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Cour fédérale

 

 

 

 

 

 

 

 

Federal Court

 


 

 

 

Date: 20090817

Dossier : IMM-4796-08

Référence : 2009 CF 831

Ottawa (Ontario), le 17 août 2009

En présence de monsieur le juge Mandamin

 

 

ENTRE :

SHADI JABBOUR

SAMAH AMUN

NDAL AMUN

 

demandeurs

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (le tribunal) a rejeté la demande d’asile des demandeurs.

 

CONTEXTE

[2]               La demanderesse principale, Mme Samah Amun, est une citoyenne d’Israël. Elle est une Palestinienne divorcée de confession musulmane qui est maintenant mariée avec le demandeur Shadi Jabbour, un Palestinien de confession chrétienne qui est lui aussi citoyen d’Israël. Mme Amun a un fils, Ndal Amun, qui est né en Israël et est le demandeur mineur dans la présente demande. Mme Amun et M. Jabour ont un fils ensemble, Joel Loaay Shadi Jabbour, qui est né au Canada et qui n’est pas partie à la présente demande.

 

[3]               Les demandeurs adultes se sont rencontrés en Israël. Le demandeur, M. Jabbour, a fait preuve de gentillesse envers Mme Amun, une musulmane divorcée. Ils ont entrepris une relation qu’ils ont gardée secrète, parce qu’elle est de confession musulmane et qu’il est de confession chrétienne. La famille de Mme Amun n’aurait jamais approuvé sa relation avec un chrétien. Sa famille et son voisinage l’épiaient en raison de son statut de femme divorcée.

 

[4]                La famille de Mme Amun a eu connaissance de la relation lorsque des membres du personnel hospitalier leur ont fait mention d’un accident de voiture dont Mme Amun et M. Jabour ont été victimes en 2002. Malgré la désapprobation de la famille, le couple a secrètement continué sa relation.

 

[5]               Afin de garder leur relation secrète, Mme Amun a eu recours à trois avortements, sous les conseils d’un médecin qui connaissait les périls auxquels elle s’exposait si elle devait avoir un enfant avec un homme de confession chrétienne. Les deux premiers avortements ont eu lieu en 2000 et en 2001. La mère de M. Amun a découvert la relation au moment du troisième avortement en 2005, mais sa fille l’a convaincue de garder la relation secrète.

 

[6]               Au cours de cette période, Mme Amun était suivie et est devenue victime de vandalisme. Elle a dit avoir joint les forces policières afin d’obtenir de l’aide, mais s’est fait répondre qu’il était impossible de faire quoi que ce soit, à moins qu’elle n’identifie les malfaiteurs. Après qu’un membre de sa famille l’ait harcelée, son frère lui a dit que sa famille nierait qu’il se soit passé quoi que ce soit si elle signalait l’incident. Lorsqu’elle a porté plainte à la police, Mme Amun a été dirigée vers un autre agent, qui lui a proposé d’agir comme informatrice, ce qui lui assurait la protection de la police. Elle a refusé, parce que cela remettrait en question sa sécurité dans sa communauté

 

[7]               M. Jabbour a affirmé avoir reçu des appels de menace. Des gens ont lancé des bouteilles et des pierres sur les locaux de son entreprise. Il s’est adressé aux forces policières, mais s’est heurté à la même réponse que Mme Amun. Les forces policières ont dit ne pouvoir rien faire puisqu’il n’était pas en mesure d’identifier les malfaiteurs.

 

[8]               En 2005, M. Jabbour a cherché à faire la paix en demandant officiellement la permission de se marier avec Mme Amun. La famille de celle-ci a rejeté la proposition. Deux des frères de Mme Amun ont assailli cette dernière. Un troisième a menacé de tuer M. Jabbour, ainsi que de réduire sa ville en cendres si sa sœur se mariait avec le chrétien.

 

[9]               Mme Amum craignait que ses frères la tuent pour défendre l’honneur de la famille. La menace d’un meurtre d’honneur était fondée sur la relation qu’elle entretenait avec un homme de confession chrétienne et sur l’enfant qu’elle a eu avec lui.

 

[10]           Les demandeurs ont fui Israël en direction du Canada en septembre 2006, afin de vivre ensemble en toute sécurité. Ils se sont mariés à Mississauga le 27 février 2008, et leur fils est né le 7 avril 2008.

DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE JUDICIAIRE

[11]           La demande d’asile des demandeurs est fondée sur les motifs suivants prévus dans la Convention : la religion, la nationalité, les opinions politiques et l’appartenance à un certain groupe social, soit une famille biconfessionnelle. Les demandeurs ont affirmé que leur vie était en danger, et qu’ils risquaient des traitements ou peines cruels et inusités en Israël.

 

[12]           Le tribunal a conclu que les demandeurs craignaient à tort d’être persécutés du fait d’un motif prévu par la Convention en Israël, que leur vie n’était pas en danger et qu’ils ne risquaient aucun traitement ou peine cruels et inusités.

 

[13]           Le tribunal a conclu que les demandeurs n’avaient pas fourni une preuve suffisante pour montrer qu’ils ont tenté d’obtenir la protection de l’État ou que la protection de l’État ne leur était tout simplement pas accessible. Le tribunal n’était pas convaincu non plus qu’il aurait été déraisonnable de solliciter la protection de l’État en Israël.

 

[14]           Le tribunal a examiné la preuve documentaire et a conclu que la discrimination envers les Arabes d’Israël existait, mais pas à un degré assimilable à la persécution. Le tribunal cite le International Religious Freedom Report 2003, qui énonce qu’Israël confère [traduction] « la pleine égalité sociale et politique à ses citoyens, sans égard à leur appartenance religieuse ».

 

[15]           Le tribunal a examiné la question de la possibilité d’un meurtre d’honneur, puisque la demanderesse allègue qu’elle aurait subi ce sort; cependant, le tribunal a rejeté sa prétention, déclarant ce qui suit :     

En l’espèce, aucun document versé au dossier ne me permet de conclure que les autorités israéliennes ne prendraient pas les mesures qui s’imposent si une menace de meurtre d’honneur leur était signalée. Rien ne laisse entendre que les policiers ne donneraient pas une suite à une plainte faisant expressément état d’un musulman palestinien ou d’un membre de la communauté musulmane ayant proféré une quelconque menace de mort à l’endroit d’une personne ou ayant menacé d’incendier une ville, ou que les policiers seraient incapables d’enquêter sur une plainte de ce genre.

 

[16]           Le tribunal n’a pas exprimé de doutes au sujet de la crédibilité des demandeurs adultes.

 

QUESTIONS

[17]           Les questions en litige en l’espèce sont les suivantes :

a.       Le tribunal a-t-il commis une erreur de droit dans son analyse de la protection de l’État en omettant d’évaluer le caractère adéquat de celle-ci?

b.      Le tribunal a-t-il commis une erreur en se fondant de manière sélective sur la preuve documentaire?

 

NORME DE CONTRÔLE

[18]           La question de savoir s’il y a une protection de l’État adéquate est une question de fait. Avant que ne soit rendu l’arrêt Dunsmuir, la norme de contrôle appliquée était celle de la décision manifestement déraisonnable : Judge c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1089; Czene c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 723; Charway c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 577. Depuis l’arrêt Dunsmuir, la norme de contrôle à appliquer est celle de la raisonnabilité. Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9.

 

[19]           Pourvu que les motifs du tribunal soient « capable[s] de résister à un examen assez poussé », la décision du tribunal est raisonnable et la Cour ne la modifiera pas : Barreau du Nouveau‑Brunswick c. Ryan, 2003 CSC 20, au paragraphe 55.

 

[20]           La Section de la protection des réfugiés est un organisme spécialisé expert dans son domaine. Les éléments de preuve concernant les conditions dans le pays et la disponibilité de la protection de l’État font partie de son champ d’expertise. La Cour ne devrait pas modifier la décision du tribunal, à moins que cette dernière n’ait été rendue de manière arbitraire ou que le tribunal n’ait pas tenu compte d’éléments de preuve admissibles et pertinents. Une fois que ces faits sont établis, les demandeurs doivent réfuter la présomption de la protection de l’État. Muszynski c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1075, aux paragraphes 7 et 8.

