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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

                                        COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT

 

                                        LOI DE L’IMPÔT SUR LE REVENU

 

                                                                                                      Référence : 2007CCI296

                                                                                                       Dossier : 2005‑4348(IT)I

 

ENTRE :

 

ALLISON CLEMENT

appelante

 

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

et

 

                                                 ALESSANDRO D'OVIDIO

                                                                                                                           mis en cause

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT RENDUS ORALEMENT À L’AUDIENCE

PAR LE JUGE JOE E. HERSHFIELD,

aux bureaux du Service administratif des tribunaux judiciaires,

180, rue Queen Ouest, Toronto (Ontario),

le jeudi 19 avril 2007, à 13 h 45.

 

COMPARUTIONS :

 

M. Theodore Cowdrey                                                                   Représentant de l’appelante

Me Laurent Bartleman                                                                                  Avocat de l’intimée

 

Également présent :

 

M. Alessandro D'Ovidio

 

                                       A.S.A.P. Reporting Services Inc. 8 2007

 

200, rue Elgin, bureau 1004               130, rue King Ouest, bureau 1800

Ottawa (Ontario)  K2P 1L5               Toronto (Ontario)  M5X 1E3

613‑564-2727                                      416‑861-8720


                                 Toronto (Ontario)

MOTIFS DU JUGEMENT

(Révisés depuis la transcription des motifs rendus oralement à l’audience à Toronto (Ontario), le 19 avril 2007.)

LE JUGE HERSHFIELD : L’appelante interjette appel d’une nouvelle cotisation concernant son année d’imposition 2003, par laquelle la pension alimentaire pour enfants payée par son ex‑époux, d’un montant de 9 600 $, a été incluse dans son revenu. Conformément à une ordonnance rendue en vertu du paragraphe 174(3) de la Loi de l’impôt sur le revenu par le juge Bowie le 4 janvier 2007, l’ex‑époux de l’appelante, Alessandro D’Ovidio, a été joint à titre de partie à l’appel.

L’appelante et son ancien mari vivent séparés depuis le mois d’avril 1996 pour cause d’échec de leur mariage. Un jugement de divorce a été rendu au mois de novembre 2002 par la Cour supérieure de l’Ontario. L’appelante et son ancien mari ont trois enfants dont ils ont la garde conjointe, ces derniers résidant principalement chez l’appelante.


Un accord de séparation a été signé en 1996, aux termes duquel le mis en cause était tenu de payer, pour subvenir aux besoins des enfants, un montant mensuel de 1 000 $, soit 333 $ par enfant, ce montant étant indexé. D’autres contributions à certains coûts se rattachant à la garde d’enfant devaient également être faites.

Il s’agit ici de savoir si une date d’exécution a été établie après la conclusion de l’accord de 1996. Il n’est pas contesté que, selon une entente orale, les paiements mensuels fixes ont baissé vers le mois de juin 1998 à 800 $, soit 266 $ par enfant.

Un accord modificateur non signé a été présenté à l’audience. Cet accord fait état de la réduction du montant de la pension alimentaire pour enfants de 1 000 $ à 800 $. Selon le témoignage de l’appelante, l’accord indiquait un montant qui lui était unilatéralement imposé au titre de la pension et il avait été préparé pour le compte de son mari.

L’ancien mari a témoigné n’avoir jamais vu le document en question. Toutefois, il a reconnu que la pension alimentaire payée sur une base mensuelle régulière ou sur une base mensuelle fixe avait été ramenée à 800 $ par mois, conformément à une entente qu’ils avaient conclue oralement à ce moment‑là, mais il a également témoigné avoir continué à payer d’autres dépenses concernant les enfants, lesquelles s’élevaient à divers montants, de sorte que le total s’élevait peut‑être à environ 1 000 $, ou peut‑être même à plus de 1 000 $ par mois, au cours de certaines années.


Tel a été l’état des choses jusqu’au mois de novembre 2002, lorsque la requête en divorce a été présentée. Dans le cadre de cette instance, en 2002, les parties ont signé un affidavit dans lequel elles s’entendaient sur une pension alimentaire mensuelle de 266 $ par enfant. Une clause distincte de l’affidavit prévoyait que, compte tenu des frais d’environ 800 $ engagés chaque mois pour les enfants, il était convenu que le père verserait chaque mois 800 $ à la mère.

