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Dossier : 2012-1854(IT)I

ENTRE :

SARA PEIXOTO DAFONSECA,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 17 mars 2014, à Thunder Bay (Ontario)

 

Devant : L’honorable juge F.J. Pizzitelli

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

MRandall V. Johns

 

Avocat de l’intimée :

Me Ryan Gellings

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté à l’encontre de la nouvelle détermination effectuée par le ministre en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu concernant les années de base 2007, 2008 et 2009 est rejeté.

 

 

       Signé à Toronto (Ontario), ce 19e jour de mars 2014.

 

 

« F.J. Pizzitelli »

Juge Pizzitelli

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour d’avril 2014.

 

Marie-Christine Gervais, traductrice


 

 

 

 

Référence : 2014 CCI 88

Date : 20140319

Dossier : 2012-1854(IT)I

ENTRE :

SARA PEIXOTO DAFONSECA,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Pizzitelli

[1]             Il s’agit d’un conflit malheureux qui déchire une mère et sa fille. Il est question de savoir laquelle des deux a droit à la Prestation fiscale canadienne pour enfants (la « PFCE ») et au Supplément de la prestation nationale pour enfants (le « SPNE ») à l’égard de deux des enfants de la fille pour la période allant de février 2009 à juin 2011 (la « période »), relativement aux années de base 2007, 2008 et 2009. Au cours de la période, la mère et la fille résidaient ensemble au domicile de la mère avec les trois enfants de la fille. L’appelante, qui est la mère de la fille dans ce conflit et la grand‑mère des deux enfants, a reçu les prestations jusqu’à ce que le ministre effectue une nouvelle détermination selon laquelle elle n’était pas le « particulier admissible » au cours de la période à l’égard des enfants. Suivant cette nouvelle détermination datée du 20 juin 2011, qui a été confirmée le 16 février 2012, il a été demandé à l’appelante de rembourser la somme de 12 993,45 $, qui fait l’objet du présent appel. Il a été déterminé que la fille de l’appelante, C, était le particulier admissible au cours de la période.

 

[2]             Les faits qui ne sont pas contestés par les parties ou qui ressortent par ailleurs clairement de la preuve sont que C a emménagé chez sa mère à Thunder Bay, en Ontario, lorsqu’elle est tombée enceinte de son troisième enfant, D, avant le début de la période, et a demeuré dans la maison de sa mère pendant la période et après celle‑ci, jusqu’au mois de mai 2012. C avait aussi emménagé chez sa mère lorsqu’elle était tombée enceinte de ses deux premiers enfants et y avait vécu, puis avait quitté le domicile entre ses grossesses. Cela montre donc qu’elle avait l’habitude d’emménager chez sa mère lorsqu’elle était enceinte. Il n’est également pas contesté, comme C l’a admis dans son témoignage, que celle-ci prenait de la drogue et qu’elle était toxicomane, du moins avant la période, ce qui causait de grandes inquiétudes à sa mère, l’appelante, en ce qui concerne sa fille et ses petits-enfants. C’est en partie pour cette raison que l’appelante voulait que sa fille et ses petits-enfants demeurent chez elle. Bien entendu, la mère et la fille ne s’entendent pas du tout quant à l’ampleur de la toxicomanie de la fille et au style de vie de celle‑ci. Franchement, dans les circonstances, c’est trop simplifier les choses que de simplement dire que la mère et la fille avaient des problèmes relationnels importants. Malheureusement, dans leur témoignage respectif, elles se sont en grande partie employées à se blâmer l’une et l’autre pour leurs désaccords.

 

[3]             L’appelante était soignante et travaillait par postes à deux différents établissements d’hébergement pour personnes âgées ou de soins. Elle a témoigné qu’elle effectuait le poste du matin, de 7 h à 15 h, ou le poste de l’après-midi, de 15 h à 23 h, et qu’elle avait d’habitude trois ou quatre postes de travail par semaine à l’un ou l’autre des établissements, selon les besoins de ses employeurs. Il ressort de la preuve que son salaire était sa principale source de revenus au cours de la période, auquel venait s’ajouter l’argent que lui versait sa fille, C.

