Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

Dossier : 2009-1717(IT)G

ENTRE :

WILLIAM A. KELLY,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Requête en rejet d’appel entendue sur preuve commune avec les requêtes de

Steve Djelebian 2009-1332(IT)G et de Glen R. Mullins 2009-1336(IT)G

le 4 décembre 2013 à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge David E. Graham

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocates de l’intimée :

Me Samantha Hurst

Me Donna Dorosh

____________________________________________________________________

 

ORDONNANCE

La requête est accueillie avec dépens, lesquels sont fixés à 2 500 $ et doivent être payés sans délai à l’intimée. En conséquence, l’appel est rejeté.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 18e jour de décembre 2013.

 

 

« David E. Graham »

Juge Graham

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour d’avril 2014.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


 

 

 

Dossier : 2009-1332(IT)G

ENTRE :

STEVE DJELEBIAN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Requête en rejet d’appel entendue sur preuve commune avec les requêtes de

William A. Kelly 2009-1717(IT)G et de Glen R. Mullins 2009-1336(IT)G

le 4 décembre 2013 à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge David E. Graham

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelant :

Me W. A. Kelly, c.r.

Avocates de l’intimée :

Me Samantha Hurst

Me Donna Dorosh

____________________________________________________________________

 

ORDONNANCE

La requête est accueillie avec dépens, lesquels sont fixés à 1 500 $ et doivent être payés sans délai à l’intimée. En conséquence, l’appel est rejeté.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 18e jour de décembre 2013.

 

 

« David E. Graham »

Juge Graham

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour d’avril 2014.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


 

 

 

Dossier : 2009-1336(IT)G

ENTRE :

GLEN R. MULLINS,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Requête en rejet d’appel entendue sur preuve commune avec les requêtes de

William A. Kelly 2009-1717(IT)G et de Steve Djelebian 2009-1332(IT)G

le 4 décembre 2013 à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge David E. Graham

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelant :

Me W. A. Kelly, c.r.

Avocates de l’intimée :

Me Samantha Hurst

Me Donna Dorosh

____________________________________________________________________

 

ORDONNANCE

La requête est accueillie avec dépens, lesquels sont fixés à 1 500 $ et doivent être payés sans délai à l’intimée. En conséquence, l’appel est rejeté.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 18e jour de décembre 2013.

 

 

« David E. Graham »

Juge Graham

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour d’avril 2014.

 

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


 

 

 

Référence : 2013 CCI 411

Date : 20131218

Dossier : 2009-1717(IT)G

ENTRE :

WILLIAM A. KELLY,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

 

Dossier : 2009-1332(IT)G

ET ENTRE :

STEVE DJELEBIAN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

 

Dossier : 2009-1336(IT)G

ET ENTRE :

GLEN R. MULLINS,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

 

Le juge Graham

[1]             Les appelants interjettent appel du refus par le ministre du Revenu national d’accepter les pertes de société en commandite qu’ils ont déclarées au cours des années 1990. L’intimée a présenté une requête portant rejet des appels conformément à l’article 64 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale) (les « Règles »), les appelants n’ayant pas poursuivi l’appel avec promptitude.

[2]             En plus d’être l’un des appelants, Me Kelly, qui est avocat, représente les deux autres appelants et agit pour son propre compte dans les appels.

 

L’historique

 

[3]             L’historique des présents appels est exposé en détail dans les affidavits de Charlene Cho que l’intimée a produits ainsi que dans l’affidavit de Me Kelly. Je soulignerai uniquement les principaux événements qui sont décrits dans les affidavits en question[1].

