèce. L’intimé a comparé la situation en l’espèce à celle de l’arrêt TBT Personnel Services, précité, où la Cour d’appel fédérale a mentionné, au paragraphe 35, que les camionneurs étaient des professionnels hautement qualifiés qui nécessitaient probablement peu de supervision, qu’ils aient été des employés ou des travailleurs autonomes. Dans la présente affaire, Melissa venait d’obtenir un baccalauréat spécialisé en criminologie, et l’appelante lui faisait confiance pour qu’elle accomplisse le travail pour lequel elle était rémunérée. Melissa recevait des conseils et du soutien de Mme Laviolette et devait présenter des rapports mensuels sur l’évolution du jeune dont le dossier lui était confié. De plus, la preuve ne permet pas de savoir clairement combien de fois par mois elles communiquaient entre elles. Melissa était informée des buts et des objectifs à atteindre par l’appelante ou par les Services de probation. Cette situation est très semblable à celle de l’arrêt Connor Homes, où des directives étaient données aux travailleurs.

 

[35]        En ce qui concerne les instruments de travail, l’intimé a convenu avec l’appelante qu’aucun instrument de travail n’était vraiment nécessaire pour le travail de Melissa. Comme c’était le cas dans l’arrêt Connor Homes, la travailleuse en l’espèce fournissait son propre véhicule automobile, qu’elle assurait elle-même, et avait droit à une indemnité de déplacement. De plus, comme l’a souligné la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Connor Homes (au paragraphe 49), ce n’est pas parce que le travailleur fournit son propre téléphone et son propre ordinateur, ce que de nombreux employés doivent faire aujourd’hui, qu’il est un entrepreneur indépendant.

 

[36]        Selon l’intimé, Melissa n’avait aucune possibilité de réaliser des bénéfices. Tout comme dans l’arrêt Connor Homes, l’appelante en l’espèce limitait la possibilité de gains. Un taux horaire était fixé, de même qu’un nombre maximal d’heures à consacrer à chaque jeune. Melissa devait obtenir l’approbation de l’appelante pour travailler un plus grand nombre d’heures. Au paragraphe 12 de l’arrêt Connor Homes, la Cour d’appel fédérale a souligné que les travailleuses n’avaient pas la possibilité d’accroître leur revenu en réduisant leurs frais ou en produisant plus. L’intimé fait valoir que la situation est la même en l’espèce.

 

[37]        Quant au risque de perte, l’intimé a cité le paragraphe 49 de l’arrêt Connor Homes, où la Cour d’appel fédérale a souligné que [traduction] « [l]es intéressées n’avaient pas à prendre de risques financiers, pas plus qu’à contracter d’emprunts ou à faire d’investissements, que ce soit pour des immobilisations, l’achat d’outillage spécial ou la constitution d’un capital d’exploitation ». Dans la même veine, Melissa n’était exposée à aucun risque de perte. De plus, Mme Laviolette a expliqué que, si Melissa avait fait l’objet d’une plainte, Mme Laviolette aurait été tenue de téléphoner à toutes les personnes concernées. C’était elle qui aurait également eu pour tâche de s’assurer que toutes les difficultés étaient aplanies.

 

[38]        Enfin, en ce qui a trait au critère de l’intégration, Melissa a affirmé au cours de son témoignage qu’elle n’avait pas exploité d’entreprise de son propre compte et qu’elle n’avait jamais eu l’intention de le faire. L’intimé a invoqué le paragraphe 51 de l’arrêt Connor Homes pour conclure que [traduction]  « la réalité de cet arrangement où les tâches [de la travailleuse] étaient dictées par [les objectifs fixés par les Services de probation ou l’appelante] et exécutées sous la surveillance de [Mme Laviolette], où [l’appelante fixait] les taux de rémunération et les horaires de travail, et où [la travailleuse n’avait] pas à prendre de risques ni à faire d’investissements importants, ne suffit pas à définir le rapport juridique liant les parties comme une relation de client à entrepreneur indépendant ».