 

[4]             Il ressort aussi clairement de la preuve que la fille, C, ne travaillait pas durant la période ainsi que pendant une bonne partie du temps au cours duquel elle avait emménagée chez sa mère les fois précédentes, et que, au cours de la période, ses seules sources de revenus étaient l’aide qu’elle recevait du programme Ontario au travail pour ses frais de loyer et de transport, la somme de 100 $ qu’elle recevait chaque mois du père de son troisième enfant, D, et les sommes qu’elle recevait pour son troisième enfant au titre de la PFCE. Il ne fait également aucun doute que la fille versait à l’appelante à titre de loyer la partie de l’argent qu’elle recevait du programme Ontario au travail pour ses frais de loyer, qui était de 300 $ à 350 $ par mois. L’appelante affirme toutefois n’avoir reçu une telle somme que pour un certain nombre de mois, alors que la fille a témoigné avoir versé la somme pendant la totalité de la période. Les deux s’entendent pour dire que, lorsque le gouvernement de l’Ontario a augmenté d’environ 300 $ le montant versé pour les frais de loyer vers la fin de la période, cette augmentation a été versée à l’appelante pour au moins une partie de la période. Aucun reçu ni élément de preuve ne permet d’établir la totalité des loyers que C a versés à l’appelante ou que cette dernière a reçus de C. La Cour ne peut donc qu’avancer des hypothèses à l’égard de la question, bien que, franchement, il soit évident que, compte tenu des sources de revenus limitées dont disposait la fille, tout montant que celle‑ci remettait à l’appelante était clairement minime par rapport aux frais d’entretien d’une maison de quatre chambres à coucher dans laquelle la fille et ses trois enfants demeuraient, ainsi qu’aux frais supportés pour subvenir à leurs besoins.

 

[5]             Il ressort aussi clairement de la preuve que l’appelante et sa fille soutiennent qu’elles assumaient principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation des enfants en question, et qu’elles admettent que l’autre a assumé une partie de cette responsabilité d’une certaine façon.

 

[6]             La seule question que la Cour doit trancher est celle de savoir si l’appelante assumait principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation des deux enfants et si elle était considérée comme le particulier admissible au sens de l’article 122.6 de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») et de l’article 6302 du Règlement de l’impôt sur le revenu (le « Règlement »).

 

[7]             Selon l’article 122.6 de la Loi, un « particulier admissible » à l’égard d’une personne à charge admissible, à un moment donné, est la personne qui réside avec la personne à charge, qui réside au Canada et qui est la personne – père ou mère ­– qui « assume principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation de la personne à charge ». Il n’est pas contesté que les deux enfants en question sont des personnes à charge admissibles. Il n’est pas non plus contesté que l’appelante, en tant que grand-mère des enfants, résidait au Canada et qu’elle était considérée comme « le père ou la mère » des enfants, vraisemblablement selon les lois de l’Ontario qui s’appliquent pour définir un tel terme. Quoi qu’il en soit, l’intimée n’a pas fait valoir que l’appelante ne pouvait pas être considérée comme le père ou la mère.

 

[8]             La seule question en litige en l’espèce est de savoir si l’appelante a rempli les conditions figurant dans la définition pour être la personne – père ou mère – qui assume principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation des deux enfants. L’article 6302 du Règlement prévoit que plusieurs critères servent à déterminer en quoi consistent le soin et l’éducation d’une personne à charge admissible :

 

a)      le fait de surveiller les activités quotidiennes de la personne à charge admissible et de voir à ses besoins quotidiens;

 

b)      le maintien d’un milieu sécuritaire là où elle réside;

 

c)       l’obtention de soins médicaux pour elle à intervalles réguliers et en cas de besoin, ainsi que son transport aux endroits où ces soins sont offerts;

 

d)      l’organisation pour elle d’activités éducatives, récréatives, athlétiques ou semblables, sa participation à de telles activités et son transport à cette fin;

 

e)       le fait de subvenir à ses besoins lorsqu’elle est malade ou a besoin de l’assistance d’une autre personne;

 

f)       le fait de veiller à son hygiène corporelle de façon régulière;

 

g)      de façon générale, le fait d’être présent auprès d’elle et de la guider;

 

h)      l’existence d’une ordonnance rendue à son égard par un tribunal qui est valide dans la juridiction où elle réside.