[4]             Voici un bref historique des premières étapes de l’appel de Me Kelly [2] :

a)          Me Kelly a produit son avis d’appel le 21 mai 2009.

b)         Conformément à une ordonnance datée du 14 juin 2010, les parties devaient franchir différentes étapes de l’instance selon l’échéancier qui y était fixé.

c)          De deux choses l’une : soit Me Kelly a signifié sa liste de documents à temps, mais fourni une preuve de signification à la Cour après le délai fixé par celle-ci, soit il a signifié sa liste de documents et produit la preuve de signification de celle-ci après le délai en question. Dans un cas comme dans l’autre, Me Kelly n’a pas écrit à la Cour avant l’expiration du délai pour demander une prorogation, ni n’a présenté de requête en vue d’obtenir cette prorogation après le délai[3].

d)         À deux occasions, Me Kelly a reçu signification d’avis de convocation à un interrogatoire préalable. Dans les deux cas, Me Kelly a fait savoir à l’intimée, à peine deux ou trois jours avant la date fixée, qu’il ne serait pas présent à l’interrogatoire. Dans le premier cas, l’intimée a obtenu une prorogation du délai relatif à la tenue des interrogatoires préalables. Dans le second, l’intimée a obtenu un certificat de non‑comparution[4].

e)          Le 24 mars 2011, l’appel de Me Kelly a été ajouté à un groupe d’affaires similaires à des fins de gestion d’instance.

f)           Aucune autre mesure n’a été prise dans le dossier de Me Kelly jusqu’au 25 janvier 2012, lorsque l’intimée a demandé une conférence de gestion d’instance pour le groupe. La Cour a fixé une audience relative à l’état de l’instance qui devait avoir lieu le 3 avril 2012.

[5]             Voici un résumé des premières étapes franchies dans les appels de MM. Mullins et Djelebian :

a)          MM. Mullins et Djelebian ont produit leurs avis d’appel le 28 avril 2009. Ils faisaient partie d’un groupe d’appelants similaires.

b)         Dans le groupe, neuf causes types ont été choisies. Ces affaires ont été réglées en juin 2011.

c)          En janvier 2012, l’intimée a demandé à la Cour de tenir une conférence de gestion d’instance pour les autres appels faisant partie du groupe. La Cour a fixé au 3 avril 2012 la tenue d’une audience relative à l’état de l’instance pour le groupe.

[6]             Lors de l’audience relative à l’état de l’instance tenue le 3 avril 2012, Me Kelly a comparu pour lui-même et pour le compte de MM. Mullins et Djelebian. Dans une ordonnance datée du 10 avril 2012, la Cour a décidé que tous les appels des appelants seraient entendus sur preuve commune, que l’interrogatoire préalable de Me Kelly devait être tenu au plus tard le 31 octobre 2012 et que les interrogatoires préalables dans les appels de MM. Mullins et Djelebian devaient également avoir lieu au plus tard le 31 octobre 2012. De plus, la Cour a fixé le calendrier des autres étapes à franchir dans l’instance.

[7]             Dans une ordonnance modifiée datée du 7 mai 2012, la Cour a ordonné aux parties dans les appels de MM. Mullins et Djelebian de signifier leurs listes de documents au plus tard le 30 juin 2012.

[8]             Les listes de documents de MM. Mullins et Djelebian ont été signifiées à l’intimée le 9 juillet 2012, soit après la date limite fixée par la Cour. MM. Mullins et Djelebian n’ont pas écrit à la Cour avant l’expiration du délai pour demander une prorogation et n’ont pas présenté non plus de requête en vue d’obtenir une prorogation de cette nature après le délai.

[9]             L’intimée a tenté de convenir de certaines dates avec les appelants pour la tenue des interrogatoires préalables, mais les appelants n’ont proposé aucune date. En conséquence, elle leur a signifié des avis de convocation. Tous les interrogatoires préalables devaient avoir lieu à Toronto. Une semaine avant la date fixée pour la tenue des interrogatoires préalables, Me Kelly a tenté en vain de convaincre l’intimée que les interrogatoires devraient être tenus sous forme écrite. Lorsque l’intimée lui a dit que cette façon de procéder ne serait pas acceptable, Me Kelly lui a répondu que les interrogatoires préalables de MM. Mullins et Djelebian devraient être tenus à Windsor. L’intimée a donc pris des dispositions pour que les interrogatoires préalables en question se déroulent à Windsor. La veille de la date fixée pour les interrogatoires préalables, Me Kelly a fait savoir à l’intimée que MM. Mullins et Djelebian ne seraient pas disponibles[5].