 

 

ANALYSE

[21]           Les demandeurs prétendent que le tribunal a mal compris le critère de la protection de l’État : soit, que la présomption de la capacité d’un État de protéger ses citoyens peut être réfutée par une preuve claire et convaincante. Les demandeurs prétendent que le tribunal a commis une erreur révisable en manquant à son obligation d’examiner la preuve documentaire objective se rapportant à la situation des demandeurs. Les demandeurs prétendent qu’il s’agit d’une erreur de droit, car le tribunal n’a pas tenu compte de la preuve qui indiquait que les Arabes d’Israël étaient traités comme des citoyens de seconde zone.

 

[22]           Le tribunal, en évaluant la possibilité pour les demandeurs d’obtenir la protection de l’État, doit tenir compte de l’attitude des forces policières à l’égard des Palestiniens vivant en Israël et de l’efficacité des mesures policières dans le cas des meurtres d’honneur.

 

[23]           Le tribunal a fait remarquer qu’Israël est un État démocratique muni d’un appareil judiciaire indépendant, et que les Arabes d’Israël sont assujettis aux mêmes lois que tous les autres citoyens. Le tribunal était convaincu que la raison pour laquelle les forces policières n’ont pas aidé les demandeurs était que ces derniers n’avaient pas fourni suffisamment d’information au sujet de l’identité des gens qui les harcelaient.

 

[24]           Le défendeur prétend que les demandeurs ont le fardeau de prouver la totalité des aspects de leur demande d’asile. Le tribunal n’était pas convaincu parce que les demandeurs n’ont pas réussi à réfuter la présomption d’existence de la protection de l’État.

 

[25]           Le défendeur prétend qu’il était loisible au tribunal de préférer certains éléments de preuve documentaire à d’autres. En l’espèce, le tribunal a examiné la preuve qui relevait des failles dans la protection de l’État en Israël, mais a conclu que la discrimination qui s’ensuivait ne pouvait être qualifiée de persécution. Le tribunal a le droit d’accorder plus de poids à la preuve documentaire, même lorsqu’il accepte le témoignage du demandeur. Szucs c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] A.C.F. no 1614, au paragraphe 11.

 

[26]           Le défendeur prétend que certains meurtres étaient fort probablement des crimes d’honneur, mais que cela ne signifie pas qu’une protection adéquate de l’État ne soit pas disponible. Il prétend aussi que les enquêtes et les poursuites intentées par Israël dans ces affaires indiquent que ce pays protège ses citoyens arabes contre les meurtres d’honneur.

 

[27]           Il incombe aux demandeurs de solliciter la protection de l’État, lorsque cela est possible, et de réfuter la présomption de la protection de l’État avec une preuve claire et convaincante que l’État était incapable ou refusait de les aider. Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689. Le fardeau de preuve pour réfuter la présomption de la protection de l’État est proportionnel au degré de démocratie de cet État : plus l’État est démocratique, plus le fardeau pour les demandeurs de prouver qu’ils ont épuisé tous les recours à leur disposition sera lourd : Kadenko c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1996] A.C.F. no 1376, au paragraphe 5.

 

[28]           Dans la décision Gonsalves c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration.), 2008 CF 844, au paragraphe 16, la Cour a confirmé le principe selon lequel les demandeurs d’asile n’ont pas à mettre leur vie en danger lorsqu’ils sollicitent la protection de l’État, simplement pour démontrer son inefficacité.

 

[29]           Dans la décision Erdogu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 407, j’ai conclu que la décision du juge Gibson dans Elcock c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] A.C.F. no 1438, au paragraphe 15, demeure valide en droit : « Non seulement le pouvoir protecteur de l'État doit-il comporter un encadrement légal et procédural efficace, mais également la capacité et la volonté d'en mettre les dispositions en œuvre. » Dans Erdogu, j’ai mentionné que le gouvernement turc avait fait des efforts afin de régler le problème des meurtres d’honneur, mais que celui-ci était tellement persistant que l’efficacité des efforts devait être prise en considération.

 

[30]           Dans Rosales c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 1454, et Horvath c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 398, la Cour a conclu que, lorsque le tribunal « arrive à une conclusion qui ne tient manifestement pas compte d'une preuve pertinente et écrasante opposée à cette conclusion, sa décision doit être renversée ». Rosales, au paragraphe 7.