 

[9]             Compte tenu de tous les critères susmentionnés, je peux seulement conclure que la preuve appuie fortement la thèse de l’appelante pour le critère énoncé à l’alinéa c), soit le maintien d’un milieu sécuritaire là où les enfants résident. La preuve établit de façon incontestable que l’appelante était propriétaire de la maison et qu’elle payait toutes les factures pour veiller à son entretien. L’apport financier de la fille était tout au plus minime, si l’on tient compte du fait que la fille demeurait dans la maison de l’appelante avec ses trois enfants et qu’elle ne versait à titre de loyer que la faible somme d’argent qu’elle recevait pour le paiement de ses frais de loyer, comme je l’ai mentionné plus haut. Une fois qu’elle avait versé à sa mère des sommes pour le loyer, il ne lui restait que très peu d’argent, comme nous avons pu le voir plus haut. J’admets que l’appelante a d’abord reçu la PFCE et le SPNE au lieu de la fille au cours de la période et que la fille ne disposait pas de ces fonds pour contribuer directement aux dépenses de la maison. Cependant, la preuve révèle aussi clairement que, même lorsque la fille a obtenu un paiement forfaitaire du gouvernement du Canada après qu’il eut été déterminé qu’elle était le particulier admissible, elle n’a pas utilisé ces fonds pour aider sa mère à entretenir la maison. Quoi qu’il en soit, bien que l’appelante ait reçu ces fonds, il est clair qu’elle les a utilisés pour entretenir la maison et pour subvenir aux besoins de sa fille et de ses petits‑enfants.

 

[10]        Pour ce qui est des autres critères, cependant, je dois conclure qu’ils appuient tous la thèse de la fille, C, selon laquelle C était la personne – père ou mère – qui assumait principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation des enfants en question.

 

[11]        Plus précisément, la preuve soutient le fait que la fille surveillait les activités quotidiennes des enfants et voyait à leurs besoins quotidiens, tel qu’il est énoncé au critère figurant à l’alinéa a) ci‑dessus. J’accepte le témoignage de la fille à ce sujet, qui est plus crédible. La fille a témoigné qu’elle ne travaillait pas pendant la période et que, comme sa mère travaillait, c’était elle qui réveillait les enfants, préparait leur petit déjeuner, habillait l’aîné, S, et l’envoyait à l’école, lequel s’y rendait à pied ou en prenant l’autobus à quelques rues de la maison, et qui surveillait sa fille d’âge préscolaire, N, ainsi que de son bébé, D. Elle les emmenait avec elle trois fois par semaine, le matin, à Hope Place, qui avait une garderie, pour assister aux séances de counseling qui lui étaient offertes dans le cadre du programme d’aide aux toxicomanes. J’accepte le témoignage de la fille selon lequel c’était elle qui était à la maison pour accueillir son fils lorsqu’il revenait de l’école, qui l’aidait à faire ses devoirs et qui préparait le repas du soir et mettait les enfants au lit. Il n’est pas contesté que c’était C qui avait inscrit les enfants à l’école après avoir emménagé chez sa mère et que c’était aussi elle qui avait pris des dispositions pour que son fils S puisse avoir recours au service de transport scolaire.

 

[12]        J’accepte également le fait que l’appelante, en tant que grand‑mère aimante, ait aussi participé à ces activités de temps à autre, mais il est clair que l’appelante, qui travaillait par postes pour deux employeurs différents, n’aurait tout simplement pas pu être présente de façon régulière pour être la personne qui surveille principalement ces activités quotidiennes. Elle venait peut‑être bien à la maison pendant ses pauses pour voir si tout allait bien avec sa fille et ses petits‑enfants, comme elle l’a déclaré dans son témoignage, mais, bien qu’une telle chose puisse donner à penser que l’appelante avait un rôle de surveillance générale, cela ne veut pas dire qu’elle surveillait directement les petits‑enfants.

 

[13]        Il convient aussi de souligner qu’un ancien locataire de l’appelante, un certain L.C., qui a déménagé à l’époque où la petite‑fille de l’appelante, D, est née, en 2008, a laissé entendre dans son témoignage que, même lorsque la fille de l’appelante était à la maison, elle dormait tard, en partie en raison de sa consommation d’alcool, et que l’appelante et lui devaient donc surveiller l’autre fille qui vivait alors à la maison, mais, franchement, son témoignage était vague. Il n’a donné aucune précision quant aux tâches ou aux responsabilités qu’il avait assumées à l’égard des enfants, et il a admis qu’il effectuait des postes de nuit de six à sept jours par semaine. À mon avis, il n’est pas crédible qu’il soit constamment resté éveillé pour assumer de telles responsabilités. Quoi qu’il en soit, il est clair qu’il n’était pas là pendant la période en cause et qu’il ne peut pas parler de ce qui se passait à ce moment‑là. Par conséquent, je ne peux pas accorder de poids à son témoignage visant à mettre en doute la crédibilité de la fille de l’appelante, C, et la capacité de celle‑ci à prendre soin de ses enfants. Ce témoignage confirme tout au plus que l’appelante elle‑même n’était pas disponible pour assumer ces tâches.