[10]        En raison des retards susmentionnés, l’intimée a dû de nouveau demander des reports des échéances fixées à l’audience relative à l’état de l’instance. Dans une ordonnance datée du 19 novembre 2012, la Cour a enjoint aux parties de terminer les interrogatoires préalables au plus tard le 31 décembre 2012, de satisfaire aux engagements au plus tard le 31 janvier 2013 et de communiquer avec elle au plus tard le 28 mars 2013.

[11]        Après d’autres échanges entre les parties au sujet des dates et des endroits, les interrogatoires préalables ont finalement eu lieu les 13 et 14 décembre 2012 à Toronto, et les appelants ont alors pris un certain nombre d’engagements différents.

[12]        Les appelants n’ont pas satisfait à leurs engagements à la date limite fixée par la Cour, soit le 31 janvier 2013. Ils n’ont pas écrit à la Cour avant l’expiration du délai pour demander une prorogation ni n’ont présenté de requête en ce sens après le délai.

[13]        Le 28 mars 2013, l’intimée a écrit à la Cour pour lui expliquer que les appelants n’avaient pas encore satisfait à leurs engagements et pour demander la tenue d’une audience de justification. La Cour a refusé la demande, mais a fait savoir à l’intimée qu’elle pourrait présenter une requête en tout temps. En conséquence, le 7 août 2013, l’intimée a présenté la requête visée par la présente décision.

[14]        Me Kelly a finalement fourni ses réponses à ses engagements le 22 octobre 2013, tandis que MM. Mullins et Djelebian ont déposé les leurs le 5 novembre 2013.

 

La raison du manquement à l’ordonnance concernant les engagements

[15]        Les appelants ont affirmé que, s’ils n’avaient pas satisfait à leurs engagements lorsque l’intimée a écrit à la Cour le 28 mars 2013, c’est parce que l’intimée ne leur avait pas fourni de liste des engagements en question.

[16]        Aucune disposition des Règles n’oblige l’intimée à fournir aux appelants des listes de leurs engagements. Selon la procédure normalement suivie à la Cour canadienne de l’impôt, la partie visée par l’interrogatoire préalable établit une liste des engagements lorsque ceux-ci sont donnés ou obtient une copie de la transcription. La procédure normale ne consiste pas à demander à l’autre partie de compiler la liste pour la partie visée par l’interrogatoire préalable.

[17]        L’intimée m’a cité le passage suivant de la transcription de l’interrogatoire préalable de Me Kelly [6] :

 

[traduction]

 

[Me Kelly]                     En passant, je ne prends pas de notes ici; je devrai obtenir une liste des engagements de quelqu’un.

 

[Me Chasson[7]]               Monsieur, vous pouvez commander une transcription et obtenir ça –

 

[Me Kelly]                     C’est beaucoup plus coûteux. Si vos assistants établissent une liste des engagements, je pourrais - je ferai ce que je pourrai.

[18]        Il appert clairement de cet échange que les appelants savaient, dès la date des interrogatoires préalables, que l’intimée n’avait nullement l’intention de leur fournir des listes des engagements et qu’ils auraient pu obtenir une liste simplement en commandant une copie de la transcription des interrogatoires en question.

[19]        De plus, la transcription de l’interrogatoire de M. Mullins donne à penser que Me Kelly prenait des notes au cours de l’interrogatoire préalable. Lorsque l’avocate de l’intimée a demandé deux engagements différents de suite, Me Kelly a voulu obtenir des précisions au sujet du deuxième engagement et s’est exprimé ainsi : [traduction] « Désolé, j’étais en train d’écrire »[8]. À mon avis, cette remarque indique que, du moins au cours de l’interrogatoire préalable de M. Mullins, Me Kelly prenait des notes au sujet des engagements.