 

 

La réplique de l’appelante

 

[39]        L’appelante a demandé à la Cour canadienne de l’impôt de faire preuve de prudence au moment d’appliquer l’arrêt Connor Homes à la présente affaire, étant donné que la situation dont la Cour d’appel fédérale était saisie concernait une entreprise et non un organisme à but non lucratif. De plus, de l’avis de l’appelante, les faits dans l’arrêt Connor Homes sont fondamentalement différents de ceux de la présente affaire, ce qui devrait être pris en compte dans l’examen de l’analyse factuelle menée dans cet arrêt. Ainsi, dans l’affaire Connor Homes, une travailleuse était liée par une clause de non‑concurrence, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Melissa a plutôt travaillé ailleurs pendant une certaine période alors qu’elle travaillait pour l’appelante. De plus, dans l’affaire Connor Homes, une travailleuse devait donner un préavis écrit de soixante jours pour mettre fin à l’entente. Dans la présente affaire, l’exigence se limitait à un préavis d’une semaine, et il appert de la preuve que Melissa est partie pendant la première la moitié de la période contractuelle en envoyant un simple avis écrit.

 

 

Analyse

 

[40]        Dans l’arrêt Connor Homes, qui a été cité abondamment au cours de plaidoiries, la Cour d’appel fédérale a résumé l’état du droit concernant la question de savoir si le statut juridique d’un travailleur est celui d’un employé ou d’un entrepreneur indépendant. Il existe une méthode en deux étapes à suivre pour tenter de répondre à la question centrale énoncée dans les arrêts Sagaz et Wiebe Door, précités, soit de savoir si la personne fournit ou non les services en tant que personne travaillant à son compte. La première étape consiste à établir l’intention subjective de chacune des parties à la relation, tandis que la seconde consiste à établir si la réalité objective confirme l’intention subjective des parties. Au cours de cette seconde étape, l’intention des parties ainsi que les modalités du contrat peuvent être prises en compte. Les facteurs à examiner varieront selon les circonstances. Le degré de contrôle exercé sur les activités du travailleur ainsi que les points de savoir si celui-ci fournit lui-même son outillage, engage ses assistants, gère et assume des risques financiers et peut escompter un profit de l’exécution de ses tâches sont des facteurs précis qui ont été commentés dans les arrêts Wiebe Door et Sagaz et qui sont habituellement pertinents (Connor Homes, aux paragraphes 38 à 41). D’autres facteurs, comme le manque de sécurité d’emploi et d’avantages sociaux, la liberté de choix et la mobilité, peuvent également être pris en compte (Wolf, précité, au paragraphe 120; Lang c. Ministre du Revenu national, 2007 CCI 547, 2007 DTC 1754, 2007 CarswellNat 2998, aux paragraphes 24 et 38).

 

[41]        Dans la présente affaire, eu égard à la façon dont Melissa a témoigné et dont elle s’est comportée au cours de l’audience, j’ai l’impression qu’elle avait sans doute compris qu’elle avait été engagée sur une base contractuelle pour venir en aide aux jeunes en difficulté à l’intérieur des paramètres mentionnés par l’agent de probation, conformément à l’ordonnance de la cour. Elle avait compris qu’elle serait payée au taux de 20 $ l’heure pour travailler un nombre maximal de 20 heures par mois avec un jeune que lui confiait Mme Laviolette. Elle avait compris qu’elle était tenue de facturer le nombre exact d’heures qu’elle consacrait au jeune et qu’elle devait obtenir l’approbation de Mme Laviolette afin de dépasser 20 heures de travail avec le client. Elle savait que ses frais lui seraient remboursés. Les factures déposées sous la cote R‑1, onglet 5, montrent que les heures de travail de Melissa ont varié d’un mois à l’autre. Melissa savait aussi qu’elle n’avait droit à aucun avantage (à l’exception de l’indemnité de déplacement et du remboursement de certains frais) et qu’aucune retenue à la source ne serait effectuée. Pourtant, dans ses déclarations de revenus, elle a déclaré le revenu que l’appelante lui avait versé en tant qu’autres revenus d’emploi. Elle a dit qu’elle ignorait la différence entre un employé et un entrepreneur indépendant. Elle venait de terminer ses études universitaires, elle avait été attirée par l’emploi et n’avait pas discuté des conditions du contrat. L’appelante, quant à elle, avait manifestement l’intention de ne pas la considérer comme une employée. Dans ces circonstances, il est difficile de dire qu’il y avait une entente mutuelle entre les parties ou une intention commune au sujet de leur relation. En fait, j’estime que Melissa n’a pas vraiment compris les subtilités de l’entente de services qu’elle a signée et qu’elle n’y a pas vraiment prêté attention.

