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Cour fédérale

Federal Court


 

Date : 20090519

Dossier : IMM-3211-08

Référence : 2009 CF 509

Ottawa (Ontario), le 19 mai 2009

En présence de monsieur le juge Lemieux

 

 

ENTRE :

Me TIMOTHY E. LEAHY

et

FOREFRONT MIGRATION LTD.

 

demandeurs

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Se fondant sur les articles 51 et 369 des Règles des Cours fédérales, les demandeurs interjettent appel de l’ordonnance du 12 février 2009 dans laquelle le protonotaire Aalto a radié leur demande d’autorisation et de contrôle judiciaire, sans autorisation de la modifier, et a rejeté leur demande visant à faire réunir cette demande d’autorisation et de contrôle judiciaire avec une autre demande déjà déposée devant la Cour.

 

[2]               Le protonotaire Aalto a fondé sa décision sur trois motifs. Premièrement, il était d’avis que les demandeurs n’avaient pas qualité pour présenter la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire parce qu’ils n’étaient pas directement touchés par l’objet de la demande aux termes du paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales (la Loi). Deuxièmement, une autre demande visant à obtenir la même mesure de réparation avait été présentée à la Cour. Troisièmement, la demande présentée était frivole et vexatoire et constituait un abus de procédure.

 

Norme de contrôle

[3]               La Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Merck & Co. c. Apotex Inc., 2003 CAF 488, en s’appuyant sur l’arrêt Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd. (C.A.), [1993] 2 C.F. 425, a conclu que, lors d’un appel visant la décision d’un protonotaire, la cour doit d’abord décider si les questions soulevées dans l’appel ont une influence déterminante sur l’issue du principal. Le cas échéant, la cour doit trancher la question une nouvelle fois. Si le critère de l’influence déterminante n’est pas rempli, l’ordonnance discrétionnaire du protonotaire ne doit pas être annulée en appel, à moins qu’elle ne soit entachée d’une erreur flagrante.

 

[4]               En l’espèce, l’ordonnance du protonotaire a une influence déterminante sur l’issue du principal parce que la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire des demandeurs a été radiée sans qu’il ne soit possible de la modifier.

 

Faits

[5]               M. Leahy agit en qualité d’avocat général et de directeur du deuxième demandeur, Forefront Migration Ltd. (Forefront), qui se spécialise dans le domaine de l’immigration.

 

[6]               Le 21 juillet 2008, les demandeurs ont déposé en leur propre nom, en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (la LIPR), une demande d’autorisation auprès de la Cour visant à faire contrôler judiciairement [traduction] « la décision du 16 juin 2008 que Mme Susan Burrows, gestionnaire des opérations, a rendue dans le dossier nB0527 22014 (MWA) au Consulat général du Canada [...] Hong Kong [...] empêchant la réunion d’un enfant de douze ans et de son père au Canada ».

 

[7]               Pourtant, cette même décision fait l’objet d’une autre demande d’autorisation et de contrôle judiciaire présentée par M. Tse-King Fu et M. Ko‑Cheung Fu, à titre de demandeurs, dans le dossier de la Cour nIMM-3214-08. Cette demande a été signée par M. Ko‑Cheung Fu, comme demandeur, aux soins de Forefront. Cette demande d’autorisation a été préparée par M. Leahy ou Forefront et invoque les mêmes moyens que ceux invoqués dans la demande du dossier nIMM‑3211‑08, soit la prise en compte de considérations non pertinentes.

 

[8]               M. Ko‑Cheung Fu, un résident permanent au Canada, a présenté au Consulat général du Canada à Hong Kong, avec l’aide de M. Leahy et Forefront, une demande de visa de résident permanent pour son fils en invoquant des considérations d’ordre humanitaire. Mme Susan Burrows a rejeté cette demande le 16 juin 2008. M. Ko-Cheung Fu était représenté pour cette demande par M. Leahy et Forefront.

 

Analyse et conclusions

[9]               Suivant le paragraphe 72(1) de la LIPR, le contrôle judiciaire par la Cour de toute décision prise dans le cadre de la LIPR est subordonné au dépôt d’une demande d’autorisation.

 

[10]           Les Règles des cours fédérales en matière d’immigration et de protection des réfugiés prévoient les règles de procédure et de forme applicables aux demandes d’autorisation.

 

[11]           Si la demande d’autorisation est accueillie, l’affaire fait l’objet d’un contrôle judiciaire en application de la Loi sur les Cours fédérales. Le paragraphe 18.1(1) de cette loi prévoit qu’une demande de contrôle judiciaire peut-être présentée par « quiconque est directement touché par l’objet de la demande ».

 

[12]           Le paragraphe 221(1) des Règles des Cours fédérales prévoit que la Cour peut radier un acte de procédure qui est « scandaleux, frivole ou vexatoire ». Dans l’arrêt David Bull Laboratories (Canada) Inc. c. Pharmacia Inc., [1995] 1 C.F. 588 (C.A.), la Cour d’appel fédérale a conclu que la Cour fédérale jouissait d’une compétence inhérente pour rejeter une demande de contrôle judiciaire « qui [était] manifestement irréguli[ère] au point de n’avoir aucune chance d’être accueilli[e] ».

 

[13]           En l’espèce, la Cour est saisie de deux demandes d’autorisation et de contrôle judiciaire reposant sur les mêmes moyens, dans lesquelles les demandeurs sollicitent comme mesure de réparation principale l’annulation de la décision de Mme Susan Burrows du 16 juin 2008, laquelle rejetait la demande parrainée par M. Ko‑Cheung Fu pour que son fils puisse obtenir la résidence permanente.

 

[14]           La demande en cause en l’espèce (IMM‑3211‑08) a été présentée au nom de M. Leahy et de Forefront comme demandeurs. L’autre demande (IMM‑3214‑08) a été déposée par M. Leahy et désigne comme demandeurs les parties directement touchées par la décision et par l’objet de la demande.

 

[15]           Il est clair et évident que la demande présentée dans le dossier nIMM‑3211‑08 est irrégulière et qu’elle n’a aucune chance d’être accueillie.

 

[16]           Le protonotaire Aalto s’est appuyé sur la jurisprudence citée par l’avocat du ministre pour conclure que les demandeurs en l’espèce, M. Leahy et Forefront, n’avaient pas d’intérêt direct et que leur demande devait être radiée. Il a aussi conclu que la demande avait le même objet que celle présentée dans le dossier nIMM‑3214‑08. Finalement, il a conclu que la demande en cause en l’espèce était vexatoire.

 

[17]           Je connais bien la jurisprudence citée par l’avocat du ministre concernant chacun des trois motifs distincts invoqués par le protonotaire Aalto pour radier la demande. Cette jurisprudence étaye amplement ma décision et la sienne.

 

[18]           M. Leahy, dans ses observations présentées à l’appui de l’appel, n’a pas traité sur le fond de cette jurisprudence pertinente en l’espèce. Le présent appel est sans fondement et est encombré d’observations qui passent à côté de la question. L’adjudication des dépens en faveur du ministre est donc justifiée dans les circonstances.


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que le présent appel est rejeté avec dépens.

 

                                                                                                           « François Lemieux »             

                                                                                                                        Juge

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3211-08

 

INTITULÉ :                                       Me TIMOTHY E. LEAHY et al. c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

JUGÉ SUR DOSSIER :                    Ottawa (Ontario)

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Lemieux

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 19 mai 2009

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

Timothy E. Leahy

Avocat général et directeur

Forefront Migration Ltd.

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

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