[20]        Les appelants n’ont présenté aucun élément de preuve montrant qu’ils avaient tenté d’une façon ou d’une autre d’établir les listes des engagements nécessaires entre la tenue des interrogatoires préalables et la date limite du 31 janvier 2013. Ils n’ont pas prouvé non plus qu’ils avaient fait la moindre tentative pour établir ces listes au cours des deux mois qui ont suivi cette date limite. En fait, ce n’est que lorsque l’intimée, conformément à l’obligation qu’elle avait de présenter un rapport à la Cour au plus tard le 28 mars 2011, a fait savoir à la Cour que les appelants n’avaient pas satisfait à leurs engagements que ceux‑ci ont demandé les listes à l’intimée. Il n’y a aucun élément de preuve établissant que, lorsque l’intimée a refusé cette demande, les appelants ont tenté par d’autres moyens d’établir les listes des engagements. Ils ont simplement continué à demander à l’intimée de leur fournir les listes.

[21]        En fin de compte, ce n’est que lorsque l’intimée a joint les listes d’engagements à sa requête que les appelants les ont obtenues.

[22]        La conduite décrite plus haut montre que les appelants n’ont pas vraiment déployé d’efforts pour satisfaire aux engagements, que ce soit avant ou après la date limite fixée. À mon avis, l’explication donnée au sujet des listes d’engagements n’est rien de plus qu’une excuse qui les arrangeait bien et qui visait à retarder les procédures. Les appelants savaient que l’intimée ne leur fournirait pas les listes des engagements. À mon avis, les demandes qu’ils ont présentées en vue d’obtenir ces listes visaient simplement à faire porter à l’intimée le blâme de leur inaction. Je suis convaincu que, si l’intimée n’avait pas présenté sa requête, les appelants n’auraient pas encore donné de réponse à leurs engagements.

 

L’omission des appelants de demander une prorogation de délai pour satisfaire à leurs engagements

[23]        Les appelants n’ont jamais tenté de corriger le manquement qu’ils ont commis en ne respectant pas la date limite du 31 janvier 2013 pour la présentation de réponses aux engagements. Aucune requête en prorogation de délai n’a été présentée. Je me serais attendu, à tout le moins, à ce qu’une requête de cette nature soit présentée en même temps que la requête de l’intimée.

[24]        Me Kelly a soutenu qu’il n’avait pas demandé de prorogation avant l’expiration des délais fixés par la Cour ni n’avait, pour son compte et au nom des deux autres appelants, sollicité de prorogation des délais en question après leur expiration, parce qu’il ignorait les règles qui l’obligeaient à le faire. L’intimée a attiré mon attention sur une lettre datée du 26 octobre 2010 qu’elle a adressée à Me Kelly et dans laquelle elle a précisé les exigences applicables aux demandes de prorogation de délai. Compte tenu de cette lettre, je n’accepte pas l’explication de Me Kelly. Voici un passage pertinent de la lettre en question :

 

[traduction]

 

Comme je l’ai souligné, la partie qui veut proroger le délai prévu dans un échéancier fixé par ordonnance de la Cour doit présenter une demande de prorogation à celle-ci. La demande peut être présentée au moyen d’un formulaire, si l’autre partie y consent avant l’expiration du délai d’exécution fixé par la Cour. Dans les autres cas, une requête formelle devra être présentée.

[25]        Je souligne également que Me Kelly n’a nullement présenté d’excuses à la Cour, que ce soit pendant l’audition de la requête visée par la présente décision ou dans les observations écrites des appelants, à l’égard de la violation de l’ordonnance concernant les engagements, ni n’a même reconnu que les appelants avaient commis la moindre faute en omettant de s’y conformer.