 

[14]        En ce qui concerne les critères énoncés aux alinéas c) à g) ci‑dessus, de façon générale, je conclus que, bien que l’appelante ait peut‑être parfois conduit les enfants chez le médecin ou assisté à une partie de soccer de son petit‑fils S ou au spectacle de danse de sa petite‑fille N ou généralement pris part aux autres activités décrites dans les critères susmentionnés, il ressort de la preuve que c’était C qui prenait les rendez‑vous chez le médecin de famille, chez le dentiste ou chez l’ophtalmologiste et qui les amenaient à leurs rendez‑vous en autobus la majorité du temps, que c’était C qui avait pris des dispositions pour inscrire S au soccer et qui assistait à ses parties, que c’était elle qui avait pris des dispositions pour que N suive des cours de danse et qui l’emmenait à chacun de ses cours, que c’était elle qui avait pris des dispositions pour que S suive des cours de natation et qu’elle l’y emmenait, et que c’était elle qui avait pris des dispositions pour inscrire S, et par la suite N, aux Grand Frères Grandes Sœurs pour qu’ils puissent être guidés, avoir de la compagnie et être exposés à des modèles de même sexe et à l’influence de personnes du même sexe qu’eux. Il me paraît aussi évident que, comme l’appelante travaillait plus ou moins à temps plein, elle n’aurait pas pu jouer un rôle plus important pour ce qui est de ces activités, ou bien s’occuper des enfants quand ils étaient malades ou veiller à leur hygiène corporelle. C’était donc C qui faisait tout cela. Je suis certain que l’appelante faisait ce qu’elle pouvait pour aider sa fille, mais je ne peux pas conclure qu’elle assumait principalement la responsabilité à ce sujet. Il me semble clair que C était une mère au foyer qui assumait principalement ces tâches.

 

[15]        Je souligne aussi que le témoignage de l’appelante à l’égard de ces critères était vague et général. Elle n’a donné que peu de précisions en ce qui concerne les activités ou le rôle qu’elle a joué à l’égard de celles‑ci, alors que la fille a témoigné de façon précise au sujet du type d’activités qu’elle avait organisées pour les enfants ou surveillées. Je conclus donc que son témoignage est plus fiable que celui de l’appelante à ce sujet.

 

[16]        En ce qui concerne le critère énoncé à l’alinéa h), soit l’existence d’une ordonnance rendue à l’égard des enfants, il convient de souligner qu’il n’y en a pas. Rien ne permet de penser que C ne détenait pas d’autorité légale à l’égard des enfants ou qu’elle n’en avait pas la garde.

 

[17]        L’appelante a beaucoup parlé d’un plan de services signé par la société d’aide à l’enfance (la « SAE ») et daté du 9 octobre 2008 qui montre que l’appelante assumait principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation des enfants, mais, franchement, à mon avis, un tel plan de services n’a pas pour effet de transférer ou de donner un tel statut ou rôle à l’appelante. Le plan de services traite clairement de la nécessité, pour la fille, d’obtenir de l’aide pour son problème d’alcoolisme et de toxicomanie et il y est reconnu que la force de C était le fait qu’elle bénéficiait d’un appui solide de la part de sa famille et que l’appelante avait été chargée d’assurer la sécurité des enfants. À mon avis, la tâche de l’appelante était d’être vigilante, particulièrement compte tenu des problèmes d’alcoolisme et de toxicomanie de sa fille. On ne lui avait pas confié un rôle de surveillance ou la garde des enfants. À mon avis, si on avait voulu le faire, on l’aurait précisé clairement de façon plus officielle.

 

[18]        Le seul autre élément de preuve concernant la question était le compte rendu d’une conférence de gestion du dossier datant du 15 janvier 2009, qui a été admis en preuve en tant que compte rendu d’une réunion tenue entre le représentant de la SAE, divers représentants de programmes de santé, C et l’appelante. Le compte rendu montrait que C s’était acquittée des obligations qui lui incombaient au titre du plan de services, et la SAE a même mentionné ce qui suit au paragraphe 6 du document :

 

[traduction]

Christine Galati de la SAE signale qu’un dossier de protection de l’enfance a été ouvert en avril 2008 en raison de la consommation de drogue et d’alcool de C et des répercussions sur les enfants de C. Celle‑ci a répondu aux attentes de la SAE depuis que Christine est devenue la travailleuse chargée du dossier en septembre 2008, et, à l’heure actuelle, la SAE n’interviendrait pas si C choisissait de quitter la maison de sa mère et de vivre de façon autonome avec ses enfants.