 

[42]        En conséquence, j’analyserai les différents facteurs qui ont été élaborés dans la jurisprudence et que les parties ont mentionnés dans leurs arguments résumés plus haut pour savoir si Melissa était une employée ou une entrepreneure indépendante. L’intimé a admis que le degré de contrôle devrait être considéré comme un facteur neutre, étant donné que Melissa travaillait selon son propre horaire, qu’elle ne communiquait pas régulièrement avec Mme Laviolette et qu’elle s’occupait des jeunes en fonction des compétences qu’elle possédait, bien qu’elle ait dû se conformer aux règles énoncées dans l’ordonnance de la cour au sujet du jeune concerné. Elle n’était pas tenue d’exécuter des tâches administratives, ni d’assister aux rencontres du personnel afin de discuter du mode de travail qui lui était imposé. Elle ne travaillait pas dans les locaux de l’appelante, contrairement aux employés de celle-ci.

 

[43]        L’intimé a également admis que le facteur de la propriété des instruments de travail n’était pas important en l’espèce puisque, à l’exception de son téléphone cellulaire et de son ordinateur, la travailleuse ne fournissait en fait que son véhicule automobile, pour l’utilisation duquel elle avait droit à une indemnité de déplacement.

 

[44]        Quant aux chances de bénéfice et aux risques de perte, l’intimé a soutenu qu’il n’y en avait pas pour Melissa, tandis que l’appelante a fait valoir qu’il était difficile d’appliquer ce critère dans le contexte d’un organisme à but non lucratif. Melissa était rémunérée en fonction d’un taux horaire fixe pour chaque heure qu’elle consacrait au jeune et devait obtenir l’approbation de l’appelante pour toute heure travaillée en sus de 20 heures par mois pour chaque jeune. Melissa avait droit à une allocation de dépenses et pouvait obtenir le remboursement des frais qui dépassaient le montant de cette allocation, pourvu que Mme Laviolette les ait approuvés. Le fait que Melissa était payée pour chaque heure travaillée et que l’appelante exerçait un degré de contrôle sur les heures que Melissa pouvait consacrer à chaque jeune a peut‑être empêché toute possibilité de faire des bénéfices.

 

[45]        De plus, Melissa n’avait pas à prendre de risques, à contracter d’emprunts ou à faire d’investissements dans des immobilisations ou pour la constitution d’un capital d’exploitation. Elle n’avait pas le droit non plus d’engager des assistants ou d’avoir recours à des sous-traitants. Elle devait faire le travail elle-même et, si elle n’était pas disponible, il lui suffisait de modifier la date et l’heure de son rendez‑vous avec le jeune. Tout comme dans l’arrêt Connor Homes, précité, le fait qu’elle fournissait son propre téléphone et son propre ordinateur ne permet pas de dire qu’elle n’était pas une employée.