[26]        Eu égard à ce qui précède, je conclus que les appelants étaient et continuent à être indifférents quant au respect de leur part des ordonnances de la Cour.

 

Les engagements effectivement fournis

[27]        Même un bref examen des réponses finalement données à l’égard des engagements montre clairement que les appelants n’ont pas vraiment répondu à bon nombre des questions qui leur avaient été posées. L’intimée m’a remis des copies des réponses aux engagements de M. Mullins. Le comptable de MM. Mullins et Djelebian était un certain M. Qadir. M. Mullins s’était engagé :

a)          à demander à M. Qadir si les comptables et avocats de M. Mullins avaient préparé des résumés des offres de la société en commandite;

b)         à demander à M. Qadir s’il avait mené une analyse en profondeur du logiciel;

c)          à demander à M. Qadir de fournir tous les renseignements qu’il possédait au sujet des allégations de poursuite judiciaire et du règlement s’y rapportant dont il était fait mention dans l’avis d’appel de M. Mullins.

[28]        L’affirmation suivante a été formulée en réponse à toutes ces questions :

 

[traduction]

 

M. Qadir s’est fondé sur l’avis fiscal donné par Me Beach, associé principal, fiscalité, chez Faskin, Campbell, Godfrey, ainsi que sur les renseignements contenus dans la notice d’offre, sur les projections financières et sur tous les renseignements supplémentaires fournis par le commandité.

[29]        Même aux yeux d’une personne qui ne connaît pas bien les points en litige dans l’instance sous-jacente, il est évident que cette affirmation ne constitue pas une réponse.

[30]        De plus, la réponse à une question formulée dans les engagements de M. Mullins est restée en blanc, et la réponse suivante est donnée à une autre question concernant une poursuite judiciaire :

 

[traduction]

 

D’après les renseignements dont il dispose, M. Qadir ignore de quelle poursuite il s’agit. Veuillez fournir des renseignements détaillés au sujet des parties demanderesse et défenderesse ainsi qu’une copie de la déclaration/défense, afin qu’il puisse donner une réponse appropriée à la question.

[31]        Non seulement la poursuite en question est-elle décrite dans la transcription du passage de l’interrogatoire préalable qui précède immédiatement l’engagement, mais elle est mentionnée dans les avis d’appel des appelants. La réponse précitée semble viser à éviter de répondre à la question ou à retarder le déroulement de l’instance.

[32]        Au cours des plaidoiries, Me Kelly m’a informé que les réponses aux engagements avaient été préparées par M. Qadir et que les appelants n’en avaient pas pris connaissance avant qu’elles soient acheminées à l’intimée. Les engagements avaient été donnés lors de l’interrogatoire préalable par les appelants, et non par M. Qadir. Même si bon nombre des engagements les obligeaient à poser des questions à M. Qadir, les appelants n’étaient nullement libérés pour autant de leur obligation de veiller à ce que les réponses soient exactes et complètes. Or, trois des réponses aux engagements de M. Mullins comportent des remarques qui sont précédées de l’expression [traduction] « d’après les renseignements dont je dispose » et l’une d’elles renvoie au souvenir de M. Mullins quant à la signature d’un document de sa part. Je ne comprends pas comment ces réponses peuvent être considérées comme des réponses exactes si M. Mullins ne les a même pas lues. Étant donné que les appelants n’ont pas pris connaissance des réponses, l’intimée se trouve dans une position intenable. Comment en effet peut-elle utiliser des réponses que les appelants n’ont pas adoptées? En se conduisant de la sorte, les appelants n’ont pas satisfait à leurs engagements.

[33]        Il ne s’agit pas ici d’un cas où une partie n’a pas fourni une réponse aussi complète aux engagements que ce que l’autre partie attendait. Il est évident que les appelants ont tout simplement fait preuve d’une totale indifférence quant à la question de savoir si les réponses étaient complètes ou même adéquates. Cette indifférence témoigne d’un manque de respect à l’endroit de la Cour et des Règles et d’une absence d’intention de poursuivre les appels.