 

[19]        Il ressort clairement de ce qui précède que la SAE a ouvert un dossier pour surveiller la conduite de C et les répercussions de sa conduite sur les enfants, qu’elle a pris des dispositions pour établir un plan de services qui exigeait que C obtienne l’aide de professionnels et du counseling pour ses problèmes d’alcoolisme et de toxicomanie alors que ses enfants et elle vivaient en sécurité dans la maison de l’appelante et qu’elle a clairement décidé que C avait honoré son engagement et convaincu la SAE qu’elle ne constituait plus une menace pour ses enfants; tout cela, avant même que la période ait commencé. J’ajouterais également que cela discrédite davantage l’allégation de l’appelante selon laquelle sa fille n’avait pas la capacité de prendre soin de ses enfants au cours de la période. Selon la preuve, elle en avait la capacité.

 

[20]        Compte tenu de ce qui précède, je conclus que l’appelante n’assumait pas principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation des enfants en question et qu’elle n’était donc pas le « particulier admissible » au cours de la période.

 

[21]        Il ne fait aucun doute que, durant la période et au cours des grossesses précédentes de la fille, l’amour et le soutien de l’appelante ont grandement aidé sa fille à conserver la garde de ses enfants. Il ne fait aucun doute que, bien que la fille ait témoigné qu’elle quittait souvent la maison de sa mère parce que la situation était [traduction] « insoutenable », en faisant référence à la relation tendue qu’elle avait avec sa mère, qu’elle accusait de vouloir tout contrôler, elle n’avait aucune difficulté à tolérer sa mère lorsque cette dernière subvenait à ses besoins financiers et à ceux de ses enfants dans la mesure où elle le faisait. Je n’ai aucun doute que l’appelante a utilisé les fonds qu’elle a reçus au titre de la PFCE et du SPNE au cours de la période, avant qu’on lui demande de rembourser ce qu’elle avait reçu, pour le bien de ceux à qui les fonds étaient destinés, soit les enfants et leur mère C. La preuve révèle l’histoire d’une mère qui a à plusieurs reprises ouvert sa maison, son cœur et son portefeuille pour sa fille et ses petits‑enfants. Il m’est presque intolérable de me prononcer en faveur de l’intimée en l’espèce, car les fonds ont été utilisés aux fins auxquelles ils étaient destinés, comme cela aurait dû être le cas si les fonds avaient été remis à la fille dès le début. Cependant, compte tenu de mon analyse du droit et des faits, je dois conclure que l’appelante n’était pas le particulier admissible qui avait le droit de recevoir les prestations au cours de la période, aussi malheureux, ingrat, voire même insultant que cela puisse paraître pour l’appelante dans les circonstances. Il est regrettable que le système permette que des fonds soient versés à un nouveau particulier admissible et qu’il soit demandé à un ancien particulier admissible de rembourser les fonds qu’il a reçus lorsque ces fonds ont dans les faits été utilisés aux fins auxquelles ils étaient destinés, mais c’est au législateur qu’il appartient d’examiner cette question, et non à la Cour.

 

[22]        L’appel est rejeté.

 

 

       Signé à Toronto (Ontario), ce 19e jour de mars 2014.

 

 

« F.J. Pizzitelli »

Juge Pizzitelli

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour d’avril 2014.

 

Marie-Christine Gervais, traductrice

 


RÉFÉRENCE :                                 2014 CCI 88

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :   2012-1854(IT)I

 

INTITULÉ :                                      SARA PEIXOTO DAFONSECA c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                Thunder Bay (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 17 mars 2014

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L’honorable juge F.J. Pizzitelli

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 19 mars 2014

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelante :

MRandall V. Johns

 

Avocat de l’intimée :

MRyan Gellings

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                          Nom :                     Randall V. Johns

 

                          Cabinet :                 Randall V. Johns Law Office

                                                          Thunder Bay (Ontario)

 

       Pour l’intimée :                          William F. Pentney

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

 

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