 

[46]        Cependant, le fait que Melissa utilisait son propre véhicule automobile est un facteur qui pourrait favoriser l’existence d’un statut d’entrepreneur indépendant, étant donné, surtout, que son contrat l’obligeait à souscrire une assurance responsabilité supplémentaire relativement au transport des jeunes. Il appert de la preuve qu’elle n’a pas souscrit cette assurance, parce qu’elle a mal compris cette partie du contrat; néanmoins, l’exigence était bel et bien stipulée dans le contrat. De plus, Melissa n’avait pas droit à des avantages sociaux (sauf l’indemnité de déplacement et le remboursement de ses frais préalablement approuvés) ni à une paie de vacances. Elle n’avait aucune sécurité d’emploi, puisque son contrat pouvait être résilié moyennant un préavis d’une semaine, et elle était libre d’accepter d’autres mandats. Qui plus est, elle travaillait uniquement lorsqu’un besoin existait, et j’ai cru comprendre qu’elle pouvait accepter ou refuser tout client, bien que cela ne se soit pas produit en réalité. Enfin, il est difficile de savoir quelle aurait été la procédure si une plainte avait été formulée contre Melissa, puisque cette situation ne s’est pas présentée non plus. À la lumière du témoignage de Mme Laviolette et de Melissa, j’ai cru comprendre qu’en cas de plainte, cette dernière aurait appelé Mme Laviolette, laquelle aurait téléphoné à toutes les personnes concernées. Dans l’ensemble, je suis d’avis que le facteur des chances de bénéfice et celui des risques de perte ne font pas nécessairement pencher la balance en faveur du statut d’employé ou d’entrepreneur indépendant.

 

[47]        Quant au facteur de l’intégration, il ne s’agit pas d’un facteur que les tribunaux semblent examiner de façon indépendante aujourd’hui. Pour répondre à la question centrale de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte, il y a lieu d’examiner tous les autres facteurs susmentionnés dans l’application du critère à quatre volets (Wiebe Door, précité, Sagaz, précité, au paragraphe 47). Le fait que la travailleuse n’a pas fourni les services pour lesquels elle a été engagée dans le cadre d’une affaire déjà établie n’est pas déterminant, et il se pourrait fort bien que la travailleuse ait été une entrepreneure indépendante, même si elle n’a pas conclu de contrat dans le cadre d’une entreprise qu’elle dirige actuellement (Wiebe Door, précité, à la page 564, où il est fait mention des observations que le juge Cooke a formulées dans l’arrêt Market Investigations Ltd. v. Minister of Social Security, [1968] 3 All E.R. 732).

 

[48]        Dans la décision Family Services Perth-Huron, précitée, le juge Rip a conclu qu’un prestataire de services spéciaux travaillant pour un organisme à but non lucratif dans des conditions semblables à celles de la présente affaire était une entrepreneure indépendante, même si elle n’exploitait pas une entreprise existante. Cet organisme fournissait des services de soutien à domicile aux enfants qui étaient handicapés physiquement, qui avaient un handicap lié à leur développement ou qui avaient besoins de services particuliers. Il dirigeait vers les prestataires de services les personnes ayant besoin ou estimant avoir besoin des services offerts dans le Programme des services spéciaux à domicile du ministère des Services sociaux et communautaires de l’Ontario. Lorsqu’un prestataire de services était trouvé pour une famille, une première rencontre était tenue entre le coordonnateur, le prestataire en question et la famille. Le prestataire de services suivait ensuite un programme préparé par un psychologue ou par un travailleur social. La famille et le prestataire déterminaient ensemble quand et comment les services seraient fournis. Le contrat prévoyait le nombre d’heures par semaine pendant lesquelles les services devaient être fournis ainsi que le taux horaire. Le prestataire devait tenir des relevés de temps et des relevés des frais de déplacement et « son bénéfice » était déterminé par le nombre d’heures de travail effectuées auprès d’un client. Le prestataire avait droit à une allocation de déplacement lorsqu’il utilisait son propre véhicule automobile. Il présentait des rapports d’étape et le coordonnateur était chargé de superviser le programme en cours et devait être informé sans délai si des problèmes ou questions se posaient. Le prestataire pouvait fournir des services à plus d’un client à la fois.