 


Le comportement des appelants

[34]        Dans l’ensemble, il m’apparaît évident que les appelants n’ont pas déployé le moindre effort pour poursuivre leurs appels avec promptitude. Bien au contraire, leur comportement montre, au mieux, de l’indifférence et plus probablement des efforts concertés visant à retarder le traitement des appels.

[35]        Les appelants n’ont pas respecté les échéances fixées par la Cour en ce qui concerne leurs listes de documents et leurs engagements et n’ont pas demandé de prorogations de délai pour rectifier ces manquements. De toute évidence, ils n’ont pas vraiment de respect pour les ordonnances et procédures de la Cour canadienne de l’impôt. Les appelants ont aussi rendu inutilement complexe le déroulement des interrogatoires préalables. Lorsque j’examine collectivement la série d’événements entourant chaque tentative en vue de fixer la date d’un interrogatoire préalable, je vois de l’indifférence quant à la tenue des interrogatoires en question ou encore un retard intentionnel à cet égard. Les appelants n’ayant proposé aucune autre explication au sujet des événements, ce sont les conclusions que je me dois de tirer.

[36]        Dans son affidavit, Mme Cho dresse une liste d’autres événements qui pourraient, séparément, être décrits comme des événements causant des retards mineurs dans le déroulement des procédures, mais qui, ensemble, dénotent de l’indifférence ou un retard intentionnel.

[37]        Les appelants soutiennent que, pour décider si leurs appels devraient être rejetés, je ne puis tenir compte d’une conduite (y compris les manquements aux Règles ou à des ordonnances) survenue avant l’audience de justification tenue le 3 avril 2012. Ils font valoir que la Cour a déjà examiné cette conduite à l’audience en question, de sorte que l’intimée ne peut la soulever de nouveau dans la requête visée par la présente décision.

[38]        Cette position est sans fondement. D’abord, le dossier ne me permet pas vraiment de savoir si la Cour s’est même demandé, le 3 avril 2012, si les appels des appelants devraient être rejetés. Surtout, même si elle l’avait fait, la question de droit qui aurait été pertinente aurait été de savoir si la conduite des appelants jusqu’au 3 avril 2012 inclusivement suffisait pour justifier un rejet. Je ne suis pas appelé à réexaminer cette question, mais plutôt à me demander si la conduite à laquelle les appelants se sont livrés jusqu’à maintenant justifie le rejet de leurs appels. En d’autres termes, l’intimée me demande d’appliquer le même critère juridique qui se serait peut-être appliqué précédemment, mais à un ensemble de faits plus vaste. Le fait que l’intimée n’avait peut-être pas en main suffisamment d’éléments de preuve pour convaincre la Cour de rejeter les appels le 3 avril 2012 n’élimine pas pour autant la conduite fautive des appelants.

[39]        Les appelants ont invoqué la décision Paszkowski c. La Reine, 2001 CanLII 22070, [2001] A.C.F. no 129 (C.F. 1re inst.) de la Cour fédérale. Dans cette affaire-là, la Cour fédérale s’est fait demander de rendre une décision interlocutoire fondée sur un ensemble de faits, laquelle décision aurait été tout à fait contraire à une autre décision interlocutoire précédemment rendue au sujet des mêmes faits. Ce n’est pas ce qui m’est demandé. La question qui m’est posée est de savoir si un critère juridique qui faisait défaut précédemment est maintenant établi, compte tenu des événements survenus depuis et eu égard à un examen de l’ensemble des anciens et nouveaux événements. La Cour d’appel fédérale a décidé que le principe de la chose jugée ne s’appliquait pas en pareil cas (Apotex Inc. c. Richter Gedeon Vegyeszeti Gyar RT, 2003 CAF 221).