 

[31]           Contrairement à la conclusion du tribunal voulant qu’il n’y ait rien dans les éléments de preuve qui indiquait que les forces policières ne donneraient pas suite au signalement d’une menace de meurtre d’honneur, le tribunal était saisi d’éléments de preuve qui soulevaient la question de l’efficacité de la protection des forces policières dans les cas de menaces de meurtre d’honneur proférées à l’endroit d’une musulmane. Il n’a pas bien tenu compte d’éléments de preuve hautement pertinents concernant la question de la protection des femmes faisant l’objet de menaces de meurtre d’honneur.

 

[32]           Le tribunal a traité Mme Amun comme un témoin crédible, et le témoignage de cette dernière est présumé être vrai. Elle a livré le témoignage suivant :

[traduction]

Lorsque je suis allée demander la protection des forces policières contre ce que ma famille me faisait subir et contre le harcèlement dont j’étais la cible, je suis allée me plaindre à la police, comme d’habitude. On m’a envoyée à un bureau différent, où il n’y avait qu’une seule personne; celle-ci a commencé à prendre des renseignements au sujet de ma situation. Donc, cette personne m’a dit : oui, je t’ai entendu, laissez-moi réfléchir à votre problème, voici ma carte, dès que vous entendez quelque chose qui pourrait m’intéresser, veuillez me contacter. Évidemment, c’était très clair pour moi, et il l’a même expliqué, qu’il voulait des renseignements à propos des activités, des gens, ce que ceux-ci faisaient, ce que ceux-ci ne faisaient pas. Cela n’avait rien à voir avec le problème que je lui signalais.

 

[. . .]

 

J’étais certaine que c’était ça. Je ne faisais pas partie de la bonne catégorie, je devenais donc une informatrice, une agente. Mais si j’acceptais l’offre, je me plaçais dans une situation encore plus dangereuse.

 

 

[33]           Le tribunal a considéré son compte-rendu de la proposition des forces policières voulant qu’elle s’assure de leur protection en devenant une informatrice pour elles au sein de la communauté palestinienne à un simple partage de renseignements. Il a aussi déclaré : « Toutefois, je ne suis pas [convaincu] qu’il est possible d’assimiler le fait de fournir des renseignements de ce genre à un rôle d’informateur à propos de la communauté arabe pour le compte des services de sécurité israéliens. » Le tribunal n’a jamais traité de la propension des forces policières à ne pas protéger une victime, à moins que celle-ci ne devienne une informatrice.

 

[34]           La Réponse à la demande d’information (la RDI) ISR102085 EF de la Direction des recherches est le rapport de la Section de la protection des réfugiés au sujet des meurtres d’honneur en Israël, et est hautement pertinent.

 

[35]           Avant de se référer à la RDI, le tribunal a déclaré : « [J]’admets, toutefois, que ce genre de meurtre se produit en Israël, quoique rarement. » Le tribunal s’est ensuite référé à la RDI, en disant que les « meurtres d’honneur » causent la mort d’environ 10 femmes israélo-arabes chaque année. Le tribunal a fait remarquer que la communauté arabe d’Israël défend peu les meurtres d’honneur, que les forces policières israéliennes mènent des enquêtes sérieuses lorsque des meurtres surviennent, et que le droit israélien ne reconnaît pas de circonstances atténuantes dans de tels cas.

 

[36]           Cependant, la RDI dresse un portrait différent. Elle indique qu’Al-Badil, une organisation arabe féministe, mentionne que des mesures législatives et policières sévères doivent être prises à l’endroit des auteurs de meurtres d’honneurs au sein de la communauté arabe. Al-Badil reproche à l’État israélien d’avoir négligé de remédier au problème de manière appropriée, une opinion partagée par l’organisation Femmes contre la violence, établie à Nazareth.

 

[37]           La RDI signale que le groupe de travail sur le statut des femmes palestiniennes citoyennes d’Israël, un réseau d’ONG comprenant six organisations de femmes israélo-arabes, a énoncé qu’il est de l’obligation de l’État de prendre des mesures pour éliminer la pratique des meurtres « d’honneur ». Citant les résultats d’une recherche effectuée sur les crimes d’honneur contre les femmes palestino-israéliennes, le groupe de travail a indiqué que dans cinq des vingt-cinq cas étudiés, les victimes ont sollicité l’aide de la police avant d’être assassinées; la police n’avait offert aucune assistance.  

 

[38]           La RDI signale qu’en avril 2006, la police a arrêté un médecin ainsi que ses quatre frères pour le meurtre de sa sœur parce qu’elle refusait d’épouser l’homme qu’ils avaient choisi pour elle. La police, qui la surveillait pour sa sécurité, a remarqué sa disparition « lorsqu’elle ne s’est pas présentée à une rencontre visant à assurer sa sécurité ». Le tribunal n’a émis aucun commentaire sur le caractère inadéquat des mesures de protection adoptées par les forces policières, alors que la victime avait l’obligation d’aller les rencontrer afin de démontrer qu’elle était en sécurité.

 

[39]           La RDI a indiqué qu’entre les mois d’avril et de juin 2006, soit quelques mois avant que les demandeurs ne fuient en direction du Canada en septembre, cinq meurtres d’honneur ont eu lieu, ce qui va à l’encontre de la conclusion du tribunal voulant que les meurtres d’honneur se produisaient, « quoique rarement ».

 

[40]           En dépit de la preuve documentaire ci-dessus, le tribunal a formellement déclaré :

En l’espèce, aucun document versé au dossier ne me permet de conclure que les autorités israéliennes ne prendraient pas les mesures qui s’imposent si une menace de meurtre d’honneur leur était signalée. [Non souligné dans l’original.] 

 

[41]           De plus, les documents d’information présentés par les demandeurs démontrent que les Palestiniens de confession chrétienne ont aussi des difficultés à obtenir la protection des forces policières israéliennes. Le tribunal convient que les Palestiniens sont victimes de discrimination en Israël. Cependant, il n’évalue pas la preuve documentaire concernant la question de savoir si une telle discrimination a un effet sur la protection offerte par les forces policières aux communautés concernées. Le rapport ISR42767.E de la Direction des recherches fait référence à plusieurs articles de journaux faisant étant de plaintes au sujet de l’inaction et de l’inefficacité des forces policières lorsqu’elles composent avec la violence commise à l’endroit d’Arabes de confession chrétienne. En dépit des rapports, le tribunal a déclaré :

Rien ne laisse entendre que les policiers ne donneraient pas une suite à une plainte faisant expressément état d’un musulman palestinien ou d’un membre de la communauté musulmane ayant proféré une quelconque menace de mort à l’endroit d’une personne ou ayant menacé d’incendier une ville, ou que les policiers seraient incapables d’enquêter sur une plainte de ce genre. [Non souligné dans l’original.]  

 

[42]           Il incombe au tribunal de répondre à la question du caractère pratique et adéquat de la protection de l’État lorsqu’une menace à la vie ou à la sécurité d’un demandeur d’asile est admise. Je conclus que le tribunal n’a pas répondu de manière appropriée à cette importante question. En fait, il a explicitement nié l’existence de la preuve des demandeurs au sujet de cette question cruciale.

 

[43]           Dans Galiano c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1996] A.C.F. n1629, la Cour a annulé la décision du tribunal parce que celui-ci n’avait pas tenu compte d’informations pertinentes et propres à la demande. Je conclus que les motifs du tribunal dans la décision visant la demande ne tenaient pas compte d’éléments de preuve portant directement sur la demande d’asile des demandeurs.

 

[44]           Je conclus que la présente demande de contrôle judiciaire doit être accueillie et que l’affaire doit être renvoyée à un tribunal différemment constitué pour nouvelle décision.

 


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

1.         La demande de contrôle judiciaire est accueillie et l’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué pour nouvelle décision.

 

2.                  Aucune question de portée générale n’est certifiée.

 

 

 

« Leonard S. Mandamin »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Maxime Deslippes, LL.B., B.A.Trad.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-4796-08

 

 

INTITULÉ :                                       SHADI JABBOUR, SAMAH AMUN,

DAL AMUN c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                   

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 29 avril 2009

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT              

ET JUGEMENT :                              Le juge Mandamin

 

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 17 août 2009

 

 

COMPARUTIONS :   

 

Krassina Kostadinov

 

POUR LES DEMANDEURS

Alexis Singer

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Waldman & Associates

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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