 

[49]        Dans l’arrêt Connor Homes, Connor Homes avait obtenu de la province de l’Ontario une licence l’autorisant à gérer des foyers d’accueil où elle fournissait des services à des enfants atteints de troubles graves de comportement et de développement. Connor Homes a recruté des travailleurs auprès des enfants et des jeunes pour assurer la prestation de ces services. Deux des travailleuses intéressées étaient rémunérées en fonction d’un taux horaire sur présentation de factures et recevaient également certaines indemnités de transport. Le contrat pouvait être résilié suivant un préavis de 14 jours par la travailleuse. Une autre travailleuse, qui fournissait des services en qualité de surveillante de secteur, avait signé un contrat de cinq ans qu’elle pouvait résilier sur remise d’un préavis écrit de 60 jours. Elle était rémunérée en fonction d’un taux journalier multiplié par le nombre d’enfants pensionnaires d’un foyer d’accueil qui étaient confiés à sa surveillance, et elle était payée sur présentation de factures. Le contrat comportait, dans le cas de cette personne, une clause de non‑concurrence. Les trois travailleuses n’avaient pas à supporter de risques financiers.

 

[50]        La Cour d’appel fédérale a conclu que les travailleuses en question agissaient en qualité d’employées de Connor Homes, qui exerçait un degré de contrôle élevé sur la nature et les modalités d’exécution des tâches qu’elles remplissaient. Effectivement, Connor Homes contrôlait le travail des intéressées au jour le jour. Elle leur fixait des tâches administratives et les obligeait à assister à des réunions du personnel pour discuter des procédures opérationnelles, des calendriers de travail et des événements quotidiens de la vie des foyers. Connor Homes leur donnait également des conseils et des instructions concernant la gestion des situations difficiles avec les clients ainsi que les activités de commercialisation à exercer pour son compte. Qui plus est, il a été reconnu que les intéressées remplissaient en fait les mêmes tâches que les employées de Connor Homes.

 

[51]        Je suis d’avis que la présente affaire s’apparente davantage à la situation examinée dans la décision Family Services Perth-Huron, précitée, qu’à celle de l’arrêt Connor Homes, étant donné que le contrôle exercé par le payeur dans la première affaire et dans celle dont je suis saisie était minime comparativement à celui qui était exercé sur les travailleuses dans l’affaire Connor Homes. Même si les chances de bénéfice étaient minimes en l’espèce, je conclus, comme l’a fait le juge Rip dans le cas de la travailleuse dans la décision Family Services Perth‑Huron, que Melissa avait des compétences qu’elle pourrait un jour ou l’autre utiliser à des fins lucratives, même si elle n’exploitait pas une entreprise existante.

 

[52]        Dans l’ensemble, je conclus, eu égard à la preuve, que l’appelante et Melissa agissaient d’une manière compatible avec une relation entre client et entrepreneur indépendant.

 

[53]        J’en arrive donc à la conclusion que Melissa n’exerçait pas un emploi assurable et ouvrant droit à pension au sens de l’alinéa 5(1)a) de la LAE et de l’alinéa 6(1)a) du Régime, respectivement, lorsqu’elle a travaillé pour l’appelante au cours de la période allant du 1er janvier 2010 au 8 décembre 2011.

 

[54]        Les appels sont accueillis, la décision que le ministre a rendue le 4 septembre 2012 est annulée et la décision rendue le 15 février 2012 par l’agent des décisions relatives au RPC et à l’AE est annulée.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de septembre 2013.

 

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre

 

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour de novembre 2013.

 

M.-C. Gervais

 


RÉFÉRENCE :                                 2013 CCI 291

 

N° DU DOSSIER de la Cour :   2012-4948(EI)

 

INTITULÉ :                                      Peterborough Youth Services c. MinistRe DU REVENU National

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 8 juillet 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L’honorable juge Lucie Lamarre

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 19 septembre 2013

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelante :

MDavid W. Chodikoff

Avocat de l’intimé :

MRicky Y.M. Tang

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                          Nom :                     David W. Chodikoff

 

                       Cabinet :                     Miller Thomson S.E.N.C.R.L., s.r.l.

 

               Pour l’intimé :                    William F. Pentney

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

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