[40]        Dans l’arrêt 1196158 Ontario Inc. v. 6274013 Canada Ltd., 2012 ONCA 544, la Cour d’appel de l’Ontario a examiné la situation d’un demandeur qui n’avait pris aucune mesure pour faire avancer son appel pendant de nombreuses années. J’adopte le raisonnement de la Cour d’appel de l’Ontario, notamment le passage suivant qui figure au paragraphe 25 de son jugement :

 

[traduction]

 

Je refuse totalement d’admettre que la demanderesse a été dégagée d’une façon ou d’une autre de toute responsabilité découlant des retards antérieurs par l’ordonnance rendue à l’audience relative à l’état de l’instance tenue en janvier 2010. Cette ordonnance, rendue malgré des retards étalés sur une période de plus de trois ans, a été décrite à juste titre par le juge qui présidait l’audience en question comme une [traduction] « bouée de sauvetage » qui permettait à la demanderesse de poursuivre les procédures en respectant l’échéancier fixé par ordonnance judiciaire. La demanderesse a fait fi de cette dernière chance qui lui avait été offerte et n’a pas respecté l’échéancier qui avait été fixé. Il ne peut y avoir de salut sans repentir. La demanderesse n’a nullement été libérée de ses manquements antérieurs par l’ordonnance rendue lors de l’audience relative à l’état de l’instance de 2010, et il était loisible au juge qui présidait l’audience en question de tenir compte de tous les retards précédents.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

La mesure de redressement subsidiaire suggérée

[41]        Les appelants me demandent de rejeter la requête de l’intimée, d’ordonner à celle-ci de leur fournir une liste de leurs manquements aux engagements au plus tard à une certaine date et de leur ordonner de corriger ces manquements au plus tard à une autre date. Je suis loin d’être convaincu que, si j’obtempérais à leur demande, les appelants se conformeraient à mon ordonnance, compte tenu de l’indifférence qu’ils ont constamment affichée à l’égard des ordonnances de la Cour. Même s’ils se conformaient à mon ordonnance, eu égard aux parties de leurs réponses précédentes aux engagements dont j’ai pris connaissance, je ne crois pas que leurs réponses seraient adéquates. D’une façon ou d’une autre, il est probable que les parties reviendraient devant la Cour dans quelques mois pour tenter à nouveau de régler la présente affaire et que l’intimée serait, une fois de plus, contrainte de déployer beaucoup d’efforts et d’engager des coûts élevés pour tenter de faire avancer les appels des appelants. Je ne vois pas pourquoi je devrais imposer ce fardeau à l’intimée.

 

Conclusion

[42]        Pour tous les motifs exposés plus haut, les requêtes sont accueillies et les appels sont rejetés conformément à l’article 64 des Règles.

 

Les dépens

[43]        L’intimée sollicite des dépens d’indemnisation totale de 2 500 $ de chaque appelant ou, si je ne suis pas disposé à adjuger des dépens d’indemnisation totale, des dépens d’indemnisation partielle de 1 000 $ de chacun d’eux. Les appelants admettent que, si j’adjugeais des dépens d’indemnisation partielle, il conviendrait d’exiger un montant de 1 000 $ de chaque appelant, mais soutiennent que, si des dépens d’indemnisation totale étaient adjugés, un montant de 1 500 $ par appelant serait suffisant.