L’affidavit et l’accord écrit relatif à la pension alimentaire qui y était joint sont attestés par un commissaire autorisé. Il ne semble pas être contesté que cette entente, consignée par écrit, indiquait les obligations réelles acceptées et honorées par les parties depuis 1998. Cela ne veut pas dire pour autant que les parties s’entendaient sur un certain nombre d’autres points, en particulier sur la question de savoir si le changement, dès 1998, visait à les soumettre au régime fiscal applicable après 1997, selon lequel le payeur ne peut pas déduire la pension alimentaire pour enfants, cette pension étant par ailleurs libre d’impôt entre les mains du bénéficiaire.


L’ancien mari de l’appelante affirme ne pas avoir été au courant d’une telle conséquence à ce moment‑là, en 1998, ni plus tard en 2002. Il soutient que son ex‑épouse lui a unilatéralement imposé l’accord en vue de bénéficier d’un avantage fiscal. Selon le témoignage de l’appelante, c’était initialement son ancien mari qui avait eu l’idée de conclure l’entente, et celui‑ci savait que cela avait pour effet de modifier les obligations relatives à la pension alimentaire et il avait même produit ses déclarations de revenus, après 1998, en indiquant un paiement réduit.

L’avocat de l’intimée a signalé les incohérences de l’avis d’opposition de l’appelante par rapport au témoignage présenté par celle‑ci, et il a même réussi à faire admettre à l’appelante qu’elle avait engagé des poursuites en vue d’obtenir les arriérés même si elle a témoigné que son ancien mari avait payé le montant mensuel de 800 $ dont il avait été convenu.

J’ai écouté les témoins et, selon moi, ni l’un ni l’autre n’est crédible. L’hostilité qui existe entre les époux est encore manifeste et chacun présente son témoignage sous un jour qui est, selon lui, favorable à sa cause. En pareil cas, les documents parlent d’eux-mêmes. Je conclus donc que l’affidavit du mois de novembre 2002 constitue un accord écrit ramenant la pension alimentaire pour enfants de 1 000 $ à 800 $ par mois et que, cela étant, cet affidavit crée une date d’exécution, à savoir le 18 novembre 2002, soit la date à laquelle l’affidavit a été souscrit devant le commissaire.


Je note ici que c’est le paragraphe 56.1(4) qui indique la façon dont la date d’exécution est établie. Cette disposition prévoit que cette date, soit la date à laquelle le montant de la pension alimentaire pour enfants commence à être non déductible et non imposable, est établie lorsque le montant est modifié. Le montant de la pension alimentaire pour enfants est également défini dans cette disposition comme étant effectivement le montant reçu à l’égard des enfants aux termes d’un accord écrit.

Le montant qui était réellement payé avant le mois de décembre 2002 et depuis la conclusion de l’entente orale était peut‑être bien de 1 000 $ ou plus par mois, même si seul un montant de 800 $ par mois était demandé depuis la conclusion de l’entente orale, vers le mois de juin 1998. Cette demande reflète la modification apportée aux paiements mensuels fixes, qu’elle ait ou non été nécessaire, compte tenu de l’entente de 1996. La question de savoir si le montant était ainsi limité dépend de la question de savoir si les autres frais payés pour les enfants, comme les frais concernant les activités récréatives, pouvaient être visés par la définition de la pension alimentaire pour enfants même s’ils n’étaient pas payés sur une base périodique fixe.


Je n’ai pas ici à décider du montant auquel l’ancien mari avait droit ou aurait pu avoir droit avant le mois de novembre ou le mois de décembre 2002. Seule est en cause l’année 2003, qui aura également une incidence sur les années ultérieures. Si une date d’exécution est établie, tous les paiements concernant les enfants sont non déductibles et non imposables, et ce, depuis cette date.

Il importe peu que le montant de la pension alimentaire pour enfants comprenne d’autres dépenses ou qu’il soit limité à 800 $. Il s’agit de savoir si l’affidavit, l’accord écrit, modifie le montant de la pension alimentaire pour enfants. Comme il en a été fait mention, si l’affidavit modifie ce montant, une date d’exécution est établie; or, comme je l’ai déjà dit, l’affidavit satisfait, à mon avis, à l’exigence nécessaire pour qu’une date d’exécution soit établie. Il n’est pas nécessaire qu’un accord écrit soit établi sous une forme particulière. L’affidavit devait inclure l’accord écrit concernant la pension alimentaire pour que le divorce puisse être obtenu. Le jugement de divorce lui‑même indique que le juge accueille la requête conjointe en divorce sur lecture de l’affidavit des requérants. Il serait même possible de soutenir que l’affidavit fait partie de l’ordonnance. Quoi qu’il en soit, la cour devait avoir devant elle l’engagement écrit montrant que les parties s’entendaient au sujet de la pension alimentaire, et la cour s’est fondée sur cet engagement en accueillant la requête en divorce.


Il est tout à fait clair qu’il a été satisfait aux exigences législatives. Je tiens également à faire remarquer avant de conclure qu’il n’y a ici aucune erreur, sauf peut‑être dans l’esprit de l’ancien mari de l’appelante. L’ancien mari affirme ne pas avoir compris qu’en signant l’affidavit, la chose aurait des conséquences fiscales défavorables. Cela est peut‑être vrai, mais cela n’est pas pertinent. L’ancien mari comprenait le résultat commercial et il voulait obtenir ce résultat. Il comprenait le résultat en droit de la famille et il voulait obtenir ce résultat. Il savait que le nouvel engagement écrit faisait état de l’entente verbale qu’il honorait depuis quatre ans. Il importe peu qu’il n’ait pas compris les résultats fiscaux ou qu’il n’ait pas voulu obtenir ces résultats. Les motifs des parties ne sont pas pertinents.

En fin de compte, l’entente orale a eu pour effet de réduire le montant fixe que l’ex‑époux de l’appelante devait payer. Elle l’a réduit au montant dont les deux parties, de bon cœur ou non, avaient convenu au titre de la pension alimentaire pour enfants. Cette entente a lié les parties, pour le mieux ou pour le pire, pendant quatre ans.

Toutefois, aux fins fiscales, le fait de respecter l’entente orale prévoyant un paiement mensuel de 800 $ n’a rien changé au régime fiscal tant que l’entente n’a pas été consignée par écrit. Aux fins fiscales, le régime a changé lorsque l’entente a été consignée par écrit, ce qui s’est produit au mois de novembre 2002.


Dans ces conditions, puisqu’il y a désaccord entre les parties, aucune doctrine fondée sur l’erreur ou sur un contrat ne peut aider le mari de l’appelante. Par conséquent, l’appel et la demande conjointe présentée en vertu de l’article 174 seront réglés compte tenu du fait qu’une date d’exécution a été établie, le 18 novembre 2002, de sorte qu’en fait, l’appelante a gain de cause dans son appel. Tels sont le jugement et les motifs qui sont rendus. Merci.

‑‑‑ L’audience a pris fin à 14 h.


 

 

Traduction certifiée conforme

ce 31e jour d’août 2007

 

Johanne Brassard, trad. a.


 

RÉFÉRENCE :                  2007CCI296

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :    2005-4348(IT)I

 

INTITULÉ :                   Allison Clement

                             et

                             Sa Majesté la Reine

                             et

                             Alessandro D’Ovidio

 

LIEU DE L’AUDIENCE :         Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE ET DU    

ET JUGEMENT RENDU ORALEMENT :     Le 19 avril 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :         L’honorable juge J.E. Hershfield

 

DATE DES MOTIFS ÉCRITS

DE JUGEMENT :                Le 23 mai 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelante :     M. Theodore Cowdrey, CA

 

Avocat de l’intimée :        Me Laurent Bartleman

 

Pour le mis en cause :       M. Alessandro D’Ovidio

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

    Pour l’appelante :

 

          Nom :             

 

          Cabinet :         

 

    Pour l’intimée :         John H. Sims, c.r.

                             Sous-procureur général

                             du Canada

                             Ottawa, Canada

 

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