[44]        À mon avis, il convient d’accorder un montant élevé à l’intimée au titre des dépens, eu égard à l’indifférence que les appelants ont affichée à l’endroit des ordonnances de la Cour et au fait qu’ils ont intentionnellement retardé le déroulement de l’instance. De plus, l’intimée a dû déployer beaucoup d’efforts inutiles, tant dans les présentes requêtes qu’au cours de l’ensemble du litige. J’estime qu’il convient d’exiger une somme plus élevée de Me Kelly au titre des dépens, parce que l’omission de sa part de poursuivre l’appel avec promptitude couvre une plus longue période et a donné lieu à un plus grand nombre de retards; de plus, j’ai tendance à appliquer une norme de conduite plus élevée à l’endroit d’appelants qui, à l’instar de Me Kelly, sont des professionnels ayant une bonne connaissance du système judiciaire et du déroulement des litiges. À cet égard, l’indifférence apparente de Me Kelly en ce qui a trait au respect des échéances fixées par la Cour et l’omission de sa part, comme il l’a admis, de prendre connaissance des réponses à ses propres engagements avant de les faire parvenir à l’intimée m’apparaissent particulièrement troublantes. Pour tous les motifs exposés plus haut, j’ordonnerai aux appelants de verser sans délai à l’intimée des dépens fixés à 1 500 $ dans le cas de MM. Mullins et Djelebian et à 2 500 $ dans le cas de Me Kelly.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 18e jour de décembre 2013.

 

 

« David E. Graham »

Juge Graham

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour d’avril 2014.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


RÉFÉRENCE :                                 2013 CCI 411

 

Nos des dossiers de la Cour :             2009-1717(IT)G

                                                          2009-1332(IT)G

                                                          2009-1336(IT)G

 

INTITULÉS :                                    WILLIAM A. KELLY ET SA MAJESTÉ LA REINE

 

                                                          STEVE DJELEBIAN ET SA MAJESTÉ LA REINE

 

                                                          GLEN R. MULLINS ET SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                Toronto (Ontario)

                                                                      

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 4 décembre 2013

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :   L’honorable juge David E. Graham

 

DATE DE L’ORDONNANCE :       Le 18 décembre 2013

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat des appelants :

Me W.A. Kelly, c.r.

Avocates de l’intimée:

Me Samantha Hurst

Me Donna Dorosh

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour les appelants :

 

                          Nom :                     W.A. Kelly, c.r.

                      Cabinet :                     W.A. Kelly, c.r.

                                                          Toronto (Ontario)

 

       Pour l’intimée :                          William F. Pentney

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1]              L’affidavit de Me Kelly porte uniquement sur les événements survenus depuis décembre 2012. Me Kelly n’y a présenté aucune description des événements antérieurs à cette date ni n’a contesté les événements décrits dans l’affidavit de Mme Cho.

[2]              Le document intitulé [traduction] « La position des appelants », que les appelants ont produit en réponse à la requête de l’intimée, donne l’impression que les trois appelants ont suivi la même voie tout au long du litige. Ce n’est pas le cas. Le cheminement de Me Kelly est bien différent de celui de MM. Mullins et Djelebian. Les différences entre l’évolution de l’appel de Me Kelly et de ceux de MM. Mullins et Djelebian sont exposées dans l’affidavit de Mme Cho.

[3]           Un des manquements reprochés par l’intimée est le fait que la liste de documents de Me Kelly n’était pas conforme aux Règles. Même si je conviens que la liste de documents n’était pas conforme aux Règles et qu’elle n’a certainement pas été préparée de façon professionnelle ou courtoise, le manquement était relativement mineur et s’apparentait davantage à un inconvénient qu’à une violation majeure. Je n’ai accordé aucune importance à ce manquement pour en arriver à ma décision.

[4]           Je souligne que, étant donné que Me Kelly a finalement décidé de ne pas interroger un témoin de l’intimée dans le cadre d’un interrogatoire préalable, il n’a pas commis de manquement à l’ordonnance de la Cour selon laquelle les interrogatoires devaient être terminés au plus tard le 21 janvier 2011.

[5]           Me Kelly a apparemment tenté d’informer l’intimée en ce sens trois jours auparavant par courriel, mais le courriel a été envoyé à la mauvaise adresse.

[6]           Transcription de l’interrogatoire préalable de Me Kelly, page 38, lignes 2 à 9.

[7]           Avocate de l’intimée.

[8]           Transcription de l’interrogatoire préalable de M. Mullins, page 67, ligne